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Bernard Thibault veut accélérer la mutation de la CGT

Publie le lundi 7 décembre 2009 par Open-Publishing
10 commentaires

de Rémi Barroux

A partir de lundi 7 décembre, un millier de délégués se retrouvent à Nantes pour le 49e congrès de la CGT, doyenne des syndicats français. Après dix ans passés à sa tête, son secrétaire général sortant, Bernard Thibault, rempile pour un quatrième et probable dernier mandat. Dans la foulée de son prédécesseur Louis Viannet, il a conduit la mutation du syndicat au risque de s’exposer à un regain d’oppositions. Etat des forces avant le début des joutes.

QUE PÈSE LA CGT ?

Dans un paysage social marqué par l’un des plus faibles taux de syndicalisation de toute l’Europe, moins de 10 % et quelque 5 % dans le seul secteur privé, la CGT reste la première centrale syndicale. Aux dernières élections prud’homales de décembre 2008, elle s’est maintenue en tête avec 34 % des voix, devant la CFDT (21,8 %) Mais alors qu’en 1987, la CGT revendiquait un million d’adhérents, elle n’en avance que 654 000.

Autres faiblesses : le rééquilibage public-privé n’est pas achevé avec une implantation encore majoritaire dans le secteur public, (56,6 %). Et dans le privé, la CGT pèse davantage dans les secteurs en déclin. Comme les autres organisations, elle a du mal à s’implanter dans les petites entreprises, là où le travail est plus précaire, où se retrouvent les femmes à temps partiel et les jeunes. C’est l’une des raisons pour lesquelles, il compte peu de femmes (34,4 %)

Dans un entretien au Monde (10 novembre), Bernard Thibault déplorait que la CGT soit "implantée dans les secteurs où l’emploi recule et absente des secteurs où l’emploi se développe", reconnaissant, à cet égard, un "échec". La CGT veut cependant croire au renouvellement. Pour 2009, elle annonce quelque 46 000 nouveaux adhérents dont 67,6 % venus du privé, 43 % de femmes et près d’un tiers de jeunes de moins de 35 ans alors que ces derniers ne pèsent que 15, 5 % dans le total des effectifs.

EST-ELLE DEVENUE RÉFORMISTE ?

Conscient d’avancer en terrain miné, Bernard Thibault évite les débats philosophiques, mais progresse dans le sillage de son prédécesseur Louis Viannet qui définit ainsi la mue vers un "syndicalisme de conquête" : "La ligne de clivage entre négociation et action ne signifie rien : aucune négociation ne peut déboucher sur quelque chose de positif si elle ne s’appuie pas sur la mobilisation des salariés".

Les chiffres le montrent : la CGT signe moins d’accords que les autres syndicats. Au niveau national ou dans les branches professionnelles, elle paraphe 40 % des accords contre 68 % pour FO et 81 % pour la CFDT (chiffres 2008 du ministère du travail). Dans les entreprises, le pourcentage atteint cependant 54,3 %. Il est plus proche de celui de la CFDT ( 60,9 %) et supérieur à celui de FO (43,9 %).

Il n’a cependant échappé à personne que Bernard Thibault a été, à l’automne 2007 l’interlocuteur privilégié de Nicolas Sarkozy dans la réforme des régimes spéciaux de retraite. Les observateurs ont aussi noté que la CGT s’était rapprochée de la CFDT pour mener à bien la réforme de la représentativité qui recompose le paysage syndical au profit des grosses centrales.

Ils ont enfin noté que Bernard Thibault refusait la classification entre syndicats réformistes et contestataires proposée par l’UNSA lors de son dernier congrès (Le Monde du 28 novembre) . Son secrétaire général, Alain Olive, avait alors proposé la création d’un pôle réformiste incluant la CFDT, à la CFTC et la CFE-CGC mais excluant la CGT. "Inadequate", avait alors rétorqué le responsable cégétiste.

QUELLE OPPOSITION ?

Le regroupement, qui a pris pour nom "Comité pour une CGT de lutte de classes et de soutien à la candidature de Jean-Pierre Delannoy", métallugiste du Nord, revendique quelque 2000 signatures d’individus ou de structures et s’appuie sur des collectifs comme Où va la CGT ? Tous ensemble, le Front syndical de classes…

Pour ces opposants qui n’ont pas les moyens statutaires de présenter un candidat face à Bernard Thibault, la CGT est en dérive. Elle a abandonné la lutte des classes pour mieux s’adapter au libéralisme. Des preuves ? Son rapprochement avec la CFDT ou encore son investissement dans le syndicalisme européen : le 1erdécembre, c’est un cégétiste, Joël Decaillon, qui a été élu au poste de numéro deux de la Confédération européenne de syndicats.

