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Des parents contre le fichier "Base élèves"

13 juin 2007, 10:46

UN TEMOIGNAGE ANONYME SUR BASE-ELEVE

Le témoignage :

Bonjour,

Je travaille pour une collectivité territoriale avec pour mission de renseigner le fichier « Base Elèves » au moment d’inscrire des enfants qui intègre une école de la commune. De part mon statut, je suis tenu par le devoir de réserve.

Cependant, je suis Papa avant tout, et à ce titre, m’inquiète sérieusement de l’avenir de mes enfants, en consultant « Base Elèves » et les dérives dangereuses que pourrait avoir cette base de données.

L’Inspection Académique de mon département a communiqué à mon service, une adresse Internet sécurisée (https), pour accéder à Base Elèves.

Ensuite, un protocole de sécurité permet l’accès au fichier concernant la commune. Ce qui m’a alarmé dans cette découverte, est que le protocole de sécurité ne remplit absolument pas sa fonction.

A tel point que je me suis amusé à tester jusqu’à quel point, n’importe quel agent de la fonction publique territoriale, pouvait avoir accès aux données des enfants et de leur famille, de n’importe quel commune. Et ainsi prendre possession de son contenu, puisque Base Elève – bien que nul en sécurité – est excellent en compatibilité. Il permet en effet d’extraire toutes les données souhaitées pour impression, ou de les sauvegarder sur un quelconque tableur.

J’ai fait plusieurs essais dans les communes de mon département. J’en ai essayé 22, et seulement 2 étaient correctement sécurisées.
Pour les 20 autres, j’avais accès libre aux informations, comme si je travaillais dans chacune d’elles.
Je me suis mis à tester quelques départements aux alentours, et heureusement, j’en ai trouvé 3 qui avait eu la conscience de bloquer un accès extérieur.

Mais, j’ai aussi trouvé 3 départements sans aucune protection.

Et tout ça pour certaines de ces communes, des villes de taille significative : La Rochelle, Toulouse, Rennes, Nantes, …

Bon, cela m’a un peu inquiété au départ, et j’ai échangé avec quelques uns de mes collègues à ce sujet. Nous nous sommes rassurés en nous disant qu’après tout, même si le protocole de sécurité était minable, j’avais pu faire mes tests parce qu’on m’avait donné la recette. Sinon, je n’y serais jamais parvenu par mes propres moyens, surtout vu mes piètres compétences en informatique.
Mais quand même, une personne plus calée, ne serait-elle pas capable de trouver cette recette en deux ou trois clics ?
Heureusement, l’adresse https elle, est assez chiadée, et ne s’invente pas. Donc, ne tombons pas dans la parano.

Jusqu’à aujourd’hui, où un de mes collègues m’a appelé pour m’annoncer qu’en moins d’une demi heure, sur un des moteurs de recherche les plus connus (ça commence par goo et ça finit par gle), en trois étapes, il est parvenu à consulter le fichier Base Elèves d’une ville de plus de 200.000 habitants.

1 ère étape : un site qui met en ligne une démo PowerPoint pour les professeurs des écoles. On y découvre tous les onglets informatiques de Base Elèves, et le détail des informations renseignées : identité de l’enfant, adresse, date de naissance, de ses parents (mariés ou pas mariés), numéros de téléphone domicile, professionnel, sa classe, le nom de sa maîtresse, le nom de son école, s’il mange à la cantine ou pas, comment il va et vient à l’école (apparemment, par défaut, c’est renseigné « seul » !!!), etc.

2 ème étape : un site qui permettrait de pratiquer et de s’exercer au renseignement de Base Elèves. J’ai essayé, je n’aboutis à rien, mais par contre, il est très proche, à quelques caractères près, de l’adresse https, sensée être confidentielle.

3 ème étape : là, cela me fait froid dans le dos, parce que c’est en tout point, l’adresse https confidentielle, fournie par l’Inspection Académique dont dépend la commune où je travaille.

J’ai trouvé sur Internet plusieurs associations, syndicats et fédérations de parents d’élèves, qui demandent l’arrêt pur et simple de Base Elèves pour les raisons suivantes : stigmatisation des enfants avec un suivi psychiatrique, bénéficiant de dispositifs personnalisés dans leur scolarisation, mis en lien avec la CAF pour la suspension des prestations sociales, repérage des enfants de nationalité autre que française, sans papier et dont les parents sont en situation irrégulière, j’en passe et des pires.

Je suis sensible à ces revendications. Mais elles sont assez politisées et porteraient pour certains à polémique. Des bulletins ont été exprimés, il y a trois semaines, la France est classée comme une démocratie, terre d’asile (doucement …), berceau des droits de l’homme (beurk). « Droits de l’homme, du point de vue de l’être humain, mais de l’enfant … ».

En revanche, l’aventure que je vous révèle, renvoie à un argument qui mettra les parents de droite et de gauche d’accord.
Si une personne mal attentionnée, aux mœurs peu recommandables, voire répréhensibles par la loi, accède aux données de Base Elèves, cela deviendrait dans le pire des cas, le supermarché du pédophile.
Il ou elle peut choisir, le sexe, l’âge, même faire une sélection par prénom.

Bref, toutes les saloperies dont nos médias font tant de presse, et qui malheureusement ont encore fait les tabloïdes dernièrement, avec cette histoire entre un belge et un français qui préparait le scénario de l’enlèvement et du meurtre d’un enfant sur Internet.
Il ne s’agit pas d’entretenir la psychose, mais je vois dans cet argument, la possibilité de convaincre largement la population, au-delà des clivages politiques.
Ce même argument serait peut être plus entendu par la CNIL, que ceux ci-dessus, faisant plus référence à une morale qu’à une idéologie.

Pour moi, mon enfant est en danger avec Base Elèves, et je compte faire mon possible pour récupérer son dossier de scolarité, pour le remplacer par un nouveau avec le moins d’info possibles, voir volontairement erronées.

Désormais mon unique but, est de militer au retrait de Base Elèves. Il y a trois semaines, si les pourcentages s’étaient inversés je suis persuadé que les arguments idéologiques auraient suffis.
Mais dans le contexte de la nouvelle présidence de John Fitzgerald Narkosy, je pense que l’agitation du spectre de la pédophilie, fera plus vite bouger les gens.

Le fond, je souhaite le partager avec le plus grand nombre. Que la forme soit anonyme, n’enlève rien au sens de cette information.

Je n’ai pas pu me renseigner correctement sur les conséquences du présent écrit, et suis bien conscient, pour qui le souhaiterait, que mon adresse IP, permettrait de me retrouver.

Bref, c’est ma première démarche formalisée et concrète, peut être ai-je encore des doutes sur sa légitimité ?

Je verrai bien fonction des réponses, j’espère quelles seront encourageantes.

Source : Réseau Résistons ensemble