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A. Bordiga tiré de "La doctrine du diable au corps" 1951
Publie le jeudi 3 avril 2008 par Open-Publishing1 commentaire
Extrait du texte de A. Bordiga tiré de "La doctrine du diable au corps" 1951
"Aujourd’hui
Nous ne pouvons démontrer ici que le capitalisme " parasitaire " de Lénine ne doit pas être compris au sens où le pouvoir serait davantage aux mains des capitalistes financiers que des industriels. Le capitalisme ne pouvait se répandre et s’accroître sans se différencier et sans séparer toujours plus les divers éléments qui contribuent au gain spéculatif : finance, technique, outillage, administration. La tendance est à ce que la plus grande part de bénéfice et de contrôle social échappe toujours plus aux mains des éléments positifs et actifs et se concentre dans celles des spéculateurs et du banditisme affairiste.
Nous allons donc voler de Marx à… Don Sturzo [4].
Celui-ci, avec sa prudence habituelle, s’est occupé du scandale de l’Institut National des Assurances. Ses propos sont intéressants : je ne peux pas dire ce qui se passait à l’époque fasciste car j’étais en Amérique et là, ces choses sont à l’ordre du jour et d’une tout autre ampleur ! Nous en étions sûrs. Le parasitisme capitaliste de l’Italie contemporaine surpasse celui de l’Italie mussolinienne et tous deux sont des jeux d’enfant en comparaison des manœuvres de l’affairisme états-unien.
L’INA dispose de fonds colossaux puisqu’il centralise tous les versements des travailleurs aux assurances sociales, comme d’autres instituts paraétatiques apparentés dont les sigles sont connus. Ils paient avec lenteur et une masse énorme de numéraire circule donc dans ses caisses. Il a par conséquent le droit (tout en n’ayant ni tête, ni corps, ni âme : ce n’est pas pour rien que nous sommes dans la civilisation de l’habeas corpus !) de ne pas laisser dormir une si grande richesse ; par conséquent, il place et investit. Quelle aubaine pour l’entrepreneur moderne ! Il est le capitaliste sans capital, de même que, dialectiquement, le capital moderne est le capital sans patron, acéphale.
Le mal, nous dit le sage prêtre sicilien (dont ceux de son bord aspirent tant à faire au plus tôt un éloge funèbre dithyrambique), est la formation, à l’ombre de l’INA, de trop nombreuses sociétés de complaisance.
Que sont, Kaiser, les sociétés de complaisance ? Quelques types versés dans les affaires, qui ont des bureaux luxueux et sont introduits dans les antichambres économiques et politiques, qui n’ont pourtant pas un sou à eux, ni de titre à leur nom ou d’immeubles cadastrés (ni même le loyer d’une maison : ils vivent dans les grands hôtels, connaissent à fond Vanoni [5], mais Vanoni ne les connaît pas), font le " plan " d’une affaire donnée et fondent une société dont le seul patrimoine est ce même plan. L’argent, c’est l’INA ou quelque autre organisme similaire qui le donnera en s’appuyant, s’il le faut, sur une petite " loi spéciale ", disons pour le développement de l’élevage des crabes sur les épaves de navires coulés ; problème qu’on s’empresse de mettre au rang des problèmes nationaux de premier plan, surtout si un parlementaire d’opposition fait un puissant discours contre l’inaptitude du gouvernement.
Naguère, en effet, l’entrepreneur ordinaire allait à la banque chercher des fonds à placer dans l’affaire en projet. Le banquier disait : Bon voilà, quelles sont tes garanties ? Montre tes propriétés, titres ou autres... Mais un organisme paraétatique n’a pas de ces basses exigences : le but national lui suffit et il sort ses sous. Le reste de l’histoire va de soi. Si l’entrepreneur à l’ancienne mangeait la grenouille [6] dans le cadre de son plan et de son projet de production, il était fini : son argent ne rentrait plus et il quittait, tout penaud, la classe patronale.
Notre société de complaisance, avec son brillant état-major, n’a pas ce souci : si elle attrape des grenouilles qui sont achetées par des gourmets à des prix rémunérateurs, c’est de l’argent gagné. Si par hasard elle n’en attrape pas, ou si personne n’en mange, pas de problème : des jetons de présence, des indemnités, des participations ont été encaissés et c’est l’INA qui paie pour la faillite du plan-grenouilles.
Avec ce petit exemple banal, nous avons expliqué ce qu’est le capitalisme d’État ou l’économie centralisée dans l’État : il faut préciser que la perte de l’INA est celle de tous les pauvres malheureux qui laissent dans ses caisses une nouvelle fraction du salaire quotidien.
Le capitalisme d’État est la centralisation de la finance par l’État, mise ainsi à disposition de ceux qui, momentanément, manœuvrent l’initiative des entrepreneurs. Jamais l’initiative privée n’a été aussi libre que depuis qu’elle conserve le profit et que tout risque de perte lui a été épargné en le reportant sur la collectivité.
Seul l’État peut battre autant de monnaie qu’il le veut tout en châtiant les faussaires. C’est sur ce premier principe de force que repose, dans les formes historiques successives, le procès progressif d’expropriation des petits propriétaires et de concentration capitaliste. Nous avons bien souvent dit, à juste titre, que toute économie où les entreprises ont des bilans, et où les échanges se mesurent en monnaie, ne peut échapper à ces lois.
Le pouvoir d’État prend donc appui sur les intérêts convergents de ces bénéficiaires profiteurs de plans spéculatifs d’entreprises et de leur réseau à forte liaison internationale.
Comment ces États ne prêteraient-ils pas de capitaux à ces bandes qui ne paient jamais leurs dettes envers eux mais la font payer de force aux classes exploitées en les réduisant à la famine ?
