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A Bombay, Coca-Cola est érigée en symbole de ces multinationales accusées de pollution

Publie le mercredi 21 janvier 2004 par Open-Publishing

Les temps sont décidément difficiles pour Coca-Cola en Inde. La polémique sur le niveau de pesticides contenu dans les boissons qu’elle produit localement est à peine retombée que la firme se trouve au cœur d’une nouvelle campagne. OAS_AD(’Middle’) ; Et cette bataille pourrait bien devenir, pour les organisations non gouvernementales (ONG) internationales, le symbole de leur lutte contre les multinationales qui pillent et polluent, accusent-elles, les ressources en eau des communautés villageoises.

Le Forum social mondial de Bombay était évidemment une occasion idéale pour braquer les projecteurs sur le différend qui oppose Coca-Cola aux habitants du village de Plachimada, dans l’Etat du Kerala, depuis près de deux ans. Une vingtaine d’activistes, parmi lesquels le leader de la Confédération paysanne José Bové, Maude Barlow, du Conseil des Canadiens et, côté indien, Vandana Shiva du mouvement Navdanya, devaient se rendre, mercredi 21 janvier, dans le village de Plachimada, en signe de soutien. Le Mouvement mondial contre la privatisation de l’eau a déjà prévenu qu’il relaierait cette campagne dans les soixante pays où il est présent.

De quoi s’agit-il ? La firme américaine installée à Plachimada depuis 2001 pour y embouteiller ses principaux sodas (Coca-cola, Sprite, Fanta) est accusée de puiser abusivement dans les nappes phréatiques et de rejeter des eaux polluées. Les villageois sont ainsi privés d’eau pour leur usage domestique et pour leurs champs.

Plachimada compte environ 1 500 familles appartenant en majorité à la catégorie des tribaux ou des dalits (les "intouchables"). Très peu d’entre elles ont profité des 350 emplois environ créés par l’arrivée de Coca. Les plus riches ont une petite parcelle de terrain où ils produisent du riz, de la noix de coco et des légumes destinés pour l’essentiel à leur consommation. Beaucoup sont simplement ouvriers agricoles ou exercent à la journée de petits métiers de coolies, bûcherons.

"Une dizaine de mois après le démarrage de l’usine, nous avons commencé à remarquer des changements dans la qualité de l’eau",explique en hindi Veloor Swaminathan qui coordonne le comité anti-Coca-Cola. "Nous avons commencé à avoir des problèmes de peau, nous avions du mal à respirer et il a fallu s’éloigner à deux kilomètres du village pour trouver de l’eau potable", ajoute une femme, elle aussi venue à Bombay pour faire connaître son histoire.

Un mouvement de protestation a débuté, avec des manifestations quotidiennes pour demander la fermeture de l’usine et des compensations pour le préjudice causé. Il n’a pas cessé depuis avril 2002. Le village a reçu le soutien de nombreuses ONG indiennes dont, parmi les plus connues, celle de Medha Patkar du mouvement Narmada.

"Plusieurs études ont été réalisées, explique Veloor Swaminathan, et toutes concluent à la présence de métaux toxiques à un niveau anormalement élevé." Il met notamment en avant celle réalisée avec l’aide de journalistes de la BBC. Les analyses faites auraient ainsi montré des traces anormales de plomb et de cadmium.

Face à cette mobilisation croissante, le gouvernement local, qui avait accordé en 2000 une licence permettant à Coca-Cola de s’installer, a décidé de ne pas renouveler son autorisation le 7 avril 2003. L’entreprise a déposé une requête devant la haute cour du Kerala qui n’a toujours pas tranché. En revanche, la cour vient de donner satisfaction aux paysans en imposant à la multinationale, dans un arrêt rendu fin décembre, de réduire le pompage sur la nappe phréatique.

"Le gouvernement local qui a pris position pour les villageois de Plachimada se trouve confronté au pouvoir central qui, à l’inverse, souhaite conforter Coca-Cola",estime Ajit Muricken, également engagé dans la campagne et membre organisateur du Forum de Bombay. "A un moment où le gouvernement veut envoyer des signaux positifs aux investisseurs étrangers, il ne veut pas assumer le risque d’un affrontement avec une multinationale aussi puissante", poursuit-il.

Plachimada n’est pourtant pas le seul cas de plainte suscité par Coca-Cola pour des raisons identiques. Il y a quelques mois, des mouvements environnementalistes ont organisé une manifestation devant une usine de la firme, à Mehdigany, dans le nord du pays. A la suite de cette protestation, l’administration a ordonné l’ouverture d’une enquête sur les activités de l’entreprise.

Joint par téléphone, mardi à Delhi, le porte-parole de Coca-Cola en Inde, Sunil Gupta, n’a pas souhaité répondre à nos questions.

Laurence Caramel
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3220,36-349885,0.html

Pour plus d’infos et pour vous faire une tête, visitez :

Forum Social Mondial 2004 : www.wsfindia.org

Version française : http://www.wsfindia.org/french_info.php

Mumbai Resistance 2004 : www.mumbairesistance.org