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Eco-simulacre : qu’ils mangent du pétrole !

Publie le vendredi 25 mai 2007 par Open-Publishing
4 commentaires

de Marie Bové

Roulez bio avec une pastille verte ! Sincèrement angoissés par le réchauffement climatique, les candidats au trône carburent au bio. Discours durable ? Le temps que les lobbies pétrolier et agricole se paient une virginité sur le dos des morts de faim.

LA COURSE AU PÉTROLE VERT est lancée. Chez les poids lourds de la présidentielle, les biocarburants font l’unanimité, histoire de racoler les bobos tendance nature. Chez les blouses blanches, on est à fond pour tester le procédé à grande échelle en avalisant la transformation industrielle du maïs ou du soja en éthanol. Mais voilà : un litre de pétrole vert réclamerait un litre de pétrole fossile et beaucoup trop d’hectares pour satisfaire toute la demande... Du coup, les labos s’orientent vers les algues et les champignons ! Le projet européen Nile expérimente le modelage des génomes de champignons filamenteux, de l’éprouvette jusqu’aux essais moteurs. Les accords entre le Brésil et les États-Unis pour l’exploitation de trente millions d’hectares de canne à sucre sont déjà signés. Total, Ford, Dreyfus et Monsanto passent à l’attaque pour rafler le marché de l’éthanol et du biodiesel. Qui l’emportera ?

Nicolas Hulot, l’anesthésiant du débat politique, a mis de l’huile dans le moteur. Du coup, les candidats roulent sur un 2-temps : climat d’insécurité et insécurité du climat. Au chapitre Énergie et Transports du programme des quatre principaux candidats ? Un simple copier-coller des directives économiques internationales. Ségolène rabâche le rapport du 10 janvier de la commission européenne. Il faut " anticiper l’épuisement du pétrole en soutenant massivement les énergies renouvelables et encourager les contributions des agriculteurs à la fourniture d’énergie ". Même purin pour Le Pen, qui annonce " la substitution, à hauteur de 10 %, des importations de pétrole par les carburants verts ". Côté Bayrou, rien de nouveau sous le soleil : " Taxation "progressive" des énergies fossiles ". Quant à Sarkozy, l’épuisement des sols, connaît pas : " L’agriculture a une carte à jouer car les biocarburants sont de nouveaux marchés solvables " ! L’écologie est absente de son abécédaire. Belle leçon d’hypocrisie ! Ces programmes aux allures publicitaires servent tout au plus de témoins de mariage aux industries agricole et pétrolière.
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Utilisé dans la fabrication de l’éthanol, le sucre est un enjeu exemplaire. Les pays de l’Union entendent en importer à moindre coût en sortant vainqueurs du cycle de négociations en cours à l’OMC. L’affaire est trop juteuse pour s’attarder sur les impacts environnementaux et sociaux de l’agriculture intensive. Robert Louis-Dreyfus prend les devants avec sa filiale LD Commodities. Pas étonnant que l’Olympique de Marseille souffre d’obésité : RLD est le n°2 du sucre et de l’éthanol au Brésil. Un pactole de 1,9 milliard de dollars en 2006, grâce à l’implantation de cinq nouvelles usines. Les trusts semenciers s’arrachent les brevets. Après le scandale des OGM dans l’alimentation, Monsanto se reconvertit dans les biocarburants.

Mais comble de malchance, son maïs montre des faiblesses de rendement en éthanol ! Alors la firme s’est trouvé un complice en destruction massive. En août dernier, le géant vert a signé un partenariat de trois ans avec Sandia National Laboratories, du groupe Lockheed Martin, spécialiste des projets militaro-nucléaires US. Les marchands de canons sont de la partie, et rien de contre-nature là-dedans. Après tout, Monsanto fabriquait déjà le fameux Agent orange, un herbicide plutôt guerrier dont plus de 41 millions de litres furent déversés sur le Vietnam.
" Les carburants végétaux ne sont ni verts, ni bios, ni équitables. "

Plus près de chez nous, les rois du pétrole jouent des coudes. Shell, BP et Total se partagent le butin et redorent leur blason en proposant des carburants verts à la pompe. Quant à l’industrie automobile, elle n’a pas manqué le rendez-vous du salon de l’agriculture 2007. Dans le hall 2, ils étaient presque tous là : Peugeot, Ford, Renault... Dans cet univers merveilleux, les favoris à la présidentielle participent cheveux au vent à la foire aux mensonges. Et ce malgré le cri d’alarme de l’association Kokopeli : " Les carburants végétaux ne sont ni verts, ni bios, ni équitables. " Des villages d’indigènes colombiens ont été rasés et leurs terres confisquées : des champs de palmiers à huile ont pris leur place pour fournir du biodiesel.

Au Brésil " 200 000 migrants coupent à la machette la canne à sucre, douze heures par jour et pour un salaire de misère. La nuit, ils sont entassés dans des baraquements sordides. Tous les ans, des migrants-esclaves meurent de chaleur ou d’épuisement ". Le professeur Pimentel conclut que la production des biocarburants, gourmande de charbon et de pétrole, réchauffe davantage la planète que l’essence ! Transformer des aliments en pétrole... Les présidentiables s’en tamponnent d’autant plus volontiers que ça paye au contrôle d’Alliance pour la Planète, la popote à Hulot qui distribue les bons points : 16 sur 20 pour Royal et 13 sur 20 pour Bayrou. Fidel Castro, en congé maladie, a quand même rendu sa copie lors des négociations latino-américaines en déclarant que les biocarburants condamnaient trois milliards de personnes à mourir prématurément de faim ou de soif. Si cela arrivait, quelle note Hulot mettrait-il aux génocidaires bio ?