La preuve, ou si vous voulez la nouvelle preuve, que de tels États " capitalisateurs " se trouvent dans cette position de débiteurs chroniques de la classe bourgeoise, est qu’ils sont contraints d’émettre des prêts en continuant à accepter son argent et en versant des intérêts.
Une administration socialiste d’" économie centralisée " ne donnerait son aval à aucun " plan " venant de l’extérieur, de même que, d’autre part, elle ne verserait aucun intérêt. Et d’ailleurs, elle ne manipulerait pas d’argent.
Le capital centralisé dans l’État ne l’est que pour rendre plus aisée la conduite de la production en vue de la survaleur et du profit, qui reste " à la portée de tous ", c’est-à-dire à celle des représentants de la classe des entrepreneurs, lesquels ne sont plus de simples capitaines d’industrie mais des brasseurs d’affaires déclarés ; on ne produit plus de marchandises, disait déjà Marx, on produit de la survaleur.
Le capitaliste en chair et en os ne nous sert plus à rien : le capital vit sans lui, avec la même fonction mais centuplée. Le sujet humain est devenu inutile. Une classe privée des individus qui la composent ? L’État au service non plus d’un groupe social mais d’une force impalpable, oeuvre de l’esprit saint ou du diable ? Nous manions l’ironie à la manière de notre vieux Maître Karl. Nous vous offrons la citation promise :
" Le capitaliste, en transformant l’argent en marchandises qui servent d’éléments matériels pour un nouveau produit, en leur incorporant ensuite la force de travail vivante, transforme la valeur - du travail passé, mort, devenu chose - en capital, en valeur grosse de valeur, monstre animé qui se met à " travailler " comme s’il avait le diable au corps. " [7]
Il faut prendre le capital par ses cornes.
Notes
[1] It. : Don Carlo.
[2] Il s’agit de Castoriadis, fondateur du groupe Socialisme ou Barbarie.
[3] It. : intestata, verbe dont la racine est " testa ", tête.
[4] Luigi Sturzo, prêtre sicilien, fondateur en 1919 d’un parti catholique, le parti populaire italien.
[5] Politicien démo-chrétien. Il fut commissaire gouvernemental de la banque régionale d’agriculture.
[6] It. : prendere granchi, litt. : " attraper des crabes " (voir plus haut), c’est-à-dire : faire des bêtises.
[7] Souligné par Bordiga. Le passage original est le suivant : " Indem der Kapitalist Geld in Waren verwandelt, die als Stoffbildner eines neuen Produkts oder als Faktoren des Arbeitsprozesses dienen, indem er ihrer toten Gegenständlichkeit lebendige Arbeitskraft einverleibt, verwandelt er Wert, vergangne, vergegenständlichte, tote Arbeit in Kapital, sich selbst verwertenden Wert, ein beseeltes Ungeheuer, das zu "arbeiten" beginnt, als hätt’es Lieb’ im Leibe. " En transformant la monnaie en marchandises qui servent de matériaux à la formation d’un nouveau produit ou de facteurs du procès de travail, en incorporant à la choséité morte de ces dernières de la force de travail vivante, le capitaliste transforme de la valeur, travail passé, réifié, mort, en capital, valeur se valorisant elle-même, monstre animé qui se met à " travailler " comme s’il avait le diable au corps. "
Messages
1. A. Bordiga tiré de "La doctrine du diable au corps" 1951, 3 avril 2008, 13:09
Qui se cache derrière « SCIENCE MARXISTE » ?
« La théorie marxiste léniniste est la science du développement de la société, la science du mouvement ouvrier, la science de la révolution prolétarienne, la science de la construction de la société communiste » Staline (Histoire du PC d’Union soviétique)
QUI EST LOTTA COMUNISTA ? D’OU VIENT L’ARGENT ?
A la FNAC ou dans certaines librairies politiques, vous avez eu certainement l’occasion de feuilleter des ouvrages bien bâtis, cartonnés et liserés de rouge, à mi-chemin entre les célèbres éditions de Moscou et La Pléiade. Vous avez apprécié qu’on y republie les versions du Manifeste de 1848, un ouvrage du révolutionnaire Grandizio Munis (dont le principal ouvrage n’avait jamais été publié en français) et vaguement feuilleté des pensums imbitables d’un certain Cervetto et d’un Guido La Barbera (vraiment barbant). Vous avez bien lu qu’ils étaient le produit d’une maison d’édition nommée « science marxiste » apparue subitement vers l’an 2000. Vous avez bien sûr rigolé, la science marxiste n’a jamais existé, heureusement pour le marxisme. Vous avez alors pensé qu’il pouvait s’agir des produits d’une secte dinosaure maoïste quelque peu friquée. Vous vous êtes approché sans le savoir de la vérité, enfin presque.
C’est Antoine, le sympathique et compétent libraire de La brèche qui m’a mis la puce à l’oreille initialement : « étonnant la qualité de ces éditions vraiment pas chères… ». Le même genre d’ouvrage chez des éditeurs bourgeois traditionnels vaut en effet quatre fois plus !
J’ai été plus loin que le simple étonnement lambda. C’est un indice, mais pas complètement suffisant hélas, de la probité d’un groupe révolutionnaire anti-capitaliste qu’il publie à faible tirage et de moindre qualité ! Face à la classe ouvrière la source de financement doit être claire et nette ! Si on vous cloue au pilori parce que vous avez posé une question qui gêne, posez-vous la question de savoir si votre interlocuteur n’est pas un sous-marin du machin en question.
