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Finkie a trouvé un nouvel objet de trouille...Il veut faire "dérailler" internet...

Publie le mercredi 7 décembre 2005 par Open-Publishing
14 commentaires

de Copas

Nous avons depuis quelques temps un débat ici (et ailleurs) sur la pensée de Finkie.

Je pense qu’il est juste en complement, pour comprendre ses autres dérapages, de lire l’inerview qui suit, qui exprime une panique et une trouille profonde très partagée dans une petite partie de nos médias et nos élites qui voit perdre ses estrades, a peur de se faire dérober ses porte-voix unipolaires et qui semble rêver de pouvoir nous ficeler sur une chaise afin que nous n’ayons autres choix que de subir devant les petites lucarnes leurs gargarismes, leurs états d’âme et qu’on acclame ensemble à leurs génies...

Une pensée brejnevienne, qui, comme toute pensée autoritaire crépusculaire, transpire d’autoritarisme et d’aristocratisme.

Si j’ose dire, et à la mode finkienne de détournement honteux je dirai qu’il accompli là comme un pogrom anti-blogs.

Cet homme a peur, il est terrorisé, ....

Mais au delà il existe un débat interessant sur le monde du net et des blogs à mener et je rajouterai une réponse à celà ensuite, afin de ne pas alourdir, petit mot envoyé sur un autre blog. http://www.pointblog.com/

Copas.

06 décembre 2005

http://passouline.blog.lemonde.fr/livres/2005/12/

Finkielkraut veut faire "dérailler" internet

Cette nouvelle interwiew d’Alain Finkielkraut fera certainement moins de bruit que la précédente, sauf dans la médiasphère, la première concernée. Où l’on voit que le philosophe ne craint pas d’enfoncer le clou, quitte à se faire définitivement cataloguer comme « néo-réac », ce dont il se fiche à juste titre. Car sous la colle des étiquettes, les idées demeurent et elles seules valent d’être analysées nonobstant les catégories dans lesquelles on se hâte de les ranger.

L’entretien en question paraît ces jours-ci dans le numéro de décembre de La Revue littéraire (No21, 256 pages, Editions Léo Scheer). Il s’intitule "Après la défaite" et il est conduit par deux piliers de la revue, Vincent Roy et Florent Georgesco. Consacrés principalement au dernier livre d’Alain Finkielkraut (Nous autres, modernes), les propos ont été recueillis le 14 octobre dernier, soit avant le scandale déclenché par l’article de Haaretz. En voici des morceaux choisis, selon un nécessaire « montage » réalisé par ma pomme avec rigueur et honnêteté, ce qui va sans dire mais va mieux en le disant en un temps où la moindre virgule déplacée vaut un procès d’intention :

Question : (...) On entend partout que vous êtes un conservateur. Mais je crois plutôt que vous êtes moderne au point de réinventer la modernité. Vous dites : regardons ce qui se passe derrière nous pour exister aujourd’hui

Réponse : Oui, j’entends bien -il faudrait être sourd pour ne pas l’entendre !- qu’on me traite de conservateur, voire de réactionnaire. Je suis considéré par toute une intelligentsia progressiste comme un personnage pas fréquentable (...) On connaît aujourd’hui un durcissement, une radicalisation politique. Et, comme d’autres, j’en fais les frais (...)

Question : Vous semblez ne pas avoir renoncé à l’idée qu’en philosophie, la vérité ne peut exister en dehors d’une forme de beauté. Mais n’est-il pas trop tard ? (...)

Réponse : La poésie consiste à rendre grâce. La célébration est sa tonalité fondamentale. Or, l’une des tendances de la modernité est de substituer à la gratitude envers le donné un ressentiment illimité à son encontre. Ce ressentiment conduit à la création de ce que le philosophe Rüdiger Safranski appelle une « cité tautologique », c’est-à-dire un monde où l’homme ne rencontre que lui-même, à travers ses produits, ses instruments, où l’homme, tout harnaché de prothèses, vit dans une connexion perpétuelle, au milieu des écrans. On assiste à une éclipse de la nature - une disparition progressive du donné (...)

Question : Vous connaissez les blogs, où tant de gens, qui parfois ne s’adressent plus à personne, se répandent. Eh bien, j’ai entendu récemment un mot nouveau : blogosphère, dont je ne sais pas ce qu’il désigne au juste, sinon peut-être ce bavardage permanent, ce bruit de fond de l’expression universelle où tout attention, et toute contemplation, est devenue impossible.

