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Accord France-Maroc, Justice et Droits de l’Homme

Publie le mardi 23 juin 2015 par Open-Publishing

La Commission des droits de l’homme s’oppose à l’accord judiciaire entre la France et le Maroc
En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/afrique/article/2015/05/22/la-commission-des-droits-de-l-homme-s-oppose-a-l-accord-judiciaire-entre-la-france-et-le-maroc_4638850_3212.html#xWuW1iltyXyPWtJJ.99

La Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH) a appelé jeudi 21 mai, à l’unanimité, au rejet du protocole d’entraide judiciaire entre la France et le Maroc, jugeant la rédaction du texte « peu claire et imprécise ». L’accord est censé mettre un terme à un an de brouille entre les deux pays, mais il suscite l’opposition des organisations de défense des droits de l’homme. Autorité administrative indépendante, la commission ne peut faire que des recommandations, mais ces dernières pourraient alimenter les débats au sein de l’Assemblée nationale et du Sénat, qui doivent en principe se prononcer sur l’accord, sans pouvoir l’amender, d’ici à la fin juin.
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Les députés français ont adopté mardi 23 juin le protocole signé entre le Maroc et la France pour modifier leur convention d’entraide judiciaire, afin de mettre un terme à un an de brouille diplomatique. Le document a été approuvé par 33 voix pour, et 4 contre. Les écologistes et les communistes ont fait entendre leur opposition au texte, que dénoncent les organisations de défense des droits de l’homme.
Lire aussi : Des ONG dénoncent l’accord judiciaire Paris-Rabat
Lors du vote du texte en commission des affaires étrangères, lundi 16 juin, les députés socialistes et Républicains ont approuvé le projet. Le protocole a été adopté dans le but de rétablir au plus vite « les relations exceptionnelles qui existent depuis toujours » entre les deux pays, a alors expliqué Elisabeth Guigou, présidente de la commission et rapporteure du texte. Le projet est d’ailleurs examiné dans le cadre d’une procédure accélérée afin de répondre, selon Mme Guigou, à « l’urgence du contexte ».
« Nous avons intérêt à ne pas nous poser en censeurs arrogants, mais plutôt en soutien dans la poursuite des efforts engagés par le Maroc », a-t-elle déclaré pour défendre le rétablissement de la coopération judiciaire entre Paris et Rabat, après une année de vive tension déclenchée en février 2014 par la demande d’audition du chef des services de renseignement marocains, Abdellatif Hammouchi, visé par plusieurs plaintes pour « torture » en France.
Mais le nouvel accord signé en janvier par les ministres de la justice des deux pays inquiète sérieusement les associations de défense des droits de l’homme, comme Amnesty international, l’ONG Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (ACAT) ou Human Rights Watch (HRW), qui accusent le texte de favoriser l’impunité, notamment pour les cas de torture, et appellent les parlementaires à le rejeter.
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Un texte d’une « immense ambiguïté »

Sur le papier, le projet de loi est censé « favoriser, durablement, une coopération plus efficace des deux pays et renforcer les échanges d’informations ». Le nouveau dispositif prévoit en effet que les plaintes déposées en France seront désormais « prioritairement » renvoyées vers Rabat ou clôturées. Pour de nombreux observateurs, le protocole risque de remettre en cause l’indépendance de la justice et la compétence universelle des tribunaux français. Les ONG (ACAT, FIDH – Fédération internationale des droits de l’homme –, LDH – Ligue des droits de l’homme –, Amnesty, HRW) dénoncent un déni de droit. La commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) recommande elle aussi, dans un avis rendu le 21 mai, que l’accord « soit retiré ou rejeté ».
La députée écologiste Cécile Duflot a expliqué, lors du vote en commission, que le protocole souffre d’un « flou dans la rédaction » et d’une « immense ambiguïté ». « C’est vrai que c’est un texte qui souffre d’imprécisions mais il ne remet pas en cause notre droit interne ni nos engagements internationaux », a au contraire justifié Elisabeth Guigou. Si elle ne s’attend pas à des débats trop houleux à l’Assemblée, elle a rencontré ces dernières semaines toutes les associations pour tenter de répondre à leurs inquiétudes. De son côté, l’ancien ministre Pierre Lellouche (Les Républicains) a tenu à rappeler la responsabilité de la France dans la récente crise diplomatique avec le Maroc : « Ce que je retiens, c’est l’extraordinaire maladresse qui est à l’origine de cette affaire. »
L’ACAT, Amnesty International France, la FIDH, Human Rights Watch et la LDH regrettent le vote de cet accord, qui favorise, selon elles, l’impunité pour les responsables marocains suspectés de graves violations des droits humains. Elles se disent « très préoccupées que les députés aient adopté un accord qui comporte des dispositions contraires à la Constitution française et à certains engagements internationaux de la France. En enjoignant au juge français de se dessaisir au profit du juge marocain, ce texte risque d’entraîner un déni de justice pour les victimes de torture au Maroc qui ont saisi les juridictions françaises en dernier recours. » Le collectif appelle le Sénat à rejeter le protocole lors de son examen, le 8 juillet.

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