Accueil > J - 4 : Colonies : "La belle affaire !"

J - 4 : Colonies : "La belle affaire !"

Publie le samedi 13 août 2005 par Open-Publishing

de Al Faraby

Depuis le début de l’occupation par Israël de la Cisjordanie et de Gaza dans la foulée de la guerre des Six-Jours en 1967, la colonisation, au départ mission de quelques sionistes déterminés à s’installer sur des terres [ attribuées aux juifs par la Bible ], s’est transformée en réseau de plus de 150 enclaves où vivent près de 240.000 juifs.

Aujourd’hui, à l’heure où Israël envisage de dépenser deux milliards de dollars (1,6 md d’euros) pour démanteler 25 colonies, au-delà des questions idéologiques ou politiques, un mystère demeure : combien d’argent a été investi dans le mouvement de colonisation, et par qui ?

Les estimations tournent autour de 50-60 milliards de dollars depuis 1977 (de 40 à 48 mds d’euros).

Mais fixer un chiffre exact est impossible car une grande partie de ce financement est passé par des canaux obscurs et des voies détournées, via un budget d’Etat opaque, des subventions déguisées, voire des dépenses militaires secrètes.

Un système complexe et des méthodes fort variées pour financer la colonisation. "Il n’y a pas un oeil au monde qui ait une vision d’ensemble", estime le député travailliste Danny Yatom, confident de l’ancien Premier ministre assassiné Yitzhak Rabin. "Si la plus grande partie n’en est pas occultée, il n’est pas possible de relier les différents éléments entre eux".

Aujourd’hui, la construction de logements et routes de contournement se poursuit dans les colonies de Cisjordanie, qu’Israël espère pouvoir conserver dans le cadre d’un accord de [ paix ] définitif. En contradiction totale avec la "feuille de route" vers la paix, qui prévoit le gel de la colonisation.

En mars 2005, une enquête concluait à la "flagrante violation de la loi" par le gouvernement pour ce qui est de la création d’une centaine d’avant-postes illégaux, construits et agrandis sans autorisation par les zélotes de la colonisation, la "jeunesse des collines".

Nombre de colonies ont grandi en vertu du concept des "implantations-dortoirs", inventé par un certain Ariel Sharon : à quelque minutes des grands centres urbains israéliens, ces colonies banlieusardes furent déclarées "zones prioritaires", leurs habitants bénéficiant de facilités financières, 7% de réductions d’impôts et autres prêts préférentiels.

Toute proche de Jérusalem, Maaleh Adoumim, la plus grande des colonies, bénéficie de ce statut. Fondée en 1975 par des squatters, elle abrite aujourd’hui environ 30.000 colons, attirés par ces logements à deux pas de Jérusalem à des prix défiant toute concurrence.

Pour encourager la colonisation, l’Etat a également financé à hauteur de 50% la connexion des nouvelles maisons au réseau électrique, l’adduction d’eau ou du tout-à-l’égoût. Et les députés favorables à la colonisation se disputent les portefeuilles ministériels d’où l’on peut ainsi canaliser des aides vers les colonies : Construction, Logement, Infrastructures, Transports...

Autre cagnotte, le budget top-secret de la Défense. Les fonds allaient aux soldats affectés à la garde des colonies, à la construction de barrières pour les protéger, ou de routes plus larges, afin que les colons puissent vivre en toute tranquillité au milieu de Palestiniens.

Pendant des décennies, des colonies sont nées sous prétexte de nécessité sécuritaire, sans autorisation formelle. Les dépenses budgétaires des ministères n’étant pas régionalisées, il est difficile d’identifier les flux financiers en direction des colonies. D’où une discrétion bien utile.

Autre source de revenus, les dons de la diaspora, surtout américaine. Pour permettre aux juifs américains de financer les colonies tout en bénéficiant des déductions d’impôts allant aux organisations caritatives mais pas aux mouvements politiques, on a séparé l’Organisation sioniste mondiale de l’Agence juive, alors qu’en fait elle ne font qu’une, explique David Newman, politologue de l’Université Ben Gourion.

La zone la plus grise du financement du mouvement colon concerne les expropriations, confiscations destinées aux colonies. Pendant les 12 premières années de l’occupation, l’armée, toujours "propriétaire" des Territoires, a cédé aux colons plus de 4.000 hectares de terres confisquées pour raisons de sécurité, selon les statistiques officielles. Même après une décision de la Cour suprême qui en 1979 a formulé des critères plus exigeants pour ces confiscations, le mouvement s’est poursuivi, donnant naissance à des colonies sauvages.

Enfin, des municipalités de Cisjordanie ont transféré l’équivalent de 2,2 millions d’euros de fonds publics au Conseil des colons (Yesha), qui les a utilisés pour financer la lutte contre le plan de désengagement de Gaza...

http://www.aloufok.net/article.php3?id_article=2398