Me questionnant et questionnant autour de moi des connaissances du milieu révolutionnaire italien, j’ai repris à mon compte deux possibilités : soit les activistes gauchistes qui se cachent derrière cette maison d’édition ont trouvé le pognon dans les comités d’entreprise d’Italie (classique source d’enrichissement et de contrats juteux) où ils ont longtemps rivalisé avec les togliattistes (hyothèse très probable du milieu politique révolutionnaire italien de Battaglia à Programma), soit la police le leur a fourni (ou les deux).
J’ai aussitôt reçu d’ardentes missives me reprochant une vision policière de l’histoire ou une légèreté grave dans l’accusation. Bon dieu, il n’y avait pas mort d’homme pourtant ! J’ai donc décidé de muer en journaliste d’investigation révolutionnaire, sur la base de mes souvenirs et de recherches approfondies sur le web.
Ce qui m’avait le plus étonné fût, non pas les reproches à ma « légèreté », mais la crédulité et la déférence dont ces lecteurs faisaient preuve vis-à-vis de cet organisme qui publie un journal obscur et illisible en France comme en Italie (L’internationaliste) et dont le nom de groupe politique en Italie est, il faut le dénoncer, Lotta Comunista (on pourra enlever comunista à la fin de cet article).
Nos lecteurs français verront assez rapidement que ce bizarre groupuscule est un condensé du P.T. lambertiste et de LO par ses pratiques de racolage show business éditorial et son double langage autiste. Pour recruter il faut désormais adopter une démarche libertaire qui flatte l’individu, qui lui promet fleurette dans son quotidien minable. Ce marxisme « libertaire » qui plagie l’hypocrite démocratie bourgeoise en prétendant tolérer les différentes opinions ou sentiments côté façade mais en criminalisant tout opposant côté cour, est ce qui caractérise l’adaptation de la plupart des groupes trotskiens ou résidus staliniens à la nouvelle période. Le trotskysme à la fin du XXe siècle, veuf du stalinisme décomposé, a fait un retour à l’anarchisme si obséquieux vis-à-vis de ses personnalités et rétif à toute exigence collégiale égalitaire du devoir de rendre des comptes. Nul mieux que la secte de Lambert, le PT, ne l’a aussi bien assuré avec sa traditionnelle caution-fraction « libertaire-syndicaliste » avec Hébert & fils. On ne l’a pas bien saisi dans le milieu révolutionnaire prolétarien, mais il y a belle lurette que libertaires et staliniens marchaient main dans la main, à la Libération en France et en Italie, mais aussi dans les années Mitterrand. Ennemis putchistes de l’Octobre russe et vieilles bourriques du stalinisme se sont retrouvés finalement à l’unisson pour verser les mêmes larmes de crocodiles, dans le bourbier syndicaliste bien sûr mais aussi dans l’hystérie anti-fasciste. L’altermondialisme ridicule de la fictive IVe Internationale qui épouse tout courant d’air, le populisme racoleur de LO, l’hystérie démocratique lambertiste signent le retour à Proudhon de léninistes en peu de lapin.
UNE ETRANGE HISTOIRE OCCULTEE : LA MYTHOLOGIE D’UN CERTAIN CERVETTO
Sur Wikipédia Lotta Comunista est présenté comme un parti extra-parlementaire et internationaliste (ce qui n’est pas fait pour déplaire face à leurs confrères compromis dans l’électoralisme bourgeois) mais qui reste à démontrer. D’où vient-il ? Quel est son programme ? On le cherchera en vain derrière les icônes momifiées de Marx et Lénine.
L’histoire de Lotta Comunista et de son papy fondateur, Arrigo Cervetto (par un affidé) est par après très elliptique. On a affaire à un très classique plagia de la vraie Gauche révolutionnaire italienne (après avoir tenté de circonscrire Battaglia comunista et de s’annexer Bruno Fortichiari), où Cervetto – qui, de son vivant, avait marqué la secte par son égocentrisme comme son homologue français Lambert ou l’obscur Hardy de LO - est intronisé grand vizir à la place de Bordiga. Le credo comporte comme chemin de Damas, non pas les grandes dates de Livourne ou de Florence du PCI à la pointe de l’Internationale, mais la fameuse année 1957 où, souvenez-vous, Cervetto publia cet inoubliable texte où il découvrait l’existence de deux blocs impérialistes et une possible social-démocratisation des PC, apport inoubliable à la conscience du « parti scientifique » alors que les prolétaires italiens ne bandaient à l’époque que pour Anita Ekberg et que la sandale de Khrouchtchev résonnait sur un pupitre de l’ONU.
Au sortir de la guerre, il s’en est passé des choses dans les milieux politiques qui se disputaient le contrôle de la classe ouvrière, ou qui prétendaient s’occuper d’elle et décider de son avenir. Encore bambino, le petit Cervetto ne tombe pas du berceau dans un bain internationaliste, il joue dans les eaux de la mouvance antifasciste du PCI (Moscou-Togliatti), il manifeste avec les résistants bourgeois et staliniens (ceux-ci étant des bourgeois déguisés en ouvriers à l’époque, ce qu’il ne saisit pas encore). Si les anarchistes sont apparemment critiques de Moscou, ils mettent la main à la pâte là où c’est possible dans le syndicalisme d’Etat « en reconstruction ». Les anarchistes à la Libération n’ont pas brillé par leur dénonciation de l’antifascisme à retardement. Etre anarchiste de cœur n’était pas incompatible avec le fait d’être un dirigeant de la CGT ou de la CGIL, sans accepter la carte du parti. J’ai connu pendant trente années nombre de chefaillons CGT volontiers anarchistes et qui se foutaient de défendre l’URSS. Nombre de centres culturels en France ont subitement pris le nom de « centre Léo Ferré » !
