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Quand la base se rebelle

Publie le vendredi 31 juillet 2009 par Open-Publishing
20 commentaires

de JACKY SANUDO

Près de 3 000 délégués syndicaux d’usines liquidées ou en perdition se sont retrouvés à New Fabris, dans la Vienne, pour tenter de relancer le syndicalisme de la base.

C’était émouvant et joyeux à la fois, comme si les gens étaient heureux de partager leur misère. Quand les coups durs sont là, on appelle cela la solidarité. Hier, dans la zone industrielle nord de Châtellerault, de nombreuses délégations syndicales d’entreprises en difficulté ou carrément fermées sont venues dire leur soutien aux 366 salariés de New Fabris, fabricant de pièces automobiles.

Le tribunal de commerce a annoncé sa liquidation en juin dernier. Depuis, les ouvriers bataillent pour décrocher une prime de licenciement pour tous de 30 000 euros auprès de Renault et PSA, qu’ils fournissent exclusivement. Pour faire pression ils ont menacé début juillet de brûler leur ancien outil de travail et les pièces usinées, ainsi que de faire exploser cinq bonbonnes de gaz qu’ils ont mises bien en évidence à l’intérieur du site. Un ultimatum est fixé aujourd’hui, 31 juillet, midi (lire ci-dessous).

Hier, la manifestation se voulait nationale. Et elle l’a été. « Notre but est de regrouper un maximum de délégations et créer un collectif pour se battre tous ensemble. Nous n’avons eu que huit jours pour organiser tout ça, mais les camarades ont répondu présent malgré les vacances. Ce qui n’est pas le cas de nos responsables syndicaux nationaux qu’on n’entend pas et à qui nous offrions une opportunité de se racheter », explique Guy Eyermann, délégué CGT et secrétaire du comité d’entreprise des Fabris. Chaque nouvel arrivant était invité à laisser ses coordonnées sur un cahier prévu à cet effet.

Ford est là mais pas JLG

Apparaissent sur la liste les sociétés qui ont fait l’actualité sociale de ces derniers mois : Continental (Compiègne), Freescale (Toulouse), Rencast (Châteauroux), Philips (Dreux), Molex (Villemur), Ford (Blanquefort), Aubade (Saint-Savin) SBFM (Lorient), Goodyear (Amiens), Flextronics (Saint-Étienne), Peugeot (Saint-Ouen)... Manquent à l’appel les JLG de Tonneins (Lot-et-Garonne) qui ont obtenu 30 000 euros d’indemnités supralégales pour les 53 salariés licenciés en... menaçant de faire sauter leur usine à la bouteille de gaz. « Il nous fallait cinq heures de route et nous avions une nouvelle réunion avec la direction. Que les Fabris sachent que l’on est totalement avec eux. Nous, on a abouti grâce à leur idée et on espère bien qu’ils y arriveront aussi », s’est excusé le secrétaire du CE Christian Amadio.

Défense de la ligne dure

Denis Rivier (F0 Métallo Flextronics) a fait le déplacement, seul, depuis Saint-Étienne. « Même si je désapprouve la méthode, s’il n’y avait pas eu les bonbonnes de gaz nous ne serions pas là. Nous devons arrêter de nous bagarrer chacun dans notre coin. Il faut créer un véritable G8 syndical et se retrouver tous, par millions, au même endroit », dit-il. Dans les rangs, après une visite improvisée de l’usine, où des pièces neuves sont entassées par tonnes, 3 000 participants échangent des tracts et des autocollants.

Parmi les plus actifs, les six représentants des pneus Continental de Clairoix, que tout le monde surnomme les Conti. Eux sont parvenus à obtenir gain de cause dans leurs revendications. Ils ne regrettent pas le saccage d’une préfecture et défendent la ligne dure. « Qui sont les plus responsables de la misère, ceux qui mettent des bouteilles de gaz ou les patrons et les politiciens qui ferment et délocalisent ? » questionne Christian Lahargue.

Son collègue Xavier Mathieu est encore plus virulent : « Ils claquent dans le plan social le prix d’une usine neuve et ils y retrouvent encore leur compte. Notre avantage sur vous c’est d’être 1 200 au lieu de 300. À chaque manif et à l’AG quotidienne nous étions 600 et notre interlocuteur était allemand, c’est autre chose que Renault ou PSA. On n’a pas hésité à brûler des pneus de Porsche Cayenne à 400 euros pièce sur le pont de Compiègne et au bout, sur quatre mois de grève on ne m’a enlevé que trois jours de salaire », déclare-t-il à un petit groupe de Fabris impressionnés. Avec ses vingt-deux ans de boîte, il se félicite d’avoir obtenu 80 000 euros d’indemnités et 80 % de salaire versé sur un an. En revanche il ne décolère pas sur les fédérations au niveau national qui « sont juste là pour les photos à l’Élysée ». Bernard Thibault en prend pour son grade.

