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Mission Latarjet sur l’avenir du spectacle vivant
Publie le jeudi 6 novembre 2003 par Open-PublishingDix-huit rapporteurs et trois axes de réflexion pour la mission Latarjet sur l’avenir du spectacle vivant
Nommée après la crise des intermittents, la mission s’interrogera sur les enjeux du débat, les métiers et la décentralisation
La mission pour le débat sur l’avenir du spectacle vivant, plus connue sous le nom de mission Latarjet, a trouvé une adresse : une aile du Grand Palais, à Paris. Elle est doublée, comme il se doit, d’un site Internet (www.debat-spectacle.org) qui ouvrira le 6 novembre. Et l’on connaît, depuis le mardi 4 novembre, sa composition et ses tâches, qui ont été rendues publiques par le ministère de la culture.
Le président de l’Etablissement public du parc et de la Grande Halle de La Villette, Bernard Latarjet, avait accepté, le 4 septembre, de conduire cette difficile entreprise : sonder les principaux acteurs du spectacle vivant afin d’établir un diagnostic des actions, des enjeux et des perspectives d’évolution possible de ce secteur en crise. Le rapport final devrait déboucher sur un plan de soutien à l’emploi du spectacle vivant promis par le président de la République, Jacques Chirac, sur un projet de loi évoqué par le premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, et sur une refonte des réseaux et des clés de financement méditée par le ministre de la culture, Jean-Jacques Aillagon. "Je me contente de rédiger un rapport, indique Bernard Latarjet. Pas des textes législatifs."
Cette tâche lui a été confiée par Jean-Jacques Aillagon, après "l’été des intermittents" au cours duquel les principaux festivals français avaient été annulés ou perturbés. La vague de protestation qui avait touché la quasi-totalité du spectacle vivant était née de l’accord du 26 juin sur la réforme du régime d’assurance-chômage des intermittents du spectacle. Accord notamment refusé par la CGT, le principal syndicat, appuyé par des coordinations d’intermittents.
La mission de Bernard Latarjet, déjà périlleuse en soi, est rendue plus difficile encore par le refus de la CGT, du Syndicat national des entreprises artistiques et culturelles (Syndeac), qui regroupe 250 centres dramatiques, scènes nationales ou scènes de musique actuelle, et des coordinations de débattre officiellement avec Bernard Latarjet tant qu’un moratoire n’aura pas été annoncé sur l’accord du 26 juin. "J’ai déjà rencontré plus de trente organisations professionnelles, précise le président de La Villette. Et je compte me nourrir aux assises, forums, rencontres et débats organisés sur ce thème, dans toute la France, aussi bien par la CGT que par le Parti socialiste ou les diverses coordinations. Dans l’état actuel des choses, nous pouvons commencer à travailler."
Le projet affiché de Bernard Latarjet est de faire un état des lieux, mais aussi de soulever quelques questions "qui dérangent". Faut-il redéfinir le champ d’application de l’assurance-chômage ? Faut-il refondre le réseau des établissements subventionnés, c’est-à-dire donner plus d’argent à moins de structures ou moins d’argent à plus de structures ? Pourquoi y a-t-il un engorgement de la diffusion par rapport à la création ? On assiste en effet à une baisse du nombre de représentations des spectacles créés. Comment aborder l’inéluctable décentralisation ? Le monde du spectacle vivant y est très hostile, mais, insiste Bernard Latarjet, "il y a mille manières de décentraliser". "On peut utiliser la hache en décentralisant par pans entiers - toutes les scènes nationales, par exemple. On peut également envisager des financements croisés souples avec des contrats pluriannuels à définir."
Il y a aussi la question sous-jacente au conflit de cet été : faut-il donner un statut commun aux acteurs du spectacle vivant, ouvrant des droits et des garanties ? Si la réponse est positive, quelle instance délivrera (et retirera) la "carte professionnelle" ? Ou encore le vieux débat toujours latent : doit-on subventionner la culture savante et la culture populaire ? Tirer un trait entre l’Ircam et le théâtre de rue ou le cirque ?
Comment établir un équilibre entre l’action artistique et l’action culturelle, le fameux "socio-cul" ? "Pour tenter de résoudre ces problèmes souvent anciens, nous refusons la géométrie, note Bernard Latarjet. Il faut les aborder avec prudence et préférer la complexité, voire l’ambiguïté, aux réponses carrées. Sous prétexte de rationalisation, faut-il s’engager dans un processus à l’allemande qui privilégie les structures lourdes et les troupes permanentes ? Il me semble que le foisonnement à la française rend difficile cette approche."
Reste à appliquer la "méthode Latarjet" : pendant trois mois, rencontrer et consulter le maximum de personnes, se rendre à tous les débats, être attentif à tout ce qui se dit, rentrer par la fenêtre si la porte vous est fermée.
Les trois mois suivants permettront de resserrer les questions, de réfléchir avec des personnalités moins nombreuses, à des scénarios et à des évolutions. Il faudra ensuite que les commanditaires ne remisent pas le rapport dans un tiroir.
Emmanuel de Roux
Une équipe de dix-sept auditeurs-rapporteurs
Aux côtés de Bernard Latarjet, responsable de la Mission pour le débat national sur l’avenir du spectacle vivant, on trouve dix-sept auditeurs-rapporteurs, choisis dans différents secteurs culturels.
Laurent Bayle, directeur général de la Cité de la musique.
-Abraham Bengio, ancien directeur régional des affaires culturelles.
-Françoise Benhamou, professeur d’économie à l’université de Rouen.
-Jacques Blanc, directeur de la scène nationale de Brest.
-Bruno Boutleux, directeur des Jeunesses musicales de France.
A-lain Garlan, directeur adjoint du Théâtre Gérard-Philipe à Saint-Denis.
-Dominique Goudal, directrice de l’Espace Jules-Verne à Brétigny-sur-Orge.
-Pascale Henrot, codirectrice du festival Paris, quartier d’été.
-Fabien Jannelle, directeur de l’ONDA.
-Robert Lacombe, ancien directeur de l’Institut français de Budapest.
-Stéphane Le Sagère, directeur de la Fédération nationale des écoles d’influence jazz et musiques actuelles.
-Alain Meilland, directeur des affaires culturelles de Bourges.
-Jacky Ohayon, directeur du Théâtre Garonne à Toulouse.
-Bruno Ory-Lavollée, ancien directeur général de la Comédie-Française.
-Olivier Poubelle, directeur d’Astérios productions.
-Michel Sala, directeur général du Centre national de la danse.
-Jean-Marie Songy, directeur des Festivals d’Aurillac et de Châlons-en-Champagne.
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