La crise ? C’est la faute aux médias !

Après avoir expliqué en octobre 2008 que la crise ne toucherait pas plus d’un million de personnes, mettant en cause la faiblesse du système bancaire allemand et les erreurs de la chancelière Angela Merkel, le conseiller de Nicolas Sarkozy estime cette fois-ci que trois millions de personnes seront peut-être touchées. Et que tout cela serait la faute aux médias...

Alain Minc

Alain Minc est une sorte de Red Bull du capitalisme. Une gorgée de cette boisson énergisante et ça repart. Il y a plusieurs mois, invité de Parlons Net, l’essayiste assurait que le phénomène était « grotesquement psychologique ». Dans le Grand Journal de Canal-Plus récemment, avec la candeur des intouchables qui naviguent dans les hautes sphères de la finance, il lâchait une nouvelle perle : la crise ne toucherait tout au plus qu’un million de personnes. Bref, pas de quoi en faire un plat, même si le PDG d’AM Conseil glissait à l’époque quelques mots pour ces « pov’gens », « dramatiquement » touchés et dont « on » ne s’occupe pas assez.

Invité du Grand-Jury-RTL-Le Figaro-LCI, Alain Minc toujours en tournée promotionnelle, sans qu’on sache véritablement s’il s’agit d’assurer les ventes de son dernier opus ou le SAV laborieux du Sarkozysme, s’est montré hier encore très inspiré. Soucieux d’établir un diagnostic en temps réel de la situation, Minc estime que pour le « village français », à la louche, ce sont « 300.000, 400.000, 500.000 personnes qui seront touchées, avec les familles ce sont 2,5 millions de personnes. Trois millions peut-être ». Circulez, y’a rien à voir puisque « la crise n’a pas touché à ce stade l’ensemble de la population française ».

Les médias projettent leur déprime sur le monde entier

Et pourtant, lorsqu’il abandonne ses prophéties, Alain Minc voit bien que quelque chose a changé. C’est là que la superbe machinerie intellectuelle du conseiller multi-cartes s’enraye et sombre dans la facilité car il faut bien trouver un coupable à l’origine de ce foutoir mondial. Pourquoi pas les experts économiques et autres prophètes du secteur habitués des plateaux télés, assis confortablement sur leurs certitudes scientifiques solides ? Ceux-là qui depuis le début des années 80 nous expliquaient ce qu’il fallait faire pour aller toujours plus haut ? A peu près les mêmes qui depuis 6 mois nous disent ce qu’il faudra faire pour s’en sortir ?

Vaste fumisterie ! Si toutes ces mauvaises nouvelles économiques vous font hésiter à investir ou consommer, pointez du doigt les gens qui vous en parlent. Tout cela serait, en fait, la faute aux médias, secteur particulièrement sinistré, qui projetterait sa « propre déprime sur le monde entier ». Il fallait oser, non ?

Lundi 09 Mars 2009 - 18:30

Régis Soubrouillard

http://www.marianne2.fr/La-crise-C-...