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Ce que l’éthique communiste n’est pas

21 septembre 2010, 13:44, par copas

Mansoor HEKMAT dans "Le marxisme et le monde actuel (1992)

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On peut dire beaucoup de choses à propos du socialisme et de l’individu, ou plutôt, à propos du socialisme et l’être humain. Jusqu’à aujourd’hui, Marx a été le critique le plus important et le plus profond de la déshumanisation de l’humanité sous le capitalisme.

L’essentiel de la discussion sur le fétichisme de la marchandise dans le Capital consiste à montrer comment le capitalisme, la transformation de la production et l’échange de marchandises, placées au centre des relations mutuelles entre les individus, sont la base de l’aliénation et de la perte d’identité de l’homme dans la société capitaliste. Le socialisme vise à rendre une identité à l’être humain.

Le slogan « de chacun selon ses capacités, à chacun selon ses besoins » est entièrement basé sur la reconnaissance et la garantie du droit pour chaque personne à déterminer sa position dans la vie matérielle de la société.

Dans la société capitaliste, l’être humain est l’esclave de lois économiques aveugles qui déterminent son destin économique indépendamment de ses pensées, de ses raisonnements et de ses jugements.

Comme je l’ai déjà dit, dans la pensée bourgeoise, l’individu, c’est l’être humain vidé de son identité, auto-aliéné, dépouillé de toutes ses caractéristiques particulières et des qualités individuelles ; c’est un être humain qui peut donc être transformé, comme unité, en agent humain d’une quelconque relation économique, en agent de production, en acheteur ou en vendeur d’une quelconque marchandise.

C’est en fait cette société qui, de cette manière, standardise les êtres humains, et les réduit tous aux modèles définis par la division économique du travail. Dans ce système nous ne sommes pas des êtres vivants singuliers avec nos conceptions propres de la vie, avec notre psychologie, avec nos tempéraments et nos émotions particulières, mais les occupants de postes économiques particuliers. Nous sommes les agents vivants de l’échange de marchandises mortes.

Même dans nos relations intimes personnelles et émotionnelles, nous sommes d’abord reconnus par ces caractéristiques : Quel est notre travail ? Quel est notre pouvoir d’achat ? A quelle classe appartenons-nous ? Nous sommes classifiés et jugés en fonction de ce statut économique, sur la base de notre relation avec les marchandises. La société capitaliste a même donné l’image d’un style de vie à chaque groupe : ce que nous mangeons, ce que nous portons, où nous vivons, ce qui nous fait plaisir, ce qui nous fait peur, ce que sont nos rêves et nos cauchemars. Le capitalisme d’abord nous retire notre identité humaine et ensuite, nous présente l’un à l’autre avec les étiquettes économiques standardisées qu’il nous a collées.

Par contre, le socialisme est une société dans laquelle les êtres humains acquièrent le contrôle de leur vie économique. Ils sont libérés des chaînes des lois économiques aveugles et peuvent eux-mêmes définir consciemment leurs activités. La décision est au niveau de l’individu et non du marché, de l’accumulation ou de la plus value. Cette libération de l’ensemble de la société des lois économiques aveugles et la condition de l’émancipation de l’individu et de la restitution de l’humanité et des spécificités humaines de chaque individu.

L’exaltation de l’individu par le capitalismeest en réalité l’exaltation de l’atomisation de l’homme. Par conséquent, la masse humaine est tellement indéterminée et flexible qu’elle peut être jetée par-ci, par-là, selon les besoins économiques du capital.

Regarde quand est-ce que la bourgeoisie se souvient de l’individualismeet des droits individuels :

- quand elle veut contrer les tentatives d’économie planifiée qui perturbent le mécanisme du marché et impliquent des priorités sociales extra-économiques ; quand elle veut attaquer la sécurité sociale, l’instruction publique, les crèches, les services sociaux, les allocations chômage, les décrets interdisant les licenciements ; ou bien quand elle veut attaquer les syndicats et les organisations ouvrières, car ces organisations, quel que soit leur niveau, réduisent la dispersion des travailleurs et la compétition individuelle entre les vendeurs de force de travail, et de cette manière, imposent aux lois brutes du marché certaines décisions du peuple à propos du niveau de salaire, des conditions de travail, etc.

Ils se rappellent de l’individualisme et des droits individuels, juste au moment où les ouvriers et le peuple veulent exercer leur humanité et prendre les décisions économiques fondées sur des principes, des besoins humains. Cela témoigne bien du véritable sens de la primauté de l’individu dans le capitalisme.

La base du socialisme est l’être humain, à la fois collectivement et individuellement.

Le socialisme est le mouvement qui restaure la volonté consciente de l’homme, c’est un mouvement pour libérer les êtres humains des obligations économiques et de l’asservissement des moules prédéterminés de la production. C’est un mouvement visant à abolir les classes et les classifications entre les personnes, ce qui est la condition essentielle pour l’épanouissement de l’individu.