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Vous qui saviez...

Publie le samedi 23 avril 2011 par Open-Publishing
6 commentaires

A suivre les événements de Fukushima, on est pris d’un sentiment d’horreur et d’effroi qui glace le sang. Mais, au-delà de la tragédie que subit le peuple japonais, l’objet principal de cette sidération horrifiée, c’est ce que ce que cette tragédie nous révèle sur vous, Messieurs du pouvoir.

Car VOUS SAVIEZ .

VOUS SAVIEZ que vos centrales présenteraient des risques d’accident. Oh ! des risques infinitésimaux, bien sûr, car vous aviez tout prévu pour que vos centrales puissent résister à la majorité des risques géologiques prévisibles ; mais, bien sûr bien sûr, comme vous le dites avec votre élégant cynisme, ‘le risque zéro n’existe pas’, et on ne peut pas garantir qu’un événement géologique critique (c’est-à-dire au-delà des sécurités mises en place, entraînant la dégradation majeure de la centrale et une catastrophe) ne se présentera pas. Mais, chantiez-vous, ce risque serait de l’ordre de 0,05 pour mille, donc négligeable. Et chacun de se sentir rassuré : qu’est-ce qu’une probabilité de 0,05 pour mille ? C’est, tout simplement, un événement qui est susceptible de se produire environ une fois tous les 20.000 ans… et donc, si votre ‘statistique’ veut dire quelque chose, qui se produira à coup (presque) sûr, d’ici à 20.000 ans … ce qui peut être demain, par exemple. Et donc, actuellement, avec plus de 400 centrales de par le monde, une certitude d’accident majeur nous attend tous les 25 à 50 ans – si vos calculs sont exacts. Nous observons maintenant les résultats de votre prévoyance : en 45 ans d’existence, 3 accidents majeurs, soit en moyenne un accident tous les quinze ans.

VOUS SAVIEZ que cette prétendue mesure des risques ne pouvait (au mieux) s’appliquer qu’à des événements objectivement prévisibles, tels que les événements géologiques (et encore… ?) ; mais pas à des événements d’origine humaine, tels que des négligences dans l’application des procédures, ou des erreurs, voire des actes criminels (ou belliqueux) ; et que vous n’aviez aucune possibilité de prévoir les risques dus à des événements collatéraux, pannes d’électricité, par exemple, ou répercussions sur les sous-sols de techniques industrielles encore inconnues à l’époque de la construction des centrales (qu’on pense aux gaz de schiste…). Et que donc, la probabilité d’accidents majeurs était beaucoup plus élevée que tout ce que pouvait laisser espérer (au doigt mouillé) la prétendue sévérité des normes de construction et de maintenance de ces centrales.

VOUS SAVIEZ qu’il n’existe pas d’accident mineur, et que tous les accidents de centrales seraient nécessairement très graves, non seulement pour les vastes populations qu’ils concerneraient directement, mais pour des générations et des territoires immenses, et pendant des siècles – si pas des millénaires.

VOUS SAVIEZ qu’une telle prise de risque outrepassait scandaleusement le mandat qui vous était confié.

Et VOUS SAVIEZ que nos peuples n’en voulaient pas. Dès le milieu des années 60, les mouvements antinucléaires manifestaient vigoureusement leur opposition à vos projets, mais vous les avez balayés, et n’avez jamais organisé de consultation sur la question, ni même cherché à obtenir le consentement des parlements. Au mépris de cette démocratie, au nom de laquelle vous massacrez des peuples qui ne vous ont rien fait.

VOUS SAVIEZ que, loin de nous assurer l’ « autonomie » tant vantée, cette technologie allait vous rendre dépendants des pays fournisseurs d’uranium, et vous obliger à pactiser avec des régimes politiques haïssables, pour le plus grand malheur des peuples des pays producteurs d’uranium.

