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Ma saisine du Conseil d’Etat contre EDVIGE

Publie le jeudi 31 juillet 2008 par Open-Publishing
11 commentaires

Les droits et libertés individuels et collectifs étant conjointement mis en cause par le décret instituant le fichier EDVIGE, il paraît indispensable que des individus saisissent le Conseil d’Etat en tant que « simples citoyens », sans être des responsables d’organisations ni des élus, afin que la recevabilité de leurs actions à ce titre soit reconnue. Tel est le sens du recours que j’ai introduit mardi.

 
Suit ma note du 29 juillet actualisée :

 
Pourquoi j’ai saisi le Conseil d’Etat contre le décret EDVIGE (I)

http://notresiecle.blogs.courrierinternational.com/archive/2008/07/30/pourquoi-...

 
Le décret n° 2008-632 du 27 juin 2008 portant création d'un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « EDVIGE » (Exploitation documentaire et valorisation de l'information générale) m'est apparu incompatible avec les libertés individuelles et collectives, telles qu'elles avaient toujours été conçues en France depuis la Libération. C'est pourquoi j'ai introduit, le 29 juillet par télécopie et courrier électronique, un recours auprès du Conseil d'Etat demandant à la Haute Juridiction administrative de bien vouloir prononcer l'annulation de ce décret. Le recours a été régularisé le 30 juillet, par la production de l'original au Greffe du Contentieux.

 

Rappelons qu'aux termes du décret, il s'agit de rien de moins que de « centraliser et d'analyser les informations » relatives aux « personnes physiques ou morales ayant sollicité, exercé ou exerçant un mandat politique, syndical ou économique ou qui jouent un rôle institutionnel, économique, social ou religieux significatif », ainsi qu'aux « individus, groupes, organisations et personnes morales qui, en raison de leur activité individuelle ou collective, sont susceptibles de porter atteinte à l'ordre public ». De mon modeste point de vue, ces définitions comportent par elles-mêmes des rapprochements très inquiétants.

Quant aux raisons, objectifs, limites et moyens de contrôle d'une si vaste entreprise de fichage collectif, ils paraissent pour le moins mal définis. Pourquoi faudrait-il être fiché, du fait d'avoir « sollicité ou exercé un mandat politique, syndical ou économique ou qui jouent un rôle institutionnel, économique, social ou religieux significatif » ? Comment caractérise-t-on les « individus, groupes, organisations et personnes morales qui, en raison de leur activité individuelle ou collective, sont susceptibles de porter atteinte à l'ordre public » ?

Le prétexte d'un éventuel « risque d'atteinte à l'ordre public », pour lequel le texte du décret ne prend même pas la peine d'employer l'adjectif « grave », ne semble pas être de nature à justifier de tels fichages généralisés effectués a priori. Et qui décide de ce qui est « susceptible de porter atteinte à l'ordre public » ? Après tout, les gouvernements sont eux-mêmes partisans.

Enfin, où veut-on en venir ? Pourquoi un tel volume d'informations sur les personnes (voir l'article 2 du décret), incluant même les données « relatives à l'environnement de la personne, notamment à celles entretenant ou ayant entretenu des relations directes et non fortuites avec elle  » ? Quel usage sera fait de ces montagnes d'informations ?

 

Mon recours contre le décret n° 2008-632 n'est apparemment pas le premier, ou pas le seul. 01net fait état, en date du 29 juillet, d'un recours d'Etienne Tête, adjoint au maire de Lyon et conseiller régional Verts en Rhône-Alpes. Le texte de ce recours, daté du 22 juillet, est accessible à l'adresse :

http://www.nonaedvige.ras.eu.org/IMG/pdf/Recours-EtienneTete.pdf

Etienne Tête attaque en même temps le décret n° 2008-631 du 27 juin 2008 portant modification du décret n° 91-1051 du 14 octobre 1991 relatif aux fichiers gérés par les services des renseignements généraux et du décret n° 2007-914 du 15 mai 2007 pris pour l'application du I de l'article 30 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, ce que je me propose également de faire dans une note complémentaire. D'après Altermonde sans frontières, le recours d'Etienne Tête est arrivé au Conseil d'Etat le mercredi 23 juillet.

Dans un communiqué du 22 juillet, la centrale syndicale Force Ouvrière annonce aussi son intention de sasir le Conseil d'Etat. Aucune date de dépôt effectif d'un recours n'a été spécifiée à ce jour. Plusieurs autres organisations ont annoncé la même intention, notamment : le Syndicat de la magistrature, le Syndicat des avocats de France, la Ligue des droits de l'Homme, la CGT, la FSU, Solidaires et la CFDT. Il paraît indispensable que des citoyens à titre individuel déposent également des recours, afin que la recevabilité de leurs actions soit actée par le Conseil d'Etat.

