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"La société n’a pas pris soin de m’annoncer son décès"
Publie le mercredi 23 juillet 2008 par Open-Publishing1 commentaire

Témoignage . En juin, un employé roumain d’une société travaillant pour Schindler est écrasé par un ascenseur. Il n’était pas déclaré. Sa compagne se bat pour obtenir réparation.
de Alexandra Chaignon
C’est un fait divers lugubre. Dans la matinée du samedi 7 juin, un
ascenseur parisien s’est écrasé sur deux techniciens chargés de la mise
aux normes des appareils d’un immeuble parisien du 14e arrondissement.
Bilan : un mort et un blessé grave. La victime décédée sur le coup
s’appelait Gheorghe Banescu. Employé depuis le 15 mai par la société
Comas, petit sous-traitant de l’ascensoriste Schindler, ce Roumain de
quarante-sept ans travaillait à la « modernisation » des quatre ascenseurs du 57, avenue du Maine, avec deux autres techniciens également roumains.
« Ce samedi matin, vers 10 heures, un bruit épouvantable a secoué tout
l’immeuble : la cabine s’est décrochée et est venue écraser les deux
ouvriers se trouvant dans la fosse », témoigne un copropriétaire de
l’immeuble, dans un communiqué de l’Association des responsables de
copropriétés (ARC).Une heure après le drame, le PDG de Schindler France
était sur les lieux.
Dans un communiqué, le groupe, qui s’est déclaré « très affecté par ce drame », a tenu à « exprimer son émotion et partager
la douleur des familles ». Mais non content d’avoir attendu la fin
d’après-midi pour avertir les membres du comité d’hygiène, de sécurité et
des conditions de travail (CHSCT) de l’entreprise, Schindler, comme le
sous-traitant, n’a même pas pris la peine d’informer la compagne de
Gheorghe Banescu. « J’ai appris qu’il était mort, le mercredi suivant »,
raconte l’intéressée, Aurelia Laposi.
« Pendant quatre jours, j’ai appelé les hôpitaux. Je ne comprenais pas pourquoi Gheorghe ne donnait pas de nouvelles. Puis j’ai fini par rencontrer un Roumain qui m’a dit qu’un accident mortel avait eu lieu le samedi. Mais il ne savait pas comment s’appelait la victime. » Aurelia Laposi s’est donc rendue dans un commissariat où, après avoir attendu plusieurs heures, elle a eu confirmation de la terrible nouvelle. Et appris qu’une enquête judiciaire a été ouverte.l’espoirde mener une« vie meilleure »Pour cette femme de trente-cinq ans, mère d’une petite fille de trois ans, c’est tout son avenir, qui d’un coup, s’est effondré.
Le couple était arrivé en France il y a trois ans - Aurelia était alors enceinte de plus de huit mois - dans l’espoir de mener « une vie meilleure ». « Là-bas, en Roumanie, il n’y
avait pas de travail, pas d’argent ; on n’avait pas de maison à nous », se
souvient la jeune maman, qui a fait le choix de laisser ses deux aînés de
dix et seize ans, issus d’un précédent mariage, chez sa mère. Ici, en
France, Gheorghe, Aurelia et Alexandra passaient d’hôtel en hébergement
d’urgence - lui ancien ingénieur des chemins de fer à l’époque de Nicolae
Ceausescu vivant, depuis sa chute, de petits boulots - mais ce qui
importait, c’est qu’ils étaient « ensemble ». Et gardaient « espoir ».
Avec la mort de Gheorghe, Aurelia, qui ne travaille pas, se retrouve donc
sans ressource aucune.Selon la législation, dans le cas où un accident de
travail a entraîné la mort, les ayants droit peuvent prétendre à une
rente. Sauf que Gheorghe Banescu travaillait au noir. « Il n’avait suivi
aucune formation et n’avait pas signé de contrat de travail », a découvert
Aurelia Laposi après son décès.
Elle a bien retrouvé une demande
d’autorisation de travail accordée, mais celle-ci concernait un autre
employeur qui finalement n’avait pas fait appel à son conjoint. Une
situation qui semble avoir incité là se dédouaner de ses droits vis-à-vis
de la victime. « Comas m’a dit que je ne pouvais pas faire valoir
l’accident de travail car mon concubin n’était pas déclaré », raconte
cette femme endeuillée, qui se retrouve aujourd’hui seule et sans
ressource pour élever sa fille Alexandra mais aussi subvenir aux besoins
de ses deux autres enfants à qui elle envoie « de 30 à 50 euros tous les
mois ».
Conseillée par un avocat, Aurelia Laposi a porté plainte contre la
société Comas et l’entreprise Schindler pour « homicide involontaire » et
« travail dissimulé ». Dans sa plainte, elle rappelle ses droits : « Selon
un arrêt de la Cour de cassation rendu le 11 février 2003, un accident
survenu à un salarié au temps et lieu du travail est un accident du
travail, la circonstance que l’employeur soit reconnu coupable du délit de
travail dissimulé n’ayant pas d’incidence sur le droit de la victime à la
protection de la législation sur les accidents du travail. De ce fait, il
(Comas - NDLR) se devait de faire cette déclaration dans les 48 heures.
»Seul geste de largesse accordé par l’entreprise sous-traitante, créé par
un jeune Roumain qui emploie des compatriotes : 4 000 euros en liquide
donné de la main à la main, initialement pour les frais d’obsèques. Mais,
la municipalité où réside Aurelia ayant tout pris en charge, Comas a
consenti à lui donner cet argent, « contre reçu », équivalent à trois mois
de salaire, « jusqu’à ce qu’Alexandra rentre à l’école, en septembre ».
Après, charge à Aurelia de trouver un travail.dénoncer la façon dont on
traite les salariés étrangersEn attendant, « c’est difficile », avoue
Aurelia, qui a dû attendre trois semaines avant de pouvoir enterrer son
mari. D’un point de vue pécuniaire d’abord : « Il faut acheter la
nourriture, les vêtements, les tickets de métro. » Mais aussi et surtout
moral : « Je pleure toutes les nuits. Alexandra est perturbée car elle ne
voit plus son père. Elle l’adorait. »
Malgré toutes ces adversités, Aurelia veut rester optimiste. « ça va changer, espère-t-elle. Tout ça, je le fais pour ma fille. Je ne veux pas qu’elle grandisse en Roumanie,
qu’elle connaisse la pauvreté. » Mais si Aurelia accepte de parler de
cette tragédie, c’est aussi pour dénoncer la façon dont sont traités les
travailleurs étrangers comme Gheorghe. Des salariés qu’on exploite, qu’on tue et qu’on oublie en échange de quelques billets.
Messages
1. "La société n’a pas pris soin de m’annoncer son décès", 23 juillet 2008, 11:56, par oeil de bison
c’est pas fini ç,ça commence voir sur :UNION RÉPUBLICAINE DES PAYS l’ EST
http://www.u-p-r.org/ab/index.php?page=breve&id=78
FEU VERT GENERALISE AUX TRAVAILLEURS DES PAYS DE L’EST
en parlant avec des patrons de petites entreprises ,je suis éffarré par le
nombre de ceux qui disent " moi fin 2008 ¨j’arrête car c’est plus possible
de travailler dans de telles conditions
BRAVO SARKO ,ILS ONT VOTÉS POUR TOI , MAINTENANT ILS ONT LA HAINE