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L’arnaque de la dette publique

Publie le samedi 1er mars 2008 par Open-Publishing
5 commentaires

de B@@L

Voila un texte qui se place dans la lignée de ce que j’avais proposé dans mon article Un autre monde est possible. Voici donc le premier article d’information civique. c’est un texte un peu long, mais je l’ai écrit de façon à ce qu’il soit pas chiant à lire. Pourquoi cet article ? Parce que j’ai 25 ans, encore des rêves d’une meilleure société, et a défaut d’argent, c’est un monde moins pourri que je veux laisser en héritage.

C’est parti !

Au commencement était le troc qui permettait d’échanger des objets contre d’autres objets ou services. Pour palier aux problèmes évident d’échange réel entre différents type d’objets (i.e. : un bateau contre des pommes), il fut créé un système monétaire basé sur une unité commune : l’or. On pouvait dès lors échanger un bateau contre une quantité jugée équivalente d’or.

Le problème de l’or, c’est qu’il est lourd, et que le riche bourgeois de l’époque avait déjà peur de se faire détrousser. Les stocks d’or étaient donc entreposés chez des orfèvres qui émettaient un reçu confirmant que le riche bourgeois détenait effectivement l’équivalent en or de son bout de papier.

Il échangeait donc son reçu contre un bien ou un service, et le prestataire pouvait aller voir l’orfèvre pour réclamer son dû. C’était le début du billet. C’était alors le niveau d’évolution ultime de l’humanité. En effet, jusqu’à ce point, l’homme se souvenait encore de l’essentiel :

Le billet, ou tout type de monnaie sert juste à faciliter les échanges de biens. Une monnaie n’a pas de valeur intrinsèque, elle ne créé aucune richesse. La richesse est fournie par le travail : si aucun travail n’est fourni, la monnaie ne peut rien acheter.

Très vite après apparurent les première magouilles avec ce qu’on appelle aujourd’hui la monnaie scripturale. Certains orfèvres se rendant compte que les gens préféraient s’échanger des billets plutôt que de réclamer l’or correspondant, le billet est petit à petit devenu le référent. Des orfèvres peu scrupuleux se sont donc dit que si seulement une personne sur 10 réclamait son or, il pouvait créer 9 fois plus de billets qu’il n’a d’or. Tant que les 9/10 de la population ne viennent pas réclamer leur or, y’a pas de soucis. Dans le cas contraire, l’orfèvre devait courir très vite parce que les gens se souvenaient subitement que le bout de papier n’avait aucune valeur. L’orfèvre s’était alors transformé en encu… de banquier.

Voila de façon imagée la façon dont fonctionne une banque, et comment on en est arrivé là. Sous Napoléon Bonaparte a été créée une banque centrale (la Banque de France) pour gérer la création de monnaie dans tout l’État. Au début privé, la Banque Centrale est vite revenue sous contrôle de l’État, car comme le disait Napoléon, "lorsqu’un gouvernement est dépendant des banquiers pour l’argent, ce sont ces derniers, et non les dirigeants du gouvernement qui contrôlent la situation, puisque la main qui donne est au dessus de la main qui reçoit."

La Banque Centrale, comment ça marche ? Je suis l’État, et j’ai besoin de pognon (que je n’ai pas) pour construire un réseau de distribution d’eau. Je vais voir la Banque Centrale pour tout lui expliquer, elle créé l’argent dont j’ai besoin, me le prête sans intérêts, et au fur et à mesure que je rembourse ma dette, l’argent est détruit. La vie est belle et mes concitoyens ont accès à l’eau potable.

Pour un citoyen lambda, c’est plus ou moins la même chose. Madame Chombier est cliente dans une banque privée et elle demande un prêt à son banquier pour s’acheter la dernière brosse à dent électrique à la mode (Celui qui a inventé ça est un abruti, celui qui réussit à le vendre est un génie. C’est comme le rasoir manuel à pile, y’a des trucs que je comprendrai jamais). Si la banque n’a pas les réserves suffisantes (c’est-à-dire tout le temps), elle va pleurer chez la Banque de France qui créé de l’argent et lui prête avec un taux d’intérêt, car l’utilité du prêt n’est pas publique. La banque privée prête à son tour ce même argent à madame Chombier avec un taux d’intérêt supérieur. Tout le monde est content, même si au final madame Chombier l’a dans le cul, vu qu’elle rembourse à la banque privée de l’argent qui ne lui appartient pas. La banque privée rembourse à son tour la Banque de France, tout en se mettant dans les poches la différence entre ses intérêts et ceux de la Banque de France, puis cette dernière détruit la monnaie.