Quant à l'avis de la CNIL (Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés), il semble rester très critique à l'égard du contenu actuel du décret.

 

A propos du fond de l'affaire, j'écris notamment dans mon recours devant le Conseil d'Etat :

« Quant aux personnes visées par cette collecte d’informations, la définition comprend un très large éventail susceptible d’inclure tout citoyen sans avoir à en fournir les raisons. La nature des informations recueillies paraît également disproportionnée par rapport à des motifs mal définis, surtout s’agissant de fichier établis a priori. »

(fin de citation)

et, devant ce constat, je plaide des violations de la loi française, européenne et internationale. En particulier, dans le domaine des droits et libertés fondamentaux en rapport avec des garanties essentielles de la liberté d’association, d’opinion, d’expression et d’action politique ou syndicale et de respect de la vie privée. Le décret peut même, d'après mon analyse, comporter des dangers directs pour les citoyens, voire jouer un rôle d'intimidation à leur égard. En un sens, tout devient dangereux du moment qu'on risque de se retrouver fiché...

Dans un prochain mémoire, je me propose de développer plus explicitement des moyens, et si nécessaire des exceptions, d'illégalité, d'inconventionnalité et d'inconstitutionnalité. Par la suite, une note récapitulative publique exposera le contenu global de la requête.

 

Luis Gonzalez-Mestres
lgm_sci@yahoo.fr
http://scientia.blog.lemonde.fr

 

Suit le décret EDVIGE (source : Légifrance) :

http://www.legifrance.gouv.fr/jopdf/common/....

 

JORF n°0152 du 1 juillet 2008

Décret n° 2008-632 du 27 juin 2008 portant création d'un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé EDVIGE »

NOR : IOCC0815681D

 

Le Premier ministre,

Sur le rapport de la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales,

Vu le code de procédure pénale, notamment son article 777-3 ;

Vu la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, notamment son article 26 (I à III) ;

Vu le décret n° 85-1057 du 2 octobre 1985 modifié relatif à l'organisation de l'administration centrale du ministère de l'intérieur et de la décentralisation, notamment son article 12 ;

Vu le décret n° 2007-914 du 15 mai 2007 pris pour l'application du I de l'article 30 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés ;

Vu l'avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés en date du 16 juin 2008 ;

Le Conseil d'Etat (section de l'intérieur) entendu,

Décrète :

 
Article 1 

Le ministre de l'intérieur est autorisé à mettre en œuvre un traitement automatisé et des fichiers de données à caractère personnel intitulés EDVIGE (Exploitation documentaire et valorisation de l'information générale) ayant pour finalités, en vue d'informer le Gouvernement et les représentants de l'Etat dans les départements et collectivités :

1. De centraliser et d'analyser les informations relatives aux personnes physiques ou morales ayant sollicité, exercé ou exerçant un mandat politique, syndical ou économique ou qui jouent un rôle institutionnel, économique, social ou religieux significatif, sous condition que ces informations soient nécessaires au Gouvernement ou à ses représentants pour l'exercice de leurs responsabilités ;

2. De centraliser et d'analyser les informations relatives aux individus, groupes, organisations et personnes morales qui, en raison de leur activité individuelle ou collective, sont susceptibles de porter atteinte à l'ordre public ;

3. De permettre aux services de police d'exécuter les enquêtes administratives qui leur sont confiées en vertu des lois et règlements, pour déterminer si le comportement des personnes physiques ou morales intéressées est compatible avec l'exercice des fonctions ou des missions envisagées.

 
Article 2 

Conformément aux dispositions de l'article 6 de la loi du 6 janvier 1978 susvisée, et dans la stricte mesure où elles sont nécessaires à la poursuite des finalités mentionnées à l'article 1er du présent décret, les catégories de données à caractère personnel enregistrées dans le traitement mentionné à l'article 1er et concernant des personnes physiques âgées de treize ans et plus sont les suivantes :

― informations ayant trait à l'état civil et à la profession ;
― adresses physiques, numéros de téléphone et adresses électroniques ;
― signes physiques particuliers et objectifs, photographies et comportement ;
― titres d'identité ;
― immatriculation des véhicules ;
― informations fiscales et patrimoniales ;
― déplacements et antécédents judiciaires ;
― motif de l'enregistrement des données ;
― données relatives à l'environnement de la personne, notamment à celles entretenant ou ayant entretenu des relations directes et non fortuites avec elle.

