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Fukushima proche du "syndrome chinois" ?

Publie le mardi 29 mars 2011 par Open-Publishing
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L’origine de l’expression « syndrome chinois » vient d’une "boutade" des ingénieurs de Westinghouse, le coeur d’un réacteur américains fond et la masse du combustible nucléaire auto-entretenant sa température transperce la cuve, le béton et s’enfonce dans le sol, s’enfonce, s’enfonce jusqu’à ressortir de l’autre côté de la terre en Chine. En réalité dans ce type d’accident, cette masse fondue s’enfonce dans la terre et lorsqu’elle rencontre de l’eau (la nappe phréatique par exemple), il y a explosion de vapeur, une sorte de geyser de vapeur radioactive avec un dégagement colossale de radioactivité, et un vaste territoire devient pour toujours inhabitable...

Les Soviétiques lors de la catastrophe de Tchernobyl ont lutté (et sacrifié beaucoup d’hommes, des plongeurs qui ont plongé dans l’eau de refroidissement [et sont tous morts] pour vidanger cette eau qui s’était accumulée sous les ruines du bâtiments, et des mineurs qui ont construit une chape de béton sous le réacteur), pour empêcher que ce "corium" (une sorte de magma résultant de la fusion du combustible nucléaire et des éléments internes du cœur) ne tombe dans l’eau car il aurait pu atteindre une masse critique et entraîner d’après les calculs une explosion (comme une bombe) atomique d’une puissance énorme de 3 à 5 Mégatonnes (c’est 200 à 300 fois Hiroshima). Cela aurait provoquer des radiolésions massives des habitants dans un rayon d’environ 300 km (englobant la ville de Minsk) et toute l’Europe aurait pu se trouver victime d’une forte contamination radioactive rendant la vie normale impossible.

Il y a 32 ans, il y eut le film prémonitoire le "Syndrome Chinois" puis l’accident de Three Mile Island :

Deux mois exactement avant que ne survienne l’accident de Three Mile Island (ou TMI), la Commission de Réglementation Nucléaire américaine (NRC), remettait au Congrès des Etats-Unis un rapport d’une centaine de pages. Son titre : « Identification des problèmes de sécurité non résolus dans les centrales nucléaires ». Son but : définir avec précision les défauts de construction, de fonctionnement, d’organisation des centrales présentant un risque potentiel important pour la population. Depuis décembre 1977, la loi américaine fait obligation à la NRC, de cataloguer toutes les imperfections des centrales, de mettre sur pied un plan pour y remédier, et d’en faire part au Congrès. Il en a résulté une longue liste de 133 « tares », plus ou moins graves, qu’il est indispensable de corriger. Parmi elles, 17 ont été jugées prioritaires, justement parce qu’elles représentaient une menace réelle pour les populations. Sur ces 17 défauts graves, 3 au moins ont été à l’origine de l’accident de TMI.

Le 16 mars 1979 sortait aux Etats-Unis, dans 663 salles simultanément, un film prémonitoire le "Syndrome Chinois" qui avait pour thème un accident dans une centrale nucléaire qui manque de tourner à la catastrophe, risquant d’entraîner la fusion du coeur du réacteur qui s’enfoncerait alors dans la terre avec une telle puissance qu’il se retrouverait en Chine, d’où le titre du film. (voir le Film part 1 et part 2 1h55 en Realvideo 33Kb).

La sortie du film avait déclenché de nombreuses protestations de la part des compagnies d’électricité et des constructeurs de réacteurs nucléaires. Quinze jours plus tard, l’Amérique fût persuadée que le "Syndrome Chinois" était plus qu’un film de fiction et presque un documentaire. Le 28 mars 1979, à 8 heures du matin se produisit à la centrale nucléaire civile de Three Mile Island, un accident (non prévu dans la liste des accidents "étudiés" par les autorités de sûreté) résultant de l’enchaînement, estimé très improbable, d’une défaillance de matériel, d’une faute de maintenance non prévue à la conception, de deux erreurs de conception (au moins) et de la non-validité de la "procédure de conduite" fournie aux opérateurs (voir le documentaire de 51mn en Realvideo 33Kb).

