Accueil > ... > Forum 309549

Occupation de Sciences Po PARIS : BRAVO !

18 mars 2009, 23:50, par sophei

Bonjour

ATTAC SCPO a effectivement sorti un tract, le voici ci-dessous. Je veux bien que tu le mettes en UNE, puisque tu l’as proposé :-)

Notre tract ci-dessous permettra de répondre à tout ceux et celles qui sont reconnaissant-e-s envers sciences po pour son "ouverture sociale" (zep, bourses etc) : il s’agit d’une politique d’investissement purement intéressée, un arbitrage du marché universitaire, en aucun cas une politique de redistribution ou de service public. Pour approfondir, voir les analyses d’Annie Vinokur (Pouvoir de décision et financement et éducation).

Je vois que tu es bien renseigné... Le titre initial devait être "Occupation de Sciences Po par des étudiants de facs : mais qu’est-ce qu’ils sont venus faire chez nous ?" Il s’agissait d’IRONIE : grossir le trait pour le ridiculiser. Il semble en effet que pas mal d’étudiants ont eu l’impression d’être envahis, dépossédés de LEUR école. Il s’agissait donc d’aller jusqu’au bout de la logique, pour leur montrer la petitesse de ce "chez nous". Montrer que les étudiants des facs ont été traité en "intrus", pour dénoncer la séparation facs/grandes écoles. Dédramatiser cette occupation, en rappelant que nous sommes tous des étudiants, et que ceux de scpo peuvent bien de temps en temps tolérer de voir des étudiants des facs s’inviter dans leur école.

L’ironie apparemment n’était pas perceptible, mais comme nous fonctionnons de manière démocratique à attac, et comme nous avons la chance d’avoir ds militant-e-s très réactif-ves, cela a pu être immédiatement discuté (ce matin), d’où la modification du titre, plus façon guerre des étoiles : "Occupation de la planète Sciences Po : Des étudiants de la galaxie des universités franciliennes... "chez nous" !". Inspiré de notre QCM sur le marxisme de l’année dernière : "Marx attaque la planète pipo".

Le tract initialement marquait davantage de distance avec l’action, notamment ses "conséquences regrettables" : cela visait essentiellement la poubelle lancée par la fenêtre, la luxation de notre responsable de la vie étudiante, et les insultes proférées à certains moments. Cela a fait beaucoup débat aussi, et le tract maintenant signale simplement que "la question des modalités d’actions doit faire débat", pour surtout mettre en avant le débat de fond. Nous ne prenons pas position sur la forme (puisque les avis sont divergents/indécis), mais sur le fond, qui est le plus important. C’est le sens de ce tract qui avait justement pour fonction de se démarquer de celui de l’unef, qui prend position sur la forme d’une façon regrettable, et surtout sans parler du message de l’action.

Sur la forme, en ce qui me concerne, je suis partagée. L’action a donné un coup de fouet aux camarades, un choc culturel et social peut-être salutaire, mais je comprends aussi l’argumentaire de l’unef, qui considère que cela a braqué les étudiants plus qu’autre chose. En fait, peut-être que cette action a fragilisé l’édifice, et nos propres positions, tout l’enjeu est d’en profiter pour essayer de reconstruire autre chose, bref la balle est dans notre camp, et l’idée de ce tract était justement de s’engouffrer dans la brèche que vous avez ouverte, pour apporter du fond.

Je sais que nous ne sommes pas d’accord. Je suis à sciences po, et je respecte mes camarades, je pense que nous pouvons et devons essayer de les convaincre. Ce serait sûrement perdu d’avance dans une école comme HEC, mais l’ouverture sociale de sciences po (pour des raisons certes intéressées) rend les choses plus possibles, et leur donne plus de sens. Et effectivement, je pense que cela peut-être utile d’avoir fait scpo, pour plus tard, pour moi, pour ma classe (comprendre : pas supérieure ni moyenne), et pour mon projet politique. C’est un certain rapport aux institutions qui est en jeu, qui je sais est très clivant à gauche. C’est ma ligne politique, qui ne vaut pas moins que la tienne, et que j’espère pouvoir te demander de respecter.

