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E tribiuté too TchézaaaRé (à dire en Anglais avec l’accent italien imité par un Français)

Publie le vendredi 26 mars 2004 par Open-Publishing

"CAMBUSE FOR CESARE" est le résultat d’un petit jeu d’écriture collectif, effectué pendant le 8e festival du polar de Valence par les Travailleurs du Noir et leurs complices auteur(e)s.
Envoyé par Patrick Cressend

E tribiuté too TchézaaaRé

(à dire en Anglais avec l’accent italien imité par un Français)

Du 10 au 14 mars dernier, à Valence France, s’est tenu la 8ème édition de la Cambuse du Noir, le festival du polar.

8ème édition, ça veut dire presque un bail. Les liens se sont tissés, l’ambiance est le plus souvent aux retrouvailles, plutôt qu’à la prise de contact… Pour nous organisateurs, certains des auteurs accueillis ne sont plus les « Ecrivains » qu’on bave devant en rêvant d’un autographe ou de leur offrir un verre pour leur dire toute notre éperdue admiration surtout que la plupart ça les gonfle c’est pas trop leur trip et, disons-le tout de go, c’est pas not’style non plus. C’est sans doute pour ça que pour nous ils font partie de la tribu cambusarde, c’est les potos qui reviennent après une longue absence. Bref, ce sont des amis. Le JB POUY, parrain very officiel de la Cambuse, avait même déclaré un jour à un journaliste qu’ici, c’était plus près de la famille que du congrès de Mormons. C’est dire.

Alors chaque année on se délecte à l’idée de se retrouver les uns et les autres. Evidemment chaque année il y a des déceptions, parce que tout le monde ne peut pas venir toutes les fois. A part JB, mais lui il a signé. Y en a qui sont presque abonnés, des piliers, on s’y attache d’autant… Parmi ceux-ci, un qui était là la première fois déjà : Cesare Battisti.

Notre ami Cesare, il n’est pas venu toutes les années, un coup pris ailleurs, un coup pas les moyens ou rien à présenter… Mais en 2004, il était sur la liste, y avait un truc prévu avec lui au CRAC, le cinéma, une sorte d’invité d’honneur.

Le lapin qu’il nous a posé nous a paru particulièrement myxomatosé, avec les yeux injectés de haine. Il avait le DROIT d’être là, comme ailleurs d’ailleurs, et on le lui a refusé.

Alors on lui a gardé sa place, on a placé ses bouquins, et on a mis la pétition à côté. Les auteurs qui avaient pu venir avaient beau être serrés (c’est pas super-grand ici), ils lui ont laissé une grande place. Et puis on a pas mal parlé de lui. De ce qu’est l’engagement d’un pays. De ce qu’est l’état de droit, la démocratie, tout ça. Enfin, tout ça, on en parle chaque année, mais là, on avait un nom à mettre dessus.

On a eu envie de marquer le coup, de dire notre soutien d’une façon un peu plus durable que ces paroles. Comme on avait, sous la main, plein de types qui passent leur temps à écrire, et dont environ cent un pour cent partageait notre point de vue sur cette question, on leur a demandé à chacun d’écrire quelque chose. Genre cadavre exquis, avec Cesare dans le coin de la plume.

Aucune prétention littéraire, juste une envie de dire à qui on pense en ce moment.

C’est ce que vous trouverez ci-dessous.

Les Travailleurs du Noir.

Il fait un temps de chien, la chapelle est pleine, et nous bavardons, de toi, de l’air du temps, entre désespoir profond et optimisme de la volonté. Ta place est gardée ici, pour l’an prochain.

En espérant que le 8 avril prochain, tu t’élanceras pour un tour de France sous le signe de la liberté et de l’amitié… Tous t’attendent à Valence !

Et ceci s’appelle un cadavre exquis… Dont l’Etat, charognard, vient manger les lambeaux du passé… Viva la figua, amigo !

Un auteur passe, et un suivant et un autre. Cesare Battisti : cause efficiente, moteur, aboutissement. Et bientôt, liberté rendue à elle-même.

Salut Cesare. Puisque que tu hais la Raison d’Etat…

A vingt ans tu avais raison ;

A presque cinquante tu es la raison.

Fraternelle amitié.

Je regarde la place vide où tu devrais être… Et je la trouve vide. Je ne sais pas ce que fera le pays où je vis. Chez moi (chez nous), ton assiette est mise.

Cher Cesare, l’an dernier nous avons voyagé ensemble. J’imagine que tu serais de nouveau ici cette année. Le principal c’est que tu es toujours en France et libre. Car c’est une question de justice. A toi.

On se retrouvait d’année en année. L’idée du plus jamais est inacceptable. Pas seulement pour l’amitié. Pas seulement pour Cesare. Pour nous tous. Pour la parole donnée et que l’état de droit reste plus fort que l’état policier.

Ca me fait plaisir de te savoir « libre » ; tout simplement.

La lutte continue… Et les espoirs aussi. Salut.

Cesare, Cesare, c’est un prénom triomphal, ça. Alors, à bientôt pour le fêter, le triomphe de César ! Et cette fois, ce ne sera pas au buffet de la gare de Lyon un jour sans train. Amitiés, je t’embrasse.

C’ero anch’io… Con affetto, memoria e volontà. Auguri. Baci. Vita.

Oh Cesare ! ! Tu me manques, tu nous manques !

Avanti Cesare, a la riscossa. Cambuse un jour, Cambuse toujours, mais Cambuse sans toi pas pareille. On t’attend, putain, t’es encore en retard, Cesare ! T’es ici chez toi, tu le sais, t’es notre Italie à nous, Italie de plomb, Italie de plume. Bello ciao !

