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Nous ne laisserons pas crever "Fleur" de Libé !

Publie le vendredi 13 février 2009 par Open-Publishing
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Nous ne laisserons pas crever "Fleur" de Libé !

46 pour la grève, 132 contre : un vote sans appel. Chauffés à blanc par une intense campagne de couloir, sous la pression des "petits-chefs" socialo-gauchisants ou crypto-sarkozistes, et terrorisés à l’idée de perdre, eux aussi, leur travail - et leurs petits fauteuils de bureaucrates inutiles, ou nuisibles - une incontestable majorité des personnels de Libération a décidé de laisser crever Florence Cousin dans sa grève de la faim, écartant, et la voie de la dignité, et même celle d’un compromis toujours possible.

Pour le P-dg Laurent Mouchard, dit Joffrin, dont la tête déplumée risquait, elle aussi, de rouler dans un panier de son, mais ici dans celui de l’actionnaire Rothschild, c’est une divine surprise.

Pour nous, ce n’en est pas une. Les valeurs de solidarité et de dignité humaine, les valeurs de progrès, sont minoritaires depuis longtemps dans le quotidien créé par les Maos, prostitué par July, puis vendu, pour pas cher, à Rothchild.

Il suffit de le lire pour le voir.

Mais cette grève de la faim n’est pas une première : tirons les leçons de l’expérience.

Il y a 28 ans presque jour pour jour, début 1981, c’est une majorité, elle, écrasante , qui avait fondé l’ordre nouveau du journal par le vote des pleins pouvoirs à l’ancien trublion du mouvement du 22 mars rêvant d’un destin de "patron de presse" à cigare, en lui donnantle pouvoir de "licencier tout le monde, puis de réembaucher qui il voulait". Etant bien entendu que le "minoritaire" qui avait osé se dresser, seul ou presque, contre lui, en lui disant très simplement que "depuis des années et des années, des centaines de pauvres bougres se sont fait massacrer par les gendarmes pour qu’il existe un minimum de droit, des conventions collectives, etc, et que jamais pareil projet ne soit possible" n’aurait "pas sa place" dans le nouveau Libé de 1981, "n’en partageant, à l’évidence, pas les valeurs".

- Or, c’était à la fois vrai et faux.

Vrai qu’il n’en partageait pas les valeurs. - Faux qu’il n’en ferait pas partie.

Postant, dès le lendemain de l’A.G. où sa voix quelque peu solitaire semblait avoir été écrasée, la lettre recommandée le désignant comme le premier délégué syndical (SNJ-CGT) du journal, lettre qu’il avait tâté, sous les huées, les menaces, et les bordées d’injures, au fond de sa poche où elle voisinait, à toutes fins utiles, avec un cutter bien tranchant, le "minoritaire", flanqué d’un solide petit noyau clandestin, allait retisser, avec le temps, la toile de la démocratie que l’éradicateur du moment prétendait déchirer, ou souiller.

Une - brève - grève de la faim fut, au passage, nécessaire. La "majorité du journal", unie derrière un "chef" alors au sommet de sa puissance, et jouissant d’importantes complicités jusqu’au cœur de l’appareil d’Etat de Giscard - inspecteurs du travail "gauchistes" inclus - n’ayant pas voulu écouter quelques avertissements diurnes ou nocturnes pourtant bien sentis selon lesquels "pour en arriver là, il faudrait passer sur le ventre" des héritiers de l’épopée Mao, toujours actifs autant que rétifs aux "pleins pouvoirs à Serge July" (ou à qui que ce soit...), étant bien précisé que la chose serait (le menacé était lui-même bien placé pour le savoir...) "difficile".

Florence, Fatima, Marco ; Mourad, Karl de Sud, et les autres, vous êtes, c’est vrai, ce soir, minoritaires. Vous devez être dans la tristesse. Dans la détresse, peut-être. Mais votre cause est juste, et, si vous en prenez les moyens, tous les moyens, vous souffrirez en route, mais vous vaincrez.

Unissez-vous, restez unis dans la durée, dominez vos différences, vos différends, les instants de découragement des uns, l’exaspération sombre des autres, formez un noyau conscient et cohérent... Parlez à tous, et soyez particulièrement à l’écoute de ceux, nombreux, qui sont à la fois "pour" la défense de la gréviste de la faim, en danger d’être brisée, ou chassée, et "contre" la grève totale immédiate du journal, sous l’emprise de la peur.

Avec ceux-là, qui ont été des adversaires, dans l’urne, mais ne sont nullement des ennemis, cherchez un terrain d’entente, des passerelles, d’autres moyens d’action, communs, valables tant que Florence tient, et parvient à contrebalançer, par son courage, le poids de la direction.

Ouvrez-vous, enfin, vers l’extérieur de Libération, dans le quartier, où la rumeur se répand, chez les anciens de Libé, dans le monde syndical, en banlieue, et dans le mouvement, convergeant, qui se tisse autour de Lounis...

Restez fermes, attentifs, soyez patients, la lumière viendra du travail collectif, et de l’écoute.

C’est cet esprit de Résistance ordonnée, organisée, tenace, mais aussi prudente, intelligente, aussi souple,qu’ il le faut, qui avait fait la force des fondateurs de Libé.

C’est cet esprit dont le "journal de Serge July" a tenté, en vain, de se débarrasser, et de débarrasser le pays tout entier : jusqu’à ce que, finalement, Libé, lassé, se débarrase de lui.

C’est cet esprit dont, par la grâce de Florence, de son sourire, de son courage, vous êtes aujourd’hui, rue Bérenger, les dépositaires.

Vous n’êtes donc pas seuls. N’agissez pas comme si vous l’étiez.

12 février 2009. 18H30

Jean-Paul Cruse

http://www.lemondereel.fr/

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