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Les communistes dans la cité

Publie le samedi 2 juillet 2005 par Open-Publishing
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ANNIE RAULET est secrétaire de la cellule Rougemont. 140 membres. 25% de chômeurs. 40,57% de salariés. 7,26% de femmes au foyer. 8,69% de retraités. Annie a cinq enfants qui s’en sortent grâce au foot et un rêve de pavillon. Annie n’a plus de dents. Elle me dit « Vous » et « Madame » bien que nous soyons du même monde. Communiste.

Cela n’a pas tardé. Son mari et elle, ils ont su à quoi s’en tenir dès le jour de leur arrivée, lorsque le déménageur s’est fait faucher ses papiers. Leur cage d’escalier est un concentré de tout ce qui mine la vie, au quotidien. Pêle-mêle, « Celui qui est au premier, il a déjà tiré sur les gamins. C’était chargé à blanc. » « Celui du dessus, lorsqu’il rentre à quatre pattes, il tape sur les gamines et en passant, il pisse sur les portes des gens, c’est agréable ! » « Le matin, c’est plein de seringues dans l’escalier. » « Les voisins d’à côté, ils avaient un gamin. Il est mort du SIDA. Une fois, ils l’avaient enfermé à double tour pour le sevrer. Il a tout balancé par la fenêtre. Et maintenant, c’est leur grande qui se drogue. » « Les espaces verts, c’est le garage Renault. » « Le courrier, comme il n’y a plus de boîtes, la semaine, on va le chercher chez le gardien. Le samedi, il n’y en a pas. » « L’électro-ménager, il faut aller se le chercher soi-même, les camions Darty n’entrent plus dans la cité. » « La grande de quatorze ans, elle ne veut plus aller au collège, à cause du racket. Le petit de huit ans, il a été enfermé dans une cave. Les jeunes croyaient qu’on avait appelé les flics. Ils voulaient se venger. »

Rahmani Morad est connu comme le loup blanc. Il a grandi là, il entretient la petite flamme d’un dialogue de tout et de rien, de foot beaucoup, avec les jeunes. Il a un vrai travail. Chez lui, c’est impeccable. On le sent communiste. Il manie les concepts. Tendresse : « T’as des mômes de dix ans, maintenant, qui t’envoient chier. Ils n’ont plus le goût à la vie. » Lucidité : « Il y a une minorité qui ne veut pas s’intégrer, qui nous oblige à vivre au jour le jour. Ils sont comme des bêtes sauvages ! » Contradiction : « Si j’avais de l’oseille, on se tirerait d’ici. Moi, demain, mon fils, je le mettrai dans une école privée. »

Un tract du Parti est distribué tout de suite, François Asensi, le député communiste, intervient à l’Assemblée, soutient les profs, les parents, demande des moyens, l’ordre du jour du comité de section est chamboulé, recentré sur Painlevé. On s’inquiète. Comment stopper la violence ? Comment s’y prendre pour que l’affaire ne profite pas au FN ? On évite de dramatiser, de diaboliser, mais on veut voir les choses en face. Trop longtemps, le Parti communiste a tu les difficultés à vivre dans certaines cités par crainte d’entretenir une confusion entre insécurité et immigration. Hasard du calendrier. Une conférence de section est programmée. Se coltine le problème Painlevé. Quelle place ? Quel rôle pour le Parti dans cette affaire ? Un débat s’amorce sur les cités. Trop de délégation, d’assistanat ? Mais aider les gens à se prendre en charge, est-ce de l’assistanat ? Et n’est-ce pas lorsque les communistes ont reculé sur ces questions que le FN s’est renforcé ?

Le PCF est la seule force politique qui entre à Rougemont. Il a commencé à faire reculer le FN, sur place, en y amenant le MODEF qui vend ses fruits et légumes, en suscitant la bataille des surloyers, en montant l’APEIS avec les chômeurs, en empêchant les saisies, en entretenant du lien social. Annick Lepage, conseillère municipale communiste, a l’expérience : « La présence du Parti est le seul moyen d’empêcher les « conquêtes d’espace ». Sinon, sur le terrain, des groupes ethniques s’approprient les lieux. Et le communautarisme, c’est le contraire du partage, de la solidarité. Les autres n’osent plus y aller. S’installe un climat de peur. Se créent des repaires pour l’intégrisme, la violence. Si nous, les communistes, on ne s’en occupe pas sérieusement, si on ne donne pas des repères identitaires, cela va nous claquer dans la figure et ce sera autre chose que le collège Painlevé ! »

M.J.

Messages

  • la réalité rugueuse subit par les habitants des cités ,c’est la loi des mafias organisées autour de la drogue,influencées par l’intégrisme et le communautarisme.
    les lobbies libéraux entretiennent ces carcans pour justifier des pratiques socio-économiques oppressantes, et l’application d’une politique ultra libérale .
    il faut de la solidarité dans les quartiers,pas de communautarisme et une grande unité contre les politiques ultra-libérales.
    mouton noir