Accueil > J’écris depuis Caracas pour demander pardon
Jordán Rodríguez (Telesur)
J’écris dans le temps libre qui me reste après plusieurs rencontres avec des communautés, des étudiants, et des médias. En cet instant je viens de parler avec Ann, une cadreuse de TF1 (France) avec qui j’ai noué une belle amitié en Libye, qui est restée sur place et qui m’a raconté la dureté des derniers jours. Comme nous l’avons vu une reporter espagnole a été blessée au dos, elle ne doit la vie qu’à son gilet de protection. J’ai aussi relu ce qu’on a dit de mes reportages et j’ai vu comment seuls sont capables d’écouter ceux qui veulent vraiment écouter, cela me fait penser à la difficulté du travail qui nous attend comme société et comme pays, nous ne pouvons pas continuer à être esclaves des médias, livrant notre esprit, notre liberté et notre pensée à des stratégies bien construites dans des salles de rédaction prêtes à générer des guerres comme celle qui continue à tuer des innocents en Libye et dans d’autres parties du monde.
Ces jours-ci j’ai pu observer le matériel qu’a enregistré Jesús et en vérité il y a des images terribles, très proches de la fiction et je n’arrive toujours pas à comprendre comment il est possible que nous nous tuions de cette manière. Je continuerai à travailler pour les informer de ce que j’ai vu et je vous tiendrai au courant des lieux de rencontre. Pour l’heure j’invoque la paix, peut-être est-ce une utopie qui n’admet pas de couleurs : elle est la même pour les rouges, les verts, les blancs, les jaunes ou les noirs… Ou peut-être ai-je tort, je l’ignore...
J’ai eu des nouvelles de Mojhe, un jeune qui m’a servi d’interprète, il est sur le point de perdre une jambe, il a été blessé dans un bombardement, telle est la vérité à laquelle je ne peux échapper même quand vit et dort ma bien-aimée ville de Caracas, même si j’embrasse Diego et si je repose dans les bras de la femme aimée. C’est pour cela que j’accepte l’étiquette du plus grand menteur du monde comme je l’ai lu dans le "Noticiero Digital". Tant pis, je défendrai mon mensonge si cela me sert à dénoncer la mort et les chiens de guerre qui aujourd’hui aboient en Afrique et au Moyen Orient mais qui pourraient à tout instant tourner leurs têtes vers n’importe quelle partie du monde. Je demande pardon pour cela.
http://jordannrodriguez.blogspot.com/2011/04/escribo-desde-caracas-para-pedir-perdon.html?spref=tw
http://www.larevolucionvive.org.ve/spip.php?article1506&lang=fr