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Francis Wurtz : "Une capitulation du Parlement"

Publie le vendredi 17 novembre 2006 par Open-Publishing

Pour Francis Wurtz, président de la GUE-NGL, les députés ont perdu une occasion de contrer la tendance libérale de l’Union européenne.

Entretien réalisé par Paul Falzon

Vous avez évoqué avant le vote le risque d’une « capitulation » des députés devant la pression du Conseil et de la Commission. Y est-on finalement parvenu en dépit des satisfecit que donnent les uns et les autres ?

Francis Wurtz. Il faut savoir que le traité européen confère au parlement la possibilité, s’il n’y a pas d’accord avec le Conseil des ministres, de provoquer une négociation - ce qu’on appelle la conciliation. Et dans ce cas, il y a une obligation de compromis : si le Conseil refuse de prendre en compte l’avis du Parlement, la directive est morte. Donc, il y avait pour ceux qui veulent réellement défendre une vision non libérale de l’UE, une occasion en or. Ou on obtenait une amélioration notable, ou la directive était morte. Le fait d’avoir cédé aux injonctions du Conseil et donc de ne pas avoir déposé le moindre amendement, cela s’appelle une capitulation.

Comment jugez-vous la portée finale de la directive ?

Francis Wurtz. Tout ce que nous avions déjà dit lors de sa première lecture reste vrai - sur les « zones grises » concernant le droit applicable notamment. S’y ajoutent les modifications apportées par le Conseil, qui ont d’ailleurs été dénoncées par la CES. Nous mettons notamment en exergue les pouvoirs exorbitants confiés à la Commission de contrôler les législations des États membres pour dénicher toute loi de protection qui pourrait être jugée « disproportionnée » - un droit de regard considérable. C’est pour nous un très mauvais texte.

Vous avez dénoncé hier la tendance actuelle dans l’UE à passer d’une « harmonisation par la loi » à une « harmonisation par le marché »...

Francis Wurtz. Je pense que c’est réellement une tendance lourde que cette directive renforce. De plus en plus, tous les commissaires font référence au droit communautaire, c’est-à-dire la jurisprudence de la Cour qui évolue sans que l’on ait la moindre maîtrise. Cela revient à dire : il y a de grandes législations des 27 pays, eh bien, laissons faire la concurrence de telle manière qu’il y ait une sorte de rééquilibrage. Mais si c’est le marché qui rééquilibre, on imagine bien que c’est vers le bas, alors que la loi, le vote, l’acte politique, peut être une harmonisation vers le haut si l’on arrive à créer le rapport de force. Cela doit être un très grand débat à mener à partir de l’année prochaine, quand débutera le processus de mise au point d’un un nouveau traité européen.

http://www.humanite.presse.fr/journal/2006-11-16/2006-11-16-840429