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Kosovo : zone de non droit, avenir sombre pour la minorité serbe
Publie le dimanche 9 avril 2006 par Open-Publishing1 commentaire
Kosovo : zone de non droit, avenir sombre pour la minorité serbe
En général, les puissances occidentales et leurs medias serviles ont affirmé que l’occupation du Kosovo par l’ONU a été une grande victoire pour le maintien de la paix, la construction de la démocratie, et le respect du droit. Cependant, sur le terrain, ce processus qu’ils ont supervisé et guidé dans l’ancienne province serbe depuis 1999 a provoqué une situation très éloignée de ces idéaux.
Kosovo : zone de non droit
L’occupation du Kosovo occultée, s’est transformée en nettoyage ethnique, violence criminelle, acceptation d’histoires fausses en guise de vérité, violations du fonctionnement de base du système légal international, mise en évidence de contradictions visibles de l’universalité de la justice internationale, et plus récemment, un mépris total de la procédure de coopération pour l’application de la loi multinationale.
Les gardiens internationaux du Kosovo sont certainement beaucoup de choses, mais une chose est sûre, ils ne sont pas courageux. Il est grand temps pour eux de sortir de l’ombre et de le dire - l’indépendance pour le Kosovo, qu’ils essaient de faire passer en force, n’a rien à voir avec les valeurs de l’occident, la démocratie, et la règle de droit, mais c’est plutôt un acte de realpolitik calculé froidement. Plus ils se cachent derrière ces prétentions grotesques, plus grand sera le dommage fait à la justice internationale et par voie de conséquence aux relations internationales.
Le "statut final" du Kosovo n’aura certainement pas suffisamment de répercussion pour détruire le système international, mais celui-ci en sera affecté. Les contrecoups seront destructeurs non seulement pour les états voisins des Balkans, mais aussi pour d’autres conflits dormants en Europe de l’est et au Caucase, ou les possibilités, et les risques d’une confrontation internationale y sont même plus élevés. L’intervention au Kosovo a toujours été une intervention à courte vue, sauvage et brutale, mais il semble maintenant qu’elle ait des répercussions plus grandes.
Mars : un cimetière de commémorations.
Toutes choses bien considérées, ce mois de mars a été un mois plutôt dur pour les serbes, et chaque année il semble que cela devienne pire. Parmi les date infamantes que le mois inclus maintenant, il y a le début des bombardements par l’OTAN en 1999 (24 mars), l’assassinat en 2003 de Zoran Djindjic (12 mars) le pogrom de 2004 au Kosovo (17 mars) et maintenant les morts suspectes de Milan Babic (5 mars) et Slobodan Milosevic (11 mars).
Dernier à s’ajouter à la liste, le coup de poignard vicieux reçu par un adolescent serbe sur le pont de Mitrovica au Kosovo le 28 mars. En fait, la seule date sombre qui semble les avoir surpassés ce sont les ides de mars (référence à l’assassinat de Jules César utilisée pour dire qu’il y a toujours pire ndlt) mais attendons l’année prochaine.
La mort et la commémoration de Slobodan Milosevic
Alors que la commémoration de ces évènements sombres est devenu un rituel annuel, la cérémonie d’inauguration de la tragédie de cette année - la mort de Milosevic - a beaucoup aidé le lobby pro indépendance. D’abord, cela voulait dire la fin d’un procès embarrassant, qui, alors que la Haye affirmait être entrain de le gagner, se serait probablement terminé sans la condamnation de génocide que la procureur général Carla del Ponte sollicitait. Les medias occidentaux ont arrêté de couvrir le procès à partir du moment où Slobodan Milosevic a commencé à assurer sa propre défense, de sorte que les nombreuses contradictions, les faux témoignages et les témoins menteurs qu’il a mis en évidence n’ont jamais été enregistrés dans l’esprit des gens - et n’ont pas pu être enregistrés comme évènement "historique" puisqu’il avait été décrété dés le début que Milosevic était coupable avant même qu’il n’ait été jugé. Avec sa mort, l’affaire s’est interrompue de façon dramatique, l’accusation clamant que l’ancien président serbe "aurait été" reconnu coupable à la fin.