Marie Bové

Article publié dans CQFD n° 44, avril 2007.

Messages

  • Une seule solution : mettre du sucre dans tous les réservoirs et partir à pied !
    La planète se portera mieux et les producteurs de canne à sucre alimenteront ensuite les humains.

  • Tous repentis les gouv. Cela fait sourire même un 4x4 !! Mais mieux tard que jamais avec les hypocrites !!

    Quand au pétroliers chacun sait leur historique et à chacun d’agir aujourd’hui en connaissance de faits. Total avec ces 12 milliards de benef peut s’offrir une belle façade un beau lifting de quoi cacher le pollueur-arnaqueur car, derrière le business du profit pour ses actionaires faisseurs de guerres entre autres il n’y a rien d’autre que du profit.

    Les autres c’est dire les politiques ce qui revient à la même sauce ragoutante, d’un coup veulent rattraper 20 ans d’ineptie géante avec des ministres tellement dociles qui n’ont même pas le courage de voter les bios (en toute leurs splendeur !) et interdire les OGM, certains hiper dandereux pour tous !! En réalité s’il devrait avoir une putain de justice un jour il serait temps de les juger un par un ou en troupe, comme les maffiosis italians. Car ils ont caussé des dommages à la société comme les maffiosis, des mort, beaucoup des morts comme les soldats américains envoyés par un des maffiosis, et maintenant des pertes colosales à niveau économique....comme les maffiosis, quoi.

    En fait il faudrait les faire manger de la merde, plutôt, le pétrole est trop chér !!!!!

  • Les dirigeants européens ne manquent pas d’air ! Barroso dans un discours enflammé le 24 mai prétend que la croissance n’est pas l’un des facteurs du désastre écologique qui nous attend. Ce qui me fais hurler car c’est bien la croissance exponentielle qui nous a amené à la situation actuelle. Un court passage de ses propos suffit pour comprendre l’état d’esprit des instances européennes.

    ..... il faut que l’Union européenne donne l’exemple. D’une part, nous
    devons démontrer que nous pouvons réduire nos émissions de gaz à effet de serre
    tout en dynamisant notre croissance économique. D’autre part, nous devons
    renforcer sensiblement notre coopération avec nos partenaires du monde entier
    pour développer et appliquer de nouvelles technologies à faible intensité de
    carbone.

    De plus, il confirme la consultation public, dont je fais ici la copie du texte afin que chacun et chacune prennent conscience de la dangerosité de la généralisation des agro-carburants. Que d’ailleurs ils baptisent pompeusement biocarburant, appellation usurpée et allégorique.

    Michel Mengneau

    IP/07/591
    Bruxelles, le 30 avril 2007

    Coup d’accélérateur sur le marché des carburants
    durables : la Commission européenne lance une
    consultation publique sur les biocarburants

    La Commission européenne a lancé une consultation publique concernant
    les biocarburants dans la nouvelle législation sur la promotion de l’énergie
    renouvelable. Y sont notamment abordés les moyens d’obtenir une part de
    biocarburants de 10 % et de garantir la viabilité environnementale. Cette
    consultation fait suite à la nouvelle politique énergétique pour l’Europe,
    récemment adoptée, qui propose notamment un objectif contraignant de
    20 % d’énergies renouvelables dans la consommation énergétique totale de
    l’UE d’ici 2020 et un objectif contraignant de 10 % de biocarburants dans les
    transports. La consultation a pour but d’aider la Commission à élaborer des
    propositions permettant de traduire ces objectifs sous une forme législative.
    M. Piebalgs, membre de la Commission, a déclaré : « Les biocarburants jouent un
    rôle essentiel pour améliorer la sécurité de l’approvisionnement et réduire l’émission
    de gaz à effet de serre dans les transports, et ils représentent de nouvelles sources
    de revenus pour ceux qui dépendent de l’agriculture, tant dans l’UE que dans les
    pays en développement. Toutefois, ces avantages ne doivent pas être
    contrebalancés par les dégâts causés à l’environnement du fait d’une exploitation
    inadéquate des terres ou de processus de production dépassés. C’est la raison pour
    laquelle je me félicite du lancement de cette consultation, qui nous aidera à mettre
    en place un programme simple et concret portant sur la durabilité. »

    La Commission souhaite recueillir le point de vue des autorités publiques, des
    entreprises, des organisations non gouvernementales et d’autres parties intéressées
    sur quatre questions :

     Comment concevoir un système de viabilité à long terme des biocarburants ?
     Comment surveiller l’incidence globale des biocarburants sur l’utilisation des
    terres ?
     Comment encourager l’utilisation des biocarburants de deuxième génération ?
     Quelles sont les autres mesures nécessaires pour parvenir à une part de
    biocarburants de 10 % ?

    La consultation restera ouverte jusqu’au 4 juin 2007. Elle est accessible en ligne à
    l’adresse suivante : http://ec.europa.eu/energy/res/consultation/biofuels_en.htm