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Faire de la coopération un levier à Copenhague

Publie le samedi 5 décembre 2009 par Open-Publishing
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de Sabiha AHMINE

Lors de la session du Conseil Régionale de décembre, à l’occasion de l’adoption de deux rapports de coopération de Rhône-Alpes avec des régions d’Afrique en lien avec le RDV de Copenhague 2009, la conseillère régionale communiste de Lyon, a souligné que, face à l’urgence climatique, "notre politique de coopération doit être au service de la justice sociale et environnementale, qui tous deux doivent être liées". Voici des extraits du texte :

En effet les rapports de coopération, avec les vœux qui vont être déposés, rejoinnent notre engagement commun et responsable pour construire un monde de paix et de justice. Cela dans le respect de nos valeurs républicaines et dans le respect de nos engagements de répondre activement et d’une manière solidaire à l’urgence climatique.

Ils nous rappellent surtout que c’est à Copenhague que se décidera l’avenir de la planète et de l’humanité toute entière. Nous sommes ainsi dans la dernière ligne droite. Toutes et tous doivent se mobiliser massivement et peser d’une manière démocratique pour obtenir un fort accord sur le climat et la justice sociale.

Au moment où on assiste à un désengagement croissant de l’Etat en matière d’aide au développement, avec une casse systématique des services publics et une volonté sans précédent du gouvernement de remplacer nos valeurs de solidarité et d’ouverture par un repli identitaire stérile, produisant ainsi au passage et d’une manière collatérale des divisions, le doute et la peur de l’avenir, il faut surtout montrer combien l’urgence climatique est aussi sociale et citoyenne.

Elle est intimement liée à notre stratégie de développement globale, qui est elle-même et avant tout une urgence démocratique.

En effet, le premier rapport, qui est liée à l’action « multi-acteurs » « ZERO CARBONE » sur la thématique de l’adaptation des régions sénégalaise au changement climatique, est modeste exemple des actions novatrices que nous défendond en vue du respect des engagements internationaux de Copenhague. Bien avant et au delà du Grenelle de l’environnement.

Dans ce sens, notre Ecorégion Rhône-Alpes, qui sera présente à ce RDV, a à son actif des réalisations concrètes : dans les énergies renouvelables, la construction et rénovation de bâtiments (tous les nouveaux lycées) avec les normes de Haute qualité environnementale ou développement des transports en commun. Rhône-Alpes peux aller encore plus loin, avec les autres régions de France et d’Europe pour lutter contre le changement climatique, en veillant au respect des promesses tardives et timidement chiffrées (je vous épargne les chiffres) des autres Etats et puissance du monde…

A ce propos, nous nous pouvons que nous réjouir des signaux positifs venant des pays des sud et d’ailleurs. Mais au-delà des chiffres et des taxes, aux yeux des citoyens du monde comme ceux de nos quartiers, pour les mouvements sociaux, organisations écologistes, politiques et scientifiques du monde entier qui appellent à une action urgente et radicale pour répondre à la crise écologique et sociale que nous subissons, ce n’est pas encore suffisantes ces mesures mises en œuvre et prévues par les différents États. Car pour le respect du droit à un environnement sain, il faut que les choix politiques s’imposent sur la raison économique productiviste et financière, qui est souvent injuste et inégalitaire.

La législation environnementale doit être renforcée et mondialisée pour mieux s’imposer face à la dérégulation, les délocalisations nuisibles, la déréglementation économique absurde et la spéculation, qui est la cause directe de la crise financière actuelle comme des autres drames sociaux, culturels ou climatiques, présents ou à venir.

Au moment où le climat est otage de la finance, où le marché "boursicote" avec les « droits à polluer » et les "taxes carbone" le climat, il faut rappeller qu’une bonne partie de l’intensité carbonique des pays du sud doit être crédités au bilan des pays riches. C’est là une manière d’appliquer la facture au consommateur plutôt qu’au producteur. Car si on laisse le prix de la tonne de carbone se négocier et se fixer selon le rapport de l’offre et de la demande, les pays pauvres qui sont les moins pollueurs (par tête d’habitant), seront les premiers taxer, ce qui va stopper et faire régresser le peu de développement et de modernité qui leurs restent. Cela avec toutes les conséquences dramatiques sur la paix, la cohésion, la démographie et la mobilité des personnes....

Donc, contrairement au protocole de Kyoto qui est nettement libéral, sauvage, et marche sur sa tête, car il ne propose que de taxer les pauvres pour sauver les riches sans sauver le climat, les citoyens du monde veulent un accord solide avec une implication forte de la puissance publique dans l’économie, dans le co-développement et dans la régulation de la mobilités de l’ensemble des facteurs de production sans discrimination.

Ainsi, à Copenhague l’humanité doit dépasser le protocole de Kyoto aux résultats décevants et penser un autre monde : un monde de coopération, de confiance, de paix, de non exploitation, de non spéculation, de non agression et de non colonisation. Un monde de respect des droits humains, des valeurs démocratiques et des droits des migrants...

