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Déménagement du MEDEF sous la menace des I.S

Publie le vendredi 25 juillet 2003 par Open-Publishing

Le Medef achève sa mue en quittant ses vieux murs de l’avenue
Pierre-Ier-de-Serbie

LE MONDE | 25.07.03
| 15h01 L’organisation patronale réduit ses effectifs

Ernest-antoine seillière déménage. Pardon ! Le Mouvement des entreprises de
France (Medef) change de siège social ce week-end, et il le fait sous la
menace des intermittents du spectacle, qui devaient manifester, vendredi 25
juillet à Paris, pour protester contre une réforme de l’assurance-chômage
portée par l’organisation patronale. Adieu, donc, le vieil immeuble
haussmannien de l’avenue Pierre-Ier-de-Serbie, dans le 16e arrondissement de
Paris. Oubliés ses moquettes poussiéreuses, ses longs couloirs aux peintures
défraîchies, ses doubles portes capitonnées d’un autre âge, son modeste
restaurant "présidentiel" sous les combles où de nombreux chefs d’Etat,
premiers ministres ou patrons étrangers ont pu savourer le bon goût "années
1970" du mobilier et du papier peint...

"RINGARDE"

La Confédération générale du patronat français (CGPF) s’y était installée en
1937, après la destruction de son siège par l’organisation clandestine
d’extrême droite la Cagoule. Le régime de Vichy avait dissous l’organisation
en 1940 et réquisitionné les lieux. Rebaptisé Conseil national du patronat
français (CNPF) en 1946, après la Libération et l’épuration, le syndicat
patronal ne s’était réinstallé dans ses meubles qu’en 1950.

Une petite page de l’histoire sociale se tourne. C’est dans ce décor suranné
qu’ont eu lieu, souvent jusqu’au petit matin, toutes les grandes
négociations sociales des dernières décennies. Le Medef a fait table rase de
ce passé en vendant son siège à Bouygues pour 28,3 millions d’euros - la
moitié du coût d’acquisition et d’aménagement du nouveau siège. M. Seillière
a dû puiser 13,2 millions d’euros dans la trésorerie du Medef et réclamer
12,7 millions aux entreprises et aux fédérations adhérentes pour boucler le
financement (54,2 millions).

Lundi, les employés du Medef découvriront, 55, avenue Bosquet (7e), un
immeuble années 1960 dont l’intérieur a été repensé par l’architecte
Jean-Michel Wilmotte, choisi en 1982 par François Mitterrand pour concevoir
le nouveau mobilier de l’Elysée. Avec ce lieu, les dirigeants patronaux,
devenus des libéraux sans complexe, enterrent définitivement une
organisation que son ancien numéro deux, Denis Kessler, jugeait bien
"ringarde". "Il nous fallait un immeuble rénové symbolisant les valeurs de
l’entrepreneur et portant l’image d’une entreprise forte et solide",
explique-t-on au Medef. Il fallait aussi le "réorganiser pour le rendre plus
efficace", ajoute Jacques Creyssel, son directeur général, dans le dernier
numéro de Capital. Le patron des patrons a laissé partir une dizaine de
directeurs qui le souhaitaient. Il en a aussi remercié d’autres, qui
incarnaient trop le passé à son goût.

En 2000, le patronat avait préféré le nom de Medef à celui de CNPF, avant de
lancer la "refondation" qui doit, selon lui, adapter les relations sociales
à la nouvelle donne économique mondiale. Aujourd’hui, il achève
symboliquement une mutation engagée en octobre 1997, au lendemain de la
démission du prédécesseur de M. Seillière, Jean Gandois, qui symbolisait une
autre époque.

Jean-Michel Bezat