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Le devoir de mémoire entre morbidité et abjection

Publie le samedi 16 février 2008 par Open-Publishing
8 commentaires

Dans son intervention au dîner du CRIF, Nicolas Sarkozy a "demandé au ministre de l’Education nationale de faire en sorte que, chaque année, à partir de la rentrée scolaire 2008, tous les enfants de CM2 se voient confier la mémoire d’un des 11 000 enfants français victimes de la Shoah".

Ainsi Nicolas Sarkozy rejoue la manipulation de la mémoire qu’il avait inaugurée avec Guy Môquet et demande aux instituteurs de se soumettre à sa volonté.

Mais ici l’effet mémoire, dont Nicolas Sarkozy semble friand, relève d’une triple manipulation : manipulation des instituteurs obligés de jouer le jeu morbide du devoir de mémoire, manipulation de jeunes élèves auxquels on demande un jumelage tout aussi morbide avec un enfant juif victime de la barbarie nazie, manipulation de la mémoire qui apparaît ici comme une insulte aux victimes du génocide.

Discours démagogique prononcé lors de ce dîner du CRIF qui apparaît chaque année comme un des grands moments de la publicité sioniste, discours qui accompagne le traditionnel éloge d’Israël, ce petit Etat qui fête son soixantième anniversaire dans la douleur des massacres perpétrés par son armée contre les Palestiniens.

Et c’est au nom de l’amitié de Nicolas Sarkosy envers Israël que le CRIF accepte cette monstruosité proférée par le Président de la République.

Mais faut-il s’en étonner ? D’une part, des "responsables" de la communauté juive qui ne veulent voir dans les Juifs que des soutiens inconditionnels à la politique israélienne, d’autre part, un président de la République prêt à toutes les démagogies qui remet au goût du jour un soutien inconditionnel de la France à Israël. Quoi de mieux que de jouer le devoir de mémoire, même si ce jeu est abject, pour montrer son attachement à Israël da la part d’un qui déclare, lors de ce même dîner : « Je ne serrerai pas la main de gens qui refusent l’existence de l’Etat d’Israël ».

En mettant en avant, au nom du devoir de mémoire, le seul massacre des Juifs par les nazis, on oublie le massacre des Tziganes par les nazis.

On oublie aussi les crimes de la colonisation.

On oublie enfin la xénophobie d’Etat et la pratique de la chasse aux métèques qui a marqué l’histoire récente et continuée aujourd’hui sous la houlette du président de la République.

C’est cette politique qui conduit le chef de l’Etat à jouer les communautés les unes contres les autres et à laisser se développer la concurrence des victimes.

L’appel à la célébration de la Shoah n’est plus qu’une forme abjecte de clientélisme.

Les Français juifs devraient comprendre que cet appel, qui tend à les présenter comme des privilégiés, va à l’encontre de l’égalité des droits des citoyens français et ne peut que favoriser l’antisémitisme. Les Juifs y apparaissent comme les amis d’un Etat xénophobe, oubliant qu’ils ont été eux aussi les victimes de la xénophobie et de la chasse aux métèques. On voit ici se rejoindre judéophilie et judéophobie.

On ne peut accepter qu’un Président de la République se livre à de telles pratiques, lesquelles ne peuvent que contribuer à renforcer les clivages communautaires. Mais on sait que ces clivages sont, pour Sarkozy, un moyen d’asseoir son pouvoir.

ABJECT !!!

Paris, le 15 février 2008

Messages

  • Déjà Sarkozy n’avait pas sa place à ce diner du CRIJF, en tant que président de la République il est garant de la neutralité républicaine et du principe d’égalité. La religion juive de plus est en contradiction flagrante avec ce principe d’égalité républicaine puisque elle désigne les juifs comme faisant partie d’un peuple élu par Dieu, donc supérieurs aux autres.

  • Communiqué de la capjpo

    Sarko, Simone Veil et le CRIF : Devoir de mémoire sélectif

    Publié le 16-02-2008

    Nicolas Sarkozy va-t-il demander aux enfants de CM2 de se souvenir des noms de tous les enfants africains réduits à l’esclavage par la France, kidnappés et souvent séparés de leurs parents, souvent morts d’épuisement parce que n’ayant pas supporté les conditions de transport infâmes sur des bateaux destinés au commerce des esclaves, ou la traite impitoyable au service de leurs maîtres ? Non ? Et pourquoi ?

    Simone Veil, qui vient de s’indigner dans l’Express de la proposition de Sarkozy, “insoutenable”, parce qu’”on ne peut pas demander à un enfant de s’identifier à un enfant mort. Cette mémoire est beaucoup trop lourde à porter”, n’évoque à aucun moment le sort des autres enfants condamnés à mourir par la France.