C’est dans ce sens qu’il faut lire aussi l’importance du deuxième rapport relatif au renouvellement de conventions de coopération bilatérale avec les régions d’Afrique : de Tombouctou au mali, Matam et St-Louis au Sénégal et la région de Rabat au Maroc.

Nous voulons ainsi faire de notre politique de coopération de Rhône-Alpes un levier à Copenhague.

Sabiha Ahmine - Conseillère Régionale Rhone-Alpes de Lyon
Photo : Mobilisation citoyenne à Jérusalem Est contre la déstruction de maisons palestiniennes.

Messages

  • Afrique, continent des déchets et du transit de la cocaïne

    Transit par l’Afrique

    L’engouement stratégique des cartels sud-américains pour l’Europe obéit à une stricte logique commerciale : le marché américain étant saturé, la cocaïne se vend plus cher en Europe où elle demeure plus rare, ce qui gonfle la marge.

    L’an dernier, le prix en gros du kilo de cocaïne oscillait en Europe entre 28000 et 56600 euros, contre seulement 9000 à 28000 euros aux Etats-Unis, selon les données de la DEA.

    Soucieux de tromper la vigilance des polices, les trafiquants colombiens font de plus en plus transiter la cocaïne par les ports de certains pays africains, où la surveillance est moindre, et la corruption plus répandue.

    Pour les contrer, plusieurs pays européens – Grande-Bretagne, France, Irlande, Italie, Espagne, Portugal et Pays-Bas – ont décidé de créer un organisme commun pour monter des opérations policières conjointes en haute mer qui sera inauguré cette année à Lisbonne.

    http://gaetanpelletier.wordpress.com/2009/11/27/afrique-continent-des-dechets-et-du-transit-de-la-cocaine/

    Trafic de Cocaïne en Afrique La poudre blanche fait parler d’elle

    Jeudi, 16 Juillet 2009 00:03

    Pour l’écrivain italien Roberto Saviano, une grande partie du continent se criminalise à grande vitesse. Principal responsable : le trafic de cocaïne.

    L’Afrique aujourd’hui n’est pas noire. L’Afrique n’est pas brune, n’est pas verte, n’est pas jaune. L’Afrique aujourd’hui n’est pas d’ébène, n’est pas couleur de peau, ni couleur de savane ou couleur du désert. L’Afrique est blanche. Blanche non pas comme la peau des vieux descendants des Boers. Ni comme celle des médecins sans frontières qui la sillonnent. Ni comme celle des investisseurs. C’est le blanc de la cocaïne qui est aujourd’hui la couleur de l’Afrique. Toute l’Afrique occidentale est désormais gorgée de cocaïne et de l’argent des trafics de drogue. Toute la cocaïne qui entre en Espagne, en Italie, en Grèce, en Turquie, en Scandinavie, mais aussi en Roumanie, en Russie, en Pologne, toute cette poudre blanche transite par l’Afrique. L’héroïne est afghane. La cocaïne est sud-américaine, bien sûr. Mais aujourd’hui, ce n’est plus l’origine qui importe, l’origine de la culture, de la plante, ou du raffinage. Car désormais, la cocaïne est africaine. L’Afrique est devenue le continent blanc.

    En Guinée-Bissau, le président João Bernardo Vieria, parvenu lui aussi au pouvoir par un coup d’État, a été assassiné parce qu’il gênait les intérêts des narcotrafiquants. Le président Vieria prenait un pourcentage sur les navires qui arrivaient d’Amérique du Sud, avait des accords avec les “armateurs” [voir CI n°873 du 26 juillet 2007]. Depuis 2006, les liaisons aériennes ont pris le relais, au départ du Brésil, de Cuba, du Mexique, du cœur de la Colombie, du sud du Venezuela. En 2004, les Etats-Unis lancent la West Africa Joint Operation. En quelques jours, ils saisissent plus de 1 300 kilos de cocaïne au Bénin, au Ghana, au Togo et au Cap-Vert. Les aéroports sont aux mains des narcotrafiquants. Sans eux, pas de kérosène pour les compagnies aériennes, pas d’argent pour les entreprises de nettoyage, pas de contrôleurs dans les tours. Et tout repart ensuite du cœur de l’Afrique équatoriale, soit par la route, soit à nouveau par la voie des airs.

