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« Contrat nouvelle embauche » une régression pour flatter les instincts les plus bas !

Publie le lundi 4 juillet 2005 par Open-Publishing
3 commentaires

Sur quoi Villepin cherche t’il à jouer avec son CNE ?
« Contrat nouvelle embauche » une régression pour flatter les instincts les plus bas !
lundi 4 juillet 2005.

Le contrat Villepin sera rendu accessible le 1er septembre aux entreprises de moins de vingt salariés... Cela représente environ 98 % des entreprises et cela concerne 1 salarié sur trois (prés de 5 millions) ! Ce n’est pas rien !
D’autant que Villepin a ouvert la porte pour les autres. Le contrat « devra être évalué au fur et à mesure de sa mise en oeuvre, en liaison avec les partenaires sociaux. Nous verrons alors s’il y a lieu de l’adapter dans ses modalités ou dans son champ d’application ». En clair, ce contrat pourra être étendu aux entreprises de plus de vingt salariés : à toutes !

En fait qu’est-ce qui change avec le « contrat nouvelle embauche de deux ans » ?
Selon Villepin : « Les personnes qui seraient embauchées sous ce nouveau régime juridique bénéficieraient d’un préavis de licenciement d’une durée de deux semaines au bout de deux mois de travail ». C’était déjà le cas avant. En fait dans les Cdi « normaux », il n’y avait pas d’indemnités de licenciement avant deux ans révolus. « Au bout de six mois, la durée de ce préavis augmentera en fonction de l’ancienneté ». C’était déjà le cas avant. Il y avait une légère progressivité de préavis, même si le « préavis de deux mois » ne commençait qu’après deux ans révolus.

« En cas de rupture du contrat, l’employeur devra par ailleurs verser une indemnité au salarié. » Ce n’était pas le cas avant, seulement dans le cas d’un Cdd, c’est-à-dire d’une précarité, une « IPE » (« indemnité de précarité ») était versée, égale à 10 % du salaire brut. Dans le cas d’un Cdi, elle était déjà trop peu élevée : deux dixièmes de mois par année d’ancienneté après deux ans. De combien sera l’indemnité de contrat de nouvelle embauche (CNE) ? Si elle est plus basse, que 10 %, et plus basse que 4/10° de mois, le but visé dans ce nouveau contrat c’est aussi de baisser des salaires déjà trop bas...

« Son montant sera déterminé en fonction des salaires déjà versés et pourra être complété par une contribution de reclassement. » Qu’est-ce à dire ? Si elle est « proportionnelle » cela ressemblera à l’Ipe... De combien sera l’indemnité de reclassement ? Quels droits seront ouverts au chômage ?

Villepin a concédé un aménagement sémantique : la « période d’essai » s’appelle « période d’embauche » mais dure deux ans au lieu de deux mois. Elle est censée correspondre à « un temps de consolidation de l’emploi ». Au terme de cette période, le salarié est considéré comme en contrat à durée indéterminée.

Alors quel est le vrai but de ce CNE ?
C’est le fond de la principale mesure du Premier ministre : « permettre à l’employeur de se séparer de ses salariés en contrat de nouvelle embauche sans donner de motif » comme l’y obligeaient les régimes des CDD et des CDI.

Donc in fine, ce qu’il y a de nouveau, ce n’est pas le contrat, mais les modalités de sa rupture, il s’agit essentiellement d’un « nouveau droit licenciement » : on peut mettre dehors n’importe qui, n’importe quand, sans motif, sans procédure, sans recours !

A quel ressort cela fait-il appel vis-à-vis des employeurs puisqu’il s’agit prétendument de les inciter à embaucher ? L’employeur, on le sait, n’embauche que s’il en a besoin : qu’est-ce que le contrat Villepin lui fait comme « cadeau » pour le faire davantage ? Il l’autorise à pouvoir « foutre dehors » son salarié embauché depuis moins de deux ans sans aucun risque juridique.

C’est faire appel au pire : aux plus bas instincts ! C’est permettre la fin de l’état de droit dans la petite entreprise, c’est la destruction de la dernière et fragile barrière qui défend les droits d’un salarié : rendre impossible de faire valoir que les conditions de son licenciement étaient illégales.