Ceci a suffit aux medias, qui ont largement soutenu le verdict pré établi du tribunal de la Haye substituant souvent des statistiques éculées, douteuses quant à leur précision et leur provenance à des preuves sûres. Comme l’a fait remarqué le journaliste canadien Scott Taylor peu après, la condamnation illégitime de Milosevic dans les medias occidentaux a eu la force d’un raz de marée, qui, en un instant a recouvert et annihilé tous les efforts que des chercheurs intègres avaient fournis ces dernières années pour séparer prudemment les faits de la fiction et pour peser avec justesse les responsabilités de tous ceux qui ont été impliqués dans le triste démantèlement de la Yougoslavie.
Le cas pénible d’ Agim Ceku
Outre le "coupable sans preuve" de ceux de la Haye à propos de la mort de Milosevic, un autre élément du développement du non respect du droit au Kosovo a été l’effort incessant fourni pas les responsables de la province onusienne du Kosovo pour élever Agim Ceku, kosovar albanais, ancien commandant des forces du KLA et avant cela chef mercenaire de l’armée croate, au poste de premier ministre du Kosovo. Selon des sources bien informées, l’administration onusienne avait prévu cela depuis longtemps. Les Etats-Unis plus particulièrement tenait absolument à ce qu’un dirigeant fort soit en place au moment des négociations sur le statut final, que Ceku soit un criminel de guerre n’avait pas d’importance. Scott Taylor, a démontré qu’il l’est effectivement. Le Tribunal de la Haye ne l’inculpera certainement jamais maintenant.
Ceku est le candidat de remplacement de Ramush Haradinaj un autre ancien membre du KLA qui a été condamné par la Haye mais qui a été libéré pour bonne conduite depuis presque un an depuis. Les deux contrôlent les institutions militaires et les milices du Kosovo, en d’autres termes, ils décideront si l’indépendance sera menée à bien de manière pacifique ou violente. Les observateurs internationaux au Kosovo, aimeraient que cela se passe de la première manière, cela surtout pour leur propre sécurité.
Alors que l’adulation servile par les principaux responsables de l’UNMIK de Ceku a été particulièrement écoeurante, leur intervention pour que son nom soit enlevé de la liste d’Interpol, c’est encore autre chose. Pensez-y : un groupe de bureaucrates nommés par l’ONU, sur la base de contrats temporaires dans un pays à qui ils n’ont aucun compte à rendre, se trouvent donner des ordres à la seule force internationale légitime de police, cela sans que soit discuté la validité de leur demande. Ils n’on pas discuté pour savoir si Ceku desservait d’être ou de ne pas être sur cette liste ; il fallait tout simplement expédier l’affaire, faire en sorte que le nouveau "premier ministre" ait la possibilité de voyager librement en Europe. Et pourquoi pas ? Après tout, tout est de la faute de Milosevic non ?
La détresse des réfugiés oubliés du Kosovo
Un problème embêtant pour ceux qui ont voulu libérer le Kosovo c’est quoi faire avec les serbes, ceux qui sont déjà devenus des réfugiés de l’intérieur, et ceux qui se trouvent encore dans les enclaves et qui rejoindront bientôt les premiers. Dans l’un des refuges "temporaires" du nord de Mitrovica, près de la frontière interne avec la Serbie, quelques douzaines de serbes, pour la plupart des personnes âgées, y vivent là depuis 2 ou même 7 ans. Ils vivent dans des pièces un peu plus grandes qu’un placard à balai, et se nourrissent d’aliments donnés de mauvaise qualité, qu’ils conservent dans des seaux en plastique ; "de la nourriture que les cochons ne voudraient pas" selon l’un de ces réfugiés en colère. Ces personnes ou bien n’ont nul part ailleurs où aller, ou refusent obstinément de quitter le Kosovo. Ils viennent de villages comme Lipljan, et Polje au centre du Kosovo, quelques uns ont même fait la double expérience d’avoir été réfugiés une première fois quand ils ont été chassés des enclaves serbes en Croatie en 1990, réinstallés au Kosovo, et chassés de nouveau. Pour ces expériences ils peuvent remercier Agim Ceku, qui "espère réellement" que les serbes seront heureux de vivre dans le nouveau Kosovo.