D’autres syndicats et militants émettent des critiques. Le leader des Continental, Xavier Mathieu, a traité, cet été, le numéro un de la CGT, de "racaille", lui reprochant de préférer les rencontres à l’Elysée au terrain des luttes. Dans un texte du 1er décembre envoyé à la confédération, la fédération des industries chimiques critique les états généraux de l’industrie qui avaient été réclamés par la CGT et ont été acceptés par Nicolas Sarkozy : "La CGT ne doit pas se laisser instrumentaliser dans une manœuvre politicienne", affirme le texte qui dénonce le manque de "vision claire quant aux objectifs de lutte". Cette opposition, plus structurée qu’aux derniers congrès, risque de compliquer la tâche du secrétaire général.

QUELLE ORGANISATION ?

La réforme des structures est pour Bernard Thibault le grand enjeu du congrès. A l’heure actuelle, la confédération ne confédère pas grand-chose : les fédérations professionnelles, les unions départementales, les syndicats d’entreprise, chaque structure veut garder son indépendance, constituant parfois des baronnies concurrentes qui n’appliquent qu’imparfaitement les décisions du congrès. Bernard Thibault a décidé de réduire l’importance du bureau confédéral qui ne comptera plus que huit membres contre douze, transférant une partie du pouvoir à la commission exécutive (54 membres). Une façon aussi d’avoir les mains plus libres pour commencer à organiser sa succession.

http://www.lemonde.fr/societe/article/2009/12/07/bernard-thibault-veut-accelerer-la-mutation-de-la-cgt_1276957_3224.html

Messages

  • La Démocratie à la CGT .... Je ne connait pas !

    Je suis adhérant depuis de nombreuses décennies à la CGT mais jamais on ne m’a demandé ce que je pensais !

    La CGT file du mauvais coton... c’est sûr !

    On peut dès lors me rétorquer :
    Pourquoi es-tu toujours à la CGT ?

    A cette question je peux répondre :
    Que pour moi la CGT c’est d’abord la lutte de nos anciens 1936, la Libération, 1968, ces luttes passées ont données des acquis importants aux salariés de France.

    Actuellement notre sympathique chevelu et quelques uns de ses acolytes syndicaux et politiques font le jeu du Président et du MEDEF.

    Mais que l’on se rassure, les travailleurs français ont en eux les moyens de changer le cours des évènements actuels.

    LES TEMPS CHANGENT

    Paroles : Pierre Delanoë, Hugues Aufray. Musique : Bob Dylan 1965 "Aufray chante Dylan"
    Titre original : "The times they are a-changin’"
    autres interprètes : Richard Séguin (1993)

    http://www.cyberus.ca/~rg/ch_a004.htm

    • La CNT combien de divisions ?
      C’est un syndicat (si on peut appeler ça syndicat, c’est plus un parti pour moi) qui regroupe quelques milliers de syndiqués et qui ne regroupe quasiment que des anars et libertaires.
      Par nature, il est amené à rester ultra-minoritaire et donc quasiment impuissant sur le cours des choses et incapable de défendre au jour le jour les salariés.
      La CNT même si elle le veut n’entraine personne. En plus elle isole certains syndicalistes radicaux de la masse des syndicalistes. Certes c’est plus commode de militer entre gens de bonne compagnie. On se fait plaisir, on a les mains libres. Et après ?

      Quand on est un syndicaliste radical au sein de la CGt on a 1000 fois plus d’impact que quand on est isolé dans une réserve d’indiens de gens qui pensent tous comme nous mais qui ne pèsent rien du tout.
      Et les Thibaut and co seraient trop contents qu’on leur laisse les centaines de milliers de syndiqués et qu’on aille s’enterrer dans des syndicats ultraminoritaires. Ils ne rêvent que de ça.

      Il est là le problème de la CNT.

      C’est en partie celui de Sud aussi d’ailleurs. C’est un syndicat qui a déjà plus de poids mais qui reste incapable souvent de par sa faible implantation d’appuyer les mobilisations sauf dans certains secteurs.