Rien n’est très clair dans ce lointain passé brumeux et l’affidé délégué sur Wikipédia n’est pas explicite sur les virevoltes de bambino Cervetto entre anarchisme et stalinisme.
Résumons : le gauchisme cherche à percer sous la chape de plomb stalinienne, récemment coalisée avec le nazisme. Déduisons : de l’accouplement hideux du stalinisme et de l’anarchisme surgira le gauchisme des sixties. On assiste, en Italie surtout, à ce curieux mélange qui aboutit même vers 1950 à la création d’un Parti Communiste Libertaire (mais oui !) composé de résistants, de communistes critiques et de soit disant libertaires comme le puceau Cervetto. Le plumitif du web reste aussi elliptique sur la participation de son gourou décédé au PC togliattien. Il coule de source qu’il en a été membre puisqu’il est présenté comme un des leaders de la dissidence de ce PC qui donne Action comunista lequel appendice reconstructeur d’époque fait l’incroyable et impérissable découverte suivante : Staline est responsable de la contre-révolution !
Passons sur l’inoubliable année 1957, qui est le fond baptismal du cercle gênois Lotta comunista apparaît en couches en1965 avec un antistalinisme à retardement, comme la plupart des groupuscules maoïstes et trotskystes en Europe à l’époque, sous-produits du schisme Moscou/Pékin plus que de l’ébullition du prolétariat. Rien de très original. La décomposition du stalinisme produit des globules blancs néo-léninistes excités où la copie ridiculise l’original.
Un autre papy fondateur est déjà monté sur les planches, mais plus juteuses, celle du syndicalisme « de masse » (entendez les ouvriers encadrés servilement par les souteneurs de la bourgeoisie triomphante en bleu de chauffe). Lorenzo Parodi ne joue pas au dissident « libertaire » après-guerre comme son futur compère Cervetto ; il participe directement à la lutte dite antifasciste (le patriotisme relooké) et se retrouve rapidement membre de la direction nationale de la CGIL en 1956 (il fait penser à Hébert, l’accolyte anarcho-syndicaliste de Lambert du trouble PT). Il est présenté par Wikipédia comme l’auteur d’ouvrages critiques du syndicalisme… en 1989 ; il avait donc pris le temps d’être papy pour critiquer sa compromission de toute une vie. Comme son colistier le vieux Cervetto qui dénonce blocs, capitalisme inégal, capitalisme d’Etat dans des ouvrages à la fin des années 1990… Des penseurs émérites en somme qui effacent les ombres prégnantes de Bordiga, Korsch, Rühle, Damen, Munis et tant d’autres.
Il n’est jamais trop tard pour découvrir ce que d’autres ont découvert 50 ans auparavant. Mais entre le moment bizarre et peu glorieux de la fondation aux basques du stalinisme, du baiser à la résistance anti-fasciste après-coup et le langage sournois, abscons, diplomatique et inepte qui caractérise son journal dans trois ou quatre pays européens et ses éditions « scientifiques », qu’a fait le groupe Lotta comunista ?
Il ne faut pas confondre Lotta comunista avec Lotta continua groupe célèbre pour ses agitations urbaines et vivier du terrorisme gauchiste transalpin. Dans les sixties, Lotta comunista est une puce à côté des agités gauchistes flamboyant de Lotta continua. Non pas que leur idéologie soit foncièrement différente mais Lotta continua est un peu comme la LCR en France, ouvert à toutes les agitations avec de brillants jeunes intellectuels, moins prude que le cercle de Cervetto. Lotta Continua dispose d’intellectuels beaucoup plus séduisants que les vieilles croûtes Cervetto et Parodi, comme Antonio Negri et Adriano Sofri (*).
Lotta comunista n’a pas de programme affiché, il peut être résumé de la façon aussi laconique que sinistre par son plumitif près le web : « L’objectif du parti est de défendre un produit frelaté la « science marxiste » (en italien, en français, en anglais, en allemand, en russe, en grec) et de radicaliser le prolétariat urbain afin d’organiser la révolution prolétarienne ». En résumé le credo de base de n’importe quel parti stalinien ou tiers-mondiste arriéré. Lotta comunista se présente comme une formation qui a produit du matériel (théorique) depuis 1950, ce qui est tout de suite un mensonge puisqu’il n’apparaît qu’en 1965.
Dans ses balbutiements des sixties, le groupuscule Lotta comunista considère que Gênes est le centre du monde et « la pointe avancée de la reprise du léninisme en Italie ». Avec le reflux des luttes ouvrières du « mai rampant » italien de 1969, le groupe « léniniste » se trouve un autre centre d’intérêt (comme le machin révisionniste Révol. Int. en 2006) : le mouvement étudiant. Les « masses étudiantes » étaient présumées devenir les nouveaux cadres politiques dans « la bataille pour le parti léniniste ». Lotta comunista se vante encore de son action au milieu des petits bourgeois étudiants et même (ce qui est très comique) surtout dans la lutte des étudiants ingénieurs, ces trous du cul qui ont pour fonction d’encadrer le prolétariat sous le règne de la nécessité capitaliste.
Cervetto qui a pris de l’embonpoint se retrouve une jeunesse et publie une thèse renversante : « La tactique léniniste dans la crise de l’école ». Comme de bien entendu, les étudiants, ces radicaux en parole, ces comètes d’une révolution romantique, devenaient le centre névralgique du mouvement ouvrier par procuration ; quant aux profs et fonctionnaires ils n’étaient que de vulgaires parasites (convenons qu’à partir de cette théorie de rcrutement forcené, il n’était pas possible de présenter les profs comme des « frères de classe » mais comme des petits patrons à leur façon, meilleure manière de « gagner » les étudiants révoltés contre la lune).