Si un salarié refuse des heures supplémentaires impayées, cas le plus fréquent, il pourra être « viré ». C’est dire que si un salarié se présente comme délégué du personnel, (dans les 102 000 entreprises de 11 à 20 salariés concernées) avant deux ans, il pourra être aussi « viré ». Cela veut dire que s’il « déplait » à son petit patron, il peut être renvoyé, du jour au lendemain, sans recours... Déplaire, cela peut vouloir dire n’importe quoi, mais la plupart du temps, cela signifie faire valoir ses droits, faire valoir sa convention, faire valoir ses conditions de travail, sa dignité, refuser d’être « aux ordres ». Le patron peut lui faire faire son café, des travaux chez lui, des boulots qui ne sont pas dans sa compétence, travailler le samedi et le dimanche, rester douze heures de suite, ne pas payer ses frais, ne pas faire de syndicalisme, ni de politique, ne pas aller voter aux prud’hommes, etc... Si le salarié se plaint, hop, il est viré...

Pas besoin de lettre, pas d’écrit, donc pas besoin de motiver, pas de recours aux prud’hommes, pas d’appel à l’inspection du travail, pas de recours syndical, ça ne servira à rien.

Dés que vous enlevez la nécessité de motiver le licenciement, la zone de non droit est totale. (Soyons clairs au passage : même le fait d’être obligé de motiver un licenciement est une protection insuffisante, fragile, car il y a encore des centaines de milliers de licenciements abusifs chaque année ! Ce qu’il faudrait, c’est renforcer le droit du licenciement, pas l’affaiblir ! )

Le Contrat Villepin, comme la période d’essai, sera donc une « zone de non droits », le salarié, pendant deux ans, deux fois 365 jours, ne saura pas, chaque soir, en se couchant, s’il aura encore un travail le lendemain soir ! Il tremblera encore plus la veille du 730° jour, car, en dépit qu’il se soit « défoncé » pendant deux ans, le patron pourra le virer et en reprendre un autre...

Il pourra être « viré » même s’il a refusé de mettre sa vie en danger, (droit de retrait, conditions de travail périlleuses). Il n’aura pas de recours : parce que ce « vidage » (il faut, pour être clair, employer un autre mot que licenciement) n’a pas besoin d’être juridiquement motivé.

Ce « Cne », en dépit des protestations hypocrites de Villepin, c’est la pire des attaques contre le droit du travail.

Elle empêche tous les salariés concernés de faire valoir leurs droits tout en encourageant chez les employeurs concernés, le mépris du droit. Ils peuvent devenir librement des petits despotes assurés de l’impunité. Villepin flatte chez eux le pire des sentiments, celui de l’ignorance, celui du mépris du droit, celui de l’arbitraire ?

Car cela revient à leur dire : « avant le contrat Villepin, vous n’étiez pas libres de virer les salariés comme vous le vouliez, et c’est CELA qui vous empêchait de les embaucher. On vous a compris, on vous encourage, on le fait même par « ordonnances » : on vous fait sauter cette contrainte, on vous livre des salariés pieds et poings liés.

Ils ne pourront plus aller aux prud’hommes contre vous, vous n’aurez plus à vous justifier auprès d’eux quand vous les virerez, même pas à les regarder dans les yeux, pas besoin de les recevoir en entretien préalable, pas besoin de délai, à la seconde, faites leur dire que vous en avez assez de les voir, ils partent et pas de recours, pas de mauvaises surprises, vous en aurez fini avec eux, ils sont jetables ».

Le « contrat nouvelle embauche », c’est ça ! Villepin l’appelle cyniquement un « temps de consolidation de l’emploi » : si les mots ont un sens, consolider ce type d’ emploi, c’est démontrer sa soumission pendant deux ans, c’est accepter de renoncer à l’état de droit dans l’entreprise, c’est renoncer au syndicalisme, aux revendications, c’est se taire, ne pas déplaire, et une fois qu’on a passé le cap de deux ans, c’est consolidé, on continue pareil ?

http://www.democratie-socialisme.org/article.php3?id_article=615

Messages

  • Ce "CNE" est la pire des attaques contre le droit du travail, dit Filoche.
    En effet, qui ne le voit pas ?
    Alors, j’aimerais que l’on m’explique pourquoi il n’est pas possible d’arriver à un front uni des syndicats français face à cette "horreur" économique ?

    • Tout à fait d’accord !

      Avant le 29, alors que les partis politiques de gauche - dont certains, courageusement, en rupture avec leur propre parti - les associations telles Attac, Copernic et les citoyens de gauche de toutes origines, alors donc que toutes les forces de gauche s’unissaient dans un élan historique, se retrouvaient dans des meetings plein de chaleur et d’espoir, que faisaient les dirigeants de la CGT, de FO, de la FSU ?