Dans les discussions, autour du barbecue saucisses offert par les pompiers de Châtellerault, l’animosité est récurrente. « Ils sont devenus incapables de prendre une initiative. À force de vouloir se la jouer syndicat moderne en négociant avec le gouvernement et le président, ils ont perdu toute combativité. L’enjeu d’une journée comme aujourd’hui est de tisser des liens avec la base et de s’organiser pour une bagarre plus radicale. Si on y parvient nous n’aurons plus besoin des têtes pensantes », assure Philippe Poutou, venu de Gironde avec trois compères de la CGT représenter ce qu’il reste de Ford-Blanquefort.

Concert/débat à Blanquefort

Au passage il signale la tenue d’un concert et d’un débat auquel seront conviés tous les présents du jour pour le 5 septembre à Blanquefort. Vue la rentrée sociale morose qui s’annonce, les syndicalistes tentent d’inventer des nouvelles formes de lutte qui ressemblent finalement à celles utilisées il y a une vingtaine d’années.

Sur ces considérations, le cortège des Fabris pouvait s’élancer derrière la 2 CV, devenue symbole de leur combat, sur un trajet de 2 kilomètres en direction de la place de la Mairie. Les rares politiques présents ont préféré rester discrets en queue du peloton.

L’éphémère Premier ministre Édith Cresson, un autocollant Conti sur le dos, fermait la marche en tentant de convaincre une majorité de sceptiques qu’elle venait représenter le Parti socialiste.

La fin de l’ultimatum prévue aujourd’hui

Aujourd’hui à midi, le panneau à l’entrée de l’usine indiquera la fin de l’ultimatum lancé par les ouvriers de New Fabris. Vont-ils mettre leur menace de faire tout exploser à exécution ?

Pour l’instant, le geste de désespoir a fait son effet en attirant les médias. Il a également entraîné un retour de manivelle avec les déclarations des ministres du travail, Xavier Darcos, et de l’industrie, Christian Estrosi, qui rejettent toute médiation sous la contrainte. Ces derniers jours les syndicats se déchirent sur l’attitude à adopter et jouent au chat et à la souris.

Bouteilles de gaz

Hier les bouteilles vertes de Totalgaz ont fait leur réapparition dans la matinée avant d’être enlevées une heure plus tard. « Je refuse d’être filmé devant les bonbonnes. Ça, ce n’est plus nous. On ne menace plus mais aux dernières négociations nous en sommes toujours à 11 000 euros de prime, loin des 30 000 que nous réclamons. C’est l’impasse », explique Guy Eyermann, délégué CGT.

De son côté, le représentant FO Dominique Duval souhaite maintenir la pression jusqu’à la dernière seconde. Les bonbonnes font toujours partie de son plan. Ce matin les employés de l’ancien fabricant de pièces automobiles seront reçus dans la sous-préfecture de la Vienne où leur sera présenté le protocole d’accord.

Ensuite ils se retrouveront en AG vers 11 heures et décideront par vote à bulletin secret de la suite des événements. Pas grand monde ici ose croire qu’ils franchiront le pas de la destruction de leur ancien outil de travail, mais le doute plane toujours.

Après avoir perdu leur travail, voilà les 366 Fabris pris à leur propre piège. « Ce sont les syndicats qui ont lancé tout ça, mais il faut qu’ils sachent que si on fait tout péter nous n’aurons rien », assure cet employé aux douze ans de maison. La raison l’emportera-t-elle sur le désespoir ? Personne n’a jamais eu de réponse à cette question.

 http://www.sudouest.com/accueil/act...

Messages

  • Oui, c’est peut-être le signal de quelque chose. Les médias ont laissé passer " prolétaires unissons-nous" ! C’est bien la première fois qu’une rédaction de TV s’attarde sur un tel sujet qui démontre que la base est non seulement en état de stress et de souffrance mais qu’elle a la capacité de faire quelque chose d’important pour renverser cette situation, du moment qu’elle est rassemblée, unifiée dans un combat juste.

    Et les licenciements ne sont pas finis, loin de là, car les patrons de ces grosses boîtes ont le feu vert des Etats, de l’UE et de la grosse finance pour éjecter, dégraisser "le mammouth salarial" ! Bref, la balle est à présent dans le camp des prolos salariés, de la base. A nous !

