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Mais où est passé le ministre ? (de l’Intérieur ...)

Publie le vendredi 29 septembre 2006 par Open-Publishing
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Semaine du jeudi 28 septembre 2006 - n°2186 - Événement

Washington, Vergezac, Bruxelles...

Mais où est passé le ministre ?

Il est partout... sauf à son bureau du ministère de l’Intérieur. Un ministre à temps (très) partiel

La première fois,le 5 octobre 2005, c’était pour cause de migraine. La deuxième fois, c’est la faute à Condoleezza et à George W. Nicolas Sarkozy est ce qu’on appelle un récidiviste. Au lendemain de ses entrevues de Washington avec le président américain et sa secrétaire d’Etat, le président de l’UMP a de nouveau séché le conseil des ministres, le 13 septembre dernier. Une absence passée curieusement inaperçue mais qui jette une lumière crue sur son comportement : Sarkozy est de plus en plus candidat à l’élection présidentielle, et de moins en moins ministre.

L’examen des dix jours qui ont encadré cette escapade américaine suffit à le démontrer. Les 7 et 8 septembre, Sarkozy est à Bruxelles. Comme toujours, il y a dans son programme un élément en rapport avec son job. Ne serait-ce que pour justifier le bénéfice de la logistique gouvernementale (voir encadré). Il a donc parlé (notamment) de terrorisme et d’immigration avec José Manuel Barroso, le président de la Commission. L’essentiel n’est pas là. Sarkozy vient présenter son plan de relance de l’Europe. Pour éviter l’enlisement, il faut « un mini-traité », explique-t-il.

L’après-midi du 8, il file à Vergezac, en Haute-Loire, pour... l’ouverture de la 53e finale nationale de labour. Là encore, il a un alibi : parmi ses dossiers figure l’aménagement du territoire. En réalité, il s’agit de flatter les agriculteurs. Et Sarkozy de s’enflammer : « Vous avez de l’énergie, de l’enthousiasme : la France a besoin de vous. » Et lui de leurs voix...

Le lendemain 9 septembre, début de la séquence américaine, en partie prise sur le week-end. Mais comment croire à la fable selon laquelle cette visite serait liée à son activité de ministre ? Bien évidemment, Sarkozy ne s’est pas rendu à New York pour remettre la Légion d’honneur au chef de la police locale, à l’occasion du cinquième anniversaire du 11-Septembre. Son but est de montrer que,désormais, toutes les portes s’ouvrent devant lui. Celle de Kofi Annan, le secrétaire général de l’ONU, à New York, celles de George Bush et de Condoleezza Rice, à Washington.

L’après-midi du 13 septembre, événement dans la vie de Nicolas Sarkozy : il fait son boulot de ministre. Au Sénat, il expose son projet de loi sur la prévention de la délinquance. Qu’on se rassure : il quitte l’hémicycle avant la fin de la discussion générale et laisse à ses ministres délégués le soin de défendre le texte les jours suivants. Car, dès le lendemain, il réendosse son costume de candidat en prononçant un discours sur le logement lors d’une convention UMP. C’est déjà le week-end. Cette fois, il le passe à Londres où il rencontre Tony Blair, David Cameron, le nouveau chef des conservateurs, et le lundi matin Gordon Brown,successeur annoncé de Blair. Va-t-il enfin se poser place Beauvau l’après-midi ? Pas du tout ! Il le passe à Nanterre, devant la commission permanente, comme président du conseil général des Hauts-de-Seine, son autre casquette officielle.

Sarkozy, un ministre à temps (très, très) partiel. La semaine dernière, l’agression de deux policiers dans l’Essonne et la polémique sur les juges de Bobigny l’ont conduit à un retour aux sources. Il ne durera pas. En 2005, Nicolas Sarkozy a réintégré la place Beauvau sans redevenir vraiment ministre. Il a confié le rôle à son directeur de cabinet, Claude Guéant, pour se consacrer au rêve de sa vie : devenir président de la République. Depuis l’épisode du CPE et la disgrâce de Villepin, il a le champ libre à droite. Il pourrait donc lever le pied. Il fait tout le contraire : persuadé que son mentor, Edouard Balladur, s’est planté en 1995 parce qu’il a sombré dans l’immobilisme, il entend être omniprésent sur tous les sujets.

Dans ces conditions, le débat qui divise ses amis sur la date de son départ du gouvernement apparaît surréaliste. Dans sa tête, Sarkozy est déjà ailleurs : à l’Elysée. « C’est le jugement des Français qui compte », a-t-il lancé la semaine dernière pour justifier son attitude. En négligeant les devoirs de sa charge, le ministre de l’Intérieur leur manifeste en réalité un vrai manque de respect.

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Frais de bouche

Bien entendu, la confusion des rôles engendre l’enchevêtrement des financements : le ministère de l’Intérieur paie une grande partie des voyages du candidat. Dans un louable souci de décence, l’équipe Sarko a cependant renoncé à affréter un avion gouvernemental pour le déplacement américain : elle s’inquiète en effet des articles du « Canard enchaîné » sur le train de vie de son champion. « Le Canard » a notamment déploré le fait que trois maîtres d’hôtel de la place Beauvau aient passé le mois d’août à Arcachon pour servir le ministre en vacances. « En réalité, il n’y en avait qu’un », corrige sans rire un député UMP, invité de Sarkozy.

Hervé Algalarrondo

http://www.nouvelobs.com/articles/p2186/a318110.html

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