Accueil > ... > Forum 481376

La Commune  : abolition ou dépérissement de l’État  ?

19 juin 2012, 00:38, par Copas

Pour en revenir à l’article de Bensa. et à Marx, je dirai à Cops qu’il était compréhensible que Marx appréhende la Commune sous l’angle de ses formes politiques et mette de côté la question (tout aussi centrale) de la production, du contrôle et de la gestion ouvrière de celle-ci.

1871, c’est encore la naissance du prolétariat et la "grande industrie" en est à ses balbutiements, de plus dans un moment où toutes les forces sont mobilisés dans l’effort de guerre contre les versaillais, leur drapeau tricolore et leurs tueries. De plus sur une périodes (hélas) très courte (3 mois)...

Je dirai qu’il ne faut pas opposer les deux : des formes politiques démocratiques (élections) et la gestion ouvrière. L’absence d’une des deux ne peut que favoriser la bureaucratisation. la question d’une double chambre (territoriale et des producteurs) est une piste à explorer.

Hum, pour la première partie oui, Marx travaille avec ce qu’il a.

Pour le reste, la question de la gestion des travailleurs, je crains que dans le processus de transformation de la société il y ait bien nécessité de démolir bourgeoisie et son appareil d’état sans quoi il sera bien difficile de mettre le bas en haut et on risque de reconstruire l’ancien monde ou finalement des sociétés de transition vers...le capitalisme.

La gestion ouvrière est aussi affaire de votes et d’élections, mais il n’y a pas à mon sens dans le processus de changement de société pour mettre en l’air le système qui ne soit fruit de chaos et de tumulte, ni d’une bataille intense pour empêcher la bourgeoisie ou des nomenclaturas de maintenir, construire ou reconstruire leur domination. La question de la démocratie portée sous formes communale mise sur même pied que la démocratie des travailleurs fait partie des possibilités d’interventions de nomenclaturas et bourgeoisies pour se constituer et se reconstituer.

Ce débat n’est pas seulement un débat historique, et les nombreux "coups de patte" de Bensaïd nous l’indiquent.

Ca renvoie à l’appréciation du monde moderne et sa structure de pouvoir (réel) fine et complexe qui s’assoie sur un tissu productif, industriel, commercial et d’échanges, c’est là que se constitue le pouvoir de la bourgeoisie.

Je pense que dans les dérives actuelles, par exemple d’une partie du NPA, il y a une classe travailleuse qui est laissée dans un coin noir, un angle mort, la complémentarité des deux aspects, et la façon dont tu les présentes, illustrent cet angle mort, d’un côté la démocratie , de l’autre la gestion ouvrière, et ça donne des inflexions stratégiques.

Bien sur que la gestion des travailleurs doit être démocratique, on peut explorer des tas de pistes, mais en prenant attention que la reconstruction du monde nécessaire ne doit pas soumettre la classe ouvrière à un pouvoir extérieur (sinon on reconstruit la société d’exploitation).

Maintenant, juste, des tas de choses peuvent être explorées, tu parlais de contre-pouvoirs , pourquoi pas, il ne me gène pas non plus, bien au contraire que des expressions démocratiques soient construites sur la démocratie "géographique" (non construite sur les lieux de création de richesse, d’échanges, de transports, de communication, de commerces, etc).

Ce qui me gène est l’endiguement du pouvoir des travailleurs et ces endiguements précèdent souvent la violence contre-révolutionnaire.

Mais même dans les processus de renversement du capitalisme on voit bien que la maladie du camp de l’émancipation est de s’extérioriser de là où la bourgeoisie construit son pouvoir, de se promener là où elle a construit ses chausse-trappes, ses pièges, et des institutions à sa main.

Il y a bien une distinction à indiquer entre la démocratie limitée qu’on connait, du système, qu’il s’agit bien sur d’amender au maximum, mais qui n’a jamais porté d’une façon ou d’une autre un processus révolutionnaire mais a été un bras souvent utilisé pour écraser les velléités d’émancipation ET le pouvoir populaire démocratique centralisé.

L’assaut de la démocratie populaire, qu’elle se situe sur le terrain de la démocratie des travailleurs ou de celle du pouvoir populaire de forme communale révocable à tous moments, n’a pas de plan huilé et qui ne soit exempte de bruit et de fureur.

La compréhension de l’existence d’une démocratie limitée qui n’a pas à être mal traitée, n’empêche comme dirait l’autre, que, bon ou mauvais programme, ce qui manque par exemple aux grecs c’est bien des structures de pouvoir des travailleurs, sans ventriloques.

Alors que l’essentiel des forces politiques de l’émancipation se vident de leur sang au fur et à mesure qu’elles montent dans les urnes, tandis que l’en-face descend dans la rue par ses polices et ses néo-nazis pour courber la classe populaire à l’organisation de la réaction.

C’est une histoire grecque si l’on veut, et là les angles morts laissés deviennent de plus en plus grands.

Ce qui semble manquer est bien une démocratie socialiste en mouvement en construction coordonnée génétiquement capable d’unifier et parler d’une voix, demander au reste de la société de lui obéir pour casser les forces de la bourgeoisie.

C’est un aparté, mais je reste médusé parfois sur les débats mettant au centre le verbe en matière de ce qu’il faudrait faire en matière d’euro ou d’UE, d’expropriation de la bourgeoisie sans jamais traiter de la chair même, le centre du projet socialiste, la prise de pouvoir d’une classe et non de courants urniphères de celle-ci.

C’est que si la dictature du prolétariat est revisitée, il n’en demeure pas moins qu’il manque une démocratie des travailleurs se construisant autrement que dans les urnes de la démocratie limitée du système qui ne divisent pas en classes mais en partis, en votants.