METHODE DE TRAVAIL DE LOTTA COMUNISTA :
Sous la couverture des grands ancêtres Lénine-Trotsky et même Munis (annexé récemment et indûment, ce qui est un insulte à sa mémoire, pour faire croire à une proximité avec la Gauche communiste historique) le pape défunt Cervetto est présenté comme l’unique continuateur du marxisme vivant (il n’y a que cet imbécile de trotskien dissident de Coleman pour avaler çà) (**). Comme n’importe quel groupe stalinien d’antan ou maoïste de jadis, il se croit en mesure d’acquérir des positions de pouvoir sur le territoire italien hors de Gênes, indépendamment de la classe ouvrière, cette vulgaire masse de manœuvre future pour l’insurrection qui permettra la prise de la Poste et de la gare de Rome.
Comme attrape-nigaud pour les jeunes on a recours, comme la plupart des micro-groupes gauchistes, à l’hystérie anti-fasciste ; LC s’est démené en pétitions pour faire interdire le MSI (équivalent du FN français), succès garanti chez les potaches apolitiques.
La méthode de travail courante est celle des sectes comme LO en France ou les témoins de Jéhovah : le porte à porte ; de préférence personne seule et au chômage (je l’ai vérifié) ; LC a été alliée un temps avec les clones de LO, leur opposition ad hoc, pour faire plus libertaire, Convergences révolutionnaires.
Comme argument de colportage il est convenu de faire croire à une adhésion de Bruno Fortichiari (un des fondateurs du PC héroïque italien avec Bordiga, Damen et Perrone) même courte ainsi qu’à un rapprochement (même illusoire) du célèbre anarchiste italien Marco Ferrando (caution… libertaire anti-stalinienne frelatée).
La pratique syndicale de Lotta comunista est révélatrice de son action parallèle et souterraine parfaitement répugnante. Ils parlent pompeusement de « passer à l’étape de la conquête d’une influence révolutionnaire dans les syndicats » ; autant transformer Jérusalem en nouvelle capitale du communisme !
Un témoignage d’un lecteur français sur leur technique de marketing politique :
« Pour l’anecdote et renchérir sur le côté racoleur : je me souviens de la dernière fête de LO où nous sommes allés (sans doute en 99 ou 2000, ou peut-être 2001). Dans l’espace ultra-gauche ils avaient un stand avec leur littérature. Nous nous sommes approchés pour voir les bouquins et là il y avait une jeune femme ravissante, mais vraiment ravissante. Elle m’a fait un sourire du diable : exactement le même sourire que m’a fait Arlette quand je l’ai croisée à une manif du 1er mai et aux obsèques de Daniel Guérin. Un certain sourire de connivence...Le sourire publicitaire ! Je me souviens aussi de la première manif à Paris où j’ai vu ce groupe : ils étaient en ligne, présentant leur revue l’Internationaliste, et tous habillés avec le même costume gris et la coupe de cheveux militaire : j’ai pensé "témoins de Jéhovah".
En effet, avec le journal plaqué sur la poitrine sur les marchés, le militant donne corps à l’organisation « scientifique ». En parcourant les témoignages sur le web de bloggers lambdas ou de militants de Programma comunista (cette saloperie de Word ne cesse pas de surligner alors il n’y a qu’un seul n à comunista en italien !), il apparaît que le but est de ramasser des fonds pour publier des livres en plusieurs langues, moyen qui est apparu adéquat à la secte pour acquérir une certaine respectabilité. Ils se sont mis à éditer une compil du Manifeste de 1848 avec les diverses introductions (pour faire plus mieux que les autres). Cette republication est le clou du spectacle attrape-nigaud. Publier le Manifeste avec la compil des diverses introductions rend le document attrayant et rassemble ce qui est malheureusement dispersé ; aucun éditeur bourgeois ni stalinien ne s’est attaché par contre à une édition des œuvres complètes d’Engels qui susciterait le plus vif intérêt. Cependant, il n’y a nulle critique ni retransposition du Manifeste comme « document » dans son contexte, ce qui est la preuve… manifeste du vide théorique de nos léniniens à retardement.
LA LEGENDE LITTERAIRE CERVETTO
Après cet appel d’offre pour se légitimer face à la traditionnelle Gauche révolutionnaire italienne qui brame que la marxisme est invariant depuis ce Manifeste dépassé, ils se sont mis à publier en doublon aussi Lénine, puis Trotsky… ce qui est se ficher du monde car tous ces textes classiques sont disponibles un peu partout. Cela manifeste, en annexant en plus un ouvrage de Munis sans son avis, une volonté de phagocyter « nos » textes classiques, ce qui aboutit à ridiculiser le marxisme ou en tout cas les ferments traditionnels de la révolution. En bibliographie des éditions « science marxiste », on trouve plus ridicule en plus. Quatre livres co-présentés comme œuvre conjointe de Lénine et… « Cervetto (Que faire ? L’impérialisme, la « révolution chinoise » et « L’Etat et la révolution ». Cette dernière « caution » révolutionnaire est sous-titrée « Cervetto : La restauration de la théorie marxiste ». Dans le résumé de l’ouvrage conjoint Lénine décédé-Cervetto vivant on trouve une formule kitsch : « les géants d’Asie sont en train d’émerger et la formule l’ennemi principal est dans notre pays a désormais pris les dimensions de l’impérialisme européen ». Ce qui ne veut strictement rien dire ou pourrait laisser à penser que la formule fait de l’impérialisme européen le centre du monde ou un îlot de résistance aux « géants d’Asie » ! Après un bla-bla aussi inconsistant (repiquant les termes fleuris de Bordiga) sur le pluralisme des impérialismes avec le « ventre fertile de l’impérialisme européen » (ah ah ohé la poésie !) on apprend que : « la militance révolutionnaire se trouve face à un nouveau défi complexe. Les bases solides de la théorie marxiste de l’Etat sont des instruments sûrs pour le relever ». Il n’y a pas meilleure définition « stalinienne » de la nécessité de « relever l’Etat ». Cette pitance idéologique est justement tout le contraire du gentil pamphlet anti-Etat de Lénine écrit à deux mois de la révolution d’Octobre. On n’y trouvera bien sûr nulle analyse de l’Etat-fléau, de cet Etat moderne totalitaire qui pourrit tous les rapports sociaux et qui ne peut être conservé, même sous l’étiquette « prolétarienne » pour faire avancer la société post-révolutionnaire vers le communisme. Cervetto était un con et a enfanté des imbéciles.