Il faut mentionner un aspect assez curieux de la logique des experts promoteurs du nucléaire. Il s’agit de la notion d’impossible. Certains accidents particulièrement effrayants par leurs conséquences sont dits impossibles. Ceci justifie leur qualification de hors dimentionnement : l’installation n’est pas dimensionnée pour maintenir ces accidents dans des limites acceptables. En réalité, il s’agit là d’accidents pour lesquels, technologiquement (ou financièrement) il n’est pas possible de dimensionner l’installation, pour éviter des conséquences catastrophiques. Dans ces conditions, l’impossible est un concept bien commode. De quoi s’agit-il quand on nous parle d’un accident impossible ? C’est un accident physiquement possible, mais il n’a pas été possible pour les experts d’imaginer la séquence d’événements qui conduirait à sa réalisation. L’accident de TMI et le scénario du film " Le Syndrome Chinois " illustrent bien ce point. La séquence accidentelle était officiellement impossible, mais des cinéastes l’avaient imaginée car elle était physiquement possible. Dans la réalité à TMI et dans le film, la fusion totale du coeur du réacteur a été évitée de justesse. Le cas est dès maintenant possible à Fukushima d’un "scénario" où la fusion totale (ou presque) du coeur se produit et où le corium (ce cœur fondu) perce la cuve et attaque le radier de la centrale (très épais à Fukushima) et commence à s’enfoncer dans le sol... s’il n’a pas provoqué avant une explosion de vapeur, en rencontrant de l’eau accumulée au dessus du radier...

A Three Mile Island la gravité de la situation et la confusion ont poussé la NRC à instaurer du début à la fin des événements une permanence qui n’a été qu’une succession, chaotique, informe et souvent interrompue d’entretiens (enregistrés), dont les transcriptions en 3 parties se lisent comme un véritable roman policier et permettent de mieux comprendre l’accident.
Après l’accident de TMI, des associations de citoyens ont intenté un procès à la compagnie exploitante la Metropolitan Edison. D’une certaine façon tout le monde savait qu’un accident arriverait un jour, très exactement le jour où un grand nombre de réacteurs nucléaires serait en service, TMI a peut-être été le coup de grâce pour l’énergie nucléaire américaine mais il a frappé une industrie déjà mal en point dont le déclin était amorcé en 1974.

On apprit, plusieurs années après que l’accident de TMI fut un "mishap" (un raté) comme disent les Américains, à moins d’une heure près, la fusion du coeur aurait pu être totale, on était passé très près du "syndrome chinois", à Fukushima la situation est critique, le "syndrome chinois" n’est pas loin...

Infonucléaire
www.dissident-media.org/infonucleaire

PS

- Le 13 mars 1980 il y a eu fusion de 20 kg du coeur de Saint-Laurent (un vieux réacteur uranium-naturel/graphite-gaz), et rejet de plutonium dans la loire mais pas de problème, pour le tout nouveau réacteur de grand puissance français, le fameux EPR dans l’hypothèse où le coeur fondrait malgré toute la haute technologie et le savoir faire français, un récupérateur a été ajouté pour empêcher que le magma radioactif ne s’échappe (vers la Chine), un système que ses concepteurs appellent « récupérateur de corium ou cendrier »...

- A la suite de l’accident de Three Mile Island (TMI) en 1979, le Laboratoire National de Sandia a estimé les conséquences potentielles pour des accidents de réacteurs qui aboutissent au rejet de grandes quantités de radioactivité dans l’atmosphère. Pour chaque centrale nucléaire qui était alors en exploitation ou en voie d’achèvement, le laboratoire Sandia a défini la quantité de radioactivité qui pourrait être rejetée à la suite d’un accident majeur mais aussi les conditions météorologiques de la région et populations vivant dans la zone située sous le panache radioactif issu de la centrale. Sandia a alors estimé le nombre de personnes qui mourraient dans l’année ou auraient des problèmes de santé à cause des expositions ionisantes. Sandia a également estimé le nombre de personnes qui trouveraient la mort par la suite de maladies radio-induites comme le cancer. Les estimations des premiers cas de décès peu après un accident se chiffrent à environ 700 pour un petit réacteur et jusqu’à 100 000 pour les plus gros réacteurs. Les estimations de décès par cancers vont de 3 000 à 40 000. Les estimations de morbidité générale vont de 4 000 à 610 000. A titre de comparaison, la bombe atomique larguée sur Hiroshima a causé la mort de 140 000 personnes, et celle tombée sur Nagasaki a tué 70 000 personnes.
Extrait de Etudes de risques sur les centrales nucléaires...
IEER, David Lochbaum.

