Accueil > Sabiha AHMINE : Après le Grenelle de l’insertion, quoi de neuf ?

Sabiha AHMINE : Après le Grenelle de l’insertion, quoi de neuf ?

Publie le mercredi 11 juin 2008 par Open-Publishing

A l’approche des vacances, les radiations se poursuivent et l’emploi va bien, dit-on. C’est pourquoi, au delà des statisyiques, il est essentiel de ne pas oublier tous les nécessiteux, les précaires et les chômeurs, les femmes et les hommes exclus, ainsi que toutes les victimes des discriminations...

Ces personnes sont en nombre croissant en effet, pendant ce temps la droite aux affaires poursuit son désengagement libéral. Selon la définition officielle de la pauvreté en vigueur, la France compte depuis 2005 entre 3,7 et 7,1 millions de personnes pauvres. Toutes les hypothèses confirment que ses chiffres sont en hausse. De même, les inégalités sociales, sanitaires et psychologiques restent, encore et toujours concentrées, au sein des mêmes populations. Les collectivités et les associations ont de plus en plus de difficultés à faire face à l’explosion de ces inégalités.

1. Remplacer la compétition par la coopération et la solidarité

En tant qu’élu-e-s, nous pouvons travailler ensemble à permettre des outils innovants pour que les victimes de la précarité aient accès à leurs droits et les aider à retrouver leur dignité. Loin de l’opportunisme, et comme nous l’avons proposé depuis des années, cela passe par un plan national contre les inégalités et les discriminations. Pas seulement avec les discours et autres chimères... Pour réussir cette démarche, je propose de travailler, au niveau local ou national, dans le sens d’un plan national contre les inégalités et les discriminations. Le "grenelle de l’insertion" par exemple, devrais mieux écouter les acteurs. Car une véritable réforme doit remplacer la compétition par la coopération et la solidarité. Tout en travaillant ensemble sur les moyens nécessaires au financement de l’insertion, nous pouvons faire mieux participer les entreprises à l’effort de solidarité nationale, et créer une sécurité sociale de l’emploi et de la formation. Or depuis 1 année, le gouvernement multiplie les cadeaux pour les riches, tout en parlant de réforme à sens unique, dans le sens de plus d’austérité pour les pauvres.

2. Le RSA risque d’aggraver la situation des plus fragiles

Aujourd’hui, au lieu d’aider financièrement les collectivités dont les communes, à mettre en place des politiques d’insertion innovantes, le gouvernement veut tester toute une série de mesures flexibles. C’est le cas de l’expérimentation en cours du revenu de solidarité active RSA, au profit de ceux qui reprennent un emploi… Mais qui vise en réalité la remise en cause de la solidarité nationale et la culpabilisation des personnes qui vivent des minima sociaux et qui sont considérées comme des " assistées ". Selon la conception en cours du RSA, il y aura d’un côté ceux qui seront aidés (par un soutien financier et un accompagnement adapté) pour accéder à l’emploi et de l’autre ceux qui n’auront qu’un « parcours social » et dont le revenu restera nettement inférieur au seuil de pauvreté. Le RSA risque même d’aggraver l’enfermement de ces derniers en réduisant les soutiens dont ils bénéficient aujourd’hui et en les coupant un peu plus de ceux qui parviennent à travailler. ATD Quart Monde ne cache pas ses craintes, car si le RSA n’est pas modifié, il risque d’aggraver la situation des plus fragiles, de ceux qui ne parviennent pas à trouver un emploi. Ce serait un recul important par rapport à l’ambition que « tous accèdent aux droits de tous » inscrite depuis 1998 dans la loi d’orientation relative à la lutte contre les exclusions. Pour soutenir retrouvent un emploi, doit bénéficier à tous et non pas renforcer les divisions.

3. Pour une véritable politique d’insertion efficiente

Une véritable politique d’insertion ne doit pas diviser les pauvres. Humaniste et efficiente, elle doit avant tout permettre aux collectivités des moyens financiers et humains pour aider le public en difficulté. Elle doit permettre surtout un Plan de lutte contre les inégalités, les discriminations, d’absorber la précarité, les contrats à temps partiels et autres situations de dénis que connaissent les travailleurs pauvres, dont les femmes en sont les premières victimes. Enfin, permettre le financement de la libre formation le long de la vie, avec un revenu de dignité pour les bénéficiaires des minima sociaux et les petites retraites. Mais cela exige des moyens et une capacité collective de mobilisation.

4. Le rôle et la place des collectivités

Dans ce sens, les collectivités sont en première ligne. La baisse des moyens du FSE, les transferts de charges financières, toujours non honorées par l’Etat, vers les collectivités territoriales, ne font qu’aggraver cette situation. Un peu d’histoire : si l’Etat a conservé la responsabilité des politiques de l’emploi, la loi du 18 décembre 2003 a transféré aux conseils généraux le paiement de l’allocation RMI et l’insertion sociale et professionnelle des bénéficiaires du RMI. Depuis cette date, les départements pauvres souffrent. Si dans le Rhône la situation est gérable, plusieurs autres départements risquent de mettre la clé sous la porte et souffrent d’un désengagement de l’Etat, qui ne veut pas compensée ses transferts de charges et ses compétences. Nous voulons ainsi introduire la coopération et la solidarité à la place de la compétition sauvage et la précarité.

5. Quelle articulation entre discrimination et insertion, cas du 5° arrondissement de Lyon ?}

Alors que la ville de Lyon vient de signer en 2007 le PLIE, les moyens de l’Etat et du FSE ne sont pas au rendez-vous. C’est la Région qui, à travers les CTEF et les CDERA, est appelée à prendre le relais.
C’est pourquoi, avant toute réflexion, il est utile d’analyser les chiffres ci-dessous de l’insertion sur Lyon 5°, qui sont identique à ceux de l’agglomération et légèrement mieux que la moyenne nationale.

Comme l’affirme une étude du Millénaire3, l’important est de voir l’articulation de ses chiffres avec ceux des discriminationsce. Selon Millénaire3, « on constate ici (sur le territoire du Grand Lyon) ce qui est strictement identique à la moyenne nationale. À niveau de diplôme égal et quel que soit ce niveau, les “Étrangers” et les “Français par acquisition” originaires de l’Union européenne (Portugal, Italie, Espagne) connaissent un taux de chômage comparable aux “Français de naissance”. En revanche, toujours à niveau de diplôme égal et quel que soit ce niveau, les “Étrangers” et les “ Français par acquisition” non originaires de l’Union européenne (Algérie, Maroc, Tunisie) subissent des taux de chômage entre deux et trois fois supérieurs ».