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Étranges étrangers

Publie le mardi 23 octobre 2007 par Open-Publishing
4 commentaires

La création d’un "ministère de l’identité nationale" promise aux électeurs de Le Pen et confié à Hortefeux n’a qu’un seul précédent du même type dans l’Histoire de France : le "commissariat général aux questions juives" du sinistre Xavier Vallat. Certes, nous dira-t-on, la situation n’est pas la même. Les Sans Papiers raflés ne partent pas à Drancy ou à Auschwitz, ils sont "simplement" jetés dans des avions ou des ferrys. Mais l’intention est la même : déshumaniser, traquer, créer la peur permanente.

Les Sans Papiers ne vivent plus l’Etat de Droit. Ils sont passés de l’autre côté du miroir. Contre eux, la France viole tous les textes internationaux qu’elle a signés : droit d’asile, droit de vivre en famille, droit à la santé, droit à l’éducation exactement comme la France de Vichy avait privé de tout droit dès 1940 les Juifs, les Tziganes, les communistes, les homosexuels … La France d’aujourd’hui recopie même le vocabulaire de Vichy. Comme autrefois, les Sans Papiers sont officiellement "en surnombre dans l’économie française".

Au moment même où le gouvernement et le MEDEF veulent liquider tout ce que le Conseil National de la Résistance a établi à la Libération (sécurité sociale, retraite pour tous, nationalisation des banques, de l’énergie, du chemin de fer …), une diversion est apparue avec la lettre de Guy Môquet. Ne les laissons pas refaire l’Histoire, ne les laissons pas récupérer celles et ceux qui ont combattu la barbarie et le racisme : les étrangers et les Sans Papiers ont joué un rôle fondamental dans la Résistance.

À l’automne 1943, seule la M.O.I. (Main-d’œuvre immigrée) avait un groupe actif à Paris.

Ils s’appelaient Alfonso (espagnol), Fontanot (italien), Manouchian (arménien), Boczov, Elek, Rayman, Wajsbrot, Olga Bancik (juifs/ves venus de Pologne, Hongrie ou Roumanie).

Ils/elles ont été arrêtés et torturés par la police française (les « brigades spéciales ») puis livrés à la Gestapo et exécutés.

60 ans après, la France s’est excusée pour les rafles et les crimes commis en son nom. Elle commémore le Veld’hiv. Elle célèbre les résistants et toutes celles ou ceux qui ont aidé les gens traqués. Elle affirme qu’il aurait fallu désobéir à des ordres injustes.

À quoi bon ces commémorations quand le même cycle infernal du racisme d’Etat et de la discrimination recommencent ? Quand on reparle de quotas. Quand on criminalise les Sans Papiers et leurs soutiens.

Aux fonctionnaires de police, aux juges, aux employés des préfectures, aux pilotes d’avion ou aux capitaines de ferrys, nous disons : « désobéissez à des ordres injustes ! ». Soutenir les Sans Papiers et empêcher l’horreur quotidienne des expulsions est plus que légitime : c’est lutter pour la défense des droits de tous les humains. Le Réseau Education Sans Frontières et Florimond Guimard mènent une lutte indispensable. Le pouvoir ne nous intimidera pas.


Déclaration de Pierre Stambul (UJFP) à la manifestation de soutien à Florimond Guimard le 22/10


Messages

  • Bonjour,

    Comparer des réalités n’est pas aisé...
    Il suffit de remonter un peu plus haut. Avant les Camps ; la ségrégation, les meutres "légaux", vexations, dépuillement.... "Ca" part TOUJOURS de l’Ordinaire... Gens ordinaires, faits ordinaires, obéissance ordinaire, habitudes...
    Les ETrangés....

    @mnésieInterNationale

    • Contre eux, la France viole tous les textes internationaux qu’elle a signés : droit d’asile, droit de vivre en famille, droit à la santé, droit à l’éducation exactement comme la France de Vichy avait privé de tout droit dès 1940 les Juifs, les Tziganes, les communistes, les homosexuels … La France d’aujourd’hui recopie même le vocabulaire de Vichy. Comme autrefois, les Sans Papiers sont officiellement "en surnombre dans l’économie française".

