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Egypte : Protestations de masse contre les massacres de Gaza et repression
Publie le samedi 17 janvier 2009 par Open-Publishing2 commentaires
Le régime de Mubarak recourt à la répression pour empêcher le développement d’un mouvement anti-Mubarak
Les terrifiants évènements de Gaza ont entraîné la colère partout autour du monde, et plus particulièrement au Moyen-Orient. La collaboration des classes dirigeantes de ces pays avec les USA et Israël vient s’ajouter à la colère des travailleurs et de la jeunesse. Cela n’est nulle part aussi limpide qu’en Egypte. Le ministre des affaires étrangères israélien, Tzipi Livni, avait rendu visite au Président égyptien Hosni Mubarak deux jours à peine avant que l’attaque contre Gaza ne commence. Mubarak doit avoir été mis au courant de ce qui allait arriver. Il est lui aussi un opposant du Hamas, qui est lié au plus grand mouvement égyptien d’opposition, les Frères Musulmans.
John Dale, Socialist Party (CIO-Angleterre et Pays de Galles)
L’Egypte est un pays sans droits démocratiques, où les protestataires risquent d’être battus, emprisonnés et torturés. Mais depuis que le massacre de Gaza a commencé, le nombre de manifestations s’est développé de beaucoup. Le gouvernement ne s’est pas senti assez capable ou confiant pour les stopper complètement. Mais la répression violente de la police et des forces de sécurité est de plus en plus employée pour empêcher que ces protestations ne s’élargissant pour devenir un mouvement anti-Mubarak.
Le 28 décembre 2008, environ 900 protestataires ont défilé au Caire, conduits par les frères Musulmans, dont les députés étaient orateurs. La police les a permis de marcher sur un itinéraire de 10 minutes, mais dans le silence. Les frères Musulmans étaient d’accord, leur service d’ordre empêchant de crier des slogans anti-Mubarak. Ils ont ensuite rejoint 1.500 manifestants venus à l’appel de l’association des médecins. Les participants brandissaient des exemplaires du Coran et de journaux indépendants dévoilant des images de la destruction à l’œuvre à Gaza à côté d’images de Mubarak serrant la main de Livni.
Le jour d’après, entre 4.000 et 5.000 personnes se sont rassemblées en tenant des drapeaux du Hamas et en criant « Nous sommes tous le Hamas », « L’armée de Mohamed arrive » et « Ne déposez pas les armes, Haniyeh. » (du nom d’un des dirigeants du Hamas). Comme précédemment, le service d’ordre des frères Musulmans ont fait taire les slogans contre Hosni Mubarak.
Ceux qui dirigeaient les slogans étaient de l’autre côté des barrières de sécurité, sans aucun problème de la part des forces de sécurité alors que les quelques journalistes et photographes présents n’y avaient pas accès. Tout était comme si les Frères Musulmans et la police étaient parvenus à un accord sur le type de manifestation tolérée par le gouvernement.
Au fur et à mesure de la croissance de l’ampleur des massacres à Gaza, la question de la frontière fermée de Rafah (entre la bande de Gaza et l’Egypte) a augmenté la colère. Mubarak refuse d’ouvrir la frontière et de permettre ainsi de passer à la nourriture, au carburant et aux fournitures médicales pourtant désespérément nécessaires. Pour lui, il ne peut en être question que si le gouvernement du Fatah de Mahmoud Abbas, basé en Cisjordanie, regagne le contrôle de Gaza et, avec des observateurs d’Union Européenne, dirige la frontière comme convenu en 2005.
Protestations spontanées
Des protestations étudiantes spontanées ont éclaté le 30 décembre dans les villes du Sinaï d’Al-Arish, de Sheik Zowayed et de Rafah. Quarante-cinq membres des Frères Musulmans ont aussi été arrêtés sur le chemin d’une manifestation au Caire. Le jour d’après, une protestation a été organisée par le ‘Comité populaire pour les droits des citoyens du Sinaï’, dirigé par l’organisation Tagammu, un ancien parti ouvrier qui a beaucoup perdu de sa force. Les revendications portaient sur la réouverture de la frontière, l’arrêt de l’exportation du gaz égyptien en Israël et l’expulsion de l’ambassadeur israélien.
Une action de masse est cruciale pour briser le blocage de la frontière de Rafah afin de permettre à l’approvisionnement d’arriver dans la Bande de Gaza. Il y a un an, la frontière avait été forcée et ouverte pendant une courte période par un tel mouvement de masse issu de Gaza. Un mouvement semblable pourrait se développer en Egypte, mais il impliquerait de se confronter aux forces armées et à la police. Ce ne serait pas facile dans le désert du Sinaï, mais même la machine d’état de Mubarak pourrait s’émietter confrontée à un mouvement massif et déterminé.
