Accueil > Nouvelle loi sur la concurrence :
Intervention de François Brottes dans la discussion générale du texte faussement intitulé "Concurrence au service des consommateurs" à l’Assemblée nationale le 21 novembre :
Permettez-moi tout d’abord de m’étonner de l’absence de M. Michel-Édouard Leclerc au banc des conseillers du Gouvernement : j’avais cru comprendre que la renégociation des tarifs (que les centrales d’achats souhaitent officialiser en échange de la disparition des marges arrière pour permettre à la grande distribution de faire toujours plus de profits) avait été discutée entre le Gouvernement et la grande distribution, peut-être à l’Élysée, sur le dos des fournisseurs et sans concertation avec notre rapporteur, Monsieur Raison (Rapporteur, UMP, de la loi sur la "concurrence au service des consommateurs"), homme rigoureux et de conviction. "Aimer à perdre la raison", dit le poète…
Comme vient de le démontrer Monsieur Charié (député UMP), tout est lié : les marges arrière, le seuil de vente à perte, les CGV, le référencement et ses bakchichs, les délais de paiement… Le seul fait que votre projet n’aborde pas tous ces sujets montre que vos intentions ne sont que gesticulations et qu’il ne sortira rien de votre politique d’affichage.
Votre religion, c’est qu’introduire toujours plus de concurrence permet de rendre un meilleur service à moindre coût. Et tant pis si, s’agissant des tarifs de l’électricité ou des renseignements téléphoniques, c’est exactement l’inverse qui s’est produit ! Et ne venez pas nous dire que c’est la faute au baril de brut !
– Qui peut prétendre (comme tend à le faire le Gouvernement) que le pouvoir d’achat des ménages n’a pas régressé ? Les faits parlent d’eux-mêmes : un million de dossiers de surendettement en cinq ans, flambée des prix de l’alimentation, de l’énergie, des carburants, des loyers, des primes assurances… Hausse vertigineuse des dépenses incompressibles, baisse en euros constants des allocations familiales, stagnation des salaires et annonce d’une nouvelle taxe sur les malades, que vous appelez "franchise".
Tout cela est au cœur de l’angoisse des Français, laquelle ne concerne plus seulement les chômeurs et érémistes mais bien l’ensemble de la population.
40 % des salariés gagnent entre 1 000 et 1 350 euros par mois, ce qui n’est pas très loin du niveau du SMIC. Au cours des dernières années, 90 % des foyers n’ont vu leur revenu augmenter que de 4,5 %, soit moins que l’inflation. Pendant ce temps, les revenus des 3 500 foyers les plus riches ont progressé de 42,5 %, soit dix fois plus ! Et ce sont les mêmes à qui les services fiscaux viennent (du fait du bouclier fiscal que Mme Lagarde "oublie" souvent d’évoquer dans sa description de la loi TEPA) d’adresser des chèques de remboursement de 80 000 ou 100 000 euros !
– C’est du reste bien parce qu’il y a des gens de plus en plus riches que vos moyennes présentent un aspect flatteur ! Mais si on en fait abstraction, l’évolution est moins favorable…
Hors quelques mesures cosmétiques sur la téléphonie mobile (que votre majorité se propose d’édulcorer), votre texte ne contient aucune disposition susceptible d’améliorer le pouvoir d’achat des ménages. Dès lors, il n’a pas matière à se glorifier, Monsieur Chatel, qu’il ne coûte rien ! En définitive, votre nouveau slogan devrait être : "Gagner moins pour payer plus !"
Rien n’est prévu pour compenser les hausses de prix (passées et à venir) que j’ai décrites à l’instant, et pas davantage pour neutraliser les effets de l’assujettissement de 800 000 personnes âgées à la redevance audiovisuelle ! Rien, non plus, pour diminuer les tarifs de l’énergie, alors que l’État vient de récolter 2 milliards de dividendes sur EDF et Gaz de France, directement payés par les consommateurs, à proportion de 150 euros par foyer.
CHACUN DOIT SAVOIR QUE LE GOUVERNEMENT POUVAIT DECIDER DE FACTURER L’ENERGIE MOINS CHER : IL NE L’A PAS FAIT, CAR IL AVAIT BESOIN DE RENFLOUER LES CAISSES DE l’ÉTAT, VIDEES PAR LES CADEAUX FISCAUX DE L’ETE.
– Tout au long de ce débat, nous vous ferons des propositions pour donner de la substance à votre texte. Mais, Monsieur le ministre Chatel, qu’avez-vous fait de l’audace du député Chatel ? Quelle suite donnez-vous à la promesse du Président de la République sur l’action de groupe ? Non seulement vous y renoncez, mais Mme Dati vient en plus d’évoquer (sans doute par maladresse !) la possibilité d’instaurer une franchise sur l’aide juridictionnelle !
On ne s’y prendrait pas autrement si l’on voulait décourager les consommateurs de faire valoir leurs droits !
De ce texte qui prétendait résoudre le problème des marges arrière, l’histoire retiendra qu’il ne vise en fait à qu’à orchestrer une nouvelle marche arrière !
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