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L’Empire du Mal

Publie le samedi 14 novembre 2009 par Open-Publishing
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de Paul Craig Roberts

Le gouvernement des Etats-Unis est désormais si totalement sous la coupe des groupes d’intérêts organisés que « notre » gouvernement ne peut plus répondre aux préoccupations du peuple américain qui élit le président et les membres de la Chambre [des Représentants] et du Sénat. Les électeurs déchargeront leurs frustrations d’impuissance sur le président, ce qui implique dans le futur des présidents à mandat unique. Bientôt, nos présidents seront aussi inefficaces que les empereurs romains dans les derniers jours de leur empire.

Obama est déjà sur la voie d’une présidence à un seul mandat. Il a promis le changement, mais il n’en a fait aucun. Son projet de loi sur la santé est pris en otage par les compagnies d’assurance privées qui sont en quête de plus gros profits. L’issue la plus probable sera des réductions dans l’assistance médicale aux personnes âgées et aux plus démunis, afin de financer les guerres qui enrichissent le complexe militaro-industriel et les nombreuses entreprises créées en privatisant les services que l’armée se fournissait à elle-même à moindre coût. Il serait intéressant de connaître le pourcentage des 700 milliards de dollars et plus de la dépense pour la « défense » qui va aux entreprises privées. Dans le « capitalisme » américain, un montant incroyable des revenus des contribuables va aux sociétés privées en passant par le gouvernement. Pourtant, les Républicains crient à la « socialisation » du système de santé.

Les Républicains et les Démocrates ont vu l’occasion de créer de nouvelles sources de financement des campagnes électorales en privatisant autant de fonctions militaires que possible. Il y a désormais un grand nombre d’entreprises privées qui n’ont jamais fait un dollar en passant par le marché, s’abreuvant à la place directement au robinet public qui dépouille les contribuables de leurs dollars tous en bourrant les Américains d’obligations liées au service de la dette.

Obama avait hérité d’une occasion excellente de ramener les soldats américains à la maison des guerres illégales d’agression du régime de Bush. Dans ses derniers jours, le régime de Bush avait réalisé qu’il pouvait « gagner » en Irak en faisant embaucher par l’Armée des Etats-Unis les insurgés sunnites. Une fois que Bush eut 80.000 insurgés salariés de l’armée US, la violence, bien que toujours élevée, chuta de moitié. Tout ce que Obama avait à faire était de déclarer victoire et ramener nos gars à la maison, en remerciant Bush d’avoir gagné la guerre. Cela aurait cloué le bec aux Républicains.

Mais ce cours des choses intelligent aurait diminué les profits et le cours des actions de ces entreprises qui font partie du complexe militaro-industriel. Au lieu de faire ce qu’il avait promis de faire et ce pour quoi les électeurs l’avaient élu, Obama a donc redémarré la guerre en Afghanistan et lancé une nouvelle guerre au Pakistan. Bientôt, Obama allait reprendre à son compte les menaces de Bush et de Cheney d’attaquer l’Iran.

A la place de la protection médicale pour les Américains, il y aura plus de profits pour les compagnies d’assurance privées.

A la place de la paix, il y aura plus de guerre.

Les électeurs comprennent déjà que la catastrophe est imminente et se détachent d’Obama et des Démocrates. Les indépendants qui ont donné à Obama sa confortable victoire sont maintenant passés contre lui, faisant élire dernièrement deux gouverneurs républicains, l’un au New Jersey et l’autre en Virginie, pour succéder à deux Démocrates. C’est un vote de protestation, pas un vote de confiance pour les Républicains.

La crédibilité d’Obama est réduite à néant. Comme l’est celle du Congrès, à supposer qu’il en ait jamais eu une. La Chambre des Représentants vient juste de voter pour montrer au monde entier qu’elle n’est rien d’autre que servile et vénale et qu’elle est le pantin du Lobby d’Israël. La Chambre des Représentants de la « superpuissance » américaine a exécuté les ordres de son maître, l’, et a voté à 344 voix contre 36 pour condamner le Rapport Goldstone.