REPUTATION DE LOTTA COMUNISTA
Rien ne vaut autant que de se pencher sur les blogs italiens. Il en ressort que ce sont des léninistes indigestes. Un blogger écrit que pendant des grèves à l’université, douze heures durant, il a fallu supporter la lecture de textes de Lénine par hauts parleurs. Zamboni, un chefaillon LC, lui faisait penser à Big Brother !
Un autre s’insurge : « mais leur journal est illisible, lourd, tordu, trop de réponses définitives, comme leurs éditions ils fabriquent eux-mêmes les question s ! »
Un autre encore : « Mon impression est que ce journal n’est en rien communiste et se limite à se prétendre internationaliste. Incapable d’un discours efficace, il s’efforce d’apparaître obscur. Il est impossible de rejoindre un tel parti creux ».
Face à la défense mordicus d’un affidé de LC, un autre persiste : « Vos feuilles d’entreprise ont peu d’impact… les syndicats réalisent un travail de démoralisation incitant à la passivité ».
Il faut savoir, dans le même ordre d’idée, que Lotta comunista est complice du syndicat CGIL (équivalent de notre CGT). C’est cela qui est très grave. Que cette secte roucoule pour recruter à un premier niveau « revendicatif », c’est le lot de toute organisation, mais qu’elle mène double jeu cela est carrément bourgeois ! Le but de fond est d’avoir un maximum de fonctionnaires syndicaux, ces fainéants rétribués par l’appareil d’Etat pour servir de tampons et de temporisateurs. Comme LO et nos lambertistes, vous pouvez en déduire que pour ce faire, il faut se coucher devant l’appareil syndical ; c’est-à-dire ne pas aborder les questions politiques qui fâchent (très proudhonien), cacher son appartenance. Si les zozos qui collectent des fonds pour « science marxiste » en venaient à faire les marioles même avec le langage abscons et con de L’internationaliste, ils seraient virés par les sous-fifres néo-togliattiens de l’appareil d’Etat bourgeois.
Mais il y a plus honteux encore. Lotta comunista, comme les ancêtres du PT (AJS, etc) pratique l’intimidation face aux groupes rivaux, menaces physiques, descentes de nervis ; en 2004, lors d’une réunion au cercle d’étude Labriola sur la guerre en Irak, ils surgissent pour menacer des militants démissionnaires en les traitant de « fascistes ». Battaglia rend compte de menaces troubles concernant un militant qui avait recruté une « fille », preuve qu’il y a aussi des problèmes sexuels non résolus dans la secte LC.
LC revendique encore pleinement le passé « antifasciste » de ses fondateurs et le rôle (certes mineur) de bambino Cervetto dans la Résistance. Voici le plus scandaleux, après notre note indicative sur les années de plomb. Le Monde Diplomatique s’était fait l’écho (intéressé) que « L’internationaliste », journal d’analyse marxiste (sic) ait reproduit un texte italien (de leur cru !) de 1978 qui analysait la « lutte contre le terrorisme » comme « une des conquêtes définitives de l’école marxiste » (n°20, 33 rue du sergent Bauchart 12e Paris). Le texte exact de cette lâcheté théorique est le suivant (d’après l’original dit internationaliste) :
"Dans le dernier numéro de l’Internationaliste, en relation aux prétendus "créateurs de mouvements" de l’européanisme impérialiste, nous citions l’essai qu’Arrigo Cervetto écrivit au printemps 1978 sur l’attitude théorique du marxisme vis-à-vis du terrorisme et de la violence. La lutte contre le terrorisme constitue une des conquêtes définitives de l’école marxiste, et nous pensons que, après les tragiques événements qui ont provoqué la mort de milliers de travailleurs américains et immigrés, il est nécessaire d’en rappeler le cadre théorique général. Pour cette raison, nous publions aujourd’hui une importante partie de l’essai de Cervetto qui nous semble encore pleinement d’actualité."
Le préfet de police de Gênes n’en demandait pas tant !
Au début des années 1980, la lâcheté politique de Lotta comunista est donc patente avec cette prise de position dans le même sens que les communiqués communs des PCI néo-stal, de la DC et du PS condamnant le terrorisme – qu’on peut condamner du point de vue du prolétariat mais pas n’importe comment – ni à l’unisson des partis bourgeois « contre cette grave attaque pour déstabiliser la démocratie de notre pays » !!
