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L’Italie chasse les clandestins dans les hôpitaux

Publie le vendredi 13 février 2009 par Open-Publishing
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de Eric Jozsef

Le gouvernement Berlusconi veut favoriser la dénonciation des immigrés illégaux. Famiglia Cristiana parle de retour des lois raciales. Certains médecins portent des autocollants "nous ne sommes pas des espions"

"Nous ne sommes pas des espions." Indignés, les médecins et les infirmiers italiens lancent l’alarme. La décision du gouvernement Berlusconi d’abolir l’interdiction pour le corps médical de dénoncer les clandestins provoque une vive indignation parmi les praticiens. La mesure n’a pour l’heure été votée que par le Sénat le 4 février dernier.

Fortement voulue par le xénophobe parti de la Ligue du Nord, elle doit encore être approuvée par la Chambre des députés dans le cadre d’un projet de loi sur la sécurité qui introduit aussi le délit de clandestinité, un registre pour les sans domicile fixe ou encore la légalisation des "rondes padanes", sortes de milices populaires non armées.

Mais en quelques jours, la peur d’être dénoncés a entraîné une diminution du nombre de patients étrangers (de l’ordre de 20% selon les médecins) dans les hôpitaux et les dispensaires. « Vendredi dernier, quand la presse et la télévision ont mis en circulation le bruit que les médecins devront dénoncer les clandestins, pour la première fois depuis quinze ans, la salle d’attente est restée vide », a raconté Corrado Ferro, responsable d’un dispensaire turinois spécialisé dans l’accueil sanitaire des immigrés. « Nous sommes extrêmement préoccupés, commente Andrea Pontiroli de Médecins sans frontières, à l’origine de la mobilisation contre l’amendement. Au-delà de la fondamentale question de principe, les clandestins malades vont voir leur situation s’aggraver. S’ils sont victimes d’une maladie contagieuse, cela représente un risque pour toute la population. Et au bout du compte, si on n’intervient pas en amont, ça sera plus coûteux pour le système de santé national. »
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Concrètement, la très grande majorité des médecins et des infirmiers soutenus par leurs ordres professionnels respectifs ne devraient pas suivre l’invitation à la délation. Dans les couloirs des hôpitaux, certains portent d’ailleurs des autocollants « Nous ne sommes pas des espions » et quelques-uns envisagent d’afficher à l’entrée des structures sanitaires des panneaux indiquant « Ici nous ne dénonçons personne ». Mais dans le même temps le rapporteur (Ligue du Nord) de la loi, Fabio Rizzi qui est également médecin a déclaré : « Je n’aurais aucun problème de conscience à dénoncer puisque le projet prévoit aussi le délit de clandestinité […] C’est comme quand on est mis au courant d’une fusillade ou d’un coup de couteau. »

MSF insiste sur le climat de peur créé par ce texte et sur le risque de voir se développer des structures sanitaires clandestines : « Aujourd’hui, par manque d’information, les étrangers ne savent pas qu’ils ont accès aux soins. Si l’amendement est confirmé, il sera encore plus difficile de les soigner. » « L’Italie est en train de se précipiter vers l’abîme des lois raciales », s’insurge Famiglia Cristiana. Le ministre (Ligue du Nord) de l’Intérieur Roberto Maroni a décidé de porter plainte pour diffamation soutenant en substance qu’il fait la chasse aux clandestins mais pas aux étrangers.

http://www.letemps.ch/Page/Uuid/73d...

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