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DROIT OPPOSABLE à L’EMPLOI

Publie le jeudi 19 juin 2008 par Open-Publishing

POUR FINANCER LE DROIT OPPOSABLE A L’EMPLOI, CREATION D’UN NOUVEL IMPOT, LE RACHAT D’ACTIONS

C’est le 2 juillet 1998, sous le gouvernement de la gauche plurielle, qu’a été libéralisé le rachat par les sociétés de leurs propres titres de capital. L’adoption par la Commission des opérations de Bourse (COB) de deux règlements, homologués le 21 août 1998 et publiés au Journal officiel le 6 septembre 1998, a complété le dispositif juridique mis en place. Préalablement à la réforme du 2 juillet 1998, l’article 217 de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales prohibait l’achat par une société de ses propres actions, soit directement, soit par une personne agissant en son propre nom, mais pour le compte de la société. Ce principe général d’interdiction était assorti de quelques dérogations qui étaient toutefois limitées et mal adaptées à une gestion dynamique du capital des sociétés :

la première permettait à l’assemblée générale qui avait décidé une réduction de capital non motivée par des pertes d’autoriser l’organe d’administration à acheter un nombre déterminé d’actions pour les annuler
la deuxième permettait aux sociétés de racheter leurs propres actions lorsqu’elles font participer leurs salariés à leurs résultats par attribution d’actions et lorsqu’elles consentent des options d’achat à leurs salariés
la troisième autorisait les sociétés cotées à racheter leurs propres actions en vue d’en régulariser le cours
Les articles L. 225-2091 et suivants du Code de commerce formalisent les grands principes de la réforme de 1998 en vertu desquels les sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé peuvent « acheter un nombre d’actions représentant jusqu’à 10 % [de leur] capital ».

Entre le 6 septembre 1998 et le 30 septembre 1999, 9,06 Mds € ont été alloués à la réalisation des programmes de rachat d’actions. En 2000, 12,85 Mds € ont été affectés à ces programmes ; 23,2 Mds €2 en 2001 ; 11,07 Mds € en 2002 et 10,3 Mds € pour l’année 2003.

Une entreprise peut dans certaines circonstances racheter ses propres actions et les garder à son actif, ou les annuler et l’on parle alors de réduction de capital. Le rachat d’action, comme le dividende ou la réduction de capital, permet de rendre des fonds aux actionnaires mais il n’est pas parfaitement substituable à ces deux derniers. Ainsi le rachat d’actions a un caractère ponctuel, au contraire du dividende qui a vocation à récurrence.

Face à ces deux principales motivations du rachat d’actions : rendre aux actionnaires des fonds devenus excédentaires et adapter la nature des financements à l’évolution du risque de l’actif économique, il existe une multitude d’autres explications :

offrir une liquidité aux actionnaires que le marché boursier (si l’entreprise est cotée) ne peut parfois plus offrir. A l’extrême, une société pourra quitter ou presque la Bourse en proposant à ses actionnaires un rachat de leurs actions à l’instar de l’opération menée en 2003 par Brioche Pasquier
conforter la participation d’un actionnaire qui ne participe pas à la réduction de capital
annuler les effets dilutifs du capital et/ou couvrir les plans de stock-options prenant la forme d’options d’acquisition d’actions
verser des liquidités aux actionnaires à moindre coût fiscal. En effet en France, les dividendes sont plus lourdement taxés pour les personnes physiques (34 % au maximum à partir de 2005, la moitié du taux marginal plus 10 % de cotisations sociales et assimilées) que les plus-values (26 % sur la plus-value et non sur le flux perçu). Jusqu’à la réforme fiscale de 2006, la situation était identique aux Etats-Unis, ce qui était l’une des principales explications à la forte progression depuis le début des années 1980 des rachats d’actions dont le volume en 1999 était devenu supérieur à celui des dividendes
verser des liquidités aux actionnaires à moindre coût pour les dirigeants détenteurs de stocks-options. Le versement d’un dividende fait mécaniquement baisser le cours de l’action du montant du dividende et donc abaisse d’autant l’espérance de gain sur les stock-options dont le prix d’exercice reste fixe. Le rachat d’actions n’a pas cet effet négatif sur la valeur des stock-options et laisse même croire aux naïfs qu’il fera monter le cours de l’action (puisque l’on en rachète !), oubliant que l’actionnaire peut avoir besoin de liquidités et que celui-ci devra vendre des actions pour en obtenir
Deux techniques principales s’offrent à l’émetteur français qui veut racheter ses actions :

