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la carrière des fusillés

Publie le dimanche 21 octobre 2007 par Open-Publishing
8 commentaires

La carrière des fusillés.

J’ai vécu mon enfance dans la Mayenne. Tous les étés, avec Mamie et Pépé, on allait au Pouliguen, pas loin de Saint-Nazaire. Je l’ai fait en Aronde, en Ami 6, puis en GS. Avec les épuisettes et tout le tintouin sur la galerie. Notre itinéraire avait comme « milieu » la ville de Chateaubriant. Et, au large de Chateaubriant, la carrière des fusillés. Le grand-père s’y arrêtait systématiquement, on « allait à la carrière » en pèlerinage. Il regardait le paysage, et il disait « c’est là qu’ils les ont tués ». Y’avait pas de Guy ou de Jean ou de Jacques qui ressortait à l’époque. C’était un groupe de résistants. Z ‘étaient 23 je crois… je l’ai dans la mémoire de mes yeux cet endroit. J’préfère en parler moi-même à ma fille. Ça me gêne qu’on demande à son instit de le faire à ma place. Comme ça me gêne qu’on appelle communiste un môme de 17 ans. Chais pas pourquoi, y’a un truc qui va pas .

Messages

  • Ils n’étaient pas majeurs la plupart de ceux qui périrent dans la résistance, leur contesterai-t-on leurs idéaux aujourd’hui ?

    Grave, façon de penser que de vouloir retirer à celui qui périt son choix, son engagement.

    La Loi française permet l’adhésion à une association dès 16 ans, y a-t-il des gens plus restrictifs que la Loi elle-même ?

    Un jeune vote à 18, quel coup de baguette magique le ferait devenir comme tous les autres et à la même seconde suffisamment mûr pour juger de son potentiel à décidert par lui-même ?