  • Des délégués qui, conscients des enjeux ne comptent que sur eux même.Félicitations mes camarades et honte aux confs.Fraternellement. momo11

    • De toute façon, si on est "conscient des problèmes" en ce moment vaut mieux compter sur soi-même ou sur ceux qui sont dans la même merde que sur des mecs qui jouent à des années lumières des problèmes des autres à désarmorcer toute tentative de mouvement.

      E surtout "oublier" qu’on ne fabrique pas les victoires en faisant plaisir à l’adversaire ni en jouant le même jeu que lui.

      G.L.

  • PSA et Renault se moquent du monde

    Les stocks de Fabris suffiraient largement à payer la modeste prime de licenciement demandée par les salariés. PSA et Renault ont communiqué des chiffres pour le moins contestables au Ministre de l’Industrie concernant la valeur du stock et de l’outillage de Fabris.

    Actuellement les deux constructeurs produisent ces pièces similaires à un coût de revient très supérieur au prix qu’ils offrent au liquideur.

    Exemple : un collecteur d’échappement DV6 pour des petites cylindrés est proposé au rachat pour une valeur de 9 ?. Selon des sources internes citées par les syndicats, cette pièce serait fabriquée actuellement par PSA pour un coût de 46 ?. Elle finit sur les étagères des concessionnaires à 265 ? !

    commentaire sur

    New Fabris : l’aide relevée à 12.000 euros net

    NOUVELOBS.COM | 31.07.2009 | 11:05

    http://tempsreel.nouvelobs.com/actualites/20090731.OBS6011/lsreactions00e5.html?l=0

  • heureusement qu’ils restent des militants , des vrais.

    quant aux bonzes.... en vacances ?

    • un bronzé répond qu’au moment des greves que j’étais prêt à faire comme à la réunion , une greve illimitée et toi ?,et vous ?

    • certains aiment bien les petits groupes de 10000,de 30000,mais pas de 3000000 !

    • et si une hirondelle annonçait le printemps ?? a savoir, la rupture consommée avec les directions syndicales "modernistes’ et "negociatrices" et l’émergence, à la base d’un syndicalisme d’action directe, antagoniste, bref.. la résurgence de l’Autonomie Ouvrière comme dans les luttes de la Fiat, de la Montedison , du Polyclinico de Rome and co dans le mouvement italien des années 70...
      une ligne rouge des luttes qui passe des usines en lutte aux maisons occupées, des lieux de vie autogérés aux grèves sauvages...

      Bref, réaliser en actes le pire de leurs cauchemards de gestionnaires socio democrates ou capitalistes... un axe Tarnac/Chattelerault/Montreuil.. luttes urbaines, luttes ouvrières.. parfois une hirondelle peut aussi annoncer un printemps précoce..

    • tu m’etonnes mon ami que je vais vite me casser en vacances 43 h / par semaine sur les toits, c’est sur que je leurs laisserai pas mes vacances

      amitiés d’un tout bronzé

  • 1°) Je cite :

    « Hier les bouteilles vertes de Totalgaz ont fait leur réapparition dans la matinée avant d’être enlevées une heure plus tard. « Je refuse d’être filmé devant les bonbonnes. Ça, ce n’est plus nous. On ne menace plus mais aux dernières négociations nous en sommes toujours à 11 000 euros de prime, loin des 30 000 que nous réclamons. C’est l’impasse », explique Guy Eyermann, délégué CGT.

    « De son côté, le représentant FO Dominique Duval souhaite maintenir la pression jusqu’à la dernière seconde. Les bonbonnes font toujours partie de son plan. »

    Remarque : Et bien moi, dans cette usine, si j’étais syndiqué, je le serai plutôt à FO ! n’en déplaise à certains.

    2°) Je cite :

    « ils se retrouveront en AG vers 11 heures et décideront par vote à bulletin secret de la suite des événements. »

    Remarques :

    Les grèves commencent à main levée et se terminent à bulletins secrets !

    Quand on veut imposer la reprise du travail, la première chose à faire, c’est d’imposer un vote à bulletins secrets. Parce qu’un vote à main levée est un vote collectif où chacun prend avant tout en compte l’intérêt collectif.

    Tandis qu’un vote à bulletin secret est un vote individuel au mauvais sens du mot, au sens où chacun prend avant tout en compte ses intérêts égoïstes et ses secrets espoirs inavouables du style "ça arrivera aux autres et pas à moi".

    Le vote à main levée, c’est "un pour tous et tous pour un"

    Le vote à bulletins secrets, c’est "chacun pour soi" !

    De surcroît, seul le vote à main levée interdit la triche parce que tout le monde peut constater le résultat. Le vote à bulletins secrets autorise toutes les triches

    Aussi, je demande : QUI a décidé que ce serait un vote à bulletin secret ?

