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"Il s’agit d’un conflit social Madame la ministre : il n’y aura pas d’année universitaire 2008-2009."
Publie le lundi 27 avril 2009 par Open-Publishing6 commentaires
Ci-dessous, un très fort texte de Michel Bernard, professeur à Paris 3
Le 23 avril, 2009
Madame la ministre,
Je lis dans la presse qu’au bout de onze semaines de grève dans les universités, vous vous préoccupez de ce qui va arriver aux étudiants en fin de semestre. Pour illustrer ce qu’est l’« autonomie » des universités, vous nous donnez des ordres : vous ne validerez pas « des semestres sans cours », nous devons rattraper nos enseignements, étaler les examens, utiliser les vacances de Pâques. Peut-être estimez-vous que, tout à notre mouvement, nous avions oublié « de penser aux étudiants et aux diplômes »…
Mais rassurez-vous, Madame la ministre : nous n’entendons pas « valider des semestres sans cours ». Nous sommes en grève : pas de cours, pas d’examens ; pas d’examens, pas de diplômes. Les conséquences ? Nous les connaissons autant que vous : les étudiants de cette année, victimes de votre obstination, ne pourront pas valider leur année. Ils devront redoubler l’année prochaine. Par conséquent, il nous sera impossible d’inscrire de nouveaux étudiants. Nous ne présiderons pas les jurys du baccalauréat. Quelques centaines de milliers d’étudiants et de bacheliers vont se souvenir avec émotion de votre passage au ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, Madame la ministre.
Il est fini le temps des « voies de passage », des réécritures, des petits reculs, des petites astuces, des petits arrangements avec de petits syndicats. Votre mépris de notre enseignement est tel que vous ne vous êtes pas vraiment préoccupée, jusqu’à maintenant, de l’arrêt des cours dans la quasi-totalité des universités. On peut toujours rattraper, n’est-ce pas ? On peut dispenser le contenu de 13 semaines en 7 semaines, pas vrai ? Et puis ces diplômes universitaires ont tellement peu de valeur, après tout… Voilà comment vous voyez les choses, Madame la ministre : il y a eu un peu de « grogne », comme disent vos amis de TF1, et puis au final tout rentre dans l’ordre, on rallonge un peu l’année (il faut bien que ces fainéants d’enseignants-chercheurs travaillent enfin), vous faites les gros yeux et puis tout finit bien, les étudiants ont un diplôme, vaille que vaille, et votre décret passe, avec « modulation de service », « évaluation », et tout ce qui vous tient à cœur. Ouf ! On peut passer aux élections régionales. C’est que vous avez un plan de carrière à tenir.
Mais je suis désolé de vous dire que ce scénario bien huilé ne va pas pouvoir se réaliser. L’université est en grève, depuis onze semaines, jusqu’au retrait du projet de décret modifiant le statut des enseignants-chercheurs, de celui qui instaure un « contrat doctoral », du projet de « mastérisation » des concours de recrutement et jusqu’à ce qu’on annule les suppressions de postes de cette année. Et c’est une grève totale, illimitée, pas l’expression vague et fiévreuse d’« inquiétudes » ou de « incompréhensions ». Il s’agit d’un conflit social, Madame la ministre, comme en Guadeloupe ou chez Continental, un conflit que vous avez si mal géré que vous avez réussi à le « radicaliser », à l’étendre et à créer la situation très grave où nous sommes aujourd’hui : il n’y aura pas d’année universitaire 2008-2009.
Vous pensez avoir isolé une « frange » d’acharnés et pouvoir la désigner à la vindicte publique ? Vous comptez sur les congés du printemps pour casser le mouvement et faire passer votre décret en catimini devant le Conseil d’Etat ? Vous croyez avoir trouvé des alliés fidèles auprès des présidents d’université et des médias serviles qui se contentent de reproduire vos communiqués ? Vous pensez, même, que la majorité présidentielle va vous soutenir jusqu’au bout ? Erreurs, Madame la ministre, erreurs lourdes de conséquences pour l’enseignement supérieur et la recherche. Le mouvement continue, il ira jusqu’au bout de sa logique. La « ronde infinie des obstinés », cœur battant et symbole de notre refus, tourne toujours, de jour et de nuit. Elle tourne avec des étudiants, des enseignants, des personnels administratifs et techniques, des bibliothécaires, des chercheurs, et même, de plus en plus, avec nos collègues du primaire, du secondaire, avec des hospitaliers.
Il paraît que vous vous « inquiétez » pour l’année universitaire, « menacée », d’après vous, si « les cours continuent à être perturbés au retour des vacances de Pâques ». Je vous le confirme : si vous ne retirez pas rapidement et clairement tous vos projets de casse de l’université, les cours continueront à être « perturbés » et l’année universitaire est bien « menacée ». 83 universités, 724 000 étudiants et leurs familles, 58 000 enseignants-chercheurs, 55 000 BIATOSS attendent vos décisions, Madame la ministre.
Michel Bernard
Paris 3
Messages
1. "Il s’agit d’un conflit social Madame la ministre : il n’y aura pas d’année universitaire 2008-2009.", 27 avril 2009, 18:47
simplement bravo.
2. "Il s’agit d’un conflit social Madame la ministre : il n’y aura pas d’année universitaire 2008-2009.", 27 avril 2009, 19:10, par sweetpea
et les étudiants ki s’en foutent de la grêve et qui ont besoin de leur diplome cette année, il font comment eux ??
3. "Il s’agit d’un conflit social Madame la ministre : il n’y aura pas d’année universitaire 2008-2009.", 27 avril 2009, 20:36
voilà comment on parle à ceux-d’en-haut... droit dans les yeux et avec défi.
ça c’est bon ! pas de bac 2009, il faut s’organiser partout pour durcir le mouvement, ils veulent du bras de fer, on a les biceps affutés depuis tant de semaines, pas de pb !
1. "Il s’agit d’un conflit social Madame la ministre : il n’y aura pas d’année universitaire 2008-2009.", 27 avril 2009, 21:09
"pas de bac 2009" , j’ai un peu peur que ce soit dans vos rêves .
2. "Il s’agit d’un conflit social Madame la ministre : il n’y aura pas d’année universitaire 2008-2009.", 28 avril 2009, 00:21, par HugBert
Négatif. Le diplôme du Bac n’est valide que s’il est signé par un universitaire (c’est une galère qui nous tombe dessus chaque année car on ne peut même pas discuter de l’attribution du diplôme avec les profs de lycée).
Donc, pas d’universitaire, pas de diplôme délivré. Ou alors, il faut changer la loi.
3. "Il s’agit d’un conflit social Madame la ministre : il n’y aura pas d’année universitaire 2008-2009.", 28 avril 2009, 13:41, par nt
Faux et faux
j’ai assisté à de trés trés nombreux jurys de bac ( notamment bac techno - sti-stg , sms , ....) et il n’y a jamais eu AUCUN représentant du "supérieur" et cela n’a JAMAIS posé de problème.
c’est comme ça , donc MEME si mes collégues ne veulent pas venir , le bac se tiendra et on fera tout pour qu’il ait lieu (on pense un peu à nos élèves , NOUS ! et pas seulement à notre statut)
J’aurai d’ailleurs bien aimé que mes collégues du "supérieur" nous soutiennent un peu en 2003 par exemple et ne passent pas leur temps à crier avec les loups sur la baisse du niveau.