    Le Renard Rouge

    Il s’appelait Guy Môquet, il avait 17 ans
    Emprisonné pour avoir diffusé les idées communistes, fils du député communiste Prosper Môquet, il fit partie des otages choisis par le ministre de l’Intérieur de Pétain,Pierre Pucheu, et fusillés par les nazis à Châteaubriant.
    La station Guy-Môquet est sur la ligne 13 du métro, celle qui va à Saint-Denis et au siège du journal. Sur l’un des quais il y a une sorte de petite cabane vitrée. Dedans, la photo de Guy Môquet, celle de ses parents et la lettre. Cette lettre-là. Combien de gens, se disait-on souvent, passeront sans la voir, sans la lire. Combien de jeunes gens, filles et garçons, ne sauront même pas qu’il avait leur âge quand il a été fusillé par les nazis, à Châteaubriant, près de Nantes, le 22 octobre 1941, dans la carrière de la Sablière.
    Pourquoi faut-il maintenant que revienne avec insistance ce vers de Rimbaud : « On n’est pas sérieux, quand on a dix-sept ans. » Guy Môquet habitait avec sa mère à deux rues de la station. Rue Baron, dans ce 17e arrondissement dont son père était le député.
    1936. Il a douze ans. Prosper Môquet est cheminot, militant syndical. C’est le candidat du Parti communiste. Au second tour, il est élu député des Épinettes. Quelque temps après, on va danser dans les usines occupées. Des millions de salariés sont en grève. Jusqu’aux femmes de chambre dans les beaux hôtels de Paris. C’est le Front populaire et la vie est à eux. On imagine sans mal de quoi l’on peut parler dans la famille Môquet, chez les amis, les voisins. Le tout jeune homme est fier de son père. Torturé après son arrestation, à peine trois ans plus tard, il aurait répondu à ceux qui l’interrogent, les policiers français qui lui demandent les noms des amis de son père : « Ce sont tous les braves gens qui l’ont élu en 1936. » La réponse à de l’allure. Guy Môquet aime les belles phrases et s’essaye, maladroitement il faut bien le dire, à la poésie. C’est en alexandrins qu’il écrira au président Édouard Herriot pour demander la libération de son père :
    « Monsieur le Président, je suis l’un des enfants d’un de ces députés
    Qui sont tous en prison, aujourd’hui enfermés »…
    Car les vociférations de Hitler sont devenues des actes. Les prières d’une partie de la grande bourgeoisie : « Mieux vaut Hitler que le Front populaire » vont bientôt être exaucées. La signature du pacte germano-soviétique va lui donner le prétexte qu’elle attend pour interdire le Parti communiste, interdire l’Humanité. Dès le 4 septembre 1939, des peines de prison de trois à quinze mois vont punir les militants communistes qui distribuent l’Huma devenue clandestine ou des tracts. Le 10 octobre 1939, Prosper Môquet, qui est venu voir sa femme et ses enfants en Normandie où ils se sont réfugiés, est arrêté. Il sera incarcéré avec les autres députés communistes qui n’ont rien renié ou abjuré au bagne de Maison-Carrée, en Algérie. En mars 1940, plus de trois mille militants communistes et syndicalistes sont emprisonnés. C’est le temps de la haine. Un journal, Gringoire, demande : « Le poteau pour les traîtres communistes. » Le 4 avril, le décret Sérol, du nom du ministre socialiste qui le signe, instaure même la possibilité de la peine de mort pour propagande communiste.
    Guy a réagi avec panache, ce qui semble être son caractère, à l’arrestation de son père. Avec le sens du devoir aussi peut-être, le sentiment de devenir un homme, sans doute. Il quitte sa mère et revient à Paris : « Papa est arrêté, dit-il, je dois le remplacer. » Dans le 17e arrondissement, il organise les Jeunesses communistes clandestines. À vélo, ils lancent des tracts à la volée. Ils inscrivent la nuit sur les murs :
    « Libérez les emprisonnés ». Guy rend compte à la direction du mouvement de l’activité de son secteur : « Tous les soirs en moyenne, trois à quatre cents papillons sont collés, les inscriptions à la craie sont en nombre indéfini. » Et un peu plus loin : « Trois de nos meilleurs camarades se sont fait arrêter et sont maintenant à la Santé, ce sont Planquet, Simon et Bersilli. » Le 13 octobre de cette année 1940, c’est son tour, gare de l’Est. La France, depuis le mois de mai, est occupée par les nazis. La police française, aux ordres désormais du gouvernement de collaboration de Vichy et de Pétain, arrête les communistes français. Guy
    Môquet est interné à la Santé, puis à Fresnes. Jugé en janvier 1941, il est théoriquement acquitté, sans doute en raison de son âge, mais pratiquement maintenu en détention à Clairvaux, d’abord, puis au camp de Châteaubriant, dans la région de Nantes.
    Le 21 août 1941, au métro Barbès-Rochechouart, celui qui deviendra le Colonel Fabien a tiré sur un officier allemand. C’est le premier acte en France de résistance armée. Le 20 octobre à Nantes, le lieutenant-colonel Holtz, commandant de la place, est abattu. À Paris, le général Stülpnagel ordonne de fusiller cinquante otages. Ce n’est pas la première fois que les nazis exécutent des patriotes. À Rouen, en juillet 1940, Étienne Achavanne a été exécuté après un sabotage. Le 23 décembre 1940, Jacques Bonsergent, dont une station de métro porte aussi le nom, est également exécuté.
    Mais il s’agit maintenant de représailles de masse. De masse, mais pas aveugles.
    Le 21 octobre, le chef du bureau du sous-préfet de Châteaubriant part pour Paris avec un dossier de 200 noms. Pierre Pucheu, ministre de l’Intérieur de Pétain, va choisir 27 noms. Les autres seront choisis dans d’autres lieux de détention.
    Mais qui est Pierre Pucheu ? Administrateur des fonderies de Pont-à-Mousson, des aciéries de Micheville, fondateur du Cartel international de l’acier, il est l’un des plus éminents
    représentants de ce qu’on appelait alors le Comité des forges et de cette bourgeoisie qui, après le triomphe de Hitler, entend prendre sa revanche sur le Front populaire. Pucheu, donc, choisit. Politiquement.
    Charles Michels, secrétaire général des cuirs et peaux CGT ; Jean-Pierre Timbaud, dirigeant de la métallurgie CGT ; Jean Poulmarch, dirigeant du syndicat des produits chimiques CGT ; Jules Vercruysses, dirigeant du textile CGT ; Désiré Granet, dirigeant du papier-carton CGT ; Jean Grandel, secrétaire de la fédération postale CGT… Les autres sont professeurs, étudiants, ouvriers. Presque tous sont communistes et nombre d’entre eux sont des élus. Charles Michels est député de Paris, Granet est adjoint à Vitry, Grandel est maire de Gennevilliers.
    Guy Môquet, dix-sept ans, est le fils du député communiste de Paris Prosper Môquet. Pucheu choisit.
    Louis Aragon a raconté les dernières heures des otages. Guy a écrit sur les planches de son baraquement : « Vous tous qui restez, soyez dignes de nous, les vingt-sept qui allons mourir. »
    Quelques jours après, une lettre que lui adressée son père depuis le bagne d’Algérie lui revient. Elle porte simplement le cachet : « Retour à l’envoyeur ». Après guerre, la valise en carton bouilli de Guy reviendra à sa mère. Une chemise, un pull, une casquette à chevrons, une autre en toile. La valise est fermée par un bout de ficelle.
    Le 22 octobre dans la carrière de la Sablière, il faisait beau à n’y pas croire. À quoi Guy pensait-il avant de s’évanouir ? Au ciel bleu, à ses parents, à Odette, rencontrée au camp et au baiser d’amour qu’elle lui avait promis ? Lui qui aimait la poésie, connaissait-il les vers de Rimbaud ?
    « Vous êtes amoureux, loué jusqu’au mois d’août
    Vous êtes amoureux, vos sonnets la font rire
    Tous vos amis s’en vont, vous êtes mauvais goût
    Puis l’adorée un soir a daigné vous écrire !
    Ce soir-là… vous rentrez aux cafés éclatants,
    Vous demandez des bocks ou de la limonade…
    On n’est pas sérieux quand on a dix-sept ans
    Et qu’on a des tilleuls verts sur la promenade. »
    Maurice Ulrich