En discutant avec les réfugiés, ce scénario semble improbable ; "je ne veux pas quitter le Kosovo" dit une femme de 39 ans Planinka Aleksic, "mais si les albanais obtiennent l’indépendance, c’est notre fin à nous ici". D’autres sont d’accord avec elle. Aucun n’espère que le gouvernement de Belgrade trouvera une solution non plus. "Après tout ce que nous avons souffert, je ne sais même pas ce que je dirai au président serbe Boris Tadic" ajoute une autre femme. Un calendrier donné par les forces onusiennes au Kosovo est accroché dans une de ces misérables pièces ; vicieux par son cynisme on y lit en serbe : "KFOR brine o vasoj buducnosti - la KFOR se préoccupe de votre futur".
Le futur du Kosovo : des carottes mais pas de bâtons
L’atmosphère était la même à Gracanica, la principale enclave au centre du Kosovo, où
(comme presque partout ailleurs) 7 ans après l’arrivée de l’ONU, des trous remplis d’eau parsèment les routes délabrées. Gracanica reste une région serbe encore vivante, même assiégée, qui a été plus protégée que les autres enclaves du fait de la présence d’une magnifique cathédrale du 14ème siècle. Il y règne une sorte de demi vie bizarre, où des adolescents serbes y sirotent leur café en écoutant de la musique pop sous la protection des soldats étrangers, sans avoir grand-chose à faire, ayant besoin d’une escorte pour voyager et pleinement conscients qu’ils vivent une période de sursis.
Lors de la commémoration des deux ans du pogrom du 17 mars, qui s’est tenue devant l’église, des serbes du Kosovo se sont rassemblés pour marquer cette journée par une cérémonie religieuse simple. Des jeunes et des vieux ont exprimé la même opinion : le futur sera bref. "Nous partirons dans un ou deux ans (suite à l’indépendance) a dit Marina âgée de 19 ans, une étudiante du village. Nous n’avons rien à faire, aucune chance de trouver un travail, pas de sécurité."
Les internationaux qui supervisent la situation sont d’accord. Un haut responsable d’une agence humanitaire du Kosovo qui a participé à la mission onusienne depuis le début pense que les serbes n’ont réellement pas de place dans le futur Kosovo. La province va devenir indépendante, selon ce responsable, bien qu’une importante présence internationale s’y maintiendra, pour partie parce que la mission est devenue une vache à lait pour beaucoup.
Le processus délicat d’attribution d’une indépendance "conditionnelle" au Kosovo, se fera par le biais d’un mélange "carottes bâtons" selon lui. Néanmoins il est difficile de voir ou sont les bâtons : après tout, les albanais ne vont certainement pas être bombardés pour mauvaise conduite, s’ils réussissent à chasser du Kosovo les derniers serbes, turcs, musulmans macédoniens, et les roms. Il y aura peut être une arrivée massive de gens au Kosovo, mais ce flux de revenants involontaires viendra probablement des rangs des milliers de réfugiés albanais qui se trouvent dans des pays occidentaux qui aimeraient s’en débarrasser. Mais c’est difficile de croire que ceux qui seront obligés de quitter leur nouvelle vie en Europe de l’ouest, pour ce que le Kosovo a à leur offrir, y retourneront de gaîté de cœur. Ceci est aussi un mauvais signe pour le futur des minorités qui resteront.
Les prévision de ce responsable coïncide avec celles de serbes : "les enclaves les plus isolées et vulnérables vont se vider en un ou deux ans. Je donne à Mitrovica et les autres zones situées au nord entièrement peuplées de serbes au plus encore 10 ans puis ce sera la fin."
Effectivement, des craintes existent basées sur l’expérience dans l’enclave actuellement cossue de nord Mitrovica qui a vu tout récemment une nouvelle campagne d’intimidation avec un adolescent serbe poignardé sur le pont qui divise les groupes ethniques. Goran Antic, un réfugié de 32 ans de Svinjare, un village situé juste au sud de la ville où il y a eu un nettoyage ethnique au cours des affrontements de mars 2004, rappelle comment les troupes de la KFOR qui s’y trouvaient - comme ailleurs - ont en fait été complices des objectifs des manifestations "spontanées" d’albanais, contrôlés subrepticement par ces Ceku et Haradinaj.