Au cas où vous ne le sauriez pas, le Rapport Goldstone est le rapport de la mission d’enquête des Nations-Unies sur le conflit à Gaza. Le « conflit de Gaza » est l’attaque militaire israélienne contre le ghetto de Gaza, où vivent 1,5 millions de palestiniens dépossédés, dont les terres, les villages et les maisons ont été volés par Israël. Cette attaque a été menée contre des civils et des infrastructures civiles. Elle était sans aucun doute un crime de guerre selon les normes de Nuremberg, que les Etats-Unis ont établies afin d’exécuter les Nazis.

Goldstone est non seulement un éminent juriste juif qui a consacré sa vie à amener les gens à rendre des comptes pour leurs crimes contre l’humanité, mais il est également sioniste. Cependant, les Israéliens l’ont diabolisé en tant que « Juif qui a la haine de lui-même », parce qu’il a écrit la vérité au lieu de la propagande israélienne.

Le Député américain, Dennis Kucinich, dont le nom est à présent sans aucun doute écrit en rouge sur la liste d’extermination politique de l’AIPAC, a demandé à la Chambre si ses membres réalisaient la honte que le vote condamnant le Rapport Goldstone ferait retomber sur la Chambre et le gouvernement américain. Le reste du monde, sans exception, accepte le rapport Goldstone.

La Chambre a répondu avec son vote irrationnel que le reste du monde ne compte pas, puisqu’il ne verse pas de contributions aux campagnes électorales des membres du Congrès.

Cet acte honteux et servile de la « plus grande démocratie au monde » a eu lieu la semaine même où un tribunal italien a condamné 23 agents américains de la CIA pour avoir kidnappé une personne en Italie. Ces agents de la CIA sont à présent considérés comme des « fugitifs de la justice » en Italie, et c’est ce qu’ils sont vraiment.

La personne qu’ils ont enlevée a été remise à l’état fantoche américain d’Egypte, où la victime a été détenue pendant des années et régulièrement torturée. Les charges qui pesaient contre lui étaient tellement minces que même un juge égyptien a ordonné sa libération.

L’un des agents de la CIA reconnus coupables, Sabrina de Sousa, une jeune femme séduisante, déclare que les Etats-Unis ont violé la loi en kidnappant une personne et en l’envoyant dans un autre pays pour y être torturé, dans l’objectif de fabriquer un autre « terroriste », afin d’entretenir le bobard sur le terrorisme aux Etats-Unis. Sans le bobard terroriste, les guerres de l’Amérique pour des raisons d’intérêts spéciaux deviendraient transparentes, même pour les accros aux « Infos » de la Fox.

Mme de Sousa dit que « tout ce qu’elle a fait avait reçu l’approbation de Washington », pourtant le gouvernement, qui nous admoneste continuellement pour « soutenir les troupes », n’a rien fait pour la protéger lorsqu’elle a appliqué les ordres illégaux du régime de Bush.

Il est clair que cela signifie que le crime ordonné par Bush, Cheney, le Pentagone et la CIA est trop abominable et inadmissible pour être justifié, même par les mémos du méprisable John Yoo [1] et de la Société Fédéraliste Républicaine.

Mme de Sousa s’inquiète manifestement de sa propre personne. Mais, quelle est sa préoccupation pour la personne innocente qu’elle a envoyée vers un enfer égyptien afin d’y être torturée à mort, sauf à admettre sa qualité de terroriste ? Les remords exprimés par de Sousa sont seulement pour elle-même. Elle a obéi aux ordres de son gouvernement diabolique et le gouvernement diabolique qu’elle a si loyalement servi lui a tourné le dos. Elle n’a aucun remord pour le mal qu’elle a commis contre une personne innocente.

Peut-être de Sousa et ses 22 collègues ont-ils grandi en jouant à des jeux vidéo. C’était super de comploter pour kidnapper une personne réelle et l’envoyer en Egypte par un vol de la CIA. Etait-ce comme un pêcheur qui attrape un poisson ou un chasseur de cerf qui tue un superbe mâle ? Ils ont manifestement pris leur pied aux dépens de leur victime.