Jusque là tout va bien, et ça semble couler de source. Le souci, c’est qu’avec le temps, relations et/ou corruption aidant, l’État a cédé une partie de son pouvoir de création de monnaie à des banques privées !! Les banques privées pouvaient alors influer sur l’économie du pays en créant leur propre monnaie, et gagner encore plus de pognon sur le dos de madame Chombier, en lui proposant le même taux d’emprunt, mais en n’ayant plus à rembourser de dette à la Banque Centrale. L’État n’y gagne donc plus rien.

Répugnant n’est-ce pas ? Abjecte ! Révoltant ! Mais… c’est pas fini !!
Eh oui, parce que ça c’était AVANT, bien entendu !! Avant une certaine année 1973, année à laquelle la France s’est amputé d’un bras en s’interdisant à elle même d’emprunter de l’argent à sa propre Banque Centrale !!

Loi n°73-7 du 3 janvier 1973 sur la Banque de France, Art 25 :
Le Trésor public ne peut être présentateur de ses propres effets à l’escompte de la Banque de France.

Traduction : L’État ne peut être débiteur de la Banque de France, autrement dit : La Banque de France ne peut pas faire crédit à l’État.

La répercussion ? La France s’attaque maintenant à la création du réseau téléphonique. Comme elle n’a toujours pas le pognon qu’il faut, l’État décide de demander un crédit. Pour on ne sait quelle raison obscure, l’État se tourne donc vers une banque privée plutôt que vers sa Banque Centrale. Cette banque privée lui prête de l’argent qu’elle n’a pas non plus. C’est pas bien grave puisque cette banque a le droit de créer de l’argent. La banque lui prête donc l’argent demandé en prenant soin d’ajouter un taux d’intérêt. L’État doit maintenant rembourser l’emprunt PLUS les intérêts !! Pire, la banque privée a créé l’argent du prêt, mais pas celui des intérêts. L’État devra donc se démerder pour payer les intérêts en puisant dans la masse monétaire existante, c’est-à-dire en taxant le contribuable, les entreprises (pas trop malheureux !), ou encore en exploitant ces pays d’Afrique que la France aime tant.

Ce remboursement rendu tant injuste par la seule volonté de nos propres élus, est aujourd’hui connu sous le nom de dette publique. Oui cette fameuse dette qui ne cesse d’augmenter, qui serait due à une mauvaise utilisation de l’argent publique, ou à un nombre trop élevé de fonctionnaires. Faux !! Cette dette existe parce que nos dirigeants l’ont voulu !!

On nous dit à longueur de temps que la France va rembourser sa dette. Comment ? Si elle a emprunté c’est qu’elle n’avait pas assez d’argent pour financer ses projets. L’État a donc deux choix possibles : soit emprunter à nouveau (avec taux d’intérêt) pour rembourser sa dette à la date d’échéance, ce qui revient à s’endetter encore plus (c’est le serpent qui se mord la queue), soit vendre ses richesses pour récupérer de l’argent et rembourser la dette. Mais quels sont ces richesses me direz-vous ? Et bien ce sont les biens et services publics : SNCF, France Télécom, la Poste…

On retrouve dans ce système de création de monnaie gentiment laissé aux banques privées, la base des raisons de la privatisation des biens publiques, du pillage de notre patrimoine. Pour faire passer la pilule au peuple, on dégrade les conditions de travail des fonctionnaires, ceux-ci se mettent en grève et bloquent le pays, on monte l’opinion publique contre eux à l’aide d’une habile propagande médiatique (« Et oui c’est encore la galère pour des millions d’usagers, des millions d’usagers en colère pris en d’otages »... Celui qui a trouvé de qui je parlais ne gagne rien). Il suffit alors de servir un joli discours ventant les bienfaits qu’aurait la privatisation sur ce service, même si on n’en croit pas un mot. Une fois l’opinion publique dans la poche, on lance le processus.

Une foi privatisés, les services publics ne répondent plus à une demande de service, mais à une demande de profit. Ben oui les actionnaires ne font pas dans le social. On doit donc s’attendre à une réduction des salaires, à une hausse des prix, à une diminution de la qualité de service, à la dégradation des matériels mais mais mais… à une réduction des impôts sur les sociétés, autre rouage étrange.

Et quand il n’y aura plus de biens publics ? Et bien la dette continuera d’augmenter encore et encore sans qu’on ne puisse rien y faire. On arrivera à la freiner un peu au détriment d’autres pays plus pauvres, en exploitant leurs ressources naturelles et leur peuple.

Bon c’est pas grave, maintenant qu’on le sait on va informer les gens et faire pression pour renverser la vapeur !! Bonne idée… mais trop tard. Vous vous souvenez bien sûr du traité de Maastricht. Le débat sur l’euro, monnaie unique, Europe plus forte face aux USA tout ça… Et on a voté oui sans même lire le traité ! Et pourtant si on l’avait lu, après 103 articles indigestes, on aurait pu lire l’article 104 (si si). Et dans cet article on aurait appris que l’Europe, dans sa grande bonté, interdisait aux banques centrales d’accorder des crédits aux organismes et entreprises publiques, c’est-à-dire l’État.

