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« Le désir implique le besoin ; il est l’appétit de l’esprit, aussi naturel que la faim pour le corps »

Publie le vendredi 25 décembre 2009 par Open-Publishing
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L’APPETIT DE L’ESPRIT (1)
Réflexion pour une action de Noël

Si l’on prêtait une attention sérieuse au « made in … » des produits qu’on consomme, on considèrerait comme abusif l’emploi et invention du terme « auto »-destruction de la classe ouvrière à la mode, même avec les guillemets qu’on a pourtant, sans doute par intuition salvatrice, voulu parfois ajouter.
D’autant que sur un plan tout à fait trivial, si l’on considère le traitement réservé à la classe ouvrière et au salariat en général, on ne peut aboutir à la conclusion qu’il est auto victime du sort qu’on lui a imposé et on lui impose.

Le désir découle du besoin. Les produits de l’activité humaine ont pour but de satisfaire les désirs. Il semble pourtant qu’ils y réussissent de moins en moins. A plus forte raison lorsque la crise les affûte.

Le propre de l’humain est la capacité à se représenter son milieu et lui-même, ce qui en dernière instance est la même chose. Ce qui ne veut pas dire que ses représentations sont des calques de la réalité. Chacun sait, quelque soit la défense et l’effort qu’il accorde à juste titre aux sciences et à leurs applications, que les sens humains multipliés par les outils qui les renforcent sont encore loin de saisir l’univers ni même cette part qui lui est accessible.
Les idées, les représentations, les sentiments et de même les désirs ont une autonomie considérable et de plus en plus grande au fur et à mesure du développement de la pensée, par rapport aux conditions macro ou micro historiques qui les ont engendrées.
Cette autonomie, malgré tout relative, sous peine de conduire cette fois par contre et vraiment à l’autodestruction, trouve les conditions de la santé humaine dans l’aller retour entre l’observation et la conceptualisation.

Mais cet aller-retour nécessaire à la santé de l’individu dans son espèce et par conséquent à la santé générale de l’espèce, peut rencontrer des obstacles naturels ou des obstacles auto créés, ce qui pour l’humain est en dernière instance la même chose…(bis).

L’obstacle majeur de notre temps est exposé dans la critique de l’économie politique, pas cette réduction qui en a été faite sous forme de citations sur la plus value, ou sur l’aliénation ou sur la lutte de classe, mais dans « Le capital », tout le travail qui l’a précédé et tout le travail sérieux qui en a été engendré.

Un argument entre autre, mais majeur, bien que menacé des tares de la « citation » ou de la « formule », et qui ne peut se passer du développement et de la démonstration marxiste, c’est celui du rapport entre le désir et la marchandise.

L’humain satisfait un désir par un produit (ne pas séparer ce terme de l’action de produire au sens premier du terme). Dans le système marchand, le produit devient marchandise et dans le système capitaliste, l’intermédiaire nécessaire à l’échange marchand des produits, l’argent, devient capital, c’est-à-dire moyen d’accumulation privée, dans laquelle le producteur perd la propriété de son travail. Son travail privé, celui de l’antique producteur perd sa liberté, reste dépendant des besoins et des désirs mais ne les satisfait pas. Marx a résumé ce phénomène social par la formule de l’inversion de la circulation Argent 1-Marchandise-Argent 2 (M-A-M2) qui se substitue à Marchandise 1-Argent-Marchandise 2 (M-A-M’) primitive.

Lorsque le producteur perd toute liberté dans « le quoi et comment produire », son autonomie de citoyen est réduite à celle illusoire de consommateur. L’échange humain prend la forme mentale de la consommation sans production et la publicité en est le meilleur reflet au point d’en devenir le spectacle le plus répandu et le plus apprécié de la société humaine. Au point que les consommateurs et inventeurs de ce spectacle en deviennent tous à titres et formes divers les dupes et les victimes…en dernière instance.

On ne résout pas un problème en renforçant les causes du problème. C’est reculer pour mieux sauter…dans le vide. Tout part de l’idée que pour mobiliser il faut s’adresser aux désirs. Et pour mobiliser aux deux extrémités des préoccupations humaine : la marchandisation et la transformation sociale communiste. Mais dans les deux extrémités, la dé adhérence conduite par une autonomie sans retour entre réalité et conceptualisation, dont il est question plus haut, cette de adhérence est aujourd’hui patente.

La question est que, conscients de cette dé adhérence, nous cherchons le remède à cette dé adhérence non dans le besoin mais dans le désir. Ainsi le nœud qui étrangle l’échange, le nœud que nous donne à voir la critique de l’économie politique, nous nous le cachons et refusons même de le traiter, remettant à demain ce qui est urgent pour traiter un accessoire certes important mais dépendant de ce nœud là.
Ce n’est pas moi qui le dit. C’est Karl Marx quand il parle de la valeur, Ernst Bloch quand il oppose mesure quantitative de la valeur d’échange et humanisation de la nature, Henri Lefebvre quand il note la contradiction entre richesse du structuralisme et incapacité de synthèse, c’est Yves Schwartz quand il parle des valeurs sans dimension non reconnues dans le système marchand et dont la non reconnaissance plombe l’activité. C’est Walter Benjamin dans « Sur les concepts d’histoire », parallèle aux thèses sur Feuerbach de Marx.
Ce nœud il est temps de le mettre au centre des solutions à la crise. Parce que s’il existe sous forme lâche dès l’apparition du capitalisme, le développement que le capitalisme lui-même produit le resserre de plus en plus pour la bonne raison que ni les techniques qu’il met à notre disposition ni la globalisation à laquelle elles conduisent n’y trouvent plus leur place. Et qu’aucun retour en arrière ne peut exister sinon sous la forme de destructions qu’aucun être humain sain et sensé ne peut souhaiter.