Messages

  • En revenant à l’actualité , un des traits importants de l’heure c’est la panique visible et lisible des dirigeants de l’appareil d’état japonais.

    Le désastre en cours se révèle également par cet aspect, il prend également appui sur les épaules d’un état qui a laissé des entreprises privées jouer avec l’avenir du peuple japonais , sans parallèlement se doter d’un minimum d’outils d’intervention.

    Ca ne signifie pas qu’un nucléaire d’état eut été meilleur, mais en laissant au privé une grande partie les responsabilités de la bataille, une autre impuissance se révèle s’additionnant aux choix imbéciles d’une énergie mal maitrisée et dangereuse pour l’humanité.

    Signe des temps, un état puissant comme le Japon est devenu indigne et malingre vis à vis déjà des victimes du Tsunami qu’il tarde à assister comme il se doit, comme nous l’avons vu précédemment aux USA dans la catastrophe de Nouvelle-Orléans il y a quelques années.

    La gestion de la catastrophe nucléaire en marche, qui s’est additionnée à la catastrophe naturelle, montre les mêmes insuffisances de l’aide et de la solidarité en laissant les malfaiteurs privés gérer la bataille en grande partie.

    Le signe des temps vient d’états sur-puissants qui ne sont plus capables, par manque de volonté mais pas de moyens, d’assumer une responsabilité à minima vis à vis de leurs populations dans des circonstances graves.

    On assiste, dans le pays qui demeure économiquement le plus puissant du monde si on rapporte cela au nombre d’habitants, à une incapacité de faire face, à une ambiance de panique aux plus hauts niveaux de l’état qui fait réfléchir.

    L’héroïsme des travailleurs japonais restés sur place ne correspond qu’à l’héroïsme de ceux là, mais nullement à un engagement puissant et délibéré de l’appareil d’état pour endiguer la catastrophe.

    L’état japonais ne fait pas la guerre à la catastrophe, il laisse une poignée de héros se dépatouiller avec l’impossible.

    L’industrie nucléaire, telle qu’elle est, ne provoque pas seulement la fission des atomes mais également celle des énergies et de la volonté des états.

  • Cet article fait parti des romans rangés habituellement dans le rayon "antinucléaire" des bibliothèques !

  • mardi 29 mars 2011

    Comment l’UE nous empoisonne une fois de plus

    Les premiers navires radioactifs vont arriver en Europe mi-avril. Les sociétés maritimes ne savent pas quoi faire.

    Un cargo radioactif avec 4.698 containers à bord a été renvoyé au japon par les chinois.

    Financial Times Deutschland

    China rejects ship from California with “abnormal” radiation — Had only been in Tokyo for a few hours

    Mitsui O.S.K. Lines has not yet decided what it will do with its container ship when it returns to Japan this week, a company official said on Tuesday, after China rejected the vessel for “abnormal” radiation levels. …

    Chinese authorities detected a maximum of 3.5 microsieverts per hour on MOL’s ship when it arrived at the port of Xiamen in eastern Fujian province last week, the company spokeswoman said. …

    The MOL Presence originated in California, stopping in Tokyo for only a few hours on March 17 before arriving in China four days later, port authorities said. …

    Concernant les produits alimentaires, l’UE ne s’est pas longtemps cassé la tête pour trouver une solution :

    Le 25.3 l’UE a pondu une directive 297/2011 pour relever la dose de radiation maximale autorisée pour les produits alimentaires venant du Japon. La dose maximale de 370 (nourriture pour enfants et produits laitier) ou 600 becquerels/kg (autres produits) a été relevée à 400 (enfants) resp. 1.000 (produits laitiers) et 1.250 bq/kg (autres). Certains produits comme l’huile de poisson et les épices peuvent maintenant même dépasser 12.500 bq/kg, soit 20 fois la dose autorisée jusqu’à maintenant.