Les données collectées au titre du 1 de l'article 1er du présent décret ne peuvent porter ni sur le comportement ni sur le déplacement des personnes.

Le traitement peut enregistrer des données à caractère personnel de la nature de celles mentionnées à l'article 8 de la loi du 6 janvier 1978 susvisée. Celles de ces données autres que celles relatives aux opinions politiques, philosophiques ou religieuses, ou à l'appartenance syndicale ne peuvent être enregistrées au titre de la finalité du 1 de l'article 1er que de manière exceptionnelle. Il est interdit de sélectionner une catégorie particulière de personnes à partir de ces seules informations.

Le traitement ne comporte pas de dispositif de reconnaissance faciale à partir de la photographie.

Les données concernant les mineurs de seize ans ne peuvent être enregistrées que dans la mesure où ceux-ci, en raison de leur activité individuelle ou collective, sont susceptibles de porter atteinte à l'ordre public.

Les données collectées pour les seuls besoins d'une enquête administrative peuvent être conservées pour une durée maximale de cinq ans à compter de leur enregistrement ou de la cessation des fonctions ou des missions au titre desquelles l'enquête a été menée.

 
Article 3 

Dans la limite du besoin d'en connaître, sont autorisés à accéder aux informations mentionnées à l'article 2 :

― les fonctionnaires relevant de la sous-direction de l'information générale de la direction centrale de la sécurité publique, individuellement désignés et spécialement habilités par le directeur central de la sécurité publique ;

― les fonctionnaires affectés dans les services d'information générale des directions départementales de la sécurité publique ou, à Paris, de la préfecture de police, individuellement désignés et spécialement habilités par le directeur départemental ou, à Paris, par le préfet de police.

Peut également être destinataire des données mentionnées à l'article 2, dans la limite du besoin d'en connaître, tout autre agent d'un service de la police nationale ou de la gendarmerie nationale, sur demande expresse, sous le timbre de l'autorité hiérarchique, qui précise l'identité du consultant, l'objet et les motifs de la consultation.

 
Article 4 

Le traitement et les fichiers ne font l'objet d'aucune interconnexion, aucun rapprochement ni aucune forme de mise en relation avec d'autres traitements ou fichiers.

 
Article 5

Conformément aux dispositions prévues à l'article 41 de la loi du 6 janvier 1978 susvisée, le droit d'accès aux données s'exerce auprès de la Commission nationale de l'informatique et des libertés.

Le droit d'information prévu au I de l'article 32 et le droit d'opposition prévu à l'article 38 de la même loi ne s'appliquent pas au présent traitement.

 
Article 6

Sans préjudice de l'application de l'article 44 de la loi du 6 janvier 1978 susvisée, le directeur général de la police nationale rend compte chaque année à la Commission nationale de l'informatique et des libertés de ses activités de vérification, de mise à jour et d'effacement des informations enregistrées dans le traitement.

 
Article 7 

Le présent décret est applicable sur tout le territoire de la République.

 
Article 8

Le présent décret entre en vigueur le jour de l'entrée en vigueur du décret n° 2008-631 du 27 juin 2008 portant modification du décret n° 91-1051 du 14 octobre 1991 relatif aux fichiers gérés par les services des renseignements généraux et du décret n° 2007-914 du 15 mai 2007 pris pour l'application du I de l'article 30 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978.

 
Article 9

La ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales est chargée de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

 

Fait à Paris, le 27 juin 2008.

 

François Fillon

Par le Premier ministre :

 
La ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales,

Michèle Alliot-Marie

 

(fin du texte du décret)

Messages

  • Bonne initiative. Pour des raisons de transparence, la présence de "petits citoyens", "électrons libres", etc... sera également une bonne chose.

    • L’affaire est suffisamment importante, et grave, pour que tout le monde s’y intéresse de près. Il n’existe aucune raison pour que les citoyens ne participent pas directement aux actions en justice dans ces situations.

      A quand le mémoire récapitulatif que l’auteur nous promet ? Il me semble que la date limite pour déposer un recours est le 2 septembre, et qu’il faut qu’à cette date il soit parvenu au greffe du Conseil d’Etat.

    • Déjà, l’argument de la disproportion est à creuser. C’est du gros bon sens. Il faut également bien mettre en évidence que, dans la pratique, les moyens de contrôle des citoyens sur ce monstre informatique seront très minces.