Je pense que mes lecteurs avaient parfaitement raison de trouver que je délirais moi-même en supputant qu’un tel groupe pourrait être financé par la police, car en effet la police serait encore plus délirante si elle finançait longtemps encore un tel ramassis d’imbécillités et de collages de mots sans queue ni tête. On lit des banalités navrantes et inconsistantes sur l’impérialisme, sur la volonté d’hégémonie européenne et le développement inégal du capitalisme à longueur de colonne. On ne s’adresse même pas aux ouvriers. La secte se parle à elle-même. Exemple, sous le titre « Tâche inédite et lutte politique révolutionnaire », un lecteur lambda peut lire ceci s’il n’est par congestionné de rire avant la fin ; (et bonne lecture !) :
« La nouvelle « tâche pratique » devient l’implantation dans la métropole européenne du parti-science (sic !) ; ce qui exige de lutter contre les idéologies de l’européisme impérialiste. La conscience des événements internationaux apportée de l’extérieur (resic) devient opposition à l’impérialisme européen. Les échéances de l’Europe, lors du processus contrasté de la centralisation politique continentale, deviennent des délais supplémentaires dont peut profiter la tentative inédite d’enraciner le parti bolchevique (ouah ouah…) La force organisée positionnée en Italie du nord – région-clé du « cœur industriel de l’Europe » - acquiert une signification cruciale pour l’avenir : là, au cours des quinze dernières années, on a pu vérifier l’efficacité du levier constitué par l’organisation léniniste ; là, on a la preuve qu’une structure selon le modèle bolchevique, à contre-courant des pratiques sociales et idéologiques à la mode, est réalisable. C’est là que le défi de la « tâche inédite » a été remporté, dans le sens où la voie est frayée, expérimentée, praticable, et qu’à partir de là il est possible de se projeter dans l’espace continental… ».
Ou de se projeter dans le premier hôpital psychiatrique… Le bureau local du CCI en Italie (Rivoluzione Internazionale) qui s’efforce de démontrer que Lotta comunista n’agit pas pour la construction d’un parti international, se trompe lourdement en prétendant remettre en place des nationalistes déguisés. Il se trompe d’abord en croyant utile de « débattre » du contenu théorique de L.C., il n’y a pas à débattre avec une secte bourgeoise sur un contenu vide. Il se trompe ensuite carrément en croyant que L.C. veut préparer sa prise du pouvoir en Italie. Au contraire la LC se ramifie, ou croit pouvoir se ramifier dans les principaux pays européens, avec des méthodes d’implantation bourgeoise classiques : comme je l’ai déjà dit, recrutement de personnes isolées (comme ils ont tenté de le faire en Russie auprès de chômeurs en leur proposant de l’argent), infiltration de syndicats… dans le but un jour de « prendre le pouvoir », à la manière d’un putsch bolchevik. Jamais des ânes pareils ne pourraient s’emparer du pouvoir, ce qu’ils cherchent avec leurs ramifications douteuses, c’est à amasser des fonds. C’est vraiment une bande de rigolos « libertariens », comme la plupart des sectes léniniennes déconfites.
Il suffit de les dénoncer au grand jour pour les réduire comme peau de chagrin (cf. voyez ce qui est arrivé à la secte de scientologie en Allemagne) ; c’est le but de cet article qu’il faut faire circuler largement. De telles pratiques indécentes de merchandising racoleur (abonnements gratuits aux plus pauvres, voire envoi d’une compil reliée de « bulletins internes », mais qui ne répondent jamais aux courriers des éléments sincères en quête d’une théorie révolutionnaire vivante) ne peuvent qu’aboutir à ridiculiser l’action propagandiste honnête de vrais révolutionnaires. Voilà du pain béni pour la bourgeoisie, et on peut en déduire, dans le marasme politique actuel, l’intérêt pour les officines secrètes d’Etat d’appuyer en sous-main ce recrutement sectaire afin de démoraliser un nombre croissant de jeunes éléments en recherche de solutions révolutionnaires en lien avec les textes classiques du marxisme (***).
UNE SEMANTIQUE DE SECTE : UN PIF LE CHIEN SOPHISTIQUE
Il est quasiment impossible à une organisation ouvrière passée à la bourgeoisie de revenir dans le camp des travailleurs, avons-nous dit pendant des dizaines d’années. C’est pareil avec tous les redresseurs, reconstructeurs, rebâtisseurs trotskiens ou pas, « Actuel Marx » ou pas, Bidet, Texier et autres WC, ils conservent de leur passage au stalinisme un langage faux, torve, pédantesque qui n’a plus rien à voir avec le marxisme vivant ni avec les soucis des ouvriers. Chassez le naturel, il revient au galop.
Le langage de Lotta Comunista est un langage stalinien, de prétendus spécialistes de la « haute politique anti-européiste », rasoir, dogmatique et sans une once d’humour. Je suis désolé pour mes lecteurs qui connaissent depuis plus longtemps que moi cette littérature, ou qui lui trouve quelque intérêt, mais il faudra me donner le mode d’emploi pour que j’y trouve goût si comme le dit la première protestation « cette organisation publie des textes importants (que nous n’avons pas fait) ».
Comme feu les partis staliniens, la lecture du journal rasoir figure au premier rang des obligations militantes et des sympathisants qui doivent non pas en disséquer le contenu fallacieux mais s’en imprégner comme « conscience scientifique ». Le lecteur se doit d’être un lecteur assidu à chaque parution, même sur les lieux de vacances, pour renforcer sa conviction et son attachement à la secte « scientifique ». Le journal est bien sûr lu à un autre niveau de maîtrise par les cadres de l’organisation « scientifique » qui puisent dans la langue de bois de secte leur substantifique « moelle ».
Comme pour l’Huma des années 1950 il est sans doute mal vu voire dangereux de lire la presse bourgeoise au risque d’y trouver des similitudes avec Le Monde diplo (repaire d’ex-maoïstes), largement « pompé » avec lequel « L’internationaliste » voudrait rivaliser.
J’ai a la bouche ce goût amer et persistant de secte « dianétique » qui espère recruter de ci de là, avec une tonalité libertaire, tel ou tel prolétaire isolé ; lequel, sans connaissance du creuset de la tradition de la véritable Gauche communiste, pourrait être subjugué par ce langage de déclassés pour devenir un « illuminé » mais certainement pas un militant révolutionnaire (ce qui n’est pas une référence en soi) ni en tout cas un individu conscient pour qui la politique est affaire de tous à partir de la logique des faits sociaux et sans ce bla-bla creux de parti-secte ou de secte-parti.