Réponse : Vous avez raison. L’avenir de la culture, ce n’est pas le désert du silence total sous un pouvoir écrasant, mais, en effet, la glossolalie, la volubilité exubérante d’une blogosphère planétaire. (...) Voyez-vous, internet est une thèse sur l’être : l’être est information, et une information, disponible, malléable (...) L’information, internet noient les œuvres dans un flux textuel informe, sans contenu. Et cela satisfait une certaine forme d’égalitarisme. On nous parle beaucoup d’humiliation à l’école : l’humiliation par les notes ; l’humiliation, aussi, par ces œuvres trop belles, trop transcendantes pour reprendre votre terme, et qui manifestent un écart insupportable entre leurs auteurs et ceux qui les lisent. Cet écart doit être comblé et c’est à cela que la technologie moderne, ou hypermoderne, se voue. Je ne vois pas bien comment résister à ce phénomène, car il a pour lui une double légitimité : celle du progrès technique et celle de la démocratie triomphante.

Question : En somme, ce processus consiste, pour combler l’écart entre les œuvres et ceux qui étaient censés les recevoir, à détruire les œuvres.

Réponse : Oui. »

Messages

  • que j’ai porté sur un autre blog :

    Je suis déçu de voir Finkie affublé d’une telle trouille.

    Je pense plus utile, pour des jeunes et des moins jeunes, d’écrire, faire, animer des blogs, même avec tatonnements, même en collectionnant fôtes et malfaçons, plutôt que de rester scotchés devant la télé, spectateurs malheur.

    Le défi que nous pose le net depuis quelque temps, surtout dans sa dernière déclinaison bloguienne, c’est son immensité qui fait qu’on ne peut, de très loin, en parcourir l’intégralité, même pas une partie significative, voir une petite partie.

    Tout juste pouvons-nous effectuer quelques petits sondages , pratique que je suis maintenant de temps en temps, au travers d’un cheminement qui m’a necessité un effort d’ouverture. Une inversion du regard, une inversion de position.

    Au début, j’ai cherché à arpenter le monde des blogs, me comportant un peu comme un chaland dans une bloguerie, rêvant à embrasser l’ensemble des rayons et l’ensemble des chapitres afin d’en controler l’espace et les hierarchies.

    Jusqu’à ce que pointe en moins comme une certaine insatisfaction, une gène devant ce qui semblait de plus en plus hors du possible.

    J’essayais de regarder d’en haut le monde du blog, il m’a fallu comprendre que je devais regarder d’en bas et qu’il y avait prétention exorbitante de vouloir maitriser ce qui nous dépasse.

    C’était trop immense.

    Maintenant je vais bien sûr sur des blogs et des sites internet, mais d’autres fois JE décide de cheminer sur les blogs, un peu comme une randonée menée à fantaisie et dans les hasards de la découverte.

    Et je prends plaisir à celà. Car je sais que j’y découvrirai forcement du nouveau, des pépites et des serpents, de la fraicheur et de la poésie, du langage à la con et de l’alexandrin flamboyant,...
    Un peu comme la contemplation de la nature, avec ses choses belles et ses choses moins belles.
    On peut choisir d’essayer de passer au rouleau compresseur la nature, la maitriser, l’esclavager.
    Ou bien on peut choisir de vivre avec, s’amenager des petites niches tièdes en son sein et la contempler dans ce qu’elle nous dépasse, non point la haïr de son immensité.

    Cheminer en son sein et ne pas vouloir l’assassiner.

    Finkie parle également de contemplation et de nature, puis-je dire, en l’occurence, que le monde du net est devenu un océan immense qui sucite des fois trouille et peur (l’immensité peut suciter la crainte) et des fois plaisir de s’y plonger.

    Océan là où nos médias traditionnels n’étaient qu’unipolaires, à effets d’estrade et souvent pour le pire, marigots, rus et égouts.

    Dommage....de choisir la mare avec ses turpidités et non le grand large dans la plus formidable création litteraire de tous les temps.

    Finkie, n’essayes pas de controler, de hurler contre l’ocean,de vouloir le détruire.