"Plusieurs milliers d’albanais nous sont tombés dessus de trois côtés" dit il. "Nous étions seulement 205 dans le village, mais nous avions quelques fusils que nous avions enterrés en cas d’urgence comme celle-ci, et nous avons pu nous battre pendant quelques heures". Pourtant, selon Antic : "quand les français (de la KFOR) sont arrivés, ils nous ont dit : "ou vous restez ici ou vous venez avec nous - nous ne pouvons pas vous protéger." "Nous avons du partir, et alors les albanais sont arrivés ont volé ce qu’ils ont pu, et brûlé le reste. Et maintenant l’UNMIK nous dit de retourner dans notre village ? Quel village ?"
En fait, l’ONU a réduit continuellement ses activités durant l’année passée ainsi que ses mouvements au Kosovo, craignant pour la sécurité de son personnel. Quand un groupe de jeunes albanais est allé dégonfler les pneus des voitures de l’ONU parquées devant le commissariat de police de Pristina il y a quelques mois, aucune action n’a été entreprise ; au lieu de cela, l’ONU a simplement dit à sa police de trouver d’autres endroits pour se garer. Ici, déplacer le problème, comme c’est le cas avec le problème du transport des réfugiés serbes, se substitue au fait de s’occuper de leur cause. "Si l’ONU ne peut pas protéger ses propres véhicules en centre ville, comment allons nous protéger les serbes se trouvant dans une enclave isolée", fait remarquer un policier américain présent au moment de l’incident. "La réponse c’est que nous ne le pouvons pas".
Non respect du droit confirmé.
Alors qu’arrive le printemps, que le sol dégèle et que la saison des guerres redémarre dans les Balkans, le Kosovo n’est pas plus proche d’une solution juste et équitable pour tous ses citoyens, bien qu’il soit certainement plus proche de l’indépendance. Mais le processus qui a conduit à cette situation a peu à voir avec les idéaux prônés par l’ONU et supposés être le socle pour construire un nouveau Kosovo.
Le "respect de la loi" a été sacrifié dés le moment ou l’OTAN, sans l’accord de l’ONU, a commencé à bombarder une nation souveraine qui ne l’avait pas menacé non plus que l’un de ses états membres.
Une solution finale
Chaque décision importante prise depuis a été motivée non par le respect de la loi mais par des exigences politiques et des intrigues géostratégiques ; contre certains comme Milosevich on fournit des "preuves" de leur culpabilité de crimes de guerre avant même que leur procès ne soit terminé, alors que d’autres, tel Ceku reçoivent un blanc seing à cause de leur utilité politique. Le régime d’occupation onusien, qui revendique un contrôle légal sur le Kosovo, ne peut ni faire appliquer le minimum de respect du droit, ni offrir le minimum de respect des droits de l’homme aux minorités. Il ne peut pas non plus protéger la majorité de la population albanaise de ses propres éléments criminels, puisque sont confort dépend de leur généreuse hospitalité.
Considérant l’ampleur de l’improvisation créative qui a caractérisé la stratégie agressive de l’OTAN et les opérations menées au Kosovo depuis 1999, nous pourrions suggérer d’ajouter une suggestion à ces "conseillers" étrangers qui guide le processus de négociations. C’est une idée simple : que celui qui veut accorder l’indépendance au Kosovo vienne y habiter pour le reste de son existence, s’il est sûr d’y trouver la garantie qu’il y appréciera la vie sous un régime démocratique ami et le respect du droit.
Apres tout, si la vie dans un Kosovo indépendant est suffisamment bonne pour les albanais, serbes, roms, turcs et musulmans macédoniens de la province, pourquoi ne le serait-elle pas pour ces étrangers altruistes si empressés de déterminer son futur ?
Article De Christopher Deliso paru sur www.antiwar.com le 3 avril 2006 sous l’intitulé "the rule of lawlessness in Kosovo". Copyright son auteur ainsi que la photo. Traduction bénévole à caractère non commercial MD pour Planète Non Violence
Pour lire d’autres articles de Christopher Deliso visiter son site :www.balkananalysis.com
Messages
1. Kosovo : zone de non droit, avenir sombre pour la minorité serbe , 5 avril 2008, 17:49, par Miki
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