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LES COMMUNISTES ET LES INSTITUTIONS POLITIQUES

22 mai 2008, 12:15, par Copas

Il y a effectivement énormément de flou avec un concept de petite-bourgeoisie formidablement élastique ....

Le moindre petit grade serrait donc un passage du prolétariat à la petite-bourgeoisie ?

J’espère que vous ne soutenez pas Cuba alors ?

Effectivement vu ainsi si on enlève les petits grades explicites et implicites (forcement) ça fait un prolétariat riquiqui.

Une fois qu’on a enlevé ces différenciations riquiqui dans la classe, la petite-bourgeoisie devient cet espèce de squelette famélique qui hante l’imaginaire de la gauche.

Ca ne signifie aucunement qu’il faille s’abstenir de changer les systèmes hiérarchiques qu’imposent la bourgeoisie dans le processus d’exploitation à l’intérieur de la classe ouvrière , ni de les révolutionner (et la révolution sera cela, renverser la pyramide de décision) mais de mettre les choses dans une perspective plus juste.

Rentrer dans la chair d’une entreprise c’est effectivement regarder son fonctionnement intime et voir les contradictions modernes s’agitant autour, entre des tâches permettant de plus en plus aux travailleurs de celle-ci d’en connaitre de fait tous les rouages (ce qui n’était pas possible il y a 50 ans ) , d’avoir un travail harassant mais impliquant de plus en plus d’initiative et d’au autre côté le désir de la bourgeoisie de conserver la pyramide autoritaire qui permet de flinguer toute attaque sur le pouvoir, toute attaque menaçant la répartition de la production de richesses.

Et surtout de conserver dans celle-ci la zone de hors-droits démocratiques qui caractérise une entreprise capitaliste (les travailleurs ont moins de droits démocratiques , moins de libertés démocratiques que les citoyens ) .

Le petit encadrement (le grand encadrement ce n’est presque rien numériquement, dans mon "entreprise" une dizaine de personnes sur 2000) là dedans n’est qu’un petit rouage pratiquement indistinct des autres travailleurs, et l’attrait du pouvoir est en fait surtout souvent la recherche (vaine) plutôt d’une liberté un peu plus grande moins soumise à une pyramide hiérarchique (aspect que les théoriciens extérieurs aux entreprises connaissent mal : le désir de liberté puissant agitant les travailleurs et s’exprimant au travers de diverses stratégies, y compris rechercher un petit grade).

La question de l’appréciation de la petite bourgeoisie m’apparait comme un concept fourre-tout bien diviseur de la classe ouvrière là où je vois des contradictions internes à la classe ouvrière.

L’augmentation radicale considérable du prolétariat dans nos sociétés comme sur la planète est une donnée moderne à mieux intégrer. C’est, si j’ose dire un des secrets politiques les mieux gardés de notre société. Trop de conscience de cet aspect risquant de susciter un tsunami de classe en cas de crise sociale avec un minimum de structuration de la classe ouvrière. D’où la sur-puissance des appareils idéologiques de la bourgeoisie.

Par contre ce sont dans les processus révolutionnaires et surtout post-révolutionnaires que l’absence d’auto-gestion avec ses organes concrets de contrôle démocratique de la production, de la répartition des richesses,de contrôle absolu sur les conditions de travail, de contrôle démocratique sur les hiérarchies ordinaires encore réellement utiles devient un véritable danger par la tendance de constitution d’une caste s’autonomisant construite sur une hiérarchie incontrôlée.

Sur la question de l’état et des institutions , les représentants de la classe qui y sont délégués sont en territoire hostile , un territoire où dans la chair des processus , les satrapes de la bourgeoisie vont sans cesse essayer d’arracher les représentants de la classe ouvrière à leur classe, en leur demandant d’assurer leurs rôles de "chefs", louant leur esprit de responsabilité (un peu comme certains bourgeois parlent de Thibaut en ce moment, sur son esprit de responsabilité , patipala....ou d’autres parlant de ministres communistes comme des gens responsables, ayant accompli de grandes choses pour un intérêt supérieur...).