    • Il y a déjà un débat : pourquoi se focaliser sur EDVIGE et ne pas parler de CRISTINA ? Corinne Lepage n’en souffle mot :

      http://www.lepost.fr/article/2008/0...

      On doit pouvoir également introduire des recours contre CRISTINA.

  • http://www.legifrance.gouv.fr/affic...

    JORF n°0152 du 1 juillet 2008 page texte n° 2

    DECRET

    Décret n° 2008-631 du 27 juin 2008 portant modification du décret n° 91-1051 du 14 octobre 1991 relatif aux fichiers gérés par les services des renseignements généraux et du décret n° 2007-914 du 15 mai 2007 pris pour l’application du I de l’article 30 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978

    NOR : IOCC0815702D

    Le Premier ministre,

    Sur le rapport de la ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales,

    Vu le code civil, notamment son article 1er ;

    Vu la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, notamment son article 26 (I à III) ;

    Vu le décret n° 91-1051 du 14 octobre 1991 portant application aux fichiers informatisés, manuels ou mécanographiques gérés par les services des renseignements généraux des dispositions de l’article 31, alinéa 3, de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés ;

    Vu le décret n° 2007-914 du 15 mai 2007 pris pour l’application du I de l’article 30 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés ;

    Vu l’avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés en date du 16 juin 2008 ;

    Vu l’urgence ;

    Le Conseil d’Etat (section de l’intérieur) entendu,

    Décrète :

    Article 1

    Le décret n° 91-1051 du 14 octobre 1991 susvisé est ainsi modifié :

    1° A l’article 5, les mots : « Les fonctionnaires des renseignements généraux dûment habilités et dans la limite du besoin d’en connaître » sont remplacés par les mots : « Dans la limite du besoin d’en connaître et dans les domaines entrant dans les champs de compétences respectifs de leurs services, les fonctionnaires individuellement désignés et spécialement habilités de la sous-direction de l’information générale de la direction centrale de la sécurité publique, des services d’information générale des directions départementales de la sécurité publique, de la direction centrale du renseignement intérieur et du service central des courses et jeux de la direction centrale de la police judiciaire » ;

    2° Il est inséré, après l’article 7, un article 7-1 ainsi rédigé :

    « Art. 7-1.-La collecte et l’enregistrement de nouvelles données dans les traitements et fichiers prévus par le présent décret sont interdits à compter du 1er juillet 2008.

    A compter de cette date et jusqu’au 31 décembre 2009, les données contenues dans les traitements et fichiers prévus par le présent décret peuvent être transférées vers les traitements et fichiers, chacun pour ce qui relève de ses finalités, de la direction centrale de la sécurité publique, de la direction centrale du renseignement intérieur et du service central des courses et jeux de la direction centrale de la police judiciaire. »

    Article 2

    I. ― L’article 1er du décret du 15 mai 2007 susvisé est modifié comme suit :

    1° Les dispositions du 1 sont remplacées par les dispositions suivantes :
    « 1. Décret portant création au profit de la direction centrale du renseignement intérieur d’un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé CRISTINA ; » ;

    2° Après le 8, il est ajouté un 9 ainsi rédigé :

    « 9. Décret portant création au profit de la direction centrale de la sécurité publique d’un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé EDVIGE. »

    II. ― A l’article 2 du même décret, les mots : « les traitements prévus à l’article 1er » sont remplacés par les mots : « les traitements prévus du 1 au 8 de l’article 1er ».

    Article 3

    I. ― Le décret n° 91-1051 du 14 octobre 1991 susvisé est abrogé à la date du 31 décembre 2009.

    II. ― Le décret n° 91-1052 du 14 octobre 1991 relatif au fichier informatisé du terrorisme mis en œuvre par les services des renseignements généraux du ministère de l’intérieur est abrogé.

    Article 4

    Le présent décret est applicable sur tout le territoire de la République.

    Article 5

    La ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales est chargée de l’exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française et entrera immédiatement en vigueur.

    Fait à Paris, le 27 juin 2008.

    François Fillon

    Par le Premier ministre :

    La ministre de l’intérieur,

    de l’outre-mer et des collectivités territoriales,

    Michèle Alliot-Marie

  • http://www.legifrance.gouv.fr/affic...