    • Deux militants dignes aussi de mémoire.
      Parmi les otages assassinés de Châteaubriand figuraient aussi le militant trtskyste Marc Bourhis et un opposant communiste au stalinisme, ancien maire de Concarneau, Pierre Gueguen. Taire leurs noms, leurs cheminement politiques, leurs destins est leur infliger un deuxième supplice.
      Patrick Pinault

    • A partir du moment où Le Bourhis et Guegen n’ont pas utilisé leurs divergences avec le Pcf pour èssayer d’échapper à la fusillade, il est indécent de les dissocier des autres. C’est des communistes qui étaient visés, les assassins n’ont pas cherché à savoir s’ils étaient, ou non, à jour de leurs cotisations. Les spéculations sur la maturité de Guy Môquet, qui ne semble pas avoir posé de problème à Pucheu, me paraissent parfaitement oiseuses.

      Dans le Lot, les mêmes ne pouvant attraper le chef de la Résistance, JJ Chapou, déporteront sa mère (65ans) qui n’en reviendra pas. En fait pour ces gens-là, les otages n’avaient pas d’âge !

      CN46400

    • Pendant 60 ans seul le PCF et l’association de Chateaubriant à rendu hommage aux 27,et à aucun moment nous n’avons fait de différence.

      Tous c’est au nom de leurs convictions qu’ils ont été assassinés et il n’y a que Sarkosy pour le remettre en cause

      Jean laude Goujat

      PCF Landes

    • voir le numéro de l’Huma-Dimanche du jeudi 18 octobre :Marc Bourhis et Pierre Guéguen y sont cités à égalité avec les 25 autres autres fusillés dans l’hommage qui leur est rendu !
      Cidrolin.

  • Ah oui ça te géne que l’on appele communiste un môme de 17 ans ?

    Préçise ta pensée !

    Parce qu’i l’était !Son engagement est inéniable.Et renforcé par l’arrestation de son pére Prosper Môquet cheminot,député communiste des épinettes,déporté à Maison Carrée en Algérie,par les français,en 1939.

    Alors oui,préçise ta pensée !

    Jean Claude Goujat

    PCF Landes

    • salut Jean Paul

      Je sais, je mets du temps à te répondre.
      Peut-on se dire communiste quand on est enfant ?
      Le petit Môquet, connaissait-il l’origine des bouts de plomb qui ont frappé sa poitrine ?
      Je n’en suis pas sûr Jean Paul...
      Pourtant, je la connais bien la carrière, pépé m’y emmenait, tu as tort de m’agresser ; était-ce le communisme qu’on assassinait, ou juste la liberté ?
      Jean Paul, moi je dois transmettre à ma fille Noëmie, 10 ans, ces choses d’un autre siècle, je dois lui dire ce qui ne va pas. Le mot communiste est-il indispensable ? La raison n’est-elle pas suffisante ? Me confisquerais-tu ma carte rouge ?
      Fraternellement,
      Eric.

  • ce n’est pas ON : IL se désignait lui-même comme communiste.
    Respecter Guy Moquet et ses camarades s’est respecter le sens de leur engagement, pas leur en plaquer un soixante ans plus tard.

    Pour ma part j’ai commencer à me dire communiste à 15 ans. Vingt ans plus tard je n’ai pas changé d’idéal.

    Si tu dois protester contre les embrigadements va empêcher de ton corps des baptêmes : ce sont des entrées en religion, c’est le moment ou quelqu’un adopte une religion.