C’est pour ça que ça ne m’indiffère pas que l’action ait braqué les étudiants, et non je n’éprouve pas de plaisir à ce qu’ils aient été traité de "fils de bourges" (quoi que). La principale critique que je vous adresserai, c’est d’avoir traité l’amphi comme si c’était tous des bourgeois, alors qu’il y avait sûrement dans l’assistance des zep et des boursiers, et qui n’avaient pas à recevoir de leçon de sociologie de petits bourgeois gauchistes. Après peut-être que je m’exagère le truc, je n’y étais pas. Le fait est que les militants d’attac qui étaient présents ont bcp apprécié l’AG :)

@+

"Occupation de la planète Sciences Po : Des étudiants de la galaxie des universités franciliennes... "chez nous" !"

La contestation s’est invitée à l’IEP…

Mardi 17 mars, 17h : environ 200 étudiants et professeurs des universités franciliennes ont « investi » l’IEP pour protester contre les réformes actuelles de l’enseignement supérieur et du statut des enseignants chercheurs. Le projet des manifestants était de dénoncer le dualisme dans l’enseignement supérieur, les inégalités entre facs et grandes écoles… et d’en discuter avec les étudiants de l’IEP. Ils ont voulu organiser un débat à sujet dans l’amphi Boutmy en lieu et place du cours de M. Duhamel. Expérience controversée qui a suscité de l’émotion, quelques altercations… et beaucoup d’incompréhensions. D’un côté : des étudiants de facs qui accusent le symbole de la reproduction sociale, et des élèves de Sciences Po qui les soutiennent, de l’autre : des étudiants de l’IEP qui n’approuvent pas la critique dure de leur Ecole, ou refusent simplement les modalités d’action… et un certain nombre d’étudiants qui finalement sont partis avec leur professeur.

Facs et Grandes Ecoles : un fossé concret, des inégalités criantes

Si la question des modalités de l’action doit faire débat, on ne peut simplement ignorer son message et ce qu’elle révèle plus largement : le clivage profond qui sépare et semble maintenant dresser les uns contre les autres les étudiants des facs et ceux des Grandes Ecoles. Ce clivage s’ancre dans des réalités très concrètes : une scolarité complète dans le système des grandes écoles bénéficie d’un investissement public quatre fois plus important qu’une scolarité complète universitaire en droit ou en sciences économiques. Or, les grandes écoles sont presque exclusivement accaparées par les enfants des classes supérieures. Le taux d’enfants de cadres supérieurs ou professions libérales s’élève à 81,5% à l’IEP de Paris. Les réformes actuelles qui préparent la mise en concurrence des universités et la privatisation de leurs financements vont encore accroître les inégalités dans l’enseignement supérieur.

Sciences Po, un modèle qu’ils devraient admirer ?

Sciences Po se présente très souvent comme un modèle, à la fois en terme d’efficacité (insertion professionnelle, « image »…), mais aussi de justice sociale (ouverture aux ZEP, suppléments bourses…). Ces « réussites » reposerait sur son autonomie, sa capacité à d’adapter dans un univers de concurrence, la possibilité de moduler les droits d’inscription… En réalité, son financement privilégié, et la sélection sociale à l’entrée en sont les plus sûrs ingrédients.
Quand à l’ouverture sociale vers les ZEP, elle est évidemment appréciable, mais marginale ; surtout elle ne doit pas être confondue avec de la redistribution ou de la justice sociale : il s’agit d’une politique d’investissement dans le potentiel des élèves les plus talentueux. L’IEP a la clairvoyance de reconnaître l’intelligence dans les quartiers populaires, cela ne veut pas dire qu’il s’inscrit dans une logique de service public pour tous. Ce genre de politiques est pratiqué par de nombreuses facs américaines, et les études montrent que cela ne permet pas de compenser la privatisation des financements, de plus en plus orientés vers les classes supérieures (plus « rentables »). Sciences Po n’est donc certainement pas le modèle que l’on peut proposer à l’ensemble de l’enseignement supérieur, et la contestation de ce modèle est légitime.

Dans l’IEP, aux côtés des facs, une mobilisation à amplifier !

L’action des étudiants des facs doit nous interpeller, à Sciences Po, sur ces enjeux de financement, et d’inégalité dans l’enseignement supérieur, en même temps que le débat et la mobilisation sur les réformes actuelles de l’enseignement supérieur doivent s’amplifier. Ces réformes nous concernent également et questionnent notre position dans le système actuel de l’enseignement supérieur : à nous d’en débattre et de définir notre place dans la mobilisation actuelle !