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Hebron : Violence du colonialisme

Publie le mercredi 14 avril 2010 par Open-Publishing

Hebron, le 14 avril 2010,

Nous sommes a Hebron depuis deux jours. Visiter les deux principaux quartiers d une ville qui compte cinq colonies nous a permis de voir ce que le colonialisme peut faire de pire.

Lundi 12 avril : Nous sommes avec une professeur de francais de l universite d Hebron. Elle nous fait visiter la vieille ville. Premier choc : Un toit grillage recouvre la rue pietonne, et les fenetres sont protégées par des barbeles. Les palestiniens sont en effet obliges d en arriver la pour se proteger de la violence des colons. Nous apprenons que les colons ont le droit d etre armes dans cette ville, contrairement aux observateurs europeens, qui ont interdiction d intervener en cas de violence. Nous rencontrons un des habitants de la rue, qui nous invite chez lui.

Nous constatons que ses "voisins" ont condamne ses fenetres, ce qui l empeche de voir la lumiere du jour. Le but est autant, pour les colons, de vivre sans avoir a "subir la vue des palestiniens", que de les pousser a partir.

Cette methode n est pas la pire : En plus de jets de pierre et de detritus quotidiens, ces hebronites ont subi plusieurs aggressions. Leur fils est mal voyant depuis que les colons l ont agresse en lui jetant de l eau de javel a la figure …

Apres l entrevue, nous montons sur le toit de la maison. Un colon nous filme depuis sa fenetre. Nous observons les batiments detruits, et des citernes d eau recouvertes du drapeau de l Etat d Israel. L accaparement des matieres premieres est une des caracteristiques du colonialisme.

A la fin de l entrevue, notre hote nous montre les objets qu il vendait a l epoque ou il etait commercant. Comme beaucoup, il a du fermer son magasin a cause des aggressions permanentes ...

La journee se termine dans la Synagogue qui remplace une partie de la Mosquee. Comme souvent, les militaires nous demande notre origine, notre religion, etc. Nous restons evasifs. Apres avoir deduit que nous n etions pas musulmans, ils nous laissent passer et nous souhaitent la bienvenue …

A l entree de la Mosquee, notre amie se fait confisquer son passeport a cause de sa nationalite palestinienne. Les soldats lui rendent a la sortie, après des menaces de plusieurs minutes.

Mardi 13 avril : Nous sommes Tel Rumeida. Dans la rue, tronent plusieurs panneaux qui presentent cette "terre volee par les arabes" comme "appartenant par essence au peuple juif". Le dernier panneau titre sur la "liberation de 1967" … Dans la meme rue, une affiche en hebreux appelle a tuer les palestiniens, ou a agresser les femmes enceintes pour empecher des arabes de naitre.

Notre rencontre avec Hachem, voisin d un des leaders de la Ligue de Defense Juive, est la preuve que l action suit souvent la parole. Nasreen, sa femme a ete a plusieurs reprises agressee lorsqu elle etait enceinte, ce qui a entraine deux fausses couches. Hachem nous raconte les tags haineux et racistes sur sa porte, les aggressions physiques sur lui et ses enfants, et les menaces de mort. Il nous montre une video qu il a realisee. On y voit clairement les colons agresser physiquement des palestiniens, et saccager divers appartements. Ces images n ont pas ete considerees comme des preuves suffisantes lorsqu il a porte plainte …

Un couvre feu a ete impose jour et nuit de 2000 a 2003 aux habitants du quartier, autorises a sortir une heure par mois, La plupart y ont perdu leur emploi a ce moment, et ont ete contraints de quitter le quartier. La famille resiste, malgre la pauvrete ; leur seul revenue est issu de la vente des dessins de Nasreen. Pour remedier a ce probleme, l administration israelienne lui a propose vingt millions de dollars pour qu il quitte sa maison. Celle-ci est a une place strategique, et l occuper permettrait d avoir acces a tous les autres habitats de la rue. Preuve que les forces d occupation n ont aucune morale : lorsqu Hachem a declare qu il pourrait etre vu comme un traitre s il vendait sa maison a l Etat israelien, et etre par exemple assassine par ses enfants, ses interlocuteurs se sont declares pres a indemniser sa veuve …

Comme la majorite des personnes rencontrees, Hachem nous demande de temoigner, et nous explique tenir grace aux soutiens. Deux organisations hostiles a la politique israelienne sont particulierement actives a Hebron.