    Cette nouvelle idée de l’UE pour nous empoisonner est basée sur la directive 3954/1987, née des conséquences de Tchernobyl. Le but de cette directive est d’assurer l’alimentation de la population en cas d’accident nucléaire.

    Ils ont donc réagi très vite à Fukushima et complètement à coté de la plaque : L’alimentation des européens n’est aucunement menacée par l’accident japonais, les produits japonais ne jouant pas un rôle décisif.

    Par contre : Evidemment que les produits japonais vont contaminer les autres rangés à coté. Merci UE !

    http://mahamudras.blogspot.com/

    FUKUSHIMA INQUIETUDES DE PHYSICIENS ASIATIQUES

    29.03.2011

    FUKUSHIMA (suite22) INQUIETUDES DE PHYSICIENS ASIATIQUES

    A.H. Nayyar is a visiting professor of physics at LUMS, Lahore. M.V. Ramana and Zia Mian are physicists at the Programme on Science and Global Security, Princeton University, Princeton, US.

    http://www.dawn.com/2011/03/27/fukushima-lessons.html

    traduction en commentaire :

    http://sciencepourvousetmoi.blogs.nouvelobs.com/archive/2011/03/29/fukushima-suite22-inquietudes-de-physiciens-asiatiques.html#comments

  • MERCI DE VOTRE ARTICLE INSTRUCTIF ET MOBILISATEUR.

    ENTRE AUTRES QUESTIONS JE ME DEMANDE POURQUOI L’ÉCHELLE

    DE GRAVITÉ DES ACCIDENTS ET CATASTROPHES DE L’INDUSTRIE NUCLÉAIRE

    EST-ELLE LIMITÉE À 7, (MÊME PAS 10, COMME CELLE DE RICHTER) ?

    ALORS QUE L’ON PEUT DEPUIS LONGTEMPS CONCEVOIR, HÉLAS ET DONC

    REDOUTER PRÉCISÉMENT LES MALHEURS IRRÉMÉDIABLES QU’ON N’A ÉVITÉS

    JUSQU’ICI QUE DE JUSTESSE,
    (ET ENCORE, C’EST UNE AFFIRMATION FORT OPTIMISTE, CAR IL EST TROP TÔT POUR LE SAVOIR).

    ET LA PROCHAINE FOIS, NIVEAU 17 ?
    OU BIEN EST-CE QUE CE SERA ALORS "IMPOSIBLEMENT RÉEL" ?
     COMME PERMET DE L’AUGURER L’ARTICLE SUIVANT CONNEXE SUR CETTE PAGE, ÉGALEMENT PERTINENT ET FINEMENT IRONIQUE DANS SES REMARQUES SUR LA KAFKAIENNE PIROUETTE QUI CONSISTE À NOMMER "IMPOSSIBLE" CE QUI EST SIMPLEMENT IMMAÎTRISABLE !
    CE QUI MONTRE SANS OMBRE QUE LES "RESPONSABLES" TECHNOSCIENTIFIQUES, COMMERCIAUX, ET EN DERNIÈRE ANALYSE:POLITIQUES, CES "IRR-RESPONSABLES DONC, EXCLUENT QU’IL EXISTE UNE FAILLE À LEUR MAÎTRISE.
    CE SERAIT À SE TORDRE, MAIS NOUS SOMMES DANS LE MÊME BATEAU, LA MÊME NEF DES FOUS. "SCIENCE SANS CONSCIENCE N’EST QUE RUINE DE L’ÂME", DISAIT MONTAIGNE. MAINTENANT FAUT-IL AJOUTER : " ET RUINE DE LA VIE !" TOUT COURT.