    Copas

  • A écouter sur Radio J, Alain Finkielkraut déplorer un "complot", et que ses propos dans le Ha’aretz aient été divulgués (notamment par l’UJFP) sur Internet ; Qui vive

    et surtout lire Mona Chollet à propos de Finkielkraut : Quand l’IGNORANCE part en guerre au nom du SAVOIR

    Effectivement, voir l’information circuler aussi "vite" a certainement "déstabilisé" notre "grand penseur", vrai réac tenant des propos que ne renierait pas Le Pen

    Patrice Bardet

  • Si je comprends bien il y en à un qui a peur de se noyer dans le flux textuel informe et
    sans contenu d’internet et qui pour cela veut faire dérailler le trains du progrès technique et de la démocratie et un autre qui voient des voyoux, des malhonnêtes des violents de partout et qui
    karcherise les quartier populaires..... Ouh la la faites quelque chose docteur !
    redcook

    • Et si ce Finkie, philosophe de bazar médiatisé qui n’a jamais inventé un seul concept, était en fait un magnifique baromètre ? Un baromètre qui n’arrête pas radoter "je suis vaincu... je suis vaincu... " (pour gratifier son narcissisme masochique), mais aussi, et c’est plus intéressant, "la radicalisation est en train de l’emporter"...
      Et s’il avait raison, le bougre ?!!

    • Il est de bon ton ici de tirer à boullets rouges sur "Finkie"" (pourquoi ,par ailleurs ,ce diminutif plutôt méprisant ?), alors je précise que je ne ressens aucun besoin particulier de le défendre. Seule l’analyse "vraie" m’intéresse. Et de ce point de vue, je tiens à dire que tout ce qu’il dit ci-dessus ne m’apparaît pas totalement idiot ni réac.je n’ai trouvé nulle part une volonté de faire "dérailler" internet. A comparer celui-ci à l’océan autant ne pas oublier qu’il est périlleux de s’y aventurer sans repères ni notions élémentaires de navigation.

    • L’utilisation par moi du diminutif Finkie pour Finkielkraut n’avait rien de méprisant, mais gentillet .

      Ensuite ce monsieur (Finkie) dispose d’entrées complaisantes dans une série de médias qui confinent au bourrage de crâne, et il est juste qu’une contrepartie à celles-ci existe. Contrepartie d’ailleurs très lointaine des facilités accordées à ce monsieur qui deviennent tout à fait troublantes et curieuses.
      Deuxio donc pour les adorateurs...

      Enfin, la charge de notre philosophe est bien contre Internet dans sa globalité (bien lire le dernier paragraphe) pas contre une mauvaise utilisation de ce média .

      C’est celà que je voulais pointer, un homme qui a peur de ce qu’il ne maîtrise pas et comme il ne le maitrise pas, il souhaite le détruire. C’est une pensée très dangereuse pour l’humanité.

      Il n’est nullement dans mon propos d’indiquer que tout dans internet est du bon pain. Par contre je note que c’est actuellement le seul média qui évite, pour l’instant, le contrôle par une pensée unipolaire.
      Les radios, les télés, la presse ont souvent été controlés ici ou là, dans le présent ou dans le passé, de telle façon qu’aucune parole d’opposition puisse naître et être ouie.
      Internet permet de contourner celà.
      Je pourrai parler des 100 000 blogs iraniens (une grande partie hébergée au Canada) qui permettent ce qu’aucun journal iranien, aucune émission de télé iranienne, aucune émission de radio iranienne ne permettent.

      Au moment où une série de maneuvres existent pour s’attaquer aux libertés de ce gigantesque média, il se trouve des gens pour essayer de fournir munitions et cautions aux censeurs.

      Notre ami adore aller là où le débat est controlé, là où on lui tendra obligemment le porte-voix pour assener sa parole à des gens qui ne peuvent pas lui répondre sur le même canal. Relisez bien ce qu’il dit dans son interview. On comprend sa trouille d’Internet.

      Il n’est pas du côté de la liberté. Il s’enflamme et rugit de haine contre l’égalitarisme qui risquerait (dans l’obscurité de son raisonement) d’aboutir à ce que le propos de n’importe quel citoyen ait même poids que celui d’un autre.

      Il a peur de la liberté, il a peur des moyens de la liberté...
      Il approche de la ligne blanche qui fait une pensée autoritaire traditionelle.

      Double-enfin : Si vous n’êtes pas Finkie lui-même, combien de temps un certain nombre de personnes vont-elles soutenir quelqu’un même dans ses plus monstrueux propos ?

