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Un repenti prêt à accuser Silvio Berlusconi

Publie le samedi 28 novembre 2009 par Open-Publishing

Berlusconi et Dell’Utri

Berlusconi et Dell’Utri

de Eric Jozsef

Gaspare Spatuzza devrait répéter en public ses accusations livrées aux magistrats, à savoir que le premier ministre italien aurait été lié à Cosa Nostra dans les années 90

Convoqué le 4 décembre prochain au tribunal de Milan pour répondre de l’accusation de corruption de témoin, Silvio Berlusconi a fait savoir par l’intermédiaire de ses avocats qu’il ne pourrait se rendre à l’audience en raison d’un Conseil des ministres. Mais, le même jour, c’est dans une autre salle d’audience, celle de Palerme, que risque de se jouer son destin judiciaire et politique.

Dans le cadre du procès en appel à l’encontre de son ancien bras droit, Marcello Dell’Utri (condamné en première instance à 9 ans de réclusion pour collusion avec Cosa Nostra), un mafieux repenti, Gaspare Spatuzza, devrait répéter en public ses accusations livrées aux magistrats, à savoir que Silvio Berlusconi aurait été lié à la « Pieuvre ». Pire, que l’actuel président du Conseil aurait été dans l’ombre des attentats perpétrés en 1993 par la criminalité organisée à Rome, Florence et Milan.

Avant même l’interrogatoire, la semaine prochaine, de Spatuzza, Silvio Berlusconi aurait en substance dénoncé jeudi, devant ses collaborateurs, « des procureurs subversifs qui veulent faire tomber le gouvernement », ajoutant : « On respire un climat de guerre civile. » « Ne nous cachons pas derrière notre petit doigt, a de son côté lancé le sénateur (droite) Gaetano Quagliariello, nous sommes en train de vivre la répétition générale de l’entrée en scène de Gaspare Spatuzza. »

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Sicaire du redoutable parrain Leoluca Bagarella, celui-ci a notamment été condamné à perpétuité pour l’assassinat en 1993 d’un prêtre qui appelait les fidèles à se rebeller contre la mafia. Arrêté quatre ans plus tard, il aurait récemment décidé de collaborer avec la justice après une crise quasi mystique.

En juin dernier, il aurait notamment évoqué sa conversation avec le boss Giuseppe Graviano, chef du clan du quartier palermitain de Brancaccio, à la veille de l’attentat (manqué) en janvier 1994 au Stade olympique de Rome. Celui-ci lui aurait dit : « Les tractations se sont bien passées, nous avons obtenu ce que nous voulions. Nos interlocuteurs sont des personnes fiables. » Graviano aurait alors évoqué le nom de Berlusconi, précisant qu’il s’agissait du patron de Canale 5, la principale chaîne de télévision du Cavaliere. Devant les magistrats, Gaspare Spatuzza aurait ajouté : « Graviano m’a dit : nous avons le pays en main. »

En janvier 1994, Silvio Berlusconi s’apprêtait à se présenter et à emporter les élections pour la première fois. Au cours de l’année précédente, la mafia avait fait exploser plusieurs bombes, notamment devant la Galerie des Offices à Florence, pour tenter de desserrer l’étau de la lutte anti-mafia. A mots couverts certains magistrats avancent l’hypothèse que la Pieuvre aurait pactisé avec le patron de Forza Italia pour faciliter son accès au pouvoir et obtenir en échange des remises de peine et divers avantages.

Alors que d’autres repentis ont aussi dénoncé les liens présumés de Cosa Nostra avec Marcello Dell’Utri, sans toutefois parler explicitement de l’actuel chef du gouvernement, le quotidien (centre gauche) La Repubblica estime qu’aujourd’hui « Cosa Nostra règle ses comptes avec le Cavaliere. […] Convaincu d’avoir été vendu, le clan de Brancaccio a décidé de s’en prendre à ceux qui n’ont pas maintenu leurs engagements. » La plupart des parrains siciliens sont en effet aujourd’hui en prison.

Par le passé, le Parquet de Florence s’était déjà intéressé à Silvio Berlusconi et Marcello Dell’Utri, les soupçonnant d’avoir un lien avec l’attentat contre la Galerie des Offices. Faute d’éléments probants, ils avaient classé l’affaire. Aujourd’hui, l’entourage du Cavaliere s’insurge contre un « usage politique des repentis ».

Pour calmer la tension, le chef de l’Etat, Giorgio Napolitano, a rappelé que « rien ne peut faire tomber un gouvernement qui dispose de la confiance du parlement ».

http://www.letemps.ch/Page/Uuid/b34e7684-db9c-11de-b006-f0176d27cdbd/Un_repenti_pr%C3%AAt_%C3%A0_accuser_Silvio_Berlusconi