    • bouteilles vertes de Totalgaz

      C’est une pub déguisée. ou ça marche pas si on met du Butagaz ???

      On s’en fout des "bouteilles". Si c’est pas avec ça qu’il faut agir c’est avec autre chose. Et surtout ne pas lier une "victoire" personnelle hypothétique avec l’abandon de l’action avec ceux qui vont venir dans la liste des victimes.

      L’essentiel c’est de leur foutre la trouille en leur démontrant que l’imagination pour les baiser est complètement en action.

      Et c’est pas simplement en disant "on met les bouteilles" et si vous lâchez on les enlève.

      Faut dire "On met les bouteilles"... " Et si vous continuez avec d’autres comme vous avez fait avec nous on en mettra encore plus"... "Ou autre on mettra autre chose".

      On manque pas d’imagination.

      Y compris si vous nous filez ce qu’on demande.

      C’est pas de donner du fric qu’ils ont peur. C’est de donner aux autres victimes à venir des idées de solidarité sur des buts concrets.

      G.L.

  • Il est probable que le principe du vote a “bulletins secrets” a été decidé ailleurs ,et que c’est une des conditions des 12000 € nets :

    CHATELLERAULT

    Les "Fabris" votent la fin de leur mouvement

    NOUVELOBS.COM | 31.07.2009 | 14:48

    http://tempsreel.nouvelobs.com/actualites/social/20090731.OBS6011/les_fabris_votent_la_fin_de_leur_mouvement.html

    • Les ouvriers se sont une fois de plus fait enculer par les patrons avec l’aide des syndicats.

      Quant à Guy Eyermann (CGT locale), il a dit : « Je demande à la minorité de respecter le vote des 204 salariés »

      Et il a dit aussi : « J’ai l’impression d’avoir été abandonné par ma direction syndicale ».

      Il n’empêche que c’est lui, Guy Eyermann (CGT locale), qui a fait enlever les bouteilles de gaz et qui a interdit qu’on les remette. Guy Eyermann a par conséquent bel et bien transmis et fait exécuter les ordres de sa direction. Alors, il peut toujours dire que sa direction l’a abandonné : Il nous prend pour des cons !

      Ceux qui ont laissé les bouteilles de gaz jusqu’au bout ont obtenu bien plus que ceux qui les ont enlevées !

      Seule une coordination, des votes à mains levées et des actions radicales peuvent sortir les salariés de la merde

    • Tu crois pas qu’il faudrait avoir les couilles de critiquer AUSSI les 204 SALARIES qui ont voté pour l’arrêt de la grève et de l’occupation ??????

      Ras le bol de ce discours binaire manichéen ... vous ne rendez service à personne.

      Mettons AUSSI nos semblables face à leur responsabilité bordel. Ils vont manger LEUR MERDE.

  • estrosi qui pinaille pour 30 000 euro alors que lui en a claqué plus de 130 000 pour rejoindre son petit timonier au coeur fragile et sa (...) lifté juste histoire de s’enfiler quelques verres de champagnes, putain les ouvriers de fabris et les autres aussi devraient faire péter leurs usines licenciement ou pas que ça marche ou pas, l’outil de travail ça se reconstruit, estrosi doit bien se marrer de ses pauvres con d’ouvriers lefevbro-balkano umpist qui ont voté pour l’avocat en droit immobilier de neuilly et certains doivent avoir le front qui rougi et les oreilles qui s’allongent.

  • "Fin de mouvement sans violence pour les New Fabris. Par 204 voix contre 24, les salariés du sous-traitant automobile, situé à Châtellerault (Vienne), se sont prononcés vendredi en faveur du protocole de fin de conflit qui améliore sensiblement leurs conditions de départ. Le gouvernement avait, en effet, choisi de lâcher du lest, en acceptant, juste avant le scrutin, de faire passer la prime extralégale de licenciement de 11 000 euros brut à 12 000 euros net pour chacun des 366 salariés."

    http://www.liberation.fr/economie/0101583121-new-fabris-range-les-bonbonnes

    • Pour décrire la situation en bref, les New Fabris ne se seraient-t-ils pas fait quelque peu "embonbonner".

      Parce que tout ce boxon pour 1000 euros de plus par fion on est content pour eux qu’ils aient pas fait sauter les bonbonnes.

      Ils pourront toujours les rapporter pour récupèrer la consigne.

      Triste.

      G.L.

  • les rebelles devraient se reconvertir dans la production de vaseline,et a l’allure ou ca va dans la production de kapote,cela n’aidera pas les cabriolets de psa,mais cela leur donnera un semblant d’espoir