Accueil > Des pochoirs nazillons dans Paris

Une tribu
de Bernard Delattre, correspondant de "La Libre" à Paris
Une tribu indienne a réapparu dans les rues de Paris. On l’a constaté l’autre jour place de la Bastille, en tombant nez à nez sur toute une série de pochoirs à l’effige des apaches. En voyant ces peintures sur le macadam, on a souri. Car les apaches portent un nom très connoté dans l’Histoire de la capitale française.
A l’attention des lecteurs non-Parisiens de ce blog, signalons que, dans les années 1900, on dénommait « apaches » les bandes de petits truands des faubourgs de l’Est parisien (Belleville, Ménilmontant, etc.) qui, la nuit tombée, descendaient sur le quartier Bastille pour se livrer à tous leurs trafics. Ces « apaches » sévissaient particulièrement dans la rue de Lappe : la ruelle piétonne pas loin de l’Opéra, qui, avant de devenir si touristique voire frelatée, était autrefois très typique et pittoresque. Tomber donc, à deux pas de cette même rue de Lappe mais plus d’un siècle plus tard, sur des pochoirs célébrant les apaches, c’était plutôt amusant, pensait-on en les découvrant. Amusant ? Et bien non, en fait, pas vraiment.
En effet, renseignements pris, il apparaît que ces pochoirs indiens portent la marque… de l’extrême droite. Une famille politique qui, soit dit en passant, a toujours réalisé des scores électoraux lilliputiens dans la capitale française. Ces pochoirs sont une des traces d’un « Projet apache » mis en œuvre par des « jeunes identitaires parisiens », un groupuscule qui lutte notamment contre « l’islamisation » de l’Hexagone.
Si ces hurluberlus se réfèrent aux valeureux guerriers indiens largement massacrés lors de la conquête du Farwest, c’est parce qu’ils disent agir « par amour des nôtres, de nos aïeux, de la création, de la polyphonie du monde ». Parce qu’ils combattent « avec force et détermination tout ce et tous ceux qui portent atteinte à notre droit imprescriptible de vivre sur notre sol, selon nos valeurs et nos lois ». Parce qu’ils refusent de se considérer comme les derniers indiens « d’une réserve assiégée de toutes parts, soumise au joug de la grande surface, de la perversité, du croissant et de la bannière étoilée ». « Pour ne pas finir comme eux », proclament d’ailleurs les affiches de ce « Projet apache ». « Eux » devant sans doute être compris comme tout ceux qui ne sont pas blancs, bon croyants et propres sur eux.
Du coup, évidemment, ces pochoirs usurpant un passé si folklorique de Paris ne sont plus du tout marrants. A fortiori apposés sur le macadam d’une ville et d’un quartier qui, et c’est bien heureux, ont toujours respecté et entretenu la diversité. On n’aurait que cela à faire qu’on s’armerait illico de brosses et de savon pour aller nettoyer notre beau quartier des souillures laissées par ces nazillons.
A moins que, pour se détendre, on se replonge plutôt dans une lecture de jeunesse. On est toujours dans le registre des tribus parigo-indiennes. Mais cette fois, il ne s’agit pas de pauvres apaches détournés par des fachos mais des « Mohicans de Paris », de Dumas. Ce roman est une fresque historique palpitante. Qui, en plus, offre au lecteur le bonheur d’être interminable : l’édition Quarto publiée par Gallimard il y a quelques années fait très exactement 2.651 pages, a-t-on vérifié dans la bibliothèque avant de partir au boulot ce matin. C’est en tout cas une façon passionnante de redécouvrir de manière ludique le passé de Paris. Ce livre romançant les soubresauts et coulisses de la révolution de 1830, qui est célébrée par le monument érigé au centre de la place de la Bastille, c’est aussi une belle manière de se promener dans l’Histoire du quartier. Mais en bonne compagnie, cette fois.
– http://parislibre.lalibreblogs.be/a...

Messages
1. Des pochoirs nazillons dans Paris, 5 avril 2009, 15:00
Salut,
Je suis tombé aussi sur ces pochoirs et j’ai été bien déçu lorsque j’ai tapé "projet apache" sur g... Et oui, ce sont les jeunesses identitaires qui sont derrières ...
Dommage
J