      Comme se construisent ces attachements ? Qui font qu’on fasse semblant de comprendre autre chose que ce qui se dit , car ce qui se dit, on n’arrive pas à le regarder en face...On biaise et reprend en diagonale....

      Relisez, relisez, et voyez. Maintenant vous verrez lentement se construire une pensée cohérente en dérive, en cheminements vers une pensée autoritaire et anti-democratique, ethniciste, terrorisée par ce qui ressort des libertés individuelles, terrorisée par ce qu’elle ne comprend pas.

      Alors, bien sûr, on peut être d’accord avec cette pensée , mais il faut assumer la couleur noire, monochrome qui en ressort si elle va à ses conclusions logiques.

      Finkie peut encore revenir sur ses pas, regarder où il s’est égaré, l’endroit où il a perdu son chemin.

      Copas

    • BRAVOS COPAS
      C’EST AVEC PLAISIR QUE J’AI LU TON ANALYSE CLAIRVOYANTE,
      HEUREUSEMENT QUE DES GENS COMME TOI COMPRENNENT LES FACETTIES DE CE GENRE DE BONIMENTEUR

  • Ce qu’il y a de plus drôle dans l’interview, c’est l’incroyable suffisance onctueuse de l’interviewer qui essaie d’anticiper ce que va répondre notre philosophe.
    Des phrases comme "On entend partout que vous êtes un conservateur. Mais je crois plutôt que vous êtes moderne au point de réinventer la modernité" ou "Vous connaissez les blogs, où tant de gens, qui parfois ne s’adressent plus à personne, se répandent" valent leur pesant de cacahouettes.
    Le yéti plié

    • Je ne suis pas "Finkie", ni un adorateur.Je ne défends ni ses thèses, ni le personnage.Je ne suis pas non plus partisan d’un "verrouillage" d’internet. La vérité, le "penser-vrai" seuls m’intéressent même si cela doit aboutir à une remise en cause totale de ma vision des choses. Exercice difficile mais salutaire. C’est pourquoi j’ai relu le texte comme on m’y invite. Et je n’y trouve pas la volonté de destruction d’internet (mais on peut toujours faire des procès d’intention), mais une critique sévère de la blogosphère.Les blogs," où tant de gens, qui parfois ne s’adressent plus à personne, se répandent", c’est plutôt bien vu, de même que son analyse de la destruction de "l’oeuvre".Je ne pense pas que toutes les opinions se valent, la mienne y compris. Je ne suis pas un partisan de la bouillie conceptuelle.

    • Je ne pense pas que toutes les opinions se valent, la mienne y compris.

      Qui choisit ?

      Les maîtres ?
      Les patrons ?

      Ceux qui ne sont pas "blacks-blacks-blacks" ?

      Internet est un progrès évident par rapport au passé en démocratisant l’accès à la création. Tout autant que Guttemberg fut un homme de progrès en industrialisant le livre, même si, au passage, les hommes qui écrivaient à la main des beaux livres, avec des enluminures, furent moins recherchés ensuite. Tout autant que les mauvais scribes d’ailleurs.

      La bouillie nous l’avions déjà, et en très grandes dimensions, bien pire, dans les radios et télés, les journeaux et magazines... Mais Dieu sait qu’on ne crache pas sur la main qui nous nourrit et notre ami Finkielkraut se tait là dessus. Et il y a des fois où aucune alternative à la bouillie n’exista dans le médias squatés par Finkie. D’ailleurs, actuellement nous sommes sur une série de points dans les médias sur des niveaux de pensée afligeants, notre philospohe compris.

      Internet n’est pas celà, et comme ailleurs la qualité surnagera, .... Mais il permet surtout la diversité, et des marges immenses de créations.

      Sur les blogs, la plus grande phase de création de l’humanité (je répete et je confirme) il y a de tout, mais à des dimensions jusque là inédites. La difference avec les autres modes de création d’oeuvre intellectuelles c’est la démocratisation de l’acces qui fait qu’on passera moins à côté de Rimbauds qui, dans 99% des cas, ne trouvaient pas chemin d’expression dans notre société avec les modes existants prealablement de diffusion.