      Quand les sans-papiers se mettent en grève, un syndicat comme Solidaires même s’il est totalement impliqué est débordé et est incapable du fait du manque de militants tout simplement de faire tout le suivi que cela exige. La CGT malgré tout dispose de bien plus de militants et surtout d’un réseau bien plus étendu.

      Il est là le problème. Nous avons besoin de syndicats de masse pour pouvoir être présents au jour le jour dans les boites et des syndicats comme la CNT ont vocation à rester ultra-minoritaires et donc très peu implantés. La chute des effectifs de la CGT ne s’étant pas accompagné d’un transfert sur les syndicats comme la CNT par exemple, sa disparition n’entrainera pas non plus un transfert sur la CNT. Peut-être un peu Solidaires mais à peine. Du coups ce sera essentiellement le vide qui remplacera la CGT.

      Je ne milite pas dans un syndicat pour être en accord avec mes idées, il y a des partis politiques pour ça.
      Le syndicalisme c’est pour la défense des salariés, de tous les salariés et pas seulement des salariés dont les idées sont proches des notres et pas seulement les plus précaires. TOUT LE MONDE !
      Et pour faire ça la CNT, ce n’est tout simplement pas l’outil qu’il faut.
      Pour faire avancer les idées anarchistes peut-être (ça en fait à la rigueur un bon parti anarchiste), pour mener la bataille des idées peut-être aussi mais pour le reste, à part à la marge, c’est se condamner à l’impuissance.
      Et ça pose un vrai problème quand il s’agit d’un syndicat.

      LA DEFENSE DES SALARIES AU JOUR LE JOUR ET PAS SEULEMENT QUAND IL Y A DES LUTTES C’EST AUSSI CELA LE SYNDICALISME.

      Même si bien sûr, la bataille pour que le syndicat soit sur une orientation de classe est indispensable. Et même si le glissement toujours plus accentuée de la CGT vers un syndicalisme d’accompagnement est chaque jour plus inquiétant.

    • Mais que l’on se rassure, les travailleurs français ont en eux les moyens de changer le cours des évènements actuels.

      Alors, on s’y met quand ?

    • le CNT n’empéche pas les syndicalistes radicaux de s’engager .
      C’est certain qu’être radical à la cgt ,on est complétement noyé dans un monde sans radicalité de la part des dirigeants .

      Oui la base l’est un peu plus ,ça dépend où,par exemple au PTT c’est carrement impossible de se faire entendre sur les retraites par exemple les 37,5 ans.

      Et malheureusement c’est pas la base mais la direction qui a le pouvoir et elle s’en prive pas pour signer des accords de regréssion sociale ;
      En plus y en a un peu marre de toujours entendre qu’être peu on est inéfficace comme si le nombre des syndiqué cgt étaient la preuve d’une éfficacité ,c’est FAUX ,on l’a bien vu en 2003 et 1995 et c’est bien les militants CNT qui ont sauvé l’honneur du syndicalisme .

      je ne suis pas cnt .

      En allemagne c’est par millioàns que les prolos sont syndiqués,et qu’est ce que ça change ?

      RIEN ils sont aussi laminés que s’ils étaient duix fois moins.
      C’est l’orientation anticapitaliste qui est indispensable et là dessu la cgt a totalement failli,certes elle lutte mais ne pemrmet surtout pas que ces luttes imposent une victoire globale des travailleurs.

      je suis syndiqué sud apres avoir passé plus de 15 ans à la cgt.
      j’ai des principes ,des valeurs,si demain SUD rentre à la CES,gérent les fonds de pension,comme le fait la cgt ,si son secrétire demande un 4eme mandat je démissione.

      C’est si difficile de rester sur des bases de syndicalisme révolutionaire ?