Beaucoup d’autres manifestations ont éclaté le 31 décembre, partout en Egypte. Le nombre total de participants n’est toujours pas clair, mais les rapports suggèrent que 500.000 personnes peuvent y avoir participé. La police a fait face aux manifestations avec des matraques, du gaz lacrymogène et des arrestations. De plus grandes démonstrations se sont produites après les prières du vendredi 2 janvier, avec notamment une grande manifestation à El-Arish, où ont été criés des slogans anti-Mubarak. 3.000 personnes ont ensuite manifesté le 3 janvier dans la ville de Dalangat. Là, du gaz lacrymogène a été jeté à l’intérieur d’une école pour filles à tel point que 32 manifestantes ont maintenant des problèmes respiratoires.
le fait que Mubarak ait annoncé avec le Président Sarkozy un plan de cessez-le-feu s’est ajoutée à la colère des masses, Mubarak étant dès lors vu comme celui qui a brisé la réponse arabe unie. Quelques jours plus tard, le 9 janvier, la plus grande manifestation jusqu’ici a eu lieu à Alexandrie, avec 50.000 participants et à leur tête les parlementaires des frères Musulmans. Les Frères Musulmans ont commencé à ressentir une pression constante pour s’opposer ouvertement au régime, ce qui a été illustré par les slogans des manifestants comme : « A bas Israël et chaque collaborateur » ou encore « Que Gaza nous excuse : l’ouverture de Rafah n’est pas entre nos mains » Mubarak était clairement visé. Des manifestations avec environs 1.500 participants se sont produites à Tanta et à El-Arish, où les pierres ont répondu aux matraques de la police.
L’accord Egypte-Israël sur le gaz
Les Egyptiens qui montrent leur solidarité avec les Palestiniens sont choqués par les livraisons de gaz de l’Egypte à Israël sous les prix du marché. Un accord pour 15 ans a été conclu en 2005 entre les deux pays et le gaz égyptien a commencé à fournir Israël en février 2008.
La compagnie responsable de cet accord est le consortium égypto-israélien Eastern Mediterranean Gas (EMG), pour un contrat de 2.5 milliards de dollars pendant 15 ans. EMG est un consortium privé d’énergie co-dirigé par l’homme d’affaires égyptien Hussein Salem et par le groupe israélien Merhav. Salem est un proche ami de longue date de Mubarak et est l’un des capitalistes les plus riches d’Egypte.
En ce moment, Mubarak craint de déranger ses appuis américains et ses riches amis davantage qu’il craint les travailleurs et la jeunesse. Mais les protestations augmentent, deviennent plus militantes et pourraient même mener à une crise pour le gouvernement.
Les massacres de Gaza ont pour l’instant donné un certain élan aux Frères Musulmans, car le Hamas a des liens historiques avec eux. L’an dernier, des spéculations se sont développées au sujet des tensions internes naissantes sur la manière de faire face au régime de Mubarak et à la manière de travailler avec d’autres groupes d’opposition. Les Frères Musulmans ont tenté de séparer le thème de Gaza de ce qui se passe en Egypte, mais les travailleurs égyptiens ont ressenti une profonde colère et une grande indignation vis-à-vis de la lutte pour la survie à Gaza, dès avant l’offensive actuelle. Début 2008, il y a aussi eu des grèves au sujet des salaires et une manifestation massive défiant la police dans la ville textile de Mahalla.
De nouveaux syndicats indépendants
Un développement très important a eu lieu en décembre dernier : la formation du premier syndicat indépendant de l’Etat depuis plus de cinquante années. Avant cela, 55.000 fonctionnaires des impôts avaient mené une lutte de trois mois en automne 2007, pour gagner enfin une augmentation salariale de 325%. Leur comité de grève démocratiquement élu ne s’est pas éteint ensuite, mais a organisé une conférence réussie pour lancer le nouveau syndicat. Ils voient cela comme la première étape de la construction d’un mouvement syndical indépendant.
Les socialistes font bon accueil à ce mouvement. La classe ouvrière doit s’organiser indépendamment. Les syndicats sont essentiels dans la lutte pour les salaires, l’emploi et les conditions de travail. Mais les travailleurs ont également besoin d’un parti indépendant qui lie les différentes sections des travailleurs et de la jeunesse ensemble. Un parti des travailleurs aurait besoin d’un programme socialiste - pour en finir avec le régime de Mubarak et de ses copains, pour nationaliser les grandes compagnies, les banques et les terres et pouvoir ainsi répartir la richesse et les ressources du pays au profit de tous.
La meilleure manière qu’ont les travailleurs et les jeunes d’Egypte d’aider les Palestiniens est de lutter pour faire chuter le régime corrompu de Mubarak pour le remplacer par un Etat socialiste démocratique. Cela inspirerait les travailleurs de l’ensemble du Moyen-Orient à suivre leur exemple et à débarrasser la région de chaque gouvernement pourri qui ne vise qu’à renforcer son propre pouvoir, sa richesse et son prestige aux dépens des travailleurs, des paysans et des pauvres.
http://www.socialisme.be/psl/archives/2009/01/16/egypte.html
Messages
1. Egypte : Protestations de masse contre les massacres de Gaza et repression, 18 janvier 2009, 00:06, par Byblos
Il semble que, la deuxième semaine de l’opération israélienne sur Gaza, des ordres aient été donnés à un corps d’armée égyptien à l’effet de procéder à la destruction des tunnels dans la région de Rafah.
Apparemment, les soldats ont refusé d’exécuter les ordres.
Le régime est bien moins solide qu’il n’y paraît.
Se souvenir des coups d’État en cascade qui ont suivi la défaite des armées arabes en 1948.
2. Egypte : Protestations de masse contre les massacres de Gaza et repression, 18 janvier 2009, 11:39, par emelyne
Le decalage est gigantesque entre les dirigeants arabes et leurs peuples.
Les peuples arabes ont soif de respect et d’emancipation. Ils savent que dans l’ordre mondial actuel, pour eux c’est comme au bon vieux temps des colonies.