Accueil > ... > Forum 25545

> La bombe atomique d’Hiroshima couverte par un brevet français ?

1er août 2005, 09:25

C’es très vrai. On pourrait aussi ajouter le nom d’Albert Einstein, qui par sa fameuse lettre au Président Roosevelt, a déclenché le projet Manhattan de fabrication de la bombe atomique. Et pourtant, quel pacifiste c’était ! Richard Feynman, Enrico Fermi aussi ont participé à la fabrication de la bombe américaine, et l’Histoire ne les retient pas (c’est le moins que l’on puisse dire) comme des guerriers assoiffés de destruction, pas plus que Werner Heisenberg, engagé, lui, en tant que scientifique allemand de premier plan, dans des recherches similaires pour les nazis.
Rappelons aussi qu’en France, Frédéric Joliot-Curie et Paul Langevin, qui avaient applaudi le progrès technique incontestable que représente l’arme atomique (et encore, il ne s’agissait que d’une bombe A, à fission nucléaire, 1000 fois moins puissante que la bombe H à fusion), ont très vite pris leur distance avec son utilisation guerrière. Joliot a toujours milité pour l’utilisation civile de l’énergie nucléaire. C’est lui qui a lancé l’appel de Stockholm en 1949 exigeant l’interdiction de l’arme atomique, "arme d’épouvante et d’extérmination des populations". "Nous considérons que le gouvernement qui, le premier, utiliserait contre n’importe quel pays l’arme atomique, commettrait un crime contre l’humanité et serait à traiter comme un criminel de guerre. Nous appelons tous les hommes de bonne volonté dans le monde à signer cet appel." 3 millions de Français signèrent l’appel, et plus de 150 millions dans le monde.
Par ailleurs, son appartenance au Parti Communiste ainsi que son refus de voir l’énergie atomique utilisée à des fins destructrices coûtèrent à Joliot son poste de premier Haut Commissaire à l’énergie atomique en 1950.
Il est facile, je trouve, de se poser en Procureur de l’Histoire, et de ne voir les évènements qu’avec nos yeux du XXIe siècle, et de condamner plutôt que de chercher à comprendre les évènements. Les recherches d’avant-guerre de Joliot et son épouse portaient sur la radio-activité (dans la lignée des travaux de Marie Curie, belle-mère de Joliot), et qu’il avait très vite compris l’énergie qu’il serait possible de tirer de ce phénomène physique. Qu’il ait envisagé au départ la bombe atomique comme un aboutissement de ses travaux n’en fait pas un salaud à mes yeux. Il y voyait le moyen de réaliser de grands travaux au service de l’humanité, pas au service de sa destruction. Comment pouvait-il savoir dès 1938-39 les dégâts humains qu’une bombe atomique de grosse capacité (ce qu’il ne maîtrisait absolument pas, n’ayant découvert qu’un phénomène physique ’de laboratoire’) produirait ? Il n’a d’ailleurs jamais été impliqué dans le projet Manhattan.
Enfin, si l’on sait depuis peu que l’armée américaine était au courant que le Japon n’avait pas besoin des explosions nucléaires pour mettre genou à terre, il n’en allait pas de même à l’époque. Après la capitulation allemande, le Japon a continué la guerre, et les Alliés faisaient (encore) front commun. Le président Truman, par l’explosion des bombes à Hiroshima et Nagasaki, a simplement ouvert la guerre froide en voulant montrer à l’URSS la force de frappe qu’il possédait. Dans un premier temps (quelques jours), que cela n’ait pas été perçu par les résistants et anti-nazis sincères (Joliot pas exemple) ne me paraît pas les condamner pour toujours.