VOUS SAVIEZ que l’existence de ces centrales allait vous obliger à établir des régimes policiers de plus en plus durs, d’abord parce que les populations n’étaient pas d’accord (à Jaitapur, on a tiré à balles réelles et tué face à une population qui refuse, à 95%, la mise en œuvre du gigantesque chantier EPR d’Areva ) ; ensuite parce qu’il fallait prévoir de contenir la colère et la panique lorsque surviendraient les inévitables accidents, et enfin parce que ces centrales constituent des cibles de premier choix en cas de conflits ou de terrorisme.

VOUS SAVIEZ qu’il n’existait aucune solution en vue pour le démantèlement des centrales, ni pour le traitement de leurs épouvantables déchets, et que le transport même des matières radioactives met en danger les populations.

VOUS SAVIEZ donc que, en tout état de cause, et même sans catastrophe, vous vous apprêtiez à léguer à nos enfants, et pendant des générations, la gestion d’un héritage affreusement dangereux.

VOUS SAVIEZ que le « bas coût » de l’électricité ainsi obtenue devait surtout être imputé aux conditions abominables des ouvriers des mines productrices d’uranium (situées principalement en Afrique), et à la dévastation des territoires sur lesquels elles se situent.

VOUS SAVIEZ que c’est idiot de fabriquer de l’électricité avec le nucléaire, et encore plus pour en tirer du chauffage, car les déperditions d’énergie sont considérables – les centrales servent surtout à produire de l’eau chaude, dont une bonne partie est renvoyée sans ménagement dans les rivières et les mers, où elle détruit la vie.

Et surtout, VOUS SAVIEZ que tous vos arguments n’étaient que rideau de fumée. Vous avez construit des centrales « civiles » parce que ça permettait d’obtenir les matériaux nécessaires à constituer un armement nucléaire . Et jouer les Rambo sur la planète. L’électricité abondante et pas chère, ce n’était qu’un alibi, destiné à détourner notre attention et acheter notre consentement. Et ça ne nous apporte rien, car cette précieuse énergie est dévorée principalement par des océans de gadgets qui nous inondent et nous polluent sans augmenter notre bonheur, pour le plus grand profit de ceux qui nous les vendent.

VOUS SAVEZ maintenant (si tant est que vous l’ignoriez jusqu’ici…) que nos centrales accumulent les « incidents » et trichent sur leur nature, leur fréquence et leur gravité – au nom du profit.

VOUS SAVEZ que les personnels de maintenance de ces centrales (les « nomades du nucléaire ») sont traités de manière ignoble, et dangereuse, pour de seules raisons de fric.

Messieurs du pouvoir, vous les politiques, incapables d’élever votre réflexion au-delà des attentes de profit immédiat du « marché », vous les financiers et actionnaires, qui vous gavez des profits que rapporte cette industrie mortifère, et même vous, messieurs les « experts » si gonflés de votre prétendue connaissance, et même vous, messieurs les ingénieurs, qui savez comment faire pour arrêter des centrales dangereuses mais continuez à les faire tourner pour ne pas risquer vos emplois – les tragédies qui se sont jouées à Tchernobyl, qui se jouent en ce moment même au Japon, et qui, un jour peut-être pas si lointain, se joueront à notre porte, ces tragédies ne sont pas une fatalité, mais un crime monstrueux, et vous en êtes les auteurs. Et, mis à part peut-être les techniciens des centrales, vous n’en serez jamais les victimes : car ce n’est pas vous qui vous retrouverez coincés dans des régions ravagées par vos exploits, ni confrontés à la tâche ingrate de réparer les dégâts, vous pourrez toujours courir vous mettre à l’abri sous des cieux plus cléments !

