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Togo : merci la France

Publie le jeudi 5 mai 2005 par Open-Publishing
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Pour garder la main, la France contraint ses alliés au silence.

Faure Gnassingbé peut remercier la France, qui a fait ce qu’il fallait pour qu’il succède à son dictateur de père, Gnassingbé Eyadéma, décédé le 5 février dernier. La Cour constitutionnelle togolaise devait en effet proclamer, mardi, les résultats officiels de l’élection présidentielle du 24 avril, et le désigner vainqueur au terme d’une fraude massive. Des résultats provisoires le créditaient de plus de 60 % des voix. La contestation de l’opposition, unie derrière un candidat unique, n’aurait-elle servi à rien ? Pour refuser le fait accompli, elle s’est mobilisée. La répression aurait fait une centaine de morts. En début de semaine, opposants, journalistes et militants des droits de l’homme se cachaient encore. « C’est un coup d’État soutenu et cautionné par la France, a dénoncé le 28 avril Patrick Farbiaz, délégué à l’international des Verts, lors d’une conférence de presse avec l’opposition togolaise en exil et des organisations de défense des droits de l’homme. Il est clair que Jacques Chirac, l’Élysée et tous ceux qui soutiennent les réseaux mafieux de la Françafrique ont une responsabilité écrasante dans ce qui se passe. » À ses côtés, Guy Laberti, délégué Afrique du PS, a dénoncé un « complot du mensonge » unissant la France et la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao), qui ont jugé les conditions du scrutin « globalement satisfaisantes », selon les termes de notre ministre des Affaires étrangères, qui a par ailleurs nié toute ingérence de la France dans la crise togolaise.

Pourtant, quand l’armée a placé Faure Gnassingbé à la présidence, en février, seule l’intervention de l’Union africaine (UA), suivie par la Cedeao, a obligé le jeune putschiste à se soumettre à une élection. La France s’est chargée de casser ce front du refus africain. « Les téléphones ont sonné, explique Guy Laberti. L’Élysée s’est servi de contacts intermédiaires, par exemple à Libreville [capitale du Gabon d’Omar Bongo, ami de la Françafrique, NDLR], pour faire pression sur d’autres. Et je sais que le président de la Commission de l’UA, Alpha Oumar Konaré, et le délégué de la Cedeao à Lomé, Boukar Mai Manga, ont également subi ces pressions. » En mission, samedi dernier, à Lomé, ces organisations se sont donc contentées d’appeler pouvoir et opposition à « user du dialogue ». La France tient encore son pré carré africain...

L’Allemagne, pourtant en première ligne, ne bronche pas. Le ministre togolais de l’Intérieur, limogé avant le scrutin pour avoir demandé son report, s’est réfugié dans son ambassade ­ et non pas dans celle de la France. Simple hasard ? Le 28 avril, l’Institut culturel allemand à Lomé était détruit par des hommes cagoulés équipés d’armes de guerre. Probablement des militaires. Berlin a appelé ses ressortissants à quitter le pays. Pas Paris. Les Français craignent seulement la colère des opposants, mais l’armée semble avoir repris le contrôle de la rue. Le ministère allemand des Affaires étrangères refuse de commenter l’attitude de la France, et nous apprend que Berlin se contente de « discuter » avec Paris. De même, la France parvient à paralyser l’Union européenne, qui avait déjà renoncé à envoyer des observateurs au Togo, le 24 avril. L’Élysée a les coudées franches.

Mais la société civile française se mobilise ­ voir son appel sur http://www.survie-france.org. Si la Françafrique finissait par échouer au Togo, cela serait un formidable encouragement pour les autres peuples africains soumis à sa loi.

http://www.politis.fr/article1323.html

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