      Ils se drapaient pudiquement dans le commode principe de réserve (« ah, nous, nous sommes des syndicats. Pas de politique, please ! »). En envoyant tout de même des ambassadeurs dans les meetings qui leur servaient d’alibi pour avoir un pied dedans, tout en gardant un pied dehors.

      Pourquoi ?

      Puis, après le référendum, leurs déclarations du bout des lèvres a encore refroidi les ardeurs .
      Formation du nouveau gouvernement : avènement de Villepin et de Super-Sarko, multi-casquettes lui permettant à la fois d’être juge et partie. Ni l’un ni l’autre connus pour être progressistes.
      Les syndicats protestent mollement.

      Pourquoi ?

      Sitôt après, Villepin annonce son intention de gouverner par ordonnances, comme si un temps de réflexion ne s’imposait pas, comme si les Français avaient voté massivement pour la poursuite de leur politique inique. Aucun débat, aucun dialogue. Les citoyens français nargués et superbement méprisés.
      Mais le rouleau compresseur ne s’arrête pas. C’est là qu’est sorti de la manche du gouvernement le NCE, que le RMA sera mis en place dès septembre, qu’on nous annonce encore plus de mesures répressives, que la réforme de l’Education sera appliquée intégralement voire plus, que Sarkozy, au mépris des lois de la République accuse publiquement de laxisme les magistrats, confond sciemment meurtriers d’enfant, immigrés, sans-papiers etc. J’en passe.

      Réaction des syndicats ? « Retenez-moi ou je fais un malheur. Retenez-moi, je vous dis ! »

      Pourquoi ?

      Le calendrier de privatisation d’EDF-GDF reste malgré tout d’actualité : là, se dit-on, les syndicats de gauche vont lancer un mot d’ordre clair : la France entière se retrouvera derrière ses services publics, fleurons du modèle français (soit-dit en passant, celui qui n’aurait jamais dû être démantelé). Pas du tout ! la CGT et la FSU choisissent un jour au hasard (le 21 juin, soit TROIS semaines après le référendum et en plus, à un moment où beaucoup d’enseignants sont pris par les examens et autres impératifs de fin d’année), se débrouillent pour ne pas s’entendre (on sait plus pour quelle raison) et tout ça finalement pour mobiliser du bout des lèvres dans leurs propres rangs.

      Echec de l’action. Les profs ne sont pas au rendez-vous . La CGT, comme d’hab, accuse les autres centrales syndicales. Et dans son propre camp ? Où sont les gros bataillons de la CGT ? Euh ….

      Pourquoi ?

      A quel jeu jouent donc les syndicats ? seraient-ils en train de faire sous le manteau de la politique politicienne ? des calculs sinistres ? Un pied dedans, un pied dehors...

      Qu’ils ne disent pas que les français n’étaient pas mobilisés, comme ils ont coutume de le faire : nous étions prêts à descendre massivement dans la rue dès les premières annonces gouvernementales. Cette fois-ci les électeurs ont voté avec détermination et en connaissance de cause : ils savaient exactement ce qu’ils ne voulaient pas. Il étaient prêts à entériner leur vote et à le faire respecter.
      Cela aurait été la moindre des choses que leurs propres centrales syndicales les (nous) entendent et cherchent à nous faire entendre. Oui, mais voilà ...

      Mais, POURQUOI ?

    • Bon sang, mais c’est bien sûr ! les JO !

      Ne leur avait-on pas reproché, aux syndicats, d’organiser la gabegie justement quand le CIO était en visite à Paris ? Ne leur avait-on pas même demandé, alors, de repousser le mot d’ordre de grève ?

      Les dirigeants syndicaux ne sont-ils pas partis à Singapour dans les valises de la délégation officielle pour servir de gage qu’il n’y aura pas de mouvement de grève pendant les JO (au mois d’août ?!!! ).

      Le pays entier retiendrait donc son souffle pour ne pas entraver un des événements les plus mercantiles organisés à l’échelle mondiale par les multinationales ?

      Les français qui ont en majorité dénoncé les politiques ultra-libérales le 29 mai seraient donc arrêtés en plein vol pour cette mascarade ? NOoooN !?

      Le consensus autour de cette grande foire au fric et aux stéroïdes primerait donc, à gauche comme à droite, sur la vie des citoyens ?

      J’ai bien peur que oui.

      Emcee