Pour les sociétés cotées uniquement, le rachat sur le marché (au fil de l’eau) dans la limite de 10 % du capital et dans le cadre d’un programme de rachat d’action approuvé par l’assemblée des actionnaires. La société doit avoir préalablement publié une note d’information visée par l’Autorité des Marchés Financiers (AMF) ; la durée maximale du programme est de 18 mois. Les actions acquises peuvent être annulées (dans la limite de 10 % tous les 24 mois) et le prix de rachat s’impute d’abord sur le nominal des actions rachetées, l’excédent réduisant alors les réserves distribuables. Elles peuvent également être conservées par l’entreprise pour servir de monnaie dans le cas d’une acquisition ou être remis aux salariés en cas d’exercice de stock-options ; enfin elles peuvent être revendues sur le marché, la technique sert alors pour réguler le cours de l’action. Cependant si les actions ne sont pas annulées, on ne pourra réellement parler de réduction de capital.

L’offre de rachat ouverte à tous les actionnaires. Si la société est cotée, on parle alors d’offre publique de rachat (OPRA) par la société de ses propres actions. Dans la pratique, le conseil d’administration, utilisant une autorisation qui doit lui avoir été donnée par l’assemblée générale des actionnaires, propose à tous les actionnaires de leur racheter tout ou partie de leurs actions à un certain prix et ce pendant une certaine période (de l’ordre du mois). Si trop de titres sont présentés à l’offre, la société procède à une réduction proportionnelle des demandes de rachat. Si, au contraire, un nombre insuffisant de titres est présenté, elle rachète et annule alors toutes les actions proposées.

Dans certains pays européens, le rachat d’actions peut être réalisé par remise à chacun des actionnaires d’un bon de rachat d’action permettant de vendre à l’entreprise une action à un certain prix. Il s’agit d’une option de vente émise par l’entreprise. Cette solution du bon de rachat d’action (BRA) n’a jamais été mise en pratique en France, principalement pour des raisons fiscales.

L’entreprise peut aussi restituer à ses actionnaires des fonds par le biais d’une réduction du nominal des actions ou par remboursement de primes. Mais dans ce cas, il s’agit d’une opération qui concerne nécessairement tous les actionnaires et qui n’est donc pas susceptible de modifier l’actionnariat.

Notons enfin que, s’il est possible en droit français de procéder à des augmentations de capital réservées, l’inverse n’est possible qu’à l’unanimité des actionnaires et est, de ce fait, impossible pour une société cotée. Cependant dans le cadre d’un programme de rachat d’actions, l’entreprise peut racheter un bloc à un actionnaire important.

Le signal envoyé par un rachat d’actions est clair. Les dirigeants de l’entreprise, qui ont plus d’information que le marché sur l’état actuel et ses perspectives de celle-ci, procèdent à des rachats d’actions, parce qu’ils pensent, au vu des informations que n’a pas le marché, que l’action est sous-évaluée. Cette information est perçue comme crédible car on ne comprend pas pourquoi les dirigeants procéderaient à des rachats d’actions qui limitent leurs marges de manœuvre (par réduction de la trésorerie ou accroissement de l’endettement) si la situation de l’entreprise allait se dégrader à l’avenir.

La régularisation des cours reste l’objectif prioritaire, devant l’intervention opportune en fonction des situations de marché. Vient ensuite l’attribution d’actions ou d’options d’achat aux salariés et/ou aux dirigeants. La remise d’actions dans le cadre d’opérations de croissance externe reste également une priorité tout comme l’annulation de titres.

Entre 2000 et 2003, plus de 56 milliards d’euros ont été investis par les entreprises françaises dans le rachat d’actions. Plus de la moitié de ces investissements a été réalisée par une dizaine de sociétés seulement. Parmi elles, figurent en tête Total, France Télécom, Vivendi Universal, Danone et Sanofi-Synthelabo. Ainsi, entre juillet 1998 et décembre 2003, le montant annuel moyen alloué a la réalisation des programmes de rachats dépasse 13 Mds €.

En général, le rachat d’actions se traduit par une réaction positive des marchés et une progression du cours : 15 % en moyenne dans les deux mois suivant l’annonce, selon une étude de JP Morgan en Grande-Bretagne.

C’est pourquoi un « prélèvement sur les rachats d’actions » est instauré, au taux de 15 % sur le montant des actions concernées. Le produit de ce prélèvement serait donc de 1,9 milliard d’euros.