Qu’avez vous donc à me tracasser avec cet hypothétique dépassement de la valeur me direz-vous ! Mais c’est bien sur cette démotivation d’un effort de savoir créatif au profit d’un savoir répétitif que comptent nos dominants dans leur réalisme fou et destructeur. L’humanité ne résout un problème que lorsqu’il se pose. Mais le problème majeur qui se pose aujourd’hui pour l’humanité est celui de la valeur telle qu’elle nous régit et son dépassement et sa transformation qualitative. Chaque activité humaine dans l’infinité et la diversité de l’activité est à traiter en tant que telle, mais aussi dans son contexte et par la synthèse conceptuelle correspondant au niveau synthétique de l’activité humaine réelle.
Bien sûr, pour réussir une transformation sociale, « il faut l’unité des conditions dites matérielles et des conditions dites subjectives ». Les deux sont une. Et « quelque part » si les conditions subjectives ne sont pas réalisées, c’est qu’il y a dans les choix dits matériels contradictions de la part des exploités eux-mêmes. Si c’est cela l’ « auto »-destruction, autant utiliser un autre terme qui ne jette pas la confusion entre le rôle de l’exploiteur et celui de l’exploité. Le développement inégal des multiples contradictions internes de la société avec sa « contradiction en dernière instance » ne justifie en aucun cas ce qui en définitive n’est que la condamnation du « pauvre », de sa violence et de ses incapacités. « La guerre des paysans » d’Engels et Thomas Müntzer ne s’accommoderaient en aucune façon d’un tel terme.
S’il y a bien nécessité de dépasser la « valeur », et quels que soient les « étapes », « chemins » et « autoroutes » du dépassement, on ne peut se contenter d’emprunter une voie sans définir le but à atteindre. Le but non le dogme préfabriqué. Le but qui se manifeste non « dans les têtes et en dehors des réalités », mais dans les réalités que la tête, le corps-soi auto-observe, oui, qu’il exprime par la douleur, le plaisir et le désir, mais qu’il réalise par une conceptualisation et sa mise en pratique en adhérence en aller-retour. En phylogenèse et anthropogenèse. Lacan ne dirait rien d’autre sur cette dernière chose.
Ici j’ajoute et finis par toutes mes excuses pour un ton polémique et demande l’indulgence pour mes propres erreurs…..
C’est l’espoir de Noël.

Pierre Assante, 25 décembre 2009.

(1) « Le désir implique le besoin ; il est l’appétit de l’esprit, aussi naturel que la faim pour le corps » Nicolas Barbon, cité à la première page du « capital » de Marx.

http://pierre-assante.monsite.wanadoo.fr/

Messages

  • De la theorie a la pratique,quand le desir de nouveaux rapports sociaux depasse celui de la marchandise :

    L’Assemblée des Chômeurs de Barcelone “exproprie” un supermarché de Nou Barris

    Posted By pepe On 23 décembre 2009 @ 23:04

    Un groupe de jeunes [….] a pris d’assaut samedi après-midi un supermarché de la plaza Llucmajor Barcelone en Nou Barris, et ont distribué de la nourriture parmi les habitants du quartiers. Cette action a été organisée par l’Assemblée des Chômeurs de Barcelone, et était destinée à protester contre la crise économique et l’insécurité de l’emploi.

    Vers six heures, selon le quotidien “El Pais”, une dizaines de jeunes sont entrés dans le supermarché Caprabo-Eroski de la place Llucmajor et ont rempli une dizaine de charriots avec des produits de première necessité tels que du riz, saucisses, conserves et produits ménagers . Ils sont passés par la caisse et au moment de payer ils ont annoncé qu’ils ne le ferait pas.

    La confusion a grandit quand les jeunes ont tout de suite répartie tout ce qu’ils avaient pris entre les voisins, précédemment appelée avec deux haut-parleurs dans la rue. Quelques personnes ont profité de cette situation pour sortir sans payer avec leurs achats.

    L’arrivée de la police a mis fin à l’action, laisser aller les jeunes, et donc le supermarché a put revenir à la normale. Tous les faits ont été enregistrés par les caméras de sécurité de l’établissement.

    “Exproprier un supermarché pour distribuer ce que nous produisons, entre tous, parce que nous sommes contre un système qui nous vole tous les jours avec des contrats précaires, des hypothèques, les prêts abusifs, etc », a expliqué les tracts distribués par le Conseil des Chômeurs de Barcelone-qui parmi d’autres actions a pris d’assaut la Bourse de Barcelone, par exemple – intitulé ‘Plein de paniers-cadeaux 2009 ».

    Par la suite les jeunes sont allés dans le centre de Barcelone répéter l’action dans un autre supermarché, mais la présence de policiers en civil les à décourager.

    Article printed from Des Nouvelles Du Front : http://dndf.org

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    http://dndf.org/?p=5885