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NE PAS TRAVAILLER LE 16 MAI (Lundi de Pentecôte) : UNE ÉVIDENCE QUI NE SOUFFRE AUCUNE JUSTIFICATION

Publie le vendredi 6 mai 2005 par Open-Publishing
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Des fonctionnaires en lutte

C’est au contraire le point de départ d’une révolte qui doit déboucher sur une action d’indiscipline. Il n’y a pas à la justifier car si la grève et autres formes d’action directe gardent une certaine légitimité de compassion dans le secteur productif et les usines en particulier, ce n’est pas (plus) le cas dans les secteurs de la reproduction et particulièrement dans le secteur des services publics. La volonté étatique d’instaurer un service minimum dans les transports et tout le battage autour du paiement des jours de grèves au cours du mouvement du printemps 2003 le montrent bien. A terme et comme c’est déjà le cas dans d’autres pays, c’est bien contre les nouvelles "légalités" qui nous sont imposées qu’il faudra se battre.

Il ne s’agit donc pas d’attendre de savoir si tout le monde fera comme nous, si les syndicats se rallieront finalement aux propositions de la base, comment l’administration réagira, si l’opinion publique sera de notre côté, etc. Il ne s’agit pas non plus de pleurer sur une nouvelle attaque contre les fonctionnaires et leur statut, sur une nouvelle tendance à l’allongement de la durée du travail... Dans cette affaire, ce qui constitue l’enjeu de la mesure gouvernementale est de tenter de montrer que le travail est une activité aux ordres. Peu importe que cette mesure soit prise pour rattraper une bourde de l’État sur la canicule. L’effet recherché par Raffarin vise à affirmer l’autorité de l’État qui peut décider du jour au lendemain que tel ou tel jour traditionnellement férié ne l’est plus.

Il faut remettre les Français au travail. Quel travail ? Devant quels élèves ou quels clients ? La réponse importe peu ! Tout est bon pour restaurer la valeur idéologique du travail, y compris les mesures les plus autoritaires. Mais rares sont ceux qui se laissent duper par cette mystification puisque peu de monde voit le lien entre une journée travaillée de plus et le financement de la prise en charge des personnes âgées alors que tout le monde a connaissance que partout on licencie, qu’il y a des millions de chômeurs. Cette nouvelle activation de l’idéologie du travail tombe donc un peu à plat.

Face à cet arbitraire de l’Etat, il faut imposer notre refus de façon aussi arbitraire sans entrer dans le jeu des justifications ni des légitimations. Pour cela, tous les moyens sont bons à partir du moment où ils conduisent à ne pas travailler ce jour là, mais il faudrait sortir des moyens traditionnels, ou au moins les élargir, quand ils ne conviennent pas à la situation. Ainsi, proposer de faire grève un jour férié s’avère particulièrement défensif et même défaitiste puisque cela revient à reconnaître d’un côté (le fait que le jour ne soit plus férié), ce que l’on refuse de l’autre. Cela présente aussi le gros inconvénient concret de verser une journée de salaire à l’Etat. C’est pourtant ce que certains syndicats se sont empressés de proposer, en ordre dispersé et avec des motivations différentes. Couvrir légalement les luttes est la moindre des choses pour un syndicat comme SUD, les canaliser une "responsabilité" pour la CGT ou la FSU.

Il ne s’agit pas de condamner ces positions comme si on pouvait attendre autre chose des syndicats que la défense de nos intérêts dans le strict cadre de la loi, mais si on ne veut pas se laisser enfermer dans une position de gréviste qui n’a pas été décidée par nous, il faut ouvrir au maximum le champ d’intervention en appelant ce jour là au boycott de cette forme moderne de corvée . Il faut évidemment tenir compte du rapport de force sur le terrain qui peut aller du simple fait de faire approuver par une AG du personnel, non pas un appel à la grève, mais un appel à ne pas travailler couvrant l’ensemble des formes d’action, jusqu’à éventuellement un appel au sabotage de la journée.

Dans tous les cas, il s’agit de reprendre l’initiative et de lutter non pour se faire plaisir mais pour faire mal à l’adversaire. C’est une dimension qui a été malheureusement trop oubliée en 2003 et déjà en 1995. Le simple fait d’être ensemble nombreux dans l’action et d’avoir l’impression d’une certaine autonomie d’action retrouvée, a souvent fait passer au second plan ce que ces mouvements avaient finalement d’inoffensif par l’autolimitation qu’ils s’imposaient, aussi bien dans le contenu des revendications que dans les moyens d’action utilisés .

Cette reprise de l’initiative ne peut non plus aller, au moins dans le secteur public, sans une claire appréciation du rôle actuel de l’Etat, de nos rapports à l’Etat. Si l’Etat c’est aussi nous, c’est aussi l’adversaire et il est illusoire de lui opposer un Etat idéal introuvable qui réaliserait "nos valeurs" !

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