      Alors des blogs se parlant à eux-même ? oui, pour une grande partie. Mais faut-il rappeler le nombre écrasant de livres papiers sans lecteurs, sans diffusion, à quelques centaines de lecteurs ? Tout le monde ne fait pas des best-sellers. Et d’ailleurs est-ce que l’objectif de toute oeuvre c’est de voir des fideles en procession massive avançant à genoux vers l’objet de leur adoration ? Ces livres non vendus, sans diffusions, non proposés même dans les libarairies, donc inconnus du public, sont-ils plus mauvais que les autres ? Ou bien leus auteurs n’ont-ils pas les appuis des caïmans qui menent empire sur les deux ou trois éditeurs importants français ?

      De quoi parle-t-on ?

      Bon je vais travailler (une autre forme d’assassinat du petit Mozart).

      Copas

    • Force est de constater, en amont de ce débat, un phénomène qui brouille les données. Depuis quelques années (avant même la seconde intifada), des intellectuels juifs français que l’on avait jusqu’alors considérés comme des penseurs universalistes ont commencé, sur le plan national comme international, à développer des analyses de plus en plus orientées par un souci communautaire qui tend à relativiser la défense des principes universels d’égalité ou de justice.

      Les travaux de Pierre-André Taguieff sont très révélateurs. Son pamphlet La nouvelle judéophobie est le prototype d’une réflexion "savante" faisant fi des critères scientifiques. Le sociologue s’est mué en défenseur d’une communauté en danger dont le nouvel ennemi réel ou potentiel est l’Arabe, le musulman, fusse-t-il français. On ne trouve pas ici de mise en perspective fondée sur une analyse critique de la politique sociale de l’Etat, des réalités de la banlieue ou même de la scène internationale. La conclusion est limpide : la communauté juive de France ferait face au nouveau danger que représente cette nouvelle population d’origine maghrébine qui, de concert avec l’extrême gauche, banaliserait la judéophobie et la justifierait par une critique très retors d’Israël et un "antisionisme absolu".

      C’est surtout Alain Finkielkraut qui excelle dans le genre : on savait le penseur impliqué dans les grands débats sociaux mais voilà que l’horizon se réduit et que le philosophe est devenu un intellectuel communautaire. Son dernier ouvrage Au nom de l’Autre, réflexions sur l’antisémitisme qui vient se présente comme une attaque sans nuance de toutes les dérives antisémites (altermondialistes, immigrées ou médiatiques). Alain Finkielkraut verse dans tous les excès sans être gêné de soutenir Sharon. Le débat n’est plus fondé sur des principes universels et même s’il prétend être lié à la tradition européenne commune, sa prise de position révèle une attitude communautariste qui fausse les termes du débat, en France comme au sujet de la Palestine. Sa dénonciation du "culte de l’Autre" ne cesse, en miroir, d’exacerber le sentiment d’altérité du juif-victime et le mur de la honte devient "une simple clôture de sécurité" qu’Israël construit à contre cœur. Juifs ou sionistes (ceux qui font la différence sont antisémites) ne seront jamais des victimes ou des oppresseurs comme les autres.

      Alexandre Adler avait témoigné, au côté de Finkielkraut, dans le procès surréaliste intenté au journaliste Daniel Mermet. On pouvait s’étonner. L’analyse attentive de ses écrits nous éclaire néanmoins. La lecture du monde qu’il nous propose se comprend surtout au regard de son attachement à Israël. Il ne s’en cache pas et dans l’ouvrage collectif Le sionisme expliqué à nos potes, il avance qu’il "devient de plus en plus inenvisageable de concevoir une identité juive qui ne comporterait pas une composante sioniste forte" [1] et plus loin : "Un équilibre va s’instaurer entre diaspora et appartenance israélienne, autour duquel le nouveau judaïsme va se développer".[2] On relèvera le mélange de genres mais on retiendra la leçon au moment d’analyser ses positions en politique internationale, de même que celles de certains intellectuels juifs français, notamment lorsque Adler rappelle lui-même que les Etats-Unis ont renforcé leur soutien à Israël, lequel a par ailleurs établi une alliance stratégique avec l’Inde.