Messages

  • BON ET MAINTENANT QUE FAIT ON ? NOUS POUVONS PRIER COMME CETTE JAPONAISE AU BORD SA PLAGE RAVAGEE. NOUS POUVONS MANIFESTER. NOUS POUVONS NOUS IMMOLER. NOUS ALLONS SUBIR......LES FORAGES DE GAZ. LA DESTRUCTIONS DE NOS NAPPES ET DE NOTRE SOUS SOL. LE NUCLEAIRE FAIT PARTI DE NOTRE VIE ET DE NOTRE MORT.AUCUNE DEMOCRATIE. ON DECIDE SANS NOUS.........MEME DANS CE QUI RESTE DU PARTI COMMUNISTE ON DECIDE SANS NOUS ALORS TOUT EST FOUTU SUR CETTE TERRE. SAUF LE REGARD DE MES CHIENS ...........

  • Salut,

    Ton article est très juste et il résume exactement ce que nous sommes nombreux à ressentir je crois, notre immense colère et notre engagement humain contre la pulsion morbide de ceux qui jouent notre terre aux dés et la détruisent peu à peu parce qu’ils sont déments et ivres de leur puissance passagère et imbécile...

    Maintenant il est exact aussi comme le dit le premier commentateur de ton texte que nous sommes tous responsables de cette situation qui ne date pas d’aujourd’hui mais d’il y a pas loin de 50 ans. Sans pour autant nous culpabiliser, ce qui est improductif sur le plan de l’action à mener, il faut vraiment qu’on se décide à résister à cette mort qui est désormais partout, que ce soit à Fukushima, en Afghanistan, en Libye, en Côte d’Ivoire... dans tous les recoins de notre planète que les pseudos maîtres du monde ont décidé d’anéantir pour renforcer encore leur force négative et malade.

    Mon neveu qui vient d’avoir 15 ans n’a jamais connu les rivières pleines de petits poissons argentés que nous pêchions à la main avec une épuisette mon frère et moi quand nous avions son âge et que nous passions nos vacances dans la maison de notre grand-père au bord du Cher. Cette rivière et toutes les autres sont polluées depuis trente ans désormais, et des pollutions bien pires sont en route avec celle de l’Océan Pacifique à cause de l’accident de Fukushima sans parler aussi de la plateforme pétrolière dans le Golfe du Mexique...

    Notre terre est en voie de perdition, nous sommes en train de la regarder mourir avec cette espèce de résignation qui est celle de certains Japonais qui demandent déjà quand ils vont pouvoir rentrer chez eux dans leur maison juste à côté de Fukushima au lieu de regarder en face que la réponse est : jamais...

    Agir c’est d’abord être conscients et redonner un sens à notre existence commune, savoir que nous devons pour sauver notre planète et nous-mêmes en partager enfin les richesses sans les gaspiller absurdement en regardant les autres qui nous fournissent nos matières premières crever de faim et de désespoir.

    Refuser ce nucléaire c’est aussi et d’abord refuser que les jeunes nigériens meurent en travaillant dans les mines d’uranium d’Arlit sans pour autant que les leurs puissent vivre convenablement et être heureux de leur destin. Exigeons car c’est dans nos possibilités et c’est notre devoir et notre droit un référendum sur les énergies et sur nos choix de vie actuels et futurs. Rien n’est joué ni perdu jamais tant que nous sommes vivants et que nous croyons en un autre monde plus généreux et plus solidaire.

    Merci pour ce beau texte que j’aimerais diffuser sur notre blog si tu es d’accord. Voici l’adresse si tu veux voir de quoi il s’agit : www.lesdiablesbleus.com

    Salut et fraternité. Dominique

    • Oui, reprends ce texte s’il te semble pouvoir servir à quelque chose !

      Je ne sais pas quoi répondre à mon premier interlocuteur, dans ma jeunesse j’ai participé aux manifs antinucléaires, on croyait pouvoir s’opposer, et voilà où nous en sommes. Ce qui me fait peur, c’est de constater que la résignation, l’indifférence et le fatalisme semblent avoir pris le pas sur la révolte et l’indignation.

      Peut-être devrions-nous tous, d’abord, retrouver et entretenir notre capacité de colère et d’indignation...