Vous souvenez-vous de cette phrase étrange de la loi de 1973 ? Maintenant que l’Europe a officialisé tout ça, plus la peine d’embrouiller le citoyen qui aurait osé regarder en quoi consistait cette loi. On peut maintenant annoncer officiellement et de façon claire au citoyen qu’il s’est fait entubé, grâce à l’adaptation de cet article 104 dans le droit français, qui donne lieu à ceci :

LOI n° 93-980 du 4 août 1993 relative au statut de la Banque de France et à l’activité et au contrôle des établissements de crédit, Art 3 :
Il est interdit à la Banque de France d’autoriser des découverts ou d’accorder tout autre type de crédit au Trésor public ou à tout autre organisme ou entreprise publics.

Maintenant que le traité de Maastricht a été adopté et qu’il se trouve par conséquent au dessus du droit français, on permet au citoyen de s’indigner en lui présentant de façon intelligible la décision qui s’est prise 20 ans plus tôt. Le citoyen peut toujours protester, cette loi est maintenant irréversible. Son seul moyen de protester est de sanctionner les députés européens par les urnes. Manque de bol, ces députés, bien qu’étant les seuls élus du peuple dans le système, n’ont aucun pouvoir, et les puissants qui régissent nos vies restent en place.

Ce processus de création de la monnaie laissé aux banques privées est donc la base de nombreux problèmes, que sont la privatisation, l’endettement des ménages, la taxation à outrance, la fermeture d’établissements publics (maternités) et le faible nombre de travaux publics.

Vous connaissez la théorie de la fuite d’eau dans un immeuble ? Si j’ai une fuite d’eau au dernier étage, il est inutile de réparer les dégâts au premier étage tant que la fuite n’est pas réparée.

Avant de s’attaque hypocritement au soi-disant problème de la dette par différentes réformes douteuses, le gouvernement devrait donc s’attaquer au problème principal : la récupération de notre droit fondamental à créer notre monnaie… pour commencer. Mais en aura-t-il le courage et la volonté ?

A ce système économique mafieux, une alternative jugée viable et empêchant l’inflation a été présentée en 1932 par un certain ingénieur écossais nommé Clifford Hugh Douglas : le crédit social. Elle est cependant restée à l’état de théorie, bien qu’ayant été débattue au congrès étasunien, et ayant uni sous un même drapeau démocrates et républicains. Une autre théorie à étudier est celle de l’écosociétalisme.

Parce que la suite est développée sur un axe un peu différent, bien que traitant du même thème, je l’écrirai dans un autre article sous ce titre : "Et si je devenais oisif ?"

Merci à André-Jacques Holbecq pour ses corrections.

Pour des infos plus amples et plus techniques

Une illustration (anglais)

Avis à ceux qui veulent faire des articles de ce type.
L’idée de création d’un site spécialisé tient toujours.

Messages

  • Ce soir j’ai appris des choses avec cet article. Je me faisais une autre idée du prêt qui, pensais-je à tort, venait des autres clients de la banque. Autant pour moi.

    si aucun travail n’est fourni, la monnaie ne peut rien acheter.

    Ca c’est pas tout à fait vrai, les riches vous le diront.

    • si aucun travail n’est fourni, la monnaie ne peut rien acheter.

      Ce que je veux dire par là, c’est que si plus aucun bien n’est produit (par le travail donc), il n’y a plus rien à acheter et l’argent ne sert donc plus à rien. L’argent ne servirait plus qu’à corrompre des dirigeants, ce qui les rendraient riches si ils relancent la machine.

      Une précision qui n’a rien à voir : les banques centrales créent la monnaie fiduciaire (billets, pièces), tandis que les banques privées créent la monnaie scripturale. La proportion est d’environ 5% de monnaie fiduciaire et 95% de monnaie scripturale. Pourcentage à vérifier, mais en tout cas proche de la réalité.

      Faites passez l’info. C’est comme ça que les choses bougeront.

    • Lire également le livre de Marie-Louise DUBOIN "Mais où va l’argent ?"préfacé par René PASSET.Voire le site LA GRANDE RELEVE.

    • Attention... si les banques ont bien le pouvoir de créer la monnaie, et en réalité elles créent la presque totalité - au moins 85% - de la monnaie en circulation par le crédit (aux entreprises, aux ménages et aux Etats), lorsqu’elles font un prêt elles ont aussi le choix de prêter une épargne préalable (si, évidemment, elles disposent de ces dépôts)

      ... mais très bon article dans l’ensemble...

    • Et lire aussi " les 10 plus gros mensonges sur l’économie" dePH. Derudder et A-J Holbecq (ed Dangles)
      Voir leur site internet de présentation de ce livre : [http://www.10mensonges.org/]