    • Dire que la CGT est une organisation bureaucratique qui a trahi la classe ouvrière en 1968 et qui est toujours dirigée aujourd’hui par des traîtres, est-il vraiment une insulte ? Des oppositions dans la CGT il y en a eu depuis belle lurette. Et à chaque fois, bien sûr, "on allait voir ce qu’on allait voir". Rien n’a changé et les "contestaires" sont toujours repartis, fétichistes invétérés, en se disant que "ça a quand même évolué". Foutaise ! Niant un passé fait de trahison de bureaucratie, de stalinisme,ce que je trouve indigne, de la part d’un salarié français, c’est d’être adhérent à la CGT.
      "La CNT combien de divisons ?" est une formule qui fleure bon le stalinisme. Il faudrait bien sur être nombreux pour être efficaces. Et un révolutionnaire conséquent aurait beaucoup plus d’influence en restant dans l’organisation de la "force tranquille"où se trouvent les masses...
      Pipeau !
      D’abord il faudrait faire un bilan : qu’a rapporté aux masses, ces dernières années, l’action - ou plutôt l’inaction - de la CGT ? Quel a été l’apport, au fil des ans, de ces militants "révolutionnaires" qui ont lutté à l’intérieur de cette organisation ?
      Aucune organisation n’est parfaite, ni la CNT ni Sud. Mais il est normal, que face à cette trahison palpable qu’est la CGT, des salariés aient voulu lutter autrement, dans des organisations "nouvelles".
      La CNT est une petite organisation qui a néanmoins réussi à organiser sur la région parisienne un syndicat des employés du nettoyage. Parmi ses victoires la dénonciation du responsable CGT d’un syndicat du nettoyage rival, appuyé par les patrons et corrompu.
      S’appuyer sur la crainte d’être minoritaire, la crainte de ne plus "coller" aux masses ne fait ni une stratégie cohérente et encore moins une politique convaincante.

      P.S. : J’ai vécu en Seine Saint-Denis et j’ai été salarié toute ma vie. Ceux qui veulent répondre par des discours ouvriéristes vont se faire ramasser

  • Un jour, les adhérents de la CGT vireront Bernard Thibault.

    Un jour, les adhérents de la CGT choisiront comme numéro 1 Jean-Pierre Delannoy (ou Xavier Mathieu, n’importe). Bref, un jour, les adhérents de la CGT choisiront comme numéro 1 quelqu’un qui a compris la réalité du rapport entre un salarié et un patron :

    la lutte des classes.

    Tant qu’on ne regardera pas cette réalité en face, et tant qu’on n’agira pas en conséquence, on devra continuer à se fader des Bernard Thibault.

    Warren Buffett est l’homme le plus riche du monde. Dans le New York Times, le 26 novembre 2006, Warren Buffett parle de la guerre des classes :

    « There’s class warfare, all right, Mr. Buffett said, but it’s my class, the rich class, that’s making war, and we’re winning. »

    http://www.nytimes.com/2006/11/26/business/yourmoney/26every.html?_r=2&ex=1165554000&en=02ed48ae1473efe0&ei=5070&oref=slogin&oref=slogin

    Traduction :

    « La guerre des classes existe, d’accord, dit Warren Buffett, mais c’est ma classe, la classe des riches, qui fait cette guerre, et nous sommes en train de la gagner. »

    Le livre le plus important de l’année 2008 reprenait cette expression de Warren Buffett :

    « La guerre des classes », de François Ruffin, édition Fayard.

  • A part la CGT, il y a une vie... SUD, la CNT où rien n’est parfait non plus, mais où au moins on peut se sentir en accord avec sa conscience sans faire le jeu des traitres de mai-juin 1968.

  • bah, Rémy Barroux n’est pas pro-CGT, loin de là, et pousse de toute ses forces au réformisme.

    Alors, il y a peut-être à prendre et à laisser

    Notamment, il personnalise à outrance ce débat, qui n’est pas à personnifier par Thibault uniquement. Quand même, ce n’est pas B.T. qui prépare tous les textes qui sont soumis au congrès. C’est un travail d’équipe, et sauf erreur, aucun membre ne l’a critiqué ouvertement. C’est donc ce "travail d’équipe", cette impulsion réformiste qui doit être remise en cause

    B.T. se soumettrait au vote des militants si le congrès décidait d’une autre orientation, mais vu la composition du congrès, ce serait étonnant.

    J’entendais B.T. sur France Info critiquer ouvertement les "fuites organisées" en direction des journalistes. Mais qui dans son entourage proche les organise, ces fuites ? On ne peut accuser tous les journalistes de malveillance, et d’autres manipulations et commentaires fieilleux ont été organisés contre les partisans d’une CGT disons... plus "lutte de classe". Notamment, on les accuse, pour montrer combien ils seraient "ringards", de reproduire les amendements du congrès de 2006

    C’est malsain, très malsain : à la lutte des classes, on substitue la "Lutte des Places"

  • Thibault veut accélérer la mutation de la CGT

    Pour être encore mieux en accord avec Parisot , c’est ce dont elle se ventait hier au soir a la télé.