    JORF n°0150 du 28 juin 2008 page texte n° 4

    DECRET

    Décret n° 2008-609 du 27 juin 2008 relatif aux missions et à l’organisation de la direction centrale du renseignement intérieur

    NOR : IOCX0811987D

    Le Président de la République,

    Sur le rapport du Premier ministre et de la ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales,

    Vu le code de procédure pénale ;

    Vu le code de la défense ;

    Vu la loi n° 66-492 du 9 juillet 1966 modifiée portant organisation de la police nationale ;

    Vu la loi n° 92-125 du 6 février 1992 relative à l’administration territoriale de la République, notamment son article 4 ;

    Vu le décret n° 79-433 du 1er juin 1979 relatif aux pouvoirs des ambassadeurs et à l’organisation des services de l’Etat à l’étranger ;

    Vu le décret n° 85-1057 du 2 octobre 1985 modifié relatif à l’organisation de l’administration centrale du ministère de l’intérieur et de la décentralisation, notamment son article 5 ;

    Vu le décret n° 98-608 du 17 juillet 1998 modifié relatif à la protection des secrets de la défense nationale ;

    Vu le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l’organisation et à l’action des services de l’Etat dans les régions et départements ;

    Vu l’avis du comité technique paritaire central de la police nationale du 7 avril 2008 ;

    Vu l’avis du comité technique paritaire de l’administration centrale du ministère de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales du 8 avril 2008 ;

    Vu l’avis du comité technique paritaire ministériel du ministère de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales du 9 avril 2008 ;

    Le Conseil d’Etat (section de l’intérieur) entendu ;

    Le conseil des ministres entendu,

    Décrète :

    Article 1

    La direction centrale du renseignement intérieur a compétence pour lutter, sur le territoire de la République, contre toutes les activités susceptibles de constituer une atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation.

    A ce titre :

    a) Elle est chargée de prévenir les activités inspirées, engagées ou soutenues par des puissances ou des organisations étrangères et de nature à menacer la sécurité du pays, et concourt à leur répression ;

    b) Elle participe à la prévention et à la répression des actes terroristes ou visant à porter atteinte à l’autorité de l’Etat, au secret de la défense nationale ou au patrimoine économique du pays ;

    c) Elle contribue à la surveillance des communications électroniques et radioélectriques susceptibles de porter atteinte à la sûreté de l’Etat ainsi qu’à la lutte, en ce domaine, contre la criminalité liée aux technologies de l’information et de la communication ;

    d) Elle participe également à la surveillance des individus, groupes, organisations et à l’analyse des phénomènes de société, susceptibles, par leur caractère radical, leur inspiration ou leurs modes d’action, de porter atteinte à la sécurité nationale.

    Article 2

    La direction centrale du renseignement intérieur recherche, centralise et exploite tous les renseignements se rapportant aux activités mentionnées à l’article 1er et que lui transmettent sans délai tous les services concourant à la sécurité nationale.

    Le service chargé, sous l’autorité du préfet de police, de missions de renseignement intérieur concourt à l’activité de la direction centrale du renseignement intérieur.

    Article 3

    La direction centrale du renseignement intérieur assure les liaisons nécessaires, dans ses domaines de compétence, avec les services ou organismes concernés, français ou étrangers, sans préjudice des dispositions régissant les organes de coopération policière internationale.

    Elle dispose à cet effet d’officiers de liaison à l’étranger.

    Article 4

    Les services territoriaux de la direction centrale du renseignement intérieur, en métropole et outre-mer, sont placés sous la seule autorité du directeur central.

    Les chefs des services territoriaux de la direction centrale du renseignement intérieur rendent compte de leur action au représentant de l’Etat territorialement compétent, d’initiative ou à la demande de celui-ci, dans la limite du besoin d’en connaître.

    Il peut être créé des services à compétence zonale ou interdépartementale.

    Article 5

    Tout agent public est tenu de garder le secret sur les activités et l’organisation de la direction centrale du renseignement intérieur.

    Article 6

    Le décret n° 82-1100 du 22 décembre 1982 fixant les attributions de la direction de la surveillance du territoire est abrogé.

    Article 7

    Le Premier ministre, la ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales et la garde des sceaux, ministre de la justice, sont responsables, chacun en ce qui le concerne, de l’application du présent décret, qui entrera en vigueur le 1er juillet 2008 et sera publié au Journal officiel de la République française.

    Fait à Paris, le 27 juin 2008.

    Nicolas Sarkozy

    Par le Président de la République :

    Le Premier ministre,

    François Fillon

    La ministre de l’intérieur,

    de l’outre-mer et des collectivités territoriales,

    Michèle Alliot-Marie

    La garde des sceaux, ministre de la justice,

    Rachida Dati