    C’est au Maroc que se sont téléscopées deux générations de narcotrafiquants. Les anciens et les nouveaux. Mahmud est policier, d’origine marocaine. Il s’est installé en Italie, voilà des années, pour sauver sa vie, après une longue infiltration des cartels du haschisch. Il me raconte avoir assisté à plusieurs rencontres entre jeunes et anciens trafiquants. Les anciens sont dans le haschisch, les jeunes dans la cocaïne. Les Mauritaniens acheminent la marchandise en provenance du Sénégal et des pays équatoriens à travers le désert, et la remettent aux Marocains qui la stockent dans des maisons situées à proximité du port. Du port, la drogue repart pour ses différentes destinations : l’Andalousie, la Campanie, le Péloponnèse, la Calabre, Vlora [Albanie]. Au Maroc, me rapporte Mahmud, toutes les conversations tournent autour de la même chose. Il m’en relate une, ordinaire, semblable aux autres. Les motivations sont toujours les mêmes, les motifs de dispute aussi. “Nous, on ne peut pas faire passer la cocaïne. Si la cocaïne passe, plus rien ne passe. Ils enverront l’armée, ce sera la guerre sur les plages, assure-t-il. “si ce n’est pas nous qui le faisons, ce seront les Libyens, et si ce ne sont pas les Libyens, ce seront les Algériens”, répondront à coup sûr les jeunes. Les trafiquants de haschisch sont tolérés depuis toujours. Au fond, leur drogue n’est pas une drogue dure, elle leur fait bien gagner leur vie mais ne les rend pas riches non plus. L’économie marocaine repose essentiellement sur le haschisch. Sans lui, la bourgeoisie n’existerait pas. L’histoire remonte à loin, et c’est toujours la même. Les rouages de l’économie écrasent les règles morales. Il en va toujours ainsi. Les patrons de la Cosa Nostra de la vieille génération ne voulaient pas vendre d’héroïne. Ils ont été éliminés par la nouvelle génération de mafiosi qui, elle, entendait se mêler au trafic. Les familles du clan des Casalesi [branche de la Camorra de la région de Naples] ne voulaient pas entrer dans le marché des déchets toxiques, ce qui aurait entraîné la destruction d’une grande partie de leur territoire. Mais elles se sont aperçues qu’en refusant une affaire importante, elles se trouvaient immédiatement fragilisées et perdaient du terrain. C’est ainsi qu’elles ont fini par pénétrer sur le marché.

    L’Afrique est blanche. Blanche de la cocaïne. Même les trafiquants d’héroïne iraniens et afghans veulent faire de l’Afrique la plaque tournante de leur commerce. A l’aller, on transporte de la cocaïne et au retour de l’héroïne en Amérique du Sud, d’où elle repart pour les États-Unis – un circuit qui n’a pas encore l’ampleur de celui de la cocaïne en Afrique. Aujourd’hui, l’Afrique est le continent qui peut résoudre les problèmes des trafiquants de cocaïne, d’héroïne et même de déchets toxiques. Ce va-et-vient de drogue s’accompagne d’une augmentation considérable du nombre de toxicomanes africains. Des drogués, des toxicomanes et des cocaïnomanes sur un continent qui demeure associé à la misère et à la faim. Voilà un paradoxe qui en dit long. Les diamants, l’ivoire, l’ébène, le coltan et toutes les autres ressources arrachées à la terre d’Afrique auront essentiellement engendré le crime, et non la richesse.

    Mais aujourd’hui, les substances importées, la cocaïne et les déchets toxiques, sont en train de transformer l’Afrique. Aujourd’hui, la richesse de l’Afrique vient de son immensité et non plus, ou plus seulement, du pillage de ses ressources, de son pétrole pompé du sol, de ses diamants arrachés à la terre, de son or extirpé. Le moindre trou fait l’affaire pour y enfouir des déchets toxiques, et l’Afrique entière devient une tombe à ciel ouvert : on ne s’en aperçoit que lorsque survient la tragédie. Le 19 août 2006, le Probo Koala accoste au port d’Abidjan, en Côte-d’Ivoire, avec l’autorisation de décharger 581 tonnes de déchets toxiques, destinés à une décharge unique. Au lieu de cela, ils sont déversés un peu partout, finissant même par déborder sur les terrains voisins. Bilan : 85 000 personnes intoxiquées. Comme en Italie, les déchets toxiques envahissent les décharges africaines. Le poison finit là où devraient finir les déchets ordinaires et les déchets ordinaires finissent dans la rue. Comme en Italie, mais à une échelle infiniment plus vaste, Car l’Afrique n’est pas un recoin d’un petit pays, mais un continent.

    Pour émerger, le Continent noir a misé sur un produit qui ne naît pas dans ses mines, qui ne poussent pas dans ses champs. Voilà pourquoi l’Afrique est devenue blanche [voir CI n°965, du 30 avril 2009]. Blanche d’une substance qui ne lui appartient pas, d’un pouvoir qui la dévore, encore une fois incapable de créer le développement, mais seulement une richesse exponentielle pour sa sempiternelle classe dirigeante corrompue. L’Afrique est devenue une plate-forme, une plate-forme blanche où les substances illégales font leur dernier saut. La malédiction africaine ne se résume plus seulement au pillage de ses ressources, mais aussi – et c’est plus terrible encore – à l’absence de justice, à la possibilité d’acheter, avec une poignée de dollars, les âmes, les corps et la cruauté de ses habitants, et la terre d’Afrique, son corps, ses espaces. S’il existe aujourd’hui un “cœur des ténèbres” semblable à celui dont parlait Joseph Conrad, il pourrait être enfoui dans les profondeurs de cette terre empoisonnée. Mais sa couleur, sa substance, son sang, serait blanc.

    Auteur :

    Roberto Saviano| La Stampa 

    http://letemps.sn/societe/1458-trafic-de-cocaine-en-afrique-.html