La premiere est Breaking Silence, regroupement d anciens soldats israeliens qui font visiter la ville et expliquent les different crimes de guerre commis par leur Etat.

La seconde est un regroupement de militants qui accompagne les enfants a l ecole : Les enfants palestiniens, qui represente l avenir de cette nation, sont quotidiennement agresses par les colons qui considerent leur education comme un danger. Nous rentrons en France le vendredi seize avril, et une de notre derniere action sera de nous joindre a ces accompagnateurs.

D autre articles suivront a notre retour, a propos des different partis politiques et syndicats palestiniens que nous avons rencontres, et des anticolonialistes israeliens. Des conferences seront organisees. L evolution de la situation en Palestine est dramatique. A la suite de cet article, un editorial d Haaretz, sur la prochaine expulsion de masse de palestiniens, programmee par l Etat d Israel. Cet evenement fait la une des media au Proche et Moyen Orient, et, pour beaucoup, risque d etre comparable a la Nakbah de 1948.

Baptiste, Katia, Malika, Vivian.

EXPULSIONS DE CISJORDANIENS : TSAHAL VA TROP LOIN

éditorial Haaretz
12/04/2010

Un nouveau décret militaire qui prendra effet cette semaine permettra à l’armée d’expulser des dizaines de milliers de Palestiniens de la Cisjordanie et de les poursuivre pour infiltration, ce qui est passible de longues peines de prison. Le décret, révélé hier dans Haaretz par Amira Hass, porte la signature du général de division Gadi Shamni en sa qualité d’ancien commandant de Tsahal en Judée et Samarie.

La formulation vague du décret permettra aux officiers de l’armée de l’exploiter arbitrairement pour procéder à des expulsions de masse, conformément à des ordres militaires donnés dans des circonstances floues. Les premiers candidats à l’expulsion seront les gens dont la carte d’identité porte une adresse dans la bande de Gaza, y compris les enfants nés en Cisjordanie et les Palestiniens vivant en Cisjordanie qui ont perdu le statut de résident pour diverses raisons.

Ce serait là une décision grave et dangereuse, sans précédent dans l’occupation israélienne. Depuis des années, Israël interfère lourdement contre le registre de la population palestinienne, piétinant des droits humains fondamentaux tels que la liberté de changer de résidence à l’intérieur des territoires occupés. Cela rend la vie difficile à de nombreux Palestiniens puisqu’ils sont ainsi coupés de leur ancien lieu de résidence sans pouvoir y retourner ou faire enregistrer légalement leur nouvelle adresse.

Le droit de tous les Palestiniens à choisir où veulent vivre en Cisjordanie ou à Gaza relève d’une définition très minimale de leurs droits humains. Israël, qui empêche les Palestiniens de retourner là où ils vivaient avant 1948 et ne leur offre pas d’indemnisation équitable pour leur propriété (alors qu’il permet aux Juifs de recouvrer des biens de la même époque, comme c’est le cas à Sheikh Jarrah), ne peut pas expulser des Palestiniens des territoires en vertu d’assertions bureaucratiques discutables.

Appliquer ce nouveau décret militaire ne risque pas seulement de déclencher une nouvelle conflagration dans les territoires mais aussi d’apporter au monde la preuve claire que l’objectif d’Israël est une expulsion massive des Palestiniens de Cisjordanie. Alors que tous les Juifs peuvent s’établir là où ils le souhaitent, en Israël ou dans les territoires, Israël tente de priver les Palestiniens de ce même droit minimal à choisir à quel endroit de la Cisjordanie ou de Gaza ils veulent vivre. Le premier ministre et le ministre de la défense devraient immédiatement enterrer ce décret militaire avant que Tsahal se sente autorisée à exécuter des expulsions.