S’ils ne sont pas payés par les flics, c’est qu’ils n’en ont pas besoin. C’est en tout cas une engeance bourgeoise (comme disait mon ami Beyle en Italie dans les années 1970, et son texte est toujours sur le web) et la preuve rééditée qu’il ne peut rien sortir de communiste de l’ornière stalinienne. Ce n’est ni une anodine Sarl ni une boutique de sincères révolutionnaires, mais un ramassis de bâtards de la déstalinisation qui font leur nid dans le capitalisme libéral, et qui attendent au coin de la rue, comme tous les déchets des partis staliniens et trotskiens, dans l’espoir de reprendre du service (parasite) à la faveur du développement inéluctable de nouvelles luttes de la classe révolutionnaire, ou surtout d’en contrarier la dynamique qui est un combat pour la liberté pas pour un encadrement hiérarchique « libertaire », crépusculaire et surtout patibulaire.
(*)La police de la loge P2 va se payer le jeune normalien de Pise, Adriano Sofri en le faisant passer pour l’assassin du commissaire Calabresi qui avait torturé et tué l’anarchiste Pinelli après avoir tenté de lui faire porter le chapeau de l’attentat très sanglant de Milan en 1969, commis par un groupe d’extrême droite ami de la même loge P2 (arcanes du pouvoir anti-ouvrier très machiavélique). Dans ces « années de plomb » - où la bourgeoisie pissait dans son froc face à la résurgence internationale du prolétariat - il est certain que le comité central de Lotta continua a pris une décision dans un sens terroriste (les gauchistes en paranoïa de pouvoir ne sont pas fleur bleue) et que Sofri n’était pas partisan d’une telle solution comme les deux autres accusés par un salopard de repenti. L’Etat italien lui a fait payer pour le gauchisme lâche, comme celui de Lotta comunista qui faisait l’apologie de l’attentat comme tousles groupes léninistes peu avant, mais s’est dégonflé peu après comme on va le voir. Que le salaud Calabresi ait été descendu n’était pas une grosse perte mais pas non plus une avancée de la révolution. Contrairement à Lotta comunista, A.Sofri n’a jamais baissé culotte et toujours clamé son innocence. Il est libéré en 2006. J’ai été mêlé de près avec Anouke aux mouvements de protestation en 1970 en soutien aux anarchistes italiens injustement accusés, notamment au comité Sergio Ardau.
L’assassin de Jaurès a été tué finalement par un anarchiste espagnol, juste retour des choses, mais la bourgeoisie avait réussi à envoyer au casse-pipe des millions d’hommes et à faire payer le procès par la veuve en libérant l’assassin.
Etrange conclusion pour l’assassin de Pierre Overney, Antoine Tramoni ; il est abattu par un réseau maoïste clandestin de la Gauche Prolétarienne. La police connaît très bien ses assassins en France, mais par bonheur pour eux, ils sont devenus écrivains de salon et membres de la gauche caviar quand Mitterrand est propulsé au pouvoir. Ils ne seront jamais inquiétés contrairement à leurs homologues italiens. Le seul apport à la gauche gauchiste terroriste de Mitterrand aura été d’avoir protégé ces terroristes-là tout comme leurs confrères italiens réfugiés en France, avant que le vent ne tourne. On peut supputer de salées cuisines électorales derrière ces « facilités ». Idem pour les produits de la décomposition du gauchisme armé d’Action directe, relâchés opportunément par Tonton, mansuétude qui lui permit, à lui aussi, de muscler sa police et de faire passer pour des héros les assassins d’un général et d’un patron d’usine, actes hautement révolutionnaires… au point qu’ils ont facilité le passage à l’actuelle société humaine et communiste ! Et que les anarchistes de la mouvance FA et CNT font passer pour les derniers marxistes conséquents !
(**) Le petit commerçant Yves Coleman qui a pour base théorique la pensée antiraciste du PS et l’esprit étroit de LO est parfois magnanime même au plus profond de sa bêtise politique : « Ce groupe semble faire une fixation sur la prose et les statistiques des classes dominantes ». Un de mes lecteurs pense que : « Quant au style, oui je pense qu’il est voulu et rendu complexe exprès ». L’historien stalinien Michel Vovelle, lui, ne tarit pas d’éloges pour ses « amis » de Lotta comunista. Qui se ressemble s’assemble.
(***) Pour ceux qui persisteraient à voir dans mon enquête d’investigation une simple vision policière de l’histoire, je conseille vivement de lire le magnifique texte de Sandro Saggioro « Les dernières années de Victor Serge » (traduit et édité dans la revue Discontinuité de F.Bochet). Outre un hommage mérité à l’homme et au révolutionnaire, ce texte démontre que les maisons d’édition sont étroitement contrôlées par les Etats, et donc leurs services secrets. V.Serge ne connut que la misère de son vivant du fait de son intégrité et son refus de renier les premiers pas du parti bolchevik. Il reste un grand écrivain. Jamais ses ouvrages ne furent vraiment distribués de son vivant parce qu’il se refusait à faire l’apologie de la démocratie. Par contre les Koestler et Orwell qui avaient succombé au charme financier de l’idéologie bourgeoise, purent vivre de leurs écrits et connaître la renommée ; la CIA ou apparentés des autres pays, achetant d’office des milliers d’exemplaires ! Sans oublier qu’en face, le Komintern stalinien faisait de même pour les Barbusse, Vaillant et autres canailles.
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