Rémunération des patrons - Le Sénat se rebelle contre le gouvernement

Le Sénat se rebelle contre le gouvernement. La Haute Assemblée a voté, dans la nuit de mercredi à jeudi, un amendement qui interdit les stock-options et actions gratuites pour les dirigeants des sociétés aidées par l’Etat.

Cet amendement du président centriste de la Commission des Finances Jean Arthuis, voté contre l’avis du gouvernement et de l’UMP lors de l’examen du collectif budgétaire, va plus loin que le décret publié mardi au Journal officiel, en réaction aux affaires qui ont défrayé la chronique ces dernières semaines.

Ce décret rédigé en quelques jours est jugé très insuffisant par les syndicats, la gauche et une partie de la majorité. La mission d’information de l’Assemblée nationale sur les nouvelles régulations de l’économie a préconisé mercredi une loi sur les rémunérations des dirigeants d’entreprises, dans un rapport d’étape soutenu par l’UMP et le PS.

Alors que le décret gouvernemental couvre les six banques aidées par l’Etat, les constructeurs automobiles et les entreprises publiques, l’amendement Arthuis inclut les sous-traitants de l’automobile et les entreprises aidées par le Fonds stratégique d’investissement (FSI). Le cas de Valéo, dont le PDG Thierry Morin a démissionné le 23 mars avec un parachute doré estimé à 3,2 millions d’euros, serait ainsi couvert par l’amendement.

Lors du débat, le ministre du Budget Eric Woerth a exhorté Jean Arthuis à retirer son amendement qui va "créer de la confusion plutôt que de la clarté". Si cet amendement est confirmé en commission mixte paritaire (CMP), le gouvernement devra publier un nouveau décret pour corriger celui du 31 mars. "Nous ne sommes pas dans une course de vitesse entre les pouvoirs réglementaire et législatif. La situation est suffisamment grave pour ne pas entrer dans ce type de débat", a jugé le ministre.

"Il ne s’agit pas ici d’imaginer une quelconque course de vitesse entre le gouvernement et le Parlement mais j’estime que, dans ces circonstances, il est important que le législateur fixe les règles", a répondu Jean Arthuis.

L’amendement a été voté grâce au soutien de la gauche. "Cela ne comble pas nos attentes, mais nous pourrons au moins sauver l’honneur du Parlement face à la très mauvaise manière du gouvernement", a expliqué la socialiste Nicole Bricq. Le PS est favorable à la suppression des stock-options, sauf pour les entreprises de moins de 50 salariés, a rappelé jeudi Martine Aubry sur Europe-1.

Les voix de l’UMP, qui ne dispose pas de la majorité absolue au Sénat, n’ont pas permis de repousser l’amendement. "On ne peut diriger des entreprises en période de crise grâce à la voie législative", a plaidé en vain Gérard Longuet.

Dans la foulée, les sénateurs ont adopté par 183 voix contre 153 le collectif budgétaire. Ce deuxième collectif budgétaire de l’année 2009 officialise l’entrée de la France en récession, et met en oeuvre les mesures annoncées lors du sommet social du 18 février.

La commission mixte paritaire, réunissant sept députés et sept sénateurs, se réunira en début de semaine prochaine pour examiner les points en discussion. L’adoption définitive du texte par les deux assemblées est prévue le 9 avril. AP

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