    Son principal souci, c’est le risque de développer l’antisémitisme. “Comment réagira une famille très catholique ou musulmane quand on demandera à leur fils ou à leur fille d’incarner le souvenir d’un petit juif ?” s’interroge-t-elle, comme s’il ne fallait pas réveiller l’antisémite qui dormirait dans chaque non-juif.

    Mais les catholiques, les musulmans… les protestants, les animistes, les athées…, sont surtout choqués de voir à quel point la mémoire de la France est sélective. Ce ne sont pas des antisémites en puissance, comme on voudrait nous le faire croire en permanence. Ce sont des gens qui en ont assez du “deux poids, deux mesures”.

    Et il est bon de rappeler au passage à Madame Veil et à Sarkozy, que les musulmans, qu’il est de bon ton d’opposer aux Juifs, et que l’on oublie en général de ranger parmi les “Justes”, ont protégé et sauvé beaucoup de juifs pendant la deuxième guerre mondiale, non seulement dans les pays du Maghreb, mais également en France.

    Pour rappel à ceux qui se soucient de “mémoire”, cette petite note de Vichy :

    LES JUIFS PEUVENT-ILS ÉCHAPPER …

    Le directeur politique

    adjoint. Note pour le Ministre

    Vichy, le 24 septembre 1940.

    Les autorités d’occupation soupçonnent le personnel de la mosquée de Paris de délivrer frauduleusement à des individus de race juive des certificats attestant que les intéressés sont de confession musulmane. L’imam a été sommé, de façon comminatoire, d’avoir à rompre avec toute pratique de ce genre. Il semble, en effet, que nombre d’israélites recourent à des manœuvres de toute espèce pour dissimuler leur identité. /

    *Page 335 du livre de Pierre Jean REMY, diplomate et académicien : “Diplomates en guerre” (la seconde guerre mondiale racontée à travers les archives du Quai d’Orsay. Ed : Jean-Claude Lattes.)

    CAPJPO-EuroPalestine

  • Ce texte est excellent et je m’y retrouve tout à fait car il pointe le doigt sur de nombreuses "contre vérités" et "mythologies" que le CRIF et les sionistes tentent de faire avaler comme des petits pains , avec un certain succès d’ailleurs, à l’opinion publique.

    Le premier truc révoltant c’est cette mythologie du peuple juif comme peuple sioniste et de droite, soudé sans faille derrière les gouvernements israéliens successifs.Les bundistes et autres juifs socialistes, anti-impérialistes, communistes, le gros du bataillon de la MOI etc, apprécieront.

    C’est le premier grand piège de la construction d’Israel par le sionisme, d’avoir fait de cela "l’Etat des juifs" et d’avoir usurpé l’idée religieuse de la terre promise pour en faire un objet politique purement " de droite". On sait bien et très vite quelles dérives cela a amené et notamment qu’il es t extrêmement périlleux de se lancer dans une critique de la politique des gouvernements israéliens.

    Le CRIF, bon, on sait ce que c’est quand même, faut pas être naïf -e t c’est pour cela que je n’ai, personnellement, pas compris la participation à ce dîner, compte tenu du contexte historique (ravages de la palestine et 60ème anniversaire de la création de l’Etat d’Israel) de représentants du PCf, en plus sous l’ère Sarkozy.

    Le CRIF et le sionisme, justement ,c’est le meilleur moyen pour, à terme , raviver l’antisémitisme le plus abjecte. P. Boniface l’a bien expliqué - ça lui a valu de se faire "virer" du PS, notamment quand il a sorti son livre "est-il permis de critiquer Israël".

    Personnellement, je refuse que la religion juive, ou disons plus largement "le judaïsme", et la SHoah servent à légitimer des pratiques impérialistes et colonialistes, le meurtre de gens qui n’avaient d’autre tort que d’occuper une terre que des intérêts politiques et capitalistes mondiaux avaient décidé d’octroyer unilatéralement à une autre catégorie de gens.

    Et oui c’est exactement pour ce genre de raisons que le CRIF et M. Prasquier auraient du vomir d’horreur à l’écoute du discours de Sarkozy. ce qu’a dit simone veil aussi sur ce sujet, hier ,est très juste. Même Serge Klarsfeld a manifesté son désaccord sur RTL ce matin, quant à cette "proposition".

    Instrumentaliser la Shoah, pour des tas de raisons, c’est non.

    Alors oui, franchement ,l’article de l’UJFP est très bienvenu. Et il ne faut pas avoir peur d’appeler un chat un chat.

    Cette annonce est dégueulasse car elle instrumentalise un génocide, pour des fins complètement politiques et qu’elle contribue à masquer toutes autres sortes d’horreurs.

    Les juifs français doivent se lever et dire, comme viennent déjà de le faire beaucoup : "Monsieur Sarkozy, pas en notre nom" !

    Merci à l’UJFP pour ce texte en tout cas.

    La Louve