      La récente guerre en Irak a agi comme un révélateur. Des intellectuels aussi différents que Bernard Kouchner, André Glucksman ou Bernard-Henri Lévy, qui avaient pris des positions courageuses en Bosnie, au Rwanda ou en Tchétchénie, ont curieusement soutenu l’intervention américano-britannique en Irak. On a pu se demander pourquoi tant les justifications paraissaient infondées : éliminer un dictateur (pourquoi pas avant ?), pour la démocratisation du pays (pourquoi pas l’Arabie Saoudite ?), etc. Les Etats-Unis ont certes agi au nom de leurs intérêts mais on sait qu’Israël a soutenu l’intervention et que ses conseillers militaires étaient engagés dans les troupes comme l’ont indiqué des journalistes britanniques participant aux opérations (The Independent, 6 juin 2003). On sait aussi que l’architecte de cette opération au sein de l’administration Bush est Paul Wolfowitz, sioniste notoire, qui n’a jamais caché que la chute de Saddam Hussein garantirait une meilleure sécurité à Israël avec des avantages économiques assurés.

      Dans son livre Ouest contre Ouest, André Glucksman nous livre un plaidoyer colérique pour la guerre qui passe sous un silence très parlant les intérêts israéliens. Bernard-Henri Lévy, défenseur sélectif des grandes causes, critique très peu Israël à qui il ne cesse de témoigner sa "solidarité de juif et de Français". [3] Sa dernière campagne contre le Pakistan semblait comme sortie de nulle part, presque anachronique. En s’intéressant à l’abominable et inexcusable meurtre de Daniel Pearl, il en profite pour stigmatiser le Pakistan dont l’ennemi, l’Inde, devrait donc naturellement devenir notre ami Lévy n’est bien sûr pas le maître à penser de Sharon mais son analyse révèle une curieuse similitude quant au moment de son énonciation et à ses visées stratégiques : Sharon vient d’effectuer une visite historique en Inde afin de renforcer la coopération économique et militaire entre les deux pays.

      Que ce soit sur le plan intérieur (lutte contre l’antisémitisme) ou sur la scène internationale (défense du sionisme), on assiste à l’émergence d’une nouvelle attitude chez certains intellectuels omniprésents sur la scène médiatique. Il est légitime de se demander quels principes et quels intérêts ils défendent au premier chef ? On perçoit clairement que leur positionnement politique répond à des logiques communautaires, en tant que juifs, ou nationalistes, en tant que défenseurs d’Israël. Disparus les principes universels, le repli identitaire est patent et biaise le débat puisque tous ceux qui osent dénoncer cette attitude sont traités d’antisémites.

      C’est pourtant sur ce terrain que doit s’engager le dialogue si l’on veut éviter le choc des communautarismes pervers. S’il faut exiger des intellectuels et acteurs arabes et musulmans qu’ils condamnent, au nom du droit et des valeurs universelles communes, le terrorisme, la violence, l’antisémitisme et les Etats musulmans dictatoriaux de l’Arabie Saoudite au Pakistan ; on n’en doit pas moins attendre des intellectuels juifs qu’ils dénoncent de façon claire la politique répressive de l’Etat d’Israël, de ses alliances et autres méthodes douteuses et qu’ils soient au premier rang de la lutte contre les discriminations que subissent leurs concitoyens musulmans.

      On relèvera avec respect le courage de celles et de ceux, juifs (pas forcément altermondialistes ou d’extrême gauche), qui ont décidé de s’insurger contre toutes les injustices et notamment celles qui sont le fait de juifs. Avec les Arabes et les musulmans qui ont la même cohérence, ils sont la lumière et l’espoir de l’avenir parce que celui-ci a plus que jamais besoin de cette exigence et de ce courage.

    • Bravo 82.***.228.** !

      Je souscris totalement à votre vision.

      La réflexion philosophique doit quitter les pentes glissantes de la propagande communautaire sous peine de se compromettre avec les démons de l’intolérance.

      L’humanisme n’est pas mort, mais il étouffe pressé entre Bush et Ben Laden.

      Qui pourra cheminer sur la ligne de crête, là où l’air est pur et sans odeurs malsaines ?

      61.**.181.**

  • ... sur un blog identitaire ! ( 20 messages en trois jours ! )

    Je cite un extrait fort intéressant :

    Finkielkraut ne sera jamais identitaire au plein sens du mot et d’ailleurs qui lui demande ? Simplement, il est utile (quand en face se trouve la presque totalité des médias) d’avoir des relais de nature intellectuels qui stigmatisent les étranges oeillères du gouvernement et des fameux décideurs

    On a les soutiens que l’on mérite !

    P. Bardet