Les attendus de la cour italienne, et il faut garder en tête que l’Italie est un état fantoche acheté par les Etats-Unis, indiquent que même les pantins que nous achetons trouvent que les Etats-Unis sont trop difficiles à encaisser.

Si l’on regarde vers la partie immergée de l’iceberg, on a l’ambassadeur Craig Murray, recteur de l’Université de Dundee et, jusqu’en 2004, ambassadeur britannique en Ouzbékistan, qu’il dépeint comme un Etat stalinien totalitaire, courtisé et soutenu par les Américains.

En tant qu’ambassadeur, Murray a vu les rapports secrets du MI5 transmis par la CIA qui décrivaient les procédures les plus horribles de torture. « Des personnes étaient violées avec des tessons de bouteilles, des enfants étaient torturés devant leurs parents jusqu’à ce qu’ils [les parents] signent une confession, des gens étaient bouillis vivants. »

Les « renseignements » sur ces sessions de torture ont été passés par la CIA au MI5 et à Washington, comme preuve de la vaste conspiration d’al-Qaïda.

L’ambassadeur Murray rapporte que les personnes livrées par des vols de la CIA à des centres de torture ouzbeks « devaient confesser leur appartenance à al-Qaïda. On les obligeait à avouer qu’ils avaient été dans des camps d’entraînement en Afghanistan. On les obligeait à avouer qu’ils avaient rencontré Oussama ben Laden en personne. Et les renseignements de la CIA reprenaient constamment ces thèmes. »

« J’étais complètement abasourdi », déclare l’ambassadeur britannique, qui pensait servir un pays vertueux qui, en compagnie de son allié américain, avait de l’intégrité morale. Le formidable bastion anglo-américain de la démocratie et des droits de l’homme, les foyers de la Magna Carta et de la Constitution des Etats-Unis, les formidables démocraties morales qui avaient vaincu le nazisme et qui s’étaient dressées contre les goulags de Staline, étaient prêtes à commettre n’importe quel crime pour maximiser leurs profits.

L’ambassadeur Murray en a trop appris et il a été viré quand il a tout vomi. Il a vu les documents qui prouvaient que la motivation de l’agression militaire des Etats-Unis et de l’Angleterre en Afghanistan était en rapport avec les gisements de gaz naturel en Ouzbékistan et au Turkménistan. Les Américains voulaient un pipeline qui contourne la Russie et l’Iran et qui traverse l’Afghanistan. Pour s’en assurer, une invasion était nécessaire. On pouvait dire au public américain imbécile que l’invasion était nécessaire à cause du 11/9 et pour les sauver du « terrorisme », et ces triples idiots ont cru ce mensonge.

« Si l’on regarde le déploiement des forces étasuniennes en Afghanistan, comparé à celui des forces de l’Otan, on voit sans aucun doute que les forces américaines sont positionnées pour garder l’itinéraire du pipeline. Il ne s’agit que de ça. C’est une question d’argent et d’énergie, ce n’est pas pour la démocratie. »

Devinez qui était le consultant qui a arrangé avec le gouverneur du Texas George W. Bush les accords donnant à Enron les droits sur les gisements de gaz naturel en Ouzbékistan et au Turkménistan et attribuant à Unocal [2] le développement du pipeline trans-afghan ? C’était Karzaï, le président imposé par les Etats-Unis à l’Afghanistan, qui n’a aucun soutien dans son pays, à part les baïonnettes américaines.

L’ambassadeur Murray a été viré des Affaires Etrangères britanniques à cause de ses révélations. Il ne fait aucun doute que notre pantin anglais avait reçu ses ordres de Washington.

Paul Craig Roberts a été sous-secrétaire au Trésor dans l’administration Reagan.

Traduction : [JFG-QuestionsCritiques]

CounterPunch, 8 novembre 2009 article original : ["The Evil Empire"]

Messages

  • Le Premier ministre israélien Benjamin Netenyahou aurait compris au cours de sa dernière rencontre avec le président américain Barack Obama que ce dernier "ne s’oppose pas à d’éventuelles opérations militaires israéliennes ponctuelles en territoire libanais ou dans la zone frontalière israélo-syrienne", rapporte le quotidien palestinien "Almanar" de "sources européennes informées.