      Bien d’accord avec vous Patrice, pour l’ensemble de votre article. Et pour mieux s’en convaincre en ce qui concerne le VOCABULAIRE UTILISE PAR SARKO, c’est d’écouter parler son mentor attitré GAINO le grand ringard de service, qui préfère singer le passé, lui empruntant les idées de l’époque, en total décalage avec le présent. Est-il normal de faire une telle régression, quand les autres pays essaient d’avancer vers la modernité ?

      Est-il normal que Sarko, Gaino, Darcos, etc... veuillent nous faire revenir au port des petites sockettes blanches pour les femmes portant des salomés, ou au port du petit tablier rayé bleu ou rose à la mode de Darcos à l’école, histoire de masquer la pauvreté dans laquelle ces gens d’en haut nous plongent chaque jour davantage, oubliant que les chaussures ça parlent aussi de misère.

      Et puis quand un Sarko se permet d’offrir 15 milliards aux plus nantis, je ne lui reconnais aucune légitimité pour nous imposer des restrictions d’aucune sorte. D’ailleurs, il vient de confirmer qu’il est le président de l’UMP et pas de tous les français. Bon OK, il est allé chercher le soutien des députés umpistes pour faire passer son mini-traité de la constitution européenne...

    • Pas la même chose ? Sans vouloir affirmer quoi que ce soit, comment peut-on affirmer que ce n’est pas la même chose, que les immigrés ne sont pas envoyés (en partie) dans des camps ? Y a-t-il un suivi de chaque immigré expulsé ? De plus, balancer des immigrés dans des pays où ils risquent de mourir de faim, de maladie ou être assassinés par le pouvoir en place, n’est-ce pas comme livrer les juifs aux SS ?

      Il serait peut-être temps d’arrêter de minimiser ce qu’il est en train de se passer et se demander dans quel type de système nous vivons aujourd’hui...

    • Hum… Je ne suis pas communiste à Montreuil, et j’aimerai bien savoir ce qu’ils pensent de cela.

      J’avoue que cela me laisse perplexe, de voir une personnalité décider, en dehors de tout choix démocratique d’organisation, où doit se dérouler son plan de carrière politique.

  • Kabyles de la Chapelle et des quais de Javel

    Hommes des pays lointains,

    cobayes des colonies,

    doux petits musiciens

    soleils adolescents de la porte d’Italie

    Boumians de la porte de Saint Ouen

    Apatrides d’Aubervilliers

    brûleurs des grandes ordures de la ville de Paris

    Ebouillanteurs des bêtes trouvées mortes

    sur pied au beau milieu des rues

    Tunisiens de Grenelle

    embauchés, débauchés

    manoeuvres désoeuvrés

    Polacks du Marais, du Temple, des Rosiers

    Cordonnier de Cordoue soutiers de Barcelonne

    Pêcheurs des Baléares ou bien du Finistère

    Rescapés de Franco et déportés de Franco et de Navarre

    pour avoir défendu en souvenir de la vôtre

    la liberté des autres

    Esclaves noirs de Fréjus

    tiraillés et parqués

    au bord d’une petite mer

    où peu vous vous baignez

    Esclaves de Fréjus

    qui évoquez chaque soir

    dans les locaux disciplinaires

    avec une vieille boîte à cigares

    et quelques bouts de fil de fer

    Tous les échos de vos villages

    tous les oiseaux de vos forêts,

    et ne venez dans la capitale

    que pour fêter au pas cadencé

    la prise de la Bastille le 14 juillet.

    Enfants du Sénégal,

    dépatriés, expatriés et naturalisés

    Enfants indochinois

    jongleurs aux innocents couteaux

    qui vendiez autrefois aux terrasses des cafés

    de jolis dragons d’or faits de papier plié

    Enfants trop tôt grandis et si vite en allés

    qui donnez aujourd’hui de retour au pays

    le visage dans la terre

    et des bombes incendiaires

    labourant vos rizière

    On vous a renvoyé la monnaie de vos papiers dorés

    on vous a retourné vos petits couteaux dans le dos

    Etranges étrangers

    Vous êtes de la ville

    Voue êtes de sa vie

    même si mal en vivez

    même si vous en mourez.

    JACQUES PREVERT