Quiconque s’est retrouvé représentant du personnel dans une entreprise s’est très souvent confronté à cette offensive de la bourgeoisie louant l’esprit de responsabilité, la force de chef, du représentant des travailleurs et essayant de le mener quelque part à un rôle hiérarchique ordinaire dans l’entreprise avant de l’injurier et de le menacer si il fait rentrer le fracas de la lutte des classes sur le tapis velouté d’une salle de direction.

L’état c’est cela en grand et unifié du point de vue des représentants des travailleurs . C’est un appareil de domination. Les élus qui expriment l’intérêt de la classe ouvrière y sont d’emblée en rupture avec le rôle légal qu’on cherche à leur faire prendre (représenter une société telle qu’elle est ) et ce qui serait souhaitable (représenter le pied qui coince la porte ouverte dans l’état afin que le classe ouvrière en apprenne le plus possible).

L’état et les institutions sont des formes d’organisations bourgeoises, dans lesquelles la classe ouvrière peut peser. Mais tout cela n’a aucun sens sans une organisation de la classe ouvrière distincte, puissante, indépendante, concurrente de l’état et des institutions.

Au fur et à mesure que la classe ouvrière perdait en organisation (qui n’était pas fameuse et à repenser car elle a fourni des commis à l’état bourgeois , mais elle existait) des représentants de celle-ci se sont imaginés de plus en plus que ce qui importait était les postes dans l’état. On en connait la suite.

1981, pourquoi cela n’a-t-il pas été plus loin ? C’est que déjà depuis plusieurs années des coups sévères avaient été portés à la classe ouvrière (la défaite de la métallurgie par exemple), que la mobilisation n’y était pas , du moins elle était drainée comme un support strict et pas plus d’un gouvernement.

Alors qu’il eut fallu l’inverse : un gouvernement qui, avant d’être fournisseur de quelques conquêtes, soit appui de la mobilisation populaire.

1936 fut different radicalement de 1981 par cela justement : la force autonome de la classe ouvrière refusant d’obéir aux injonctions de calme de la part du gouvernement de gauche. Bien pire , cette victoire de 1981 presque à froid, amena rapidement les représentants de la classe ouvrière dans ce gouvernement, ainsi que leurs partis à demander aux travailleurs de ne pas gêner le travail des camarades ministres.

Qu’est-ce qui a manqué ?

Une analyse plus saine de l’état, y compris du système parlementaire et gouvernemental, comme état bourgeois. Non pas ici pour dire des gros mots et flatter un discours anti-électoraliste, mais l’incompréhension que ce qui est important c’est la classe en mouvement , indépendante et organisée démocratiquement, sans laquelle rien ne se fait, de la simple augmentation de salaire jusqu’à la bataille pour le pouvoir (réel), la révolution.

Une révolution ce n’est pas d’avoir 10 ministres communistes , 7 NPA , 3 LO et Besancenot président de la république, avec Marie-George 1er ministre, ça ce n’est rien.

C’est une classe organisée indépendamment des institutions et de l’état qui structure démocratiquement en profondeur la société et qui aspire à dominer la société afin d’enclencher le processus qui va vers la suppression des classes.

Qu’elle envoie légitimement ses représentants dans tous les recoins de la société et de l’état pour neutraliser , retourner et faire avancer les intérêts des travailleurs partout, est indispensable mais une autre question.

Qu’est ce qui manque aujourd’hui ?

Ce ne sont pas des postes d’élus comme beaucoup le pensent . Mais l’organisation large , démocratique et indépendante absolument (car elle est concurrente de l’organisation de l’état bourgeois) d’une classe ouvrière en mouvement.

Comment concrètement doit -on chercher à exprimer cela ? Par des partis révolutionnaires puissants de la classe ouvrière, par des organisations syndicales unifiées par la base et sous contrôle strict de la base (sur la base des entreprises, inter-entreprises et nationalement), par tout un tissu géographique fourmillant et ayant un puissant esprit démocratique d’associations, syndicats structurés sur la base du territoire, et enfin par la mise en mouvement de mobilisations réelles, concretes permettant de donner confiance en soi à la classe ouvrière.

La question de la présence de représentants des intérêts des travailleurs dans l’état bourgeois ne peut être abordée dans une perspective socialiste sans parler du corolaire indispensable : l’organisation opposée à l’état et ses institutions (notion fourre-tout).