    • Salut,

      Merci pour ton article, je vais le poster sur notre blog cet après-midi. Si tu as un lien dis-le moi, je le mettrai également car c’est essentiel qu’on se relie entre nous, c’est ça aussi le début du combat commun.

      Pour ce qui est de sortir du nucléaire, il n’y a rien de compliqué à ça en théorie à partir du moment où on sait qu’il faut d’abord et en même temps sortir du capitalisme libéral qui fait consommer imbécilement le double des richesses dont elle a besoin à une petite quantité de gens, occidentaux pour la plupart, en dépouillant de ce fait tous les autres... Je ne développe pas, c’est très connu et si on veut s’informer les bouquins ne manquent pas. Lire Jean Ziegler entre autres... Donc accepter a priori de vivre autrement, intelligemment et sans gaspillage inutile mais surtout sans compétition entre Etats, entre nations et entre ceux qui vivent...

      Dans les années 70 nous disions déjà qu’il fallait faire autrement que ce qui s’annonçait, mettre en route des sociétés plus paysannes qu’industrielles, car la première des choses dont tout humain a besoin c’est de se nourrir comme on le voit en Afrique régulièrement et ailleurs aussi bien sûr...

      Nous autres pays riches ( plus pour longtemps ) nous dépensons des milliards en armements et en produits gadgets, supprimons ces deux types de dépenses, et tout est possible !

      Mais enfin ce que je dis là est l’évidence même, avoir à en causer encore ça signifie que nous avons stagné depuis 40 ans et effectivement désormais nous devons nous secouer, ne pas faire qu’en parler car cette fin d’un monde, si nous ne la décidons pas et ne l’accompagnons pas, elles décidera à notre place et il ne sera plus question de dire qu’il faut y réfléchir, la mettre au point, la préparer comme on en a envie...

      L’univers capitalo-libéral si nous ne le mettons pas à bas va imploser tout seul, ce qui est déjà en route avec Fukushima et avec la misère qui ne cesse d’augmenter également désormais dans les pays riches. A nous de prendre les bonnes initiatives humaines et politiques tant que cela se peut encore...

      Sans un partage juste et pacifique de notre planète il n’y a aucune issue et la disparition de l’espèce humaine ira à son terme, d’autres espèces ont disparu avant la nôtre, nous nous croyons le centre de tout... c’est d’un comique absolu et dérisoire !

      Bonne journée à tous. Salut et fraternité. Dominique

  • Comment faire pour assurer le droit à l’énergie de 7 milliards d’habitants sur terre ?
    Je ne suis pas dans la passion anti-ceci ou anti-cela. Quand on fait l’inventaire de toutes les ressources possibles, y compris avec leurs inconvénients, il est difficile d’être optimiste. Et si l’on prend en compte la recherche de profit immédiat d’une poignée de rapaces, cela devient révoltant ! Les questions d’accès à l’énergie de tous est une grande question politique. Mais il faut bien poser le problème en termes de projet de société et de combats immédiats. Sinon la pire des confusions est possible. Je le dis en toute modestie.

  • Rajoutez à cette hécatombe :

     2053 explosions nucléaires dans le monde + vidéo :

    http://chaos-mondial-pas-de-hasard.blogspot.com/2011/04/explosions-nucleaires-dans-le-monde.html

     et comme cela ne suffit pas :

    Ils construisent et vendent des centrales nucléaires flottantes : (ici Gabon)

    http://gaboneco.com/show_article.php?IDActu=22097

     Les désastres des armes à uranium appauvri :

    http://endofline.pagesperso-orange.fr/endofline_uranium.html

     L’irradiation des aliments :

    http://www.irradiation-aliments.org/Campagne-contre-l-irradiation-des.html

     De la radio-activité dans les biens de consommation :

    http://ace.hendaye.over-blog.fr/article-de-la-radioactivite-dans-nos-assiettes-01-42297869.html