Tout commence et tout, j’espère, ne finit pas par les chansons - les chansons, l’air du temps, refrain qui souvent fait bouger les choses, qui nous fait nous souvenir et nous bouger… J’entends ta petite musique, l’accent que me rapporte le vent transalpin. Elles sont là, si proches, ces montagnes. Tu n’as pas le droit de les franchir, et elles deviennent aussi nos frontières.

La ligne blanche, toujours la ligne blanche. Ces putains de lignes blanches. Sans la paille, bien sûr. Cela dit, il faudra bien un jour que tu passes ton permis. De façon à avoir au moins dix points. Ca peut servir, dix points, on ne sait jamais… Se les faire enlever, c’est très con… Même s’il y a toutes les raisons, les mauvaises raisons… Ils nous en veulent, tant pis pour eux.

On a cru être débarrassé d’eux, mais ils sont revenus par la fenêtre. A force de croire toutes les portes fermées, nous avons respiré trop fort. Notre souffle a fait bouger les rideaux… C’est peut-être pour ça qu’on a été découverts. Ou alors parce qu’Eva a poussé un petit gémissement, je ne sais pas. Toujours est-il que Carmelita s’est tournée vers la fenêtre, et qu’on a eu vachement peur. Car derrière la vitre venait d’apparaître une face livide, aux yeux exorbités, à la bouche écumante. « Un vampire ! » S’écria Monsieur le Curé. Enfin du rouge, du vrai… Mais quelle heure est-il ? Il ne va pas officier tout de suite. J’ai le temps… De me mettre à table, le temps de manger, de roter… Et même d’aller voter.

Non, je n’avais même plus le cœur à ça ! Pourtant, mon défunt père, militant du PCF, m’avait fait jurer sur son lit de mort, que j’irai, quoi qu’il arrivât, glisser un bulletin dans l’urne… Mais aujourd’hui, non ! C’était plus fort que moi. J’ai enfilé mon pardessus, j’ai mis le flingue dans ma poche et je suis sorti. Je me demande encore pourquoi je suis passé à l’acte ; un dégoût de quelque chose, une haine, un amour, une envie, tout se mêle…Je ferme les yeux. La mémoire s’envole et les idées, lentement, s’organisent autour d’un retour à la vie impossible. L’air vient à me manquer… Dans ce genre de cas, pas la peine de s’en remettre à toutes ces conneries de fierté guerrière. C’est au choix : on sauve sa peau ou on sauve sa morale. Alors je me mets à pleurnicher, et quand le gars arrive au bout de sa surprise, je lui balance un coup de pied dans les roubignolles… Pour lui remonter les boules à la gorge, afin qu’il sache ce que c’est que d’avoir les glandes… Pour un poto couillu.

La sève avait monté, lentement, irrigué tout le tronc, dispensé la vigueur. A l’arbre il avait poussé des couilles (en premier), des bras-branches, puis une vaste chevelure-frondaison, disant combien - désormais - l’arbre se retrouvait tranquille, sage, sage, serein. Paisible. Et c’est alors, Nom de Dieu, que la tempête s’amène. Avec les tronçonneurs.

Cesare Battisti. Histoire de l’Arbre… Mais dans quelle branche, vieille branche ? Arborescence… Et le cocktail est Molotov ! Molotov, saint patron de la nouvelle Eglise Orthodoxe en lutte contre la suprématie romaine… Car en vérité, je vous le dis, Dieu reconnaîtra les chiens (à condition que la caravane passe)…

« Cave canem », prenez garde au(x) chien(s). On le lisait à Pompéi, on l’a oublié à Paris. Et les chiens n’ont pas aboyé, et les chiens t’ont emprisonné… Aujourd’hui, ne dormons que d’une oreille car « le sommeil de la raison engendre les monstres »… Ils sont là, tapis, parmi nous, à nous épier, nous guetter. On ne sait pas qui ils sont, aucun signe distinctif. Rien de tangible. Juste une _expression, peut-être, au coin de la bouche, délitée dans la commissure. « On vous aura… » Je ne sais si vous m’aurez mais je n’ai pas plus de goût pour les auréoles que pour le sacrifice… Y compris humain. Quoi qu’il en soit et qu’il arrive je ne renierai pas mes rêves car ils sont aussi les vôtres… On les aura ! ! ! …Dès qu’on aura réglé ces problèmes de circulation, Ile-de-France variqueuse, frontières thrombotiques, république à caillots, démocratie à la phlébite, on les aura, tous ces moments de liberté, ces cambuses enfin pleines à craquer - faut dire que le roman s’il manque un auteur, même qu’un seul, c’est comme un arbre auquel il manque une feuille. Et quand l’arbre perd une feuille, c’est le commencement de l’hiver…

Gérard ALLE, Claude AMOZ, Annie BARRIERE, Hafed BENOTMAN, Thierry CRIFO, Philippe DEBLAISE, Pascal DESSAINT, Alexandre DUMAL, Allassane FINGERWEIG, Katherine FRADIER, Alain GAGNOL, Pascal GARNIER, Sylvie GRANOTIER, Frédéric HOUDAER, François JOLY, Kynndylan, Jean-Claude LECOQ, Dominique MANOTTI, Laurent MARTIN, Roger MARTIN, Bernard MATHIEU, Francois MURATET, Patrick PECHEROT, Jean-Bernard POUY, Thierry REBOUD, Christian ROUX, Rina SAN TORO, Alain VINCE.