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Mumbai : Mains pleines

Publie le mercredi 21 janvier 2004 par Open-Publishing

Le taxi, ici, est aléatoire. Par « taxi », il faut entendre un rickshaw, sorte de tricycle improbable, instable et « cardiaque ment » arythmique. Oui, le cœur est mis à rude épreuve. Car la circulation a ses surprises collatérales. Ce matin, par exemple, au lieu de prendre l’autoroute par le haut, le chauffeur du rickshaw a pris par le bas : poussière, feux rouges et foule de sans-logis occupés à survivre du contenu des poubelles.

Le rickshaw est sans portes, ouvert à la poussière, à la pollution et aux sollicitations. Elles ne manquent pas. Aujourd’hui donc, une main d’enfant se pose sur mon bras. Hésitante. Au bout de la main, un visage souriant, un petit corps malingre et une torsion du corps qui sollicite. Un petit bout, n’importe quoi, un pas grand-chose. Le rickshaw avance, la main s’envole ; il freine, retour de la main.

Feu rouge. « Sir, sir ? » : ma tête dit non, mon cœur balance, pourquoi pas, mais un autre enfant s’avance la main tendue, deux, trois, combien sont-ils ? Ma tête dit non, décidément. Le rickshaw avance, la main s’accroche, elle caresse, elle supplie, feu vert, c’est trop tard. Depuis mon cœur fait la tête, reprochant à ma tête de ne pas avoir de cœur. Dans le monde que nous construirons, il y aura des têtes, du cœur et des enfants, beaucoup d’enfants. Ils auront les mains pleines.