Accueil > D’autres mondes sont possibles

D’autres mondes sont possibles

Publie le vendredi 8 août 2003 par Open-Publishing

Larzac 2003

" D’autres mondes sont possibles "

Le rassemblement "Larzac 2003" se tiendra du vendredi 8 au dimanche 10 août, à L’Hospitalet-du-Larzac, trente ans après la première grande manifestation contre l’extension du camp militaire sur le plateau. Ce rendez-vous est organisé cinq semaines avant le sommet de l’OMC,qui aura lieu à la mi-septembre à Cancun (Mexique). José Bové, sorti de prison samedi 2 août, sera la grande vedette d’un rassemblement où les organisateurs (Confédération paysanne, Attac, Groupe des Dix-Solidaires...) attendent entre 50 000 et 100 000 personnes. Le développement des pays pauvres, l’agriculture et les OGM seront au centre des débats. Mais les récents mouvements sociaux (retraites, décentralisation, intermittents, éducation nationale) ont entraîné un élargissement des thèmes des forums.

C’est le rassemblement de tous ceux qui croient que "d’autres mondes sont possibles". Le lieu où l’on vient de France et de l’étranger pour donner la réplique altermondialiste au sommet de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), qui se tiendra du 10 au 14 septembre à Cancun, au Mexique. OAS_AD(’Middle’) ; Et le carrefour de la contestation sociale, qui, au printemps et au début de l’été, a poussé enseignants, cheminots, postiers, hospitaliers et intermittents du spectacle dans les rues. Trente ans après la première grande manifestation contre l’extension du camp militaire, les organisateurs de "Larzac 2003" attendent entre 50 000 et 100 000 personnes sur le plateau, entre le 8 et le 10 août.

La figure tutélaire du mouvement altermondialiste - José Bové - est bien là, grâce à un aménagement de peine qui lui a ouvert les portes de la maison d’arrêt de Villeneuve-lès-Maguelone, samedi 2 août. "José" s’active : entre un coup de téléphone en Inde et une réunion à la préfecture de l’Aveyron, il répond aux militants venus le féliciter de sa liberté retrouvée. Il interviendra dès vendredi lors d’un forum sur l’OMC, puis samedi sur l’agriculture. Et tout au long de ces trois journées. Car ce rendez-vous estival, c’est lui qui en a eu l’idée. "Au-delà de la sympathie viscérale que les gens peuvent ressentir pour nos idées, il y a beaucoup de pédagogie à faire", explique le porte-parole de la Confédération paysanne.

Les organisateurs du sommet - la Confédération, Attac, les syndicats du Groupe des Dix-Solidaires, la FSU, le Mouvement de l’immigration et des banlieues (MIB), Greenpeace, Droits devant !!, AC ! - ont composé un programme de forums couvrant tout le spectre de la contestation : "Ecole et marchandisation" ; "L’agriculture européenne sacrifiée sur l’autel du libéralisme mondial" ; "Libéralisation des services : une menace pour tous, des gains pour quelques-uns" ; "OGM" ; "Culture et mondialisation" ; "Intermittents du spectacle" ; "Droits à acquérir, droits à conquérir".

"Le débat sur l’OMC nous ramène à la politique économique en France et en Europe, explique José Bové. La question centrale est celle de la hiérarchie des droits entre les institutions internationales. L’OMC est en train de structurer le monde parce qu’elle est la seule institution capable de faire pression sur les Etats.

Jean-Emile Sanchez, secrétaire national de la Confédération paysanne, complète : à partir des luttes catégorielles, dit-il, "il faut construire un discours global de dénonciation et de revendications concrètes, car le lien entre les revendications du printemps et les exigences de l’OMC, c’est la marchandisation de toute activité humaine, y compris les services". Annick Coupé, elle, prend date. La porte-parole du G10-Solidaires (qui regrouppe notamment les SUD) assure que, "malgré l’échec des mouvements sociaux, la colère et la volonté de bouger restent".

Les figures du Larzac se plient aussi aux questions des journalistes. Comme Maryzette Tarlier, dont le mari, Guy, aujourd’hui décédé, fut des combats de la première heure. L’aménagement du plateau n’est pas tout, dit-elle au journaliste de l’AFP, "il y a aussi ce que nous appelons "le retour de solidarité", qui a débuté avec les paysans du Sahel et qui s’est prolongé avec la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie, la Palestine, les paysans sans terre d’Amérique du Sud". Foin du passé ! "Larzac 2003", ajoute- t-elle, s’adresse aussi "aux jeunes qui n’étaient pas là il y a trente ans".

Et ces jeunes, bénévoles, ont afflué sur le plateau pour participer aux préparatifs. Une "poussée d’énervement" a décidé Pierre, un jeune diplômé en biologie marine venu en auto-stop de La Rochelle, de s’occuper de la gestion des déchets pour son premier rassemblement altermondialiste. "Le déclic a été le mouvement contre la réforme des retraites et la décentralisation. Je suis venu chercher des contacts et des informations."

Léa, une Parisienne de 26 ans, ne cache pas qu’elle a aussi été attirée par une affiche alléchante et ses 64 groupes, dont Manu Chao. Mais ce n’est pas l’essentiel : "Je suis d’une génération qui n’est pas très politisée. J’aimerais m’engager dans un syndicat, un parti, mais je serais bien en peine de choisir lequel. Ici, j’espère affiner mes idées auprès de celles des autres. Et préparer la rentrée."

A l’autre bout du site, des militants de Résistance citoyenne plantent leur chapiteau. Pour Abdelaziz Chaambi, membre de l’association lyonnaise DiverCité et du MIB, les quartiers pauvres sont les premières victimes des "attaques du libéralisme agressif menées par les gouvernements en France et par les institutions internationales". Avant de résumer sa pensée : "On veut des gens qui produisent et qui ferment leurs gueules."

En attendant forums et débats, les organisateurs doivent gérer l’intendance. Les membres de l’association de Millau "Construire un monde solidaire" doivent d’abord créer une véritable ville, avec ses marchés et ses parkings, ses logements (campings) et son hôpital de campagne, ses chapiteaux et ses stands destinés à l’accueil de 200 associations. Il a fallu stocker 150 000 litres en bouteilles et 300 000 litres en citernes. "Avec cette température, il faut 5 à 6 litres d’eau potable par jour, prévient Benoit Tomczac, sapeur-pompier à Millau. Si 100 000 personnes viennent, on est loin du compte." Des tractations sont en cours avec la préfecture pour obtenir une "ration" supplémentaire. Les feux sont interdits et les fumeurs sous surveillance. Sous le soleil, le plateau a pris l’allure d’une steppe.

Gaëlle Dupont
 http://www.lemonde.fr/article/0,5987,3224—329952-,00.html

Sites :
 http://www.monde-solidaire.org